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Il n'est pas si courant que l’ASSE forme un attaquant puissant et athlétique capable de se mesurer aux défenses de L1.
Pourtant, malgré son éclosion précoce et son indéniable régularité, Bafé Gomis reste aujourd'hui l'un des joueurs les plus controversés des années 2000...


Jeunesse en Var
Bafetimbi Gomis voit le jour en 1985 à la-Seyne-sur-Mer, dans le Var (1983) de parents d'origine sénégalaise. Ayant grandi dans le quartier de la Beaucaire, en banlieue de la riante cité de Toulon, le petit Gomis apprend donc logiquement le football dans les équipes jeunes du Sporting Toulon, qui néanmoins ne tarde pas à sombrer dans l'enfer des divisions amateures.

Repéré en 2000 à l'âge de 15 ans par les recruteurs de l'ASSE, il intègre dans la foulée le centre de formation de l'Etrat et quitte donc prématurément sa famille, restée en Provence.


Un tout jeune Gomis (à gauche) au centre de formation de l'ASSE en 2001

Les Vertes années
Après plusieurs années de formation, c’est lors de la saison 2003-04, sous la houlette de Frédéric Antonetti, que Bafetimbi Gomis fait ses premiers pas avec les pros en Coupe de France face au Puy (victoire 2-1), en Coupe de la Ligue face à Lille (victoire 3-2) et en championnat pour un déplacement à Lorient en janvier 2004 (défaite 0-2). Un joli triplé en à peine un mois !
Gomis participe donc activement à la remontée en Ligue 1 cette saison là, ainsi qu’à la conquête du titre de champion de L2, en inscrivant 2 buts, son tout premier offrant d'ailleurs la victoire face à Créteil (3-2) sur sa spécialité: la lourde frappe bien placée.


Premier match pro pour Gomis face au Puy en 2003 (photo le Progrès)

Considéré dès lors comme le principal espoir du club (avec son quasi-jumeau Loïc Perrin), son nouvel entraîneur Élie Baup fait appel à lui dès la première journée de la saison 2004-05, à la mi-temps du match contre Monaco (en remplacement de Frédéric Mendy), et Gomis effectue ainsi sans tarder ses grands débuts en L1.
Mais peu prolifique, il passe la première partie de la saison à naviguer entre la CFA et l’équipe première, pour ne finalement jouer que 6 matchs avec l’ASSE en L1. Cette saison blanche restera son unique en France.
En quête de temps de jeu, Gomis accepte du coup d’être prêté pour 6 mois à Troyes en L2 en janvier 2005. Le genre de prêt qui peut tout autant être un déclic qu'une voie de garage. Mais fort heureusement pour lui, ce sera la première option: dans l’Aube, Bafé prend activement part à la montée du club aubois (sa deuxième consécutive) en marquant 6 buts en 13 matchs.


Un intérim à Troyes plus que bénéfique

Du coup, lorsqu'il revient dans le Forez à l’intersaison, il a des arguments à faire valoir pour essayer de convaincre Elie Baup de lui faire davantage confiance. Après un début de saison difficile, Gomis voit son temps de jeu augmenter au fil des mois et participe à 24 matchs en 2005-06. Il en profite pour marquer ses deux premiers buts dans l’élite, lors d’un déplacement à Strasbourg, et à domicile contre Monaco. Des buts décisifs bien entendu...

L'explosion de la panthère
Barré par le duo de choc Ilan-Piquionne à l'aube de la saison 2006-07, Gomis s'attend à n'être que le troisième attaquant dans la hiérarchie d'Ivan Hasek et à ne disputer que des bouts de matches ou à pallier des suspensions. Pourtant, le départ rocambolesque de Frédéric Piquionne à Monaco lors du mercato d'hiver 2007 est le tournant de sa carrière: Gomis est promu titulaire en compagnie du Brésilien et ne va plus lâcher sa place. Il marque rapidement deux buts contre Toulouse et imite la panthère, tel Alex devant le kop Sud, s'assurant ainsi le soutien des supporters, ravis de voir un jeune attaquant formé au club confirmer les espoirs placés en lui.


