On jouait bien à Saint-Etienne

17/12/2024
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En présence de plusieurs anciens internationaux algériens, un hommage a été rendu à Rachid Mekhloufi mercredi dernier à la Grande Mosquée de Paris. Lors de cette soirée, une interview de l'ancien meneur de jeu stéphanois a été diffusée. Extraits.

"Il y avait un Israélite qui était à Sétif et qui avait un petit journal, Le petit Sétifien. Deux feuilles… Il avait un frère qui était vers Saint-Etienne, à Roche-la-Molière. Il était un peu recruteur de l’AS Saint-Etienne. Il lui a écrit un mot en disant « voilà, j’ai un jeune à Satif qui est formidable, etc., etc. » Le bonhomme est allé voir Saint-Etienne et Saint-Etienne m’a envoyé un billet d’avion. Il y avait 3 frères : un journaliste, soi-disant, un instituteur et un qui était en France. C’est l’instituteur qui m’a matraqué. C’est terrible, ça. C’est cet instituteur qui me giflait, enfin, qui giflait tout le monde, bien sûr. C’est lui qui m’a dégoûté de l’école. C’est son frère qui m’a repéré. C’était la famille Setboun. Saint-Etienne m’envoie un billet, j’arrive à Lyon. Monsieur Garonnaire m’attendait à l’aéroport et on a pris le train.

Finalement, je suis allé directement au stade. Je me rappellerai toujours, c’était une journée de soleil magnifique. C’était le 4 août 1954. Au stade je trouve un bonhomme qui était l’entraîneur. Jean Snella. Heureux, d’une gentillesse extraordinaire. Dans la continuité du Français sympa, sans problème. Il m’a dit : « écoute, allez, on y va sur le terrain, on va te donner l’équipement, tout ça ». C’était un jeudi. C’est incroyable ça, je m’en souviens comme si c’était hier. On va à l’entraînement, on s’amuse, on a tout de suite vu que j’avais des qualités. Le dimanche, on joue un match amical de préparation. C’était contre Grenoble ou Limoges. Grenoble je crois. On gagne 6-2 et je marque 3 buts.

C’est à partir de là que ma carrière a été lancée, c’est à partir de là que je dis que j’ai eu de la chance d’être tombé sur un Monsieur comme ça, qui avait les mêmes principes de jeu que moi. Disons plutôt que j’avais les mêmes principes que lui. Imaginez une seconde que je sois tombé sur un entraîneur défensif et qui veut jouer physiquement. Je n’aurais pas fait cette carrière, j’aurais peut-être été éliminé car j’étais frêle, etc. Mais lui, il a décelé les qualités techniques, de vitesse, etc. Il m’a fait jouer dans ce sens. Bien sûr, il a fallu attendre 2 mois parce que Sétif n’avait pas envoyé l’autorisation de jouer.  J’ai fait mon premier match à Nice. Regardez l’intelligence de ce Monsieur. Il ne m’a pas fait débuter à Saint-Etienne, il m’a fait débuter à l’extérieur. Il s’est dit : si je le fais démarrer à Saint-Etienne et qu’il joue mal, le public…

Le public est un public connaisseur. Il a tout de suite senti qu’il y avait quelque chose chez ce gamin de 18 ans, une patte. Bien sûr, j’ai un bon contact avec tout le public. Bien sûr, deux ans après, on est champion de France. En 1956-1957. Entretemps, Monsieur Snella avait bouleversé complètement l’équipe. Quand je suis arrivé, il y avait une équipe de gens âgés, qui avaient 30 ans et plus. Lui a décelé une jeunesse qui était en réserve amateur. Il a intégré tous ces joueurs : Ferrier, Tylinski, Peyroche, Goujon. Tous ces garçons qui étaient de ma même catégorie, il nous a mis dans le bain et un an après on était champions de France.

C’est là où l’école stéphanoise a démarré, avec cette assise technique, ce fond de jeu, cette joie de jouer. C’était la première chose que Jean Snella nous inculquait : « un joueur de football qui n’a pas de joie de jouer, il vaut mieux qu’il aille à l’usine. » J’étais très heureux, d’autant plus qu’un an après, il y a la sélection, l’équipe de France, le titre de champion du monde militaire en Argentine, etc.

J’ai quitté clandestinement la France alors que je venais de passer 4 années merveilleuses à Saint-Etienne. J’avais comme entraîneur un Monsieur qui était magnifique, j’avais des partenaires qui étaient d’une correction extraordinaire. Et puis on jouait bien au football. C’est ça qui est important pour moi. On jouait bien à Saint-Etienne. Mais c’est peut-être mon côté de Sétif qui a réagi, quand à 8 ans j’avais vu des mitrailleuses en train de tirer sur des gens. C’est possible que ce soit ça qui m’ait décidé à passer le pas.

Je ne l’ai pas dit à l’entraîneur. Je vous ferai passer l’interview que j’ai faite à un internaute de Saint-Etienne [entretien paru en 2007 sur notre site et republié le mois dernier, ndp2] , je disais que je ne l’ai dit à personne à Saint-Etienne, même pas à mon frère qui était là-bas. Et ensuite, pendant 4 ans, j’ai complètement occulté Saint-Etienne. Je ne voulais pas que mes amis de Saint-Etienne soient embêtés, d’autant plus que mon frère était avec moi à Saint-Etienne. Il a été tarabusté par les flics. Il était préparateur en pharmacie, il a été matraqué. Je ne voulais pas que des Messieurs de Saint-Etienne comme Jean Snella, Roger Rocher, etc. puissent être embêtés. J’ai préféré faire le black-out total."

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