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C'est l'histoire d'un supporter qui réalise son rêve: passer de l'autre côté de la barrière et porter le maillot de son club favori.
C'est l'histoire de Patrick Guillou, footballeur. Ni vedette, ni paillettes. Juste un joueur de devoir...


Patrick GUILLOU
Taille: 1m83 - Poids: 83 kg
Défenseur latéral

Né le 16/04/1970 à Villingen (Allemagne)

La carrière de Patrick Guillou en un clin d'oeil

Patrick Guillou voit le jour en 1970 en Allemagne Fédérale, où vit sa famille à l'époque. Il grandit dans la Ruhr, fief de nombreux clubs allemands (Borussia Dortmund, Vfl Bochum, Schalke 04, FC Köln, MSV Duisbourg etc...) et c'est tout naturellement qu'il intègre les rangs du Vfl Bochum pour faire ses débuts de footballeur. En trois saisons, de 1990 à 1993, Patrick participe à 9 matchs de Bundesliga. C'est Guilloüber alles !
Mais son regard de supporter est déjà tourné de l'autre côté du Rhin, plus précisément vers le Forez. En effet, Patrick est fan de l'AS Saint-Étienne. Régulièrement, avec quelques copains, il n'hésite pas à faire le long trajet Bochum-Saint-Étienne pour venir encourager ses favoris: "Je supportais dans un premier temps quand j'étais enfant le club du Bayern. Ensuite, en étant en garnison avec des Français, il y avait des supporters de Roanne qui habitaient aussi à Fribourg, ils m'ont fait découvrir les Verts. On allait régulièrement au stade Geoffroy-Guichard, on suivait surtout l'ASSE quand les Verts jouaient dans l'est de la France. J'ai été supporter de l'ASSE, j'ai été ultra aussi chez les Magic"


Sous le maillot de Bochum (saison 1991-92)

Une carrière de patachon
Changement de direction à l'été 1993. Guillou quitte l'Allemagne pour la France. Il aurait bien voulu enfiler le maillot vert, mais c'est sous le maillot rouge et noir du Stade Rennais qu'il fait ses débuts dans l'Hexagone. C'est une époque où le club breton fait l'ascenseur entre la D1 et la D2 et cette saison-là Rennes est en D2. Guillou ne le sait pas encore, mais l'antichambre de l'élite française va devenir son jardin pour la suite de sa carrière. Avec Rennes, Guillou dispute 30 matchs et inscrit son tout premier but en France.


Guillou tacle Ferreri lors d'un Chateauroux-OM de 1995

A la fin de la saison, il décide une nouvelle fois de changer d'air et prend la direction de Châteauroux. Le club berrichon est un habitué de la D2 et Patrick y réalise deux saisons pleines (1994-1996), avec près de 60 matchs en championnat. A l'intersaison 1996, il quitte le Berry pour la capitale en signant au Red Star. Son aventure dans le club francilien est un peu moins positive, puisqu'il ne participe qu'à 17 matchs au total en D2. Au bout d'une saison, Patrick reprend son baluchon. C'est là que son rêve va se réaliser.


Pat Guillou sous le beau maillot vert de 1999

Le maillot vert, enfin !
Les Verts de Saint-Étienne viennent d'échapper de justesse à la relégation en National avec une équipe inexpérimentée. Ils cherchent un défenseur solide et polyvalent, rompu aux joutes de la D2. Guillou reste sur une saison mitigée avec le Red Star et cherche un club. Ils étaient faits l'un pour l'autre ! Guillou signe enfin dans le club de son coeur.