La nouvelle panthère en action en 2006-07

C'est le début d'une folle ascension pour le gamin formé au club. En 34 matches, il marque 13 buts dont 10 en L1. Un total qui deviendra sa marque de fabrique en France: il ne marquera jamais moins par saison.
Néanmoins, son image s'écorne à l'été 2007 lorsque, vexé de ne pas avoir été titularisé contre l'OM lors de la 36e journée, il s'engage dans un bras de fer avec le club et décide de s'entraîner en marge du groupe. Le RC Lens lui fait les yeux doux et Gomis veut absolument prendre la route du Nord. Pourtant, l'ASSE, échaudée par l'affaire Piquionne, ne cède pas et le jeune attaquant doit se résigner à porter la tunique verte au moins une saison de plus. Une partie des supporters stéphanois ne le lui pardonnera jamais.

Pourtant, bien lui en prend car sous l'égide de Laurent Roussey, sa saison 2007-08 est l'une des meilleures de sa carrière: Gomis marque 16 buts, termine troisième meilleur buteur de Ligue 1, se qualifie pour la Coupe de l'UEFA et est appelé en Equipe de France. Si certains supporters lui en veulent toujours pour son écart de conduite à l'été précédent, le peuple Vert est alors tout acquis à sa cause.


La complicité entre Pascal Feindouno et Bafé Gomis est évidente

La panthère Bleue
Bien qu’étant né en France, Bafé n’oublie pas ses origines africaines ni la fédération sénégalaise qui s'était rappelée à lui en lui proposant de porter la tunique des Lions de la Téranga. Gomis avait alors refusé ces avances pour privilégier un hypothétique futur en Bleu. Convoqué en mai 2008 par Raymond Domenech pour affronter l'Equateur en match amical, Gomis prouve qu'il avait eu raison de croire en son étoile. Lorsqu'il entre sur la pelouse pour remplacer Djibril Cissé à la mi-temps, il est alors le premier Stéphanois à jouer en équipe de France depuis Laurent Blanc en 1995. Mieux: alors que la France est menée 2-0, il inscrit deux buts, dont une superbe reprise de volée, qui incitent Domenech à l'emmener à l'Euro 2008, au détriment de... Djibril Cissé.
Il y jouera deux matches mais ne marquera pas. Malheureusement, l'équipe de France est en fin de cycle. Au terme d'un tournoi raté de bout en bout, elle se fait piteusement éliminer et Gomis, symbole de l'impuissance française, ne reverra la sélection nationale qu'une seule fois sous l'ère Domenech.


Sous le maillot (rouge) des Bleus, Gomis inscrit un superbe doublé

La saison de trop ?
A l'aube de la saison 2008-09, Gomis est la superstar de l'ASSE. International, meilleur buteur de l'effectif et avec la Coupe de l'UEFA pour se mettre en évidence, le jeune attaquant voit son salaire revalorisé avec un bon de sortie à l'été suivant. Cette saison doit être celle d'un départ en apothéose. Malheureusement, ce sera l'une des pires de l'histoire récente du club: l'ASSE jette toutes ses forces dans la Coupe d'Europe avant de la sacrifier en 8e de finale, licencie Roussey pour le remplacer par l'austère Alain Perrin, engage des recrues loin de donner satisfaction (Grax, Gigliotti, Matsui, Mirallas) et propose un fond de jeu à base de "kick & rush" qui la voit flirter avec la relégation jusqu'à la dernière journée. Cible de toutes les critiques, Gomis est accusé de dilettantisme et de négligence, les supporters lui reprochant son manque d'engagement sur le terrain, sa lenteur et sa prise de poids. Lors d'un entraînement au printemps, plusieurs ultras jettent même des cartons de pizza sur la pelouse en sa direction.

Pourtant, avec 16 buts en 47 matches (dont 10 en L1), Gomis est le meilleur buteur du club cette saison là. Livré à lui même sur le front de l'attaque, il débloque par ses buts quelques situations délicates (comme contre le Havre ou Caen) et parvient à se mettre en évidence malgré sa mésentente avec Ilan et l'absence de bons passeurs, le milieu de terrain étant orphelin de Pascal Feindouno. Il paye également la mauvaise saison du club, son nouveau statut et ses anciennes vélléités de départ. Fortement critiqué et parfois même hué, il est paradoxalement l'un des seuls à donner satisfaction sur le terrain.


Une dernière saison mitigée à l'ASSE malgré de bonnes stats

La "trahison"
Mais un autre évènement va sérieusement (voire définitivement) ternir son image auprès du peuple Vert. Alors qu'il bénéficie d'un bon de sortie estimé à 15M€, un seul club se positionne pour le recruter mais pas n'importe lequel: c'est l'Olympique Lyonnais qui met la somme sur la table et se met d'accord avec l'ASSE pour recruter l'international français.
A partir de ce moment-là, les supporters se divisent en deux clans: ceux qui le remercient pour ses vertes années et son transfert record, et ceux qui le considèrent comme un traître. La guerre entre les pro-Gomis et les anti-Gomis peut commencer.

