Les souvenirs européens de Dominique Bathenay
08/12/2021
Dans un long entretien accordé à la Pravda, Dominique Bathenay se remémore les matches de Coupe d'Europe qu'il a joués avec Sainté. Extraits.
"Le premier match, ça devait être le Sporting Portugal. C'était tout nouveau pour beaucoup d'entre nous, Christian Lopez, Patrick Revelli, Alain Merchadier... J'étais le plus jeune. On était partis au vert la veille à la Poularde, le restaurant du chef Randoing à Montrond-les-Bains. C'était très chaleureux. On démarrait un peu dans l'inconnue, face à un club huppé, mais qui ne nous faisait pas peur. On sortait d'un doublé, on avait confiance en notre groupe et on y est allé sans stress.
En huitièmes, c'est le début de la légende face à Hajduk Split. En Yougoslavie, sur un terrain très boueux, ça se passe pas trop mal au départ, mais en deuxième mi-temps, ils nous ont bousculés physiquement et Ivica Surjak, le futur Parisien, nous a fait très mal. En rentrant, on va boire un verre au Whisky, une boîte de Saint-Étienne, avec Jean-Michel Larqué, Christian Lopez... et Jean-Michel nous dit : ''Pour moi, c'est fini... Vous êtes jeunes, vous allez certainement en faire d'autres, mais... on n'y arrivera jamais...'' En gros c'était ''on n'est pas faits pour ça''. L'ambiance n'était pas au beau fixe. Il fallait gagner 3-0...
Le match retour n'était pas télévisé, mais depuis on a l'impression que tout le monde l'a vu ! Quand j'en parle, ça me donne encore des frissons... à 1-1, ça devient compliqué. Et puis sur un corner, je mets une tête pas franche, un peu lobée. On recommence à y croire. Après il y a le penalty de Bereta, Herbin fait rentrer Triantafilos qui marque aussitôt et c'est la prolongation. Quel bruit dans le stade ! Et puis Tintin nous met le cinquième et là, c'est la folie. Tout le monde rentre sur la pelouse. Dans la cohue, les gens ont perdu les portefeuilles, les montres ! C'était l'exploit que personne n'attendait, mis à part nous. C'est là que tout a commencé.
Et on renverse encore une situation compromise en quarts où les Polonais de Chorzow mènent 3-0 dès la 46e minute de l'aller. On revient à 3-2. À Geoffroy-Guichard, le terrain est enneigé. On s'est échauffé sur l'annexe comme d'habitude avant de traverser la foule pour aller au stade. Et Gérard Janvion nous met un but d'entrée. On a souffert jusqu'au bout, jusqu'au penalty d'Hervé Revelli.
On tombe sur le Bayern Munich pour la première demi-finale de C1 d'un club français depuis le Stade de Reims. On rentre dans la cour des grands. On a même fait des photos avec des effigies des joueurs du grand Reims. Face à ce monstre, le champion en titre, pratiquement l'équipe d'Allemagne championne du monde avec Sepp Maier, Franz Beckenbauer, Gerd Müller... c'est un match fermé, on avait peur de se faire punir et eux étaient méfiants.
Au retour, j'ai marqué Gerd Müller. Je ne sais pas pourquoi... Peut-être qu'en m'occupant de lui, je pouvais me projeter plus facilement parce que lui n'allait pas me suivre. Il était toujours en mouvement, à l'affût dans la zone de vérité, vif sur ses appuis. Il n'a pas marqué, mais on perd 2-0 en traitant d'égal à égal.
L'épopée de 1976 commence à Copenhague en septembre 1975. Un match piège. Comme à chaque fois, Pierre Garonnaire était allé les voir jouer, les avait filmés et nous parlait des joueurs dont il affichait les photos dans le vestiaire, la taille, le poids...
En huitièmes, place au défi physique des Rangers. C'était un nom et il fallait répondre présent. Quand il était joueur, Herbin avait fait le constat qu'ils avaient une bonne équipe mais se faisaient massacrer physiquement. Alors il a beaucoup basé sa méthode sur la préparation athlétique. À l'aller, Geoffroy-Guichard était dans le brouillard et à la dernière minute, je marque le but qui nous donne une petite marge de sécurité. Au retour, on est assez confiants, vraiment présents au niveau technique et on calme les ardeurs du public, notamment par Dominique Rocheteau, dont c'était la première campagne, par sa qualité de course, sa conduite de balle. Quasiment inarrêtable.