Sa première saison dans le Forez est néanmoins difficile. L'ASSE a de gros problèmes et vit une saison terrible. Guillou ne surnage pas et n'est pas souvent titulaire (23 matchs en 1997-98). Malgré un changement de président (arrivée d'Alain Bompard en décembre 1997), les Verts ont chaud et n'évitent la relégation qu'à la dernière journée de championnat: "Lors de la saison 1997-98, l'ASSE lutte pour ne pas descendre. Je vis très mal la situation. D’autant plus qu’après des débuts intéressants, j’ai dû m’occuper de ma fille. Je suis allé voir le club en lui expliquant que ma priorité n’était plus le foot. J’ai disparu des écrans radars. Ma fille, ma femme avaient besoin de moi. J’ai demandé au club de me libérer de mes obligations professionnelles. Je pouvais venir aux entraînements quand je le souhaitais. Je ne jouais qu’uniquement en réserve. Les dirigeants et le coach ont été formidables. Je suis revenu vers la fin du championnat. Nous nous sommes sauvés en perdant à Lille mais Réginald Ray du Mans avait fait l’essentiel"


Les supporters de l'ASSE découvrent Guillou en 1997-98,
ici face à Lorient (photo le Progrès)

La saison suivante, personne ne mise sur les Stéphanois. Et pourtant ! Contre toute attente, les Verts de Robert Nouzaret restent invaincus en championnat jusqu'en décembre et se placent dans le trio de tête pour la montée en D1. On se pince pour y croire ! Guillou, lui, ne pince pas ses adversaires mais les tacle. Son enthousiasme, sa combativité, sont exemplaires et il entraîne dans son sillage une jeune génération verte prometteuse (Potillon, Sarr, Boudarène, Sablé). Guillou devient le leader moral de l'équipe, en compagnie de quelques autres éléments d'expérience comme Jérôme Alonzo, Kader Ferhaoui, Nestor Subiat, Christophe Robert ou Patrick Revelles. Le public stéphanois, qui se reconnaît dans les valeurs défendues par Patrick, ne s'y trompe pas et Geoffroy-Guichard résonne de nombreux "Guillou ! Guillou !". A la fin de la saison 1998-99, l'ASSE décroche le titre de D2 et remonte en première division: "Je garde de formidables souvenirs de cette période. Une belle histoire de potes, de briscards et d’autogestion encadrée. Nous n’étions pas forcément les meilleurs amis du monde mais nous avions un objectif commun: redonner à Saint-Étienne ses lettres de noblesse. Une superbe saison ponctuée par le titre honorifique de champion de deuxième division… Nous sommes presque tous restés en contact"


Guillou s'apprête à déborder un défenseur nîmois lors de la saison 98-99

C'est la première fois que Patrick Guillou va évoluer en D1 en France. C'est d'ailleurs chose faite dès la journée inaugurale, à Monaco (2-2): Patrick est titulaire au poste de latéral gauche face aux Simone, Trezeguet et autres Gallardo. Mais la suite de la saison est moins rose pour le défenseur des Verts puisqu'il perd rapidement sa place et s'assoit la majeure partie du temps sur le banc. L'abnégation et la volonté ne suffisent plus, la D1 requiert davantage de qualités techniques et de finesse. Guillou ne dispute que 6 rencontres de championnat, barré par le Norvégien Bjorn-Tore Kvarme et même par une recrue hivernale, l'inénarrable Francis Llacer...

En février, il entre en jeu pour quelques minutes dans un match couperet à ne surtout pas perdre face à Montpellier (5-4). A deux minutes de la fin, sous la neige, pour préserver le score, il s'arrache au milieu du terrain et obtient de haute lutte un coup-franc. Il le frappe lui-même à la manière d'un ouvreur de rugby et envoie le ballon en touche le plus près possible du poteau de corner pour gagner du temps. Cette action symbolise le personnage: la combativité, sans fioriture, afin de faire le maximum pour le bien de son club. Les Verts remportent le match et finissent la saison en trombe (6e à l'issue du championnat). L'action de Guillou est un peu sa façon de dire au revoir aux supporters. Quelques jours plus tard, en mal de temps de jeu, il se résout à quitter le Forez pour terminer la saison en Écosse en signant aux Hibernians d'Edimbourg. Mais il ne connaîtra pas la réussite en Scottish League puisqu'il ne participera à aucun match.


