Dans sa dernière édition, la Pravda revient sur l'affaire de la caisse noire. Extraits.

"Le 1er avril 1982, l'affaire de "la caisse noire des Verts" éclate et s'étale à la une de tous les médias du pays ou presque (...) Au mois de juin de la même année, elle se matérialise un peu plus quand Roger Rocher évoque un "bas de laine" constitué par des "bons de caisses anonymes placés dans des banques stéphanoises." Le juge Patrick Desmure, qui a repris le dossier, découvre l'étendue du système mis en place par Rocher et sa garde rapprochée. Entre les mois de juin 1976 et 1982, ce sont 22 millions de francs qui auraient été détournés, via des écrêtements sur les recettes liées à l'octroi des cartes de membre du comité d'honneur, l'organisation de matches amicaux ou la vente de gadgets et du magazine du club à la boutique des Verts.

Roger Rocher tente bien de se défendre en arguant que cette "cassette" a surtout servi à maintenir le "standing" de son club de coeur et lui permettre de conserver ses meilleurs joueurs. Plusieurs Stéphanois se verront ainsi verser des "sursalaires" de la main à la main, à coups d'enveloppes garnies de billets de 500 francs, en échange de la signature d'un reçu, dont un certain nombre sera exhumé et permettra d'y voir plus clair sur les sommes perçues (...) Michel Platini, Patrick Battiston, Jean-François Larios, Gérard Janvion, Christian Lopez, Bernard Lacombe, Jacques Zimako, Jacques Santini, Gérard Farison, Robert Herbin, Osvaldo Piazza et Raoul Noguès sont tous mis en examen pour recel d'abus de bien sociaux. Jamais avare de bons mots, le Canard enchaîné va même jusqu'à titrer : "Allez les Véreux !"

(...)

À l'ouverture du procès de la désormais fameuse caisse noire des Verts, le 9 mai 1990, le détail des fonds occultes perçus s'égrène - de 115 000 francs pour Bernard Lacombe à 1,1 million de francs pour Jeff Larios ; Michel Platini a, lui, touché 880 000 francs (...). "Si j'ai bonne mémoire, celui qui n'avait pas touché, c'était M. Rocheteau. Il avait des idées dites de gauche et je crois qu'il avait mis sa pratique en accord avec ses idées" se souvient le magistrat Gérgoire Findori. Avant de revenir sur la personnalité de Roger Rocher. "C'était un personnage haut en couleur, qui jouait un peu la vertu outragée, se remémore-t-il. Il y avait un côté un peu mégalomane chez lui. Tout était rapporté à sa personne."

(...)

"On a trouvé dans ce dossier les prémices des affaires que l'on a connues ensuite à un niveau très, très supérieur", note aussi Grégoire Finidori. "Ce qui était intéressant est qu'il y avait déjà un début de financement politique, une partie de l'argent détourné avait été versée à des personnalités politiques locales" (Michel Durafour, ancien ministre, député UDF et maire de la ville entre 1964 et 1977 et Lucien Neuwirth, ex-député RPR de la Loire et président du conseil général, qui avaient finalement remboursé). "Il y avait tous les ingrédients de ce qu'on allait retrouver par la suite sur le financement politique, ce dont je n'avais pas conscience à l'époque. Cette affaire de la caisse noire était un peu primaire sur le détournement des recettes. En plus, il y avait des preuves partout avec des carnets et des reçus signés par les joueurs."

(...)

Après cinq semaines de délibéré, le président Finidori, prononce la condamnation de l'ensemble des prévenus. Sans surprise, Roger Rocher écope de la plus lourde peine : quatre ans d'emprisonnement, dont trente mois avec sursis, ce qui lui évite de retourner en prison, assortis de 200 000 francs d'amende. Robert Herbin est condamné à six mois de prison avec sursis ; Michel Platini et ses dix anciens coéquipiers à quatre mois avec sursis, avant de voir leur condamnation amnistiée. Ils écoperont aussi, chacun, d'une amende équivalente à un mois de salaire."