En quart on tombe sur le Dynamo Kiev. À l'aller, on les joue à Simferopol. Derrière le rideau de fer, le pays était fermé, l'hôtel pas terrible et les lits très petits. Osvaldo avait du mal à laisser les pieds sous la couette. Le terrain était enneigé encore, et ils ont sorti les grosses turbines pour le dégager. Le stade était plein de militaires. Kiev avait gagné la Coupe des Coupes l'année d'avant. C'était une belle mécanique bien huilée et sûre d'elle. Pour ne perdre que 2-0, il fallait vraiment que les dieux du football soient avec nous. On a courbé le dos. Tous les gens qu'on croisait dans la rue croyaient en nous pour le match retour. Ivan nous a dit : ''Pour les battre, il faut faire autre chose'' Autre chose que d'habitude, c'était ne pas les laisser s'installer dans leur mécanique. Les faire déjouer.
On les a perturbés avec le public et en les prenant à la gorge. Le tournant du match est ce duel perdu par Oleg Blokhine face à Christian Lopez. Il a un instant de suffisance : ''Je suis Blokhine, Ballon d'or, je vais faire joujou''. Il a échappé à Gérard Janvion, Christian Lopez arrive devant Ivan qui ne bouge pas trop. Il a même une solution pour donner le ballon et Christian est bien revenu et ça s'enchaîne, on marque par Hervé Revelli après le contre d'Oswaldo. C'est la minute qui a tout fait basculer. Et en prolongations, on est tous fatigués. Nerveusement aussi. Jean-Michel ne peut plus marcher, Dominique veut sortir. Et puis il y a cette belle action de Jacques Santini et Patrick Revelli, et Dominique qui marque... Il n'avait plus de crampes après et il s'est mis à courir partout ! On a marché au bord du précipice, mais on est resté du bon côté.
La demi-finale retour à Eindhoven nous a ouvert les portes de la finale et reste, avec Split, le match qui me laisse le meilleur souvenir. Tout le monde s'est arraché et Ivan a fait un festival. On n'était pas tous au top pour cette finale, on avait perdu Farison et Synaeghel blessé, Rocheteau l'était à moitié et ne pouvait pas jouer et moi j'avais une cheville en l'air, j'ai joué avec une piqure. On a fait un bon match et on ne les sentait pas sereins. Mais on perd. Et comme on a tiré sur les poteaux et qu'ils étaient carrés, ça ajoute à la légende comme les shorts noirs.
On était sous le choc. Je ne sais pas si les joueurs du Bayern étaient si heureux que ça... ils avaient fait le job. Certains avaient échangé les maillots et j'ai vu des joueurs verts soulever la coupe. C'est bizarre. On est dans un autre film. Et le lendemain, sur les Champs-Elysées, on était heureux de voir les gens heureux. Mais le moment que j'ai plus apprécié, c'est quand on a retrouvé nos supporters à Geoffroy-Guichard. Chez nous.
La saison suivante, notreparcours s'arrête en quarts face à Liverpool. J'avais marqué à l'aller à ,Geoffroy-Guichard d'un revers du pied gauche. Mon missile des 35 mètres à Anfield sous la barre de Ray Clemence ? Je savais que les ballons anglais avaient une trajectoire un peu bizarre. J'ai frappé et Anfield s'est tu. C'est une fierté. Hélas ça n'a pas suffi. On est retourné en Angleterre en 1977-1978 au premier tour de la Coupe des Coupes face à Manchester United. Là, c'était vraiment la fin de cette histoire. Jean-Michel était parti, beaucoup étaient en fin de contrat, les dirigeants avaient fait beaucoup d'argent avec notre épopée, c'était les premiers contrats à temps... Chacun avait peut-être des objectifs différents... À l'aller, chez nous, ça a commencé à chauffer avec les hooligans dès le lever de rideau, il y a eu des blessés, et le retour s'est joué à Plymouth à cause de ça."

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