Etiqueté "Stéphanois", Bafé ne trouve pas plus de soutien à Lyon où les supporters lui font comprendre qu'il a intérêt à être très bon pour faire pencher l'opinion de son côté. Mais Bafé n'est pas du genre à s'enfermer dans le doute. En quatre saisons, il inscrira 73 buts en près de 200 matches, retournant complètement le versatile public lyonnais en sa faveur.
Il se fait même une spécialité durant ces années à marquer contre son club formateur, offrant ainsi la victoire à l'OL dans le derby en 2009, en 2011 et en 2012.
Lors de son retour à Geoffroy-Guichard à l'automne 2009, il inscrit non seulement le but de la victoire lyonnaise (0-1) en fin de match mais mime également la panthère devant le kop Sud. Un geste maladroit qui ne contribuera pas à se remettre le public stéphanois dans la poche...

Enfin rappelé en Equipe de France par Laurent Blanc en 2011, il dispute 7 matches en bleu et inscrit enfin son 3e but contre l'Italie en 2012.


Gomis à la lutte avec son ami Loïc Perrin dans un derby de 2012

Face à l'ingratitude
Après une superbe saison 2012-13 (21 buts dont 16 en championnat), Bafé Gomis est subitement déclaré indésirable par Jean-Michel Aulas après 4 ans de bons et loyaux services et se voit contraint de changer d'air. Il ne lui reste plus qu'un an de contrat mais son salaire et sa valeur marchande incitent le président lyonnais à lui trouver un club rapidement. Malheureusement, dans un contexte morose, seuls des clubs de l'est de l'Europe ou de Turquie le sollicitent. Gomis ne veut pas s'enterrer là-bas, il décide donc de rester à l'OL contre vents et marées.

Gomis est d'abord mis au placard en compagnie de Jimmy Briand, autre indésirable de l'effectif mais le coach Rémi Garde, faisant face à d'improbables blessures et des départs à foison pour combler un déficit béant, est contraint de le rappeler pour le titulariser en pointe. Bafé réapparait ainsi dans le groupe à la 5e journée, marque son premier but de la saison à la 6e journée et dispute ainsi encore 49 matches cette saison là avec 22 buts à la clé.
Quand il part libre, à l'été 2014, c'est avec la satisfaction du travail bien fait, jusqu'au bout et malgré la défiance de ses dirigeants.


Gomis, à la lutte avec Simon Kjaer, est la sauveur de l'OL version 2013-14

Le grand saut
Sans contrat et avec une valeur intacte, Bafé Gomis peut alors enfin réaliser son rêve: rejoindre la Premier League dont le style direct semble être fait pour lui. C'est le club de Swansea, au Pays de Galles qui remporte la timbale en le recrutant au mois de juin.
Cette décision n'est pas anodine pour lui puisqu'il explique avoir tout fait pour s'intégrer du mieux possible au sein de son nouveau groupe: "Je joue beaucoup à Football Manager. Avec mes clubs précédents, quand on voyageait en Coupes d’Europe, je jouais dans l’avion. Ça a été très utile pour m’aider à trouver plus d’infos sur Swansea. Avant de signer ici, j’ai passé un mois à jouer avec Swansea pour apprendre à connaître mes coéquipiers"

Bien intégré dans le groupe gallois, Gomis a cependant du mal à intégrer le 11 de départ. Barré par l'Ivoirien Wilfried Bony en pleine réussite, il profite de la CAN 2015 pour jouer et marquer, terminant la saison à 10 buts, dont 7 en PremierLeague. Un ratio passable mais encore insuffisant à rassurer les supporters des Swans. Si ses buts s'avèrent très souvent décisifs, c'est la première fois depuis 10 ans que Gomis ne réussit pas sa saison en terme de statistiques. Et à l'époque, il n'avait pas 20 ans !