Tout le style Guillou en une image

Guilldoubs puis back in Forez !
A l'été 2000, Guillou souhaite rentrer en France. Sochaux, qui vise la montée, cherche justement un défenseur solide pour encadrer sa classe-biberon. Guillou met donc le cap sur la Franche-Comté. Retour en D2. Il va devenir la nurse préférée des Frau, Pedretti, Daf, Mathieu et autres Monsoreau. Les Lionceaux profitent de l'expérience de ce vieux Lion et décrochent le titre de champion de D2 en fin de saison. Guillou vit sa deuxième montée en l'espace de trois ans.

Mais décidément la D1 n'est pas faite pour lui. Dans l'élite, il ne participe qu'à trois matchs en début de saison sous le maillot sochalien. Une nouvelle fois, il va devoir repartir à l'étage inférieur. Lorsqu'il apprend que les dirigeants stéphanois (l'ASSE vient de retomber en D2 suite à l'affaire des faux passeports) cherchent un défenseur, il décide de rentrer "chez lui" et de réenfiler la tunique verte.
Les Verts ont très mal débuté le championnat et vivent une saison très difficile pour leur retour en D2. Guillou ne parvient pas à enrayer la chute. Très vite, l'entraîneur Alain Michel est remplacé par Frédéric Antonetti, mais si les Foréziens se maintiennent finalement (avec 22 apparitions de Guillou), ils sont passés près de la correctionnelle.


Guillou et les Verts passent une saison 2001-02 éprouvante en D2

On espère alors que la saison 2002-03 sera de meilleur acabit. Hélas, cela commence très mal et l'ASSE touche même le fond en janvier en encaissant un 3-0 à domicile contre Gueugnon. Antonetti décide alors de resserrer son groupe et de faire confiance à ses recrues du mercato (Fabrice Jau et Mickaël Citony). Il relance aussi Alex Dias en attaque, mais Guillou ne fait plus vraiment partie de ses plans et il n'est pas content (16 matchs seulement cette saison-là pour Patrick). Les Verts redressent la barre à partir de janvier et terminent à une honorable 9e place. Sans Pat', qui ne participe pas à la fin de saison. Son dernier match avec les Verts aura eu lieu le 9 février 2003 face au Mans (2-2). En 5 saisons chez les Verts, il n'aura jamais marqué.

Le défenseur stéphanois, en fin de contrat en juin 2003, songe alors à arrêter sa carrière. A 33 ans, il n'intéresse pas de club à l'intersaison et se retrouve de surcroît blessé. Pendant plus d'une année, il reste éloigné des terrains et du monde du football. Lors de la saison suivante (2004-05), il tente cependant un retour en se lançant un ultime défi sous les couleurs de Rouen (National). Mais l'expérience dans le club normand tourne court puisque Guillou ne disputera qu'une petite poignée de matchs en tout et pour tout. Il met alors définitivement un terme à sa carrière.


En 2003, le corps ne suit plus, c'est déjà la fin de carrière

Mais sa retraite sportive ne se passe pas vraiment comme dans un rêve: Patrick supporte mal de raccrocher les crampons et tombe lentement dans une terrible dépression: "J'ai cherché un autre exutoire, c'était les cachets. J'en avais besoin pour vaincre mes démons pour sortir de ce marasme et de ce mensonge. J'avais besoin de quelque chose qui me permettrait de dormir".
Après deux tentatives de suicide et deux internements, le colosse de Villingen reprend peu peu pied et goût à la vie.

A la fin des années 2000, Patrick Guillou devient consultant TV et radio. Titulaire d'un Master 2 en Marketing à Rouen et d'une Maîtrise de Management à Limoges, il est aussi cadre d'entreprise. En 2008, il s'engage aussi en politique, lors des élections municipales de Saint-Étienne mais sa liste échoue et Pat' se retrouve dans l'opposition, face à un autre ancien joueur stéphanois, un autre Patrick, qui porte lui toujours la moustache. Le Wisigoth et le Gaulois siègeront donc l'un face à l'autre au Conseil Municipal de Saint-Étienne pendant 6 ans.


