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Difficile de résumer brièvement la carrière de Jérémie Janot sous le maillot Vert alors étendons-nous autant qu'il en était capable dans les cages...


"Je n'ai jamais été un gardien proche des supporters, mais simplement un supporter qui gardait les buts !" - Jérémie Janot

Des mines du Nord à celles du Forez
C’est à Valenciennes, dans sa région d’origine, que Jérémie Janot découvre le football. En 1993, alors qu’il évolue en moins de 15 ans, ses parents déménagent à Saint-Étienne pour des raisons professionnelles et il est autorisé à effectuer un essai à l’ASSE.
C’est donc sous le maillot vert que Janot poursuit son apprentissage, jusqu’en équipe réserve. Au passage, il est récompensé par quatre sélections en équipe de France Junior: "Je suis arrivé comme un clodo à un essai à Saint-Etienne, avec mon vieux survêt usé renforcé par ma mère car les tenues de gardien coûtaient trop chers. Et elle est très bonne couturière. A Sainté, c’est Alain Blachon,"la Blache", qui m’a fait signer. Le plus dur commençait. Ma taille aura été une source de motivation. A chaque palier à franchir, on me balançait: “Là ça va mais au-dessus, ça passera pas“. Et c’est toujours passé."


Le jeune Jérémie, 17 ans, au centre de formation de l'Étrat en 1994

Grands débuts en équipe première
Lors de la saison 1996-97, l’ASSE, qui vient de descendre en D2, a de gros problèmes financiers. Les résultats sportifs sont également décevants et le club doit se résoudre à vendre ses éléments les plus prometteurs. En décembre, le gardien Grégory Coupet, promis au plus bel avenir, est ainsi transféré à Lyon.
Malgré la présence de l’expérimenté Gilbert Ceccarelli, l’entraîneur Pierre Mankowski n’hésite pas à lancer Janot, 19 ans, dans le grand bain lors d'un match décisif contre Toulon le 22 février 1997. L'ASSE perd 1-0 à la 89e minute. On a connu meilleurs débuts...
Et pourtant, Janot ne sortira plus de l'équipe-type. Avec une équipe à la dérive, l’ASSE connaît une fin d’année très difficile et flirte avec la relégation, terminant finalement à la 17e place. Janot n'y est pas étranger, lui qui à la 42e et ultime journée, maintient un nul aussi salvateur que miraculeux face à Troyes et son futur entraîneur Alain Perrin. Dans ce match de la peur, une défaite est synonyme de relégation en National et de mort quasi-certaine pour le club. Janot parvient à préserver le 0-0 grâce à un arrêt réflexe à la 87e minute, le plus important de sa carrière selon lui.

A l'issue de la saison, Janot a disputé 14 rencontres et eu l’occasion de se mettre en valeur. A l'été 1997, il part en Malaisie disputer le championnat du monde des moins de 20 ans. Gardien remplaçant de la sélection de Gérard Houiller, il n’entre pas en jeu mais vit tout de même une belle aventure. Sa carrière est lancée !


Janot côtoie du beau monde dans l'EDF Espoirs de 1997

Cinq années pour faire sa place
Le retour à la réalité et à Saint-Étienne est du coup difficile pour lui car les dirigeants, le jugeant encore trop tendre pour être titulaire et surtout trop petit, recrutent un gardien plus expérimenté en la personne de Jérôme Alonzo. Ce dernier, qui deviendra lui aussi un des chouchous du public, sera titulaire invariablement pendant les 3 saisons qui suivront. Aussi, Janot ne dispute que le premier match de la saison 1997-98 avec les professionnels et doit à nouveau se contenter de l’équipe réserve.

La saison 1998-99 est une réussite totale pour l’ASSE, qui remporte le championnat de D2. En fin de saison, Alonzo se fracture la cheville et Janot, qui n'a joué qu'un match (certes héroïque) en Coupe de la Ligue, est titularisé pour les neuf derniers matchs. Hélas, l’équipe est rapidement assurée de monter et se démobilise, partant même faire la fête en Guadeloupe et en Martinique un mois et demi avant la fin du championnat. Les Verts encaissent plus de buts, concédent quatre défaites et quatre nuls lors des huit dernières journées. La responsabilité en rejaillit un peu sur Janot, contesté pour sa petite taille et ses sorties aériennes hasardeuses. Un peu "fou-fou" sur le terrain, il est même qualifié de gardien kamikaze.


Match décisif de la saison 1998-99 face à Lille: Janot est titulaire !