Gomis se frotte aux rugueuses défenses anglaises en 2014

Toutefois, même loin de France, Gomis jouit toujours d'une image particulièrement sympathique dans les médias et est reconnu pour sa remarquable régularité en terme de buts marqués. Son profil atypique, entre le pivot et le renard des surfaces, couplé à son manque de rapidité et à la qualité remarquable des attaquants français l'empêche toutefois d'exploser à l'international. Mais sa côte de popularité reste si élevée en France que l'OM n'hésite guère à le recruter en prêt à l'été 2016, alimentant toutefois sa réputation de mercenaire du football auprès des upporters de l'ASSE et désormais de l'OL...
Son retour dans l'hexagone lui permet de renouer avec ses glorieuses années en inscrivant 20 buts dont, évidemment, un contre les Verts...


Gomis inscrit le second des 4 buts marseillais lors d'OM-ASSE 2017

Bonne fortune en Orient
Mais l'OM reste l'OM et sur la Canebière, Provence ne rime pas avec cohérence. Le club est racheté par un milliardaire américain et revoit ses ambitions à la hausse aussi malgré sa superbe saison, Bafé ses valises à nouveau et maintenant qu'il a pris goût aux publics bouillants, il les pose en Turquie, à Istanbul, en signant un contrat de trois ans avec le Galatasaray SK. Doublé à la première journée, triplé à la 23e, quadruplé à la 24e... On n'arrête plus Gomis ! Il termine meilleur buteur du championnat turc avec 29 buts et ajoute un titre de champion de Turquie à son palmarès encore un peu maigre...


Saison fantastique pour Bafé dans le Bosphore en 2017-18

Mais tout va changer à l'été 2018. À désormais 33 ans, le buteur français comprend bien que sa carrière est plutôt derrière lui. Désirant mettre sa famille à l'abri, selon l'expression consacrée, Bafé un petit tour dans le Golfe en signant à Al-Hilal. Cinq avant la grande migration vers l'Arabie Saoudite, Gomis y devient le premier Français à remporter la Ligue des Champions asiatique, et ce à deux reprises. A Riyad, il est également sacré double champion d'Arabie Saoudite, remporte la Coupe du Roi (comme en son temps Robert Herbin) ainsi que la Supercoupe d'Arabie Saoudite et tout cà en inscrivant 116 buts en quatre saisons !


Avec Al-Hilal, Gomis enchaîne les buts et les titres

Mais sa 4e et dernière saison en Arabie Saoudite sera tronquée puisque son contrat s'achève en janvier 2022. Libre de tout contrat, Bafé le chemin inverse et retourne à la maison. A Sainté ? Non même si la rumeur court toujours depuis 15 ans mais à Istanbul où le Galatasaray enrôle à nouveau la panthère avec un plaisir non dissimulé. Il faut dire que le club stambouliote vit la pire saison de son histoire et se renforce significativement avec Gomis, malgré les 36 ans affichés par le Varois.
18 mois et 19 buts plus tard, Bafé et le Galatasaray sont de nouveau champion de Turquie. La légende de la panthère n'est pas prêt de s'éteindre du côté de la Sublime Porte...


Bafé écrit sa légende au bord de la Corne d'Or

Malgré sa longue, féconde et mobile carrière, Gomis reste à ce jour le second buteur stéphanois le plus prolifique du XXIe siècle avec 49 réalisations sous le maillot vert, uniquement devancé par Romain Hamouma. Son départ pour l'OL, son passage à l'OM et l'arlésienne de son hypothétique retour à l'ASSE ont fait et feront toujours couler beaucoup d'encre du côté du Forez. Lui n'a jamais renié son amour pour les Verts, comme en témoignent ses apparitions répétées à l'Étrat et à Geoffroy-Guichard. Gageons qu'une fois sa fertile carrière derrière lui pour de bon, il regagnera un peu d'estime auprès de ses passionnés détracteurs...

Bafetimbi Gomis
Né le 06/08/1985 à La Seyne sur Mer
Taille: 1,84 m
Poids: 77 kg
A l'ASSE de 2000 à 2009
1er contrat pro : 17 octobre 2005 jusqu'à juin 2008
Premier match en L1: ASSE-Monaco (0-1) le 7 août 2004
Premier but en L1 : Strasbourg-ASSE (0-1) le 29 octobre 2005
Nombre de matches avec l'ASSE: 165 matches
Nombre de buts marqués pour l'ASSE: 48 buts
Palmarès :
  - Champion de France L2 2003-04 avec l'ASSE
  - Coupe de France 2012 et Trophée des Champions 2012 avec l'OL
  - Champion de Turquie 2018 et 2023 avec Galatasaray
  - Champion d'Arabie Saoudite 2020 et 2023, Coupe du Roi 2020, Champion d'Asie 2019 et 2021 avec Al Hilal