Pat' de retour dans le Chaudron sous le costume de consultant Canal+

En 2013, la consécration arrive pour lui mais pas telle qu'il l'attendait: il est nommé consultant spécialisé dans la Bundesliga pour Canal+: "Je ne pensais pas du tout à cette reconversion quand j'étais joueur. Mais je savais que j’étais un bon client pour les médias. J’avais un avis tranché, des convictions et je disais autre chose que "l'important c'est les trois points" ou ce genre de banalités. Jean Guy Wallemme, mon ancien partenaire et coach à Rouen commentait les matches allemands sur Canal+. Il a accepté en cours de saison un poste d’entraîneur en Belgique. Il a proposé mon nom à Canal+. Michel Denisot était alors directeur des sports. Il me connaissait depuis Châteauroux. Il a dit banco et me voilà dans la boucle"

Mais cela ne dure qu'un temps et à l'automne 2014, son grand ami Willy Sagnol (avec qui il n'a pourtant jamais joué à l'ASSE), lui demande de devenir son adjoint à Bordeaux, le début d'une nouvelle aventure pour ce bon vivant dur au mal: "Je ne suis pas sur le banc de touche. Pendant les matches, mon positionnement se fait hors du terrain, situé plus en hauteur. Je dois voir si nous sommes en adéquation avec les objectifs fixés par Willy Sagnol. Je dois apporter des précisions très synthétiques. Mon passé d’ancien joueur peut me servir dans certaines circonstances par rapport à un joueur, à sa confiance. Des mots ou un regard suffisent pour sentir certaines choses. Derrière chaque joueur, il y a un homme. Je veux faire perdurer la confiance entre joueurs et entraineurs pour que le joueur soit le plus performant le plus possible" (SoFoot)


Guillou dans l'encadrement technique de Bordeaux en 2015

Il reste en poste à Bordeaux jusqu'à l'éviction de Sagnol au printemps 2016 où il rejoint Wolfsburg. Puis fort de son expérience du football d'outre-Rhin, il devient consultant TV pour la chaîne BeIN Sport à partir de l'été 2017, spécialisé dans la Bundesliga. Il y développe son style caustique et polémique jusqu'à se faire gifler par Franck Ribéry, alors joueur du Bayern Munich, après une diatribe cinglante lors d'un match contre Dortmund.
Une impertinence qui lui vaut de prendre la relève de Robert Herbin en tant que chroniqueur attitré du quotidien le Progrès, dans lequel il commente de façon incisive l'actualité de l'ASSE chaque semaine de match des Verts.

Patrick Guillou aura donc au total porté 109 fois le maillot vert, dont seulement 6 fois en D1. Même entre les matches allemands à commenter et les matches bordelais à préparer, il n'a jamais manqué de revenir régulièrement dans les tribunes de Geoffroy-Guichard pour encourager ses protégés, seul, entre amis ou avec sa fille Lorena, en anonyme parmi les supporters de la tribune Nord. Adulé de toute une frange de supporters de son époque, il est l'un des garants de l'esprit vert: "Ici, il faut respecter le club, l'institution, son histoire et ses supporters. L'ASSE, c'est le poumon de la ville. Quand tu signes ici, tu dois comprendre ce passé, ce contexte. Le maillot vert, c'est comme le maillot bleu, il appartient à tout le monde. Les valeurs locales, c'est le don de soi, le travail, le dynamisme et le partage. Moi, j'étais un besogneux, c'était mon fonds de commerce, j'allais au mastic. Et comme à Saint-Étienne, il ne faut jamais tricher... C'est aujourd'hui encore ma terre d'adoption. Ce club marque au fer vert" (France Football)


Guillou'll never walk alone, Patrick...