En conséquence, lors des deux saisons en D1 qui suivent, de 1999 à 2001, de nouveaux gardiens viennent renforcer l’effectif stéphanois. C’est tout d’abord Philippe Montanier, en fin de carrière, qui vient faire concurrence à Janot pour le rôle de doublure d’Alonzo. Le jeune portier des Verts parvient tout de même à disputer cinq matchs de championnat, réalisant ainsi ses grands débuts en première division lors d’une victoire épique à domicile 5-4 face à Montpellier.
La saison suivante, Robert Nouzaret fait venir l’Ukrainien Maxym Levystsky pour endosser le costume de titulaire. Janot n’est que le 3e gardien du club et sa prestation catastrophique lors du fameux match contre Auxerre (défaite 4-3) ne joue pas en sa faveur mais la saison est très agitée et le vent va tourner: le remplacement de Nouzaret par le Gallois John Toshack, les errements d’Alonzo et l'affaire des faux-passeports, dans laquelle est directement impliqué Levytsky, conduisent Janot à être titulaire à partir du mois de décembre. Le départ de l’Ukrainien au mercato et la fuite de Toshack, remplacé par un tandem Garcia-Wallemme, le maintiennent dans ce statut de n°1 pendant la deuxième moitié de saison.

Pourtant, lors de la saison 2001-02, Janot n’est toujours pas considéré comme un titulaire à part entière, malgré la relégation en D2 et le départ d’Alonzo. Alain Michel, le nouvel entraîneur, fait venir Dominique Casagrande pour préparer le futur. Les résultats sont très médiocres et Michel est rapidement remplacé par Frédéric Antonetti. Néanmoins, Casagrande est l’un des meilleurs stéphanois et Janot ne dispute que deux matches de Coupe et un seul match de championnat: une défaite 3-0 contre Beauvais...
A 24 ans, alors qu’il arrive en fin de contrat, on commence à penser que la carrière de Janot ne va jamais décoller.


Avec l'arrivée de Casagrande, Jérémie Janot redevient n°2 à l'été 2001

Le lancement de la fusée Janot
En mai 2002, Janot signe une prolongation de 2 ans. Personne ne s’y attendait vraiment mais cette décision est prise à la demande d’Antonetti, qui semble tout de même compter sur lui. Une marque de confiance que n'oubliera pas le bondissant gardien de l'ASSE. Même si leurs rapports sont parfois à la limite de la correctionnelle: "L’entraîneur que je redoutais le plus, c’était Frédéric Antonetti. En plus d’être exigeant, il avait les yeux partout. Lors d’une séance, comme j’étais un peu fatigué, j’ai laissé passer deux ou trois frappes. Il l’a vu et il m’a mis une de ces chasses… Mais le lendemain c’était fini. Il n’y avait aucune rancœur chez lui."

Car fin octobre 2002, profitant de la grave blessure de Casagrande, dont les performances étaient devenues beaucoup moins convaincantes, Janot est à nouveau propulsé sur le devant de la scène. Il sait pourtant qu’il n’a pas le droit à l’erreur et le jeune et prometteur Camerounais Carlos Idriss Kameni est embauché au mercato pour le mettre en concurrence. Grâce à des prestations impeccables, Janot parvient à laisser Kameni sur le banc et, malgré le retour de Casagrande, conserve le rôle de titulaire jusqu’à la fin de la saison.
C’est le début d’une formidable ascension pour Janot. Malgré l’arrivée de plusieurs gardiens expérimentés et talentueux, il va rester l’indiscutable gardien n°1 du club et franchir un à un tous les échelons, jusqu’à devenir l’un des meilleurs gardiens de but français.


La saison 2002-03 marque le retour en force de Janot

En 2003-04, bien qu’approché par Amiens à l’intersaison, Janot n’hésite pas et choisit de rester à l’ASSE pour effectuer sa dernière année de contrat. A 26 ans, il réalise sa première saison pleine, malgré la présence de Fabien Debec. Sa progression est flagrante et il inspire désormais pleinement confiance aux supporters. L’ASSE obtient son ticket pour la L1 et Janot est sacré champion de France de Ligue 2 pour la seconde fois de sa carrière avec, au passage, le titre de meilleur gardien de L2.

Avec une prolongation de contrat de 2 ans en poche, Janot se met rapidement au niveau de l’élite, malgré quelques doutes au départ sur ses capacités, l’arrivée d’un nouvel entraîneur et la présence de Ronan Le Crom.
Cette saison 2004-05 le révèle aux yeux de la France entière: papa depuis peu, totalement confiant de ses capacités, Janot s’extériorise complètement avec un tatouage tribal derrière le crâne et des tenues excentriques conçues spécialement pour lui par Duarig.


Florilège de tenues extravagantes de Janot durant la saison 2004-05

"Le partenariat avec l’équipementier Duarig a été une aubaine fantastique, pour moi comme pour l’ASSE. Nous avons réalisé des choses exceptionnelles, vécu de vrais délires entre nous, joueurs, et les salariés.(...) Quand j’avais une idée farfelue, on en parlait. Et 48 heures plus tard, tout était prêt. Je me souviens de quelques maillots parmi les plus excentriques: le camouflage militaire, le paintball, la panthère rose, le maillot à pois du Tour de France. Nous n’avions pas de limites ! Nous avons connu l’apothéose avec la tenue de Spiderman. Là, on avait atteint le maximum. On n’a pas voulu tomber dans une surenchère stupide ou ridicule, en faisant la tenue de trop. C’est comme ça qu’on s’est arrêté juste avant Dark Vador !"

Les résultats suivent avec, en point d’orgue, un record historique de l’après-guerre, avec 1534 minutes d’invincibilité à domicile. Récompense de ses belles performances, il prolonge à nouveau son contrat pour 3 saisons supplémentaires.
En 2005-06, la médiatisation retombe un peu. La série d’invincibilité prend fin et Janot doit se contenter de tenues plus sobres. Peu importe: il est l’un des chouchous du public et une valeur sûre de l’effectif. Plus question de chercher à le remplacer, l’ASSE sait qu’elle dispose d’un grand gardien.

Les saisons vont alors se suivre et se ressembler: Janot est titulaire, laisse son remplaçant sur le banc (en l'occurrence Jody Viviani), fait trembler sur chaque corner et rassure sur chaque plongeon. Mais Janot n'oublie jamais de faire parler de lui avec le petit truc en plus: il fracasse son poteau de rage après un penalty encaissé face à Lyon en 2004, il offre une passe décisive à Hognon lors d'un match contre Nantes en 2006, il sort un ballon haut en faisant un high-kick face à Barcelone en amical, il addresse un tonitruant doigt d'honneur aux ultras niçois en 2007... Des images bien connues des supporters des Verts et qui contribuent à façonner le personnage.


Qu'est-ce que ca doit être quand il perd à FIFA...

Le début de la fin
En 2007, Janot a 30 ans et fait partie du paysage de la L1. L'ASSE aussi mais elle ne va pas bien depuis que Laurent Roussey l'a reprise en main et elle pointe à la 13e place lorsque son gardien de but se blesse à l'épaule lors d'un plongeon anodin à la 22e journée. Ce dernier doit alors céder sa place à Jody Viviani pour de longs mois durant lesquels le club effectue une remontée phénoménale au classement et décroche la 5e place, synonyme d'Europa League. Janot joue bien quelques matches en toute fin de saison mais sa place est désormais celle de n°2, dure loi des gardiens...

D'autant que le début de saison 2008-09 est celui de toutes les désillusions, pour le club comme pour lui. Partant avec un statut de remplaçant, il est titularisé en Coupe de la Ligue face à Guingamp (L2) mais encaisse un terrible 4-0 au Roudourou. L'équipe va pourtant tellement mal que Viviani est prié de laisser dès la 20e journée sa place à Janot qui enchaîne 3 défaites de suite avant d'enfin tirer son équipe vers le haut: il retrouve le goût de la victoire lors d'un joli mois de Décembre 2008 et goûte enfin à la vraie coupe d'Europe.
L'équipe a beau vivre deux saisons à flirter avec la relégation: Janot va multiplier les prouesses dans ses buts pour maintenir son club en L1.
Le 5 avril 2009, il dispute son 300e match avec les Verts.
Le 13 décembre 2010, après avoir laissé Vincent Planté sur le banc toute la saison, il remporte le Ballon d'Eau Fraîche des Cahiers du Football, récompensant le joueur de L1 ayant la plus belle mentalité.
Le 7 mai 2011, il dispute son 384e match en Vert et bat le record d'Ivan Curkovic. Le kop Nord lui rend même un hommage vibrant via une banderole monumentale.


L'hommage de Geoffroy-Guichard à son gardien

Il semble indéboulonnable et pourtant, ce qu'aucun gardien n'avait pu faire depuis 8 ans, un homme va le faire à l'été 2011: le déloger sportivement de sa place de n°1.
Cet homme, c'est Stéphane Ruffier, le portier de Monaco, fraîchement relégué en L2. Janot avait laissé entendre à l'issue d'un ASSE-Monaco quelques semaines plus tôt que ce dernier était le seul à qui il laisserait volontiers sa place. La prophétie est réalisée et Ruffier prend la place de Janot sans que personne n'y trouve à y redire, pas même lui.
Alors que les medias évoquent un "guerre des goals", l'intéressé réplique d'un revers de la main: "L'arrivée de Stéphane ne m'ennuie pas. Il est jeune, talentueux, et je souhaite lui apprendre des choses, lui apporter un plus qui le mène très haut dans sa carrière. Quand Stéphane réalise un bel arrêt, je suis heureux pour lui. Quand il en laisse passer un, je suis triste pour lui. C'est aussi simple que ça."

Pour autant, Janot ne joue plus. Plus du tout. Pas même en Coupe. La saison 2011-12 est encore blanche pour lui quand il décide de relever pour la première fois un nouveau défi et de quitter l'ASSE pour Lorient le 4 mai 2012. Son 391e match, perdu face à Rennes un an plus tôt le 15 mai 2011, reste donc son dernier sous les couleurs vertes: "Mon pire souvenir. Je me suis blessé à l’adducteur et j’ai dû sortir. Je ne savais pas alors que ce serait mon dernier match à Geoffroy-Guichard. J’aurais aimé finir ce match."


Ruffier et Janot: une passation de témoin
dans les règles de l'art (photo le Progrès)

D’autres ambitions…
Lorsqu'il arrive en Bretagne au printemps 2012, il ne reste plus que 3 matches de championnat. Le FC Lorient a perdu ses deux portiers (Fabien Audard et Benjamin Lecomte) sur blessure et il est donc un joker médical. Il joue les 3 rencontres, maintient Lorient en L1 et réintègre immédiatement l'effectif de l'ASSE.

Néanmoins barré par Ruffier, il décide de tenter une nouvelle aventure en L2, au Mans, où le président Legarda, en proie à des difficultés financières, tente le tout pour le tout pour remonter son équipe dans l'élite. Il y signe début août 2012 mais l'expérience est une catastrophe: Le Mans FC prend l'eau de toute part, termine la saison relégable et est déclaré en faillite durant l'été 2013.
Janot, qui a disputé toute la saison en tant que titulaire malgré des défaites terribles (dont un retentissant 6-1 à Guingamp), se retrouve alors au chômage.


A Lorient et au Mans, Janot n'aura pas vraiment connu de grandes joies

Pourtant, à 36 ans, Janot ne compte pas encore s’arrêter là. Il a sans doute trop galéré pour se reposer sur ses lauriers et sait que sa carrière est derrière lui. Mais s'il a abandonné depuis longtemps son rêve d’équipe de France, il en a toujours émis un autre, celui d'évoluer outre-atlantique. Il se laisse alors une saison pour retrouver un club... ou tout arrêter.

Cette offre se présente mais son corps ne suit pas. Jérémie Janot met donc un terme à sa carrière sportive discrètement à l'été 2014 et se consacre à son complexe de sport indoor, le Club 42, qu'il a créé avec Loïc Perrin au début des années 2010.
Avant de devenir entraîneur ? "Je me suis dit que ça serait bien que je passe mes diplômes, j'ai tout de suite pris conscience que ce n'est pas parce que tu as fait une carrière, que forcément tu vas être un bon entraineur. Je pense que j'ai plein de choses à apprendre, je pense aussi que j'ai plein de choses à transmettre et pour cela il faut que j'apprenne les rudiments du métier d'entraîneur. J'ai pour but de devenir entraîneur des gardiens, j'ai un contrat de reconversion avec l'AS Saint-Etienne et une fois mes diplômes passés, j'intégrerai alors le club"

En attendant, Jérémie Janot entame sa carrière d'entraîneur au niveau local: après s'être occupé des U19 de Villars lors de la saison 2014-15, il prend les rênes de l'équipe première de Firminy (42), club partenaire de l'ASSE. Très impliqué dans son rôle d'ambassadeur de l'Euro 2016 à Saint-Étienne, le chouchou de GG est au (jérôme) four et au (jessy) moulin !
Le moment tant attendu survient en début de saison 2016-17 où il devient l'entraîneur des gardiens du centre de formation, participant notamment à l'éclosion précoce des jeunes Nathan Crémilleux et Stefan Bajic. Il poursuivra par la suite cette nouvelle carrière dans de prestigieux clubs de L2 tels qu'Auxerre ou, forcément, son club natal de Valenciennes avant de devenir entraîneur des gardiens de l'équipe de France Espoirs à partir de 2023... sous la direction de Thierry Henry, son acien partenaire de l'EDF Espoirs justement. La boucle est bouclée !


Première apparition avec les Espoirs
pour Janot (à gauche) en 2023 (photo l'Équipe)

Palmarès et Statistiques de Jérémie Janot
1996-2012: ASSE (391 matches)
2012: FC Lorient (3 matches)
2012-2013: Le Mans FC (31 matches)

* Champion de Ligue 2 (1999, 2004) avec l'ASSE
* Elu meilleur gardien de but de L2 (2003-04)
* Vainqueur du tournoi de Toulon 

* Elu Ballon d'Eau Fraîche des CdF (2010)
* Recordman d'invincibilité à domicile: 1534 mn à cheval sur deux saisons entre le 9 novembre 2004 (ASSE-Nice, but de Agali à la 29e) et le 21 septembre 2005 (ASSE-Nancy, but de Lécluse à la 34e). Soit 17 matchs pleins et plus de 24 heures de jeu sans encaisser le moindre but

So long, Jérémie !