Le Sphinx enflamme Roustan

01/05/2020
bookmark bookmark
share share
Image
 

Didier Roustan a publié hier son dernier podcast en hommage au Sphinx. Une sympathique émission d'une bonne heure, où le journaliste s'enflamme en chantant la chevauchée des Walkyries pour commenter les but du mythique Sainté-Kiev (à écouter à partir de 50:45). On l'entend aussi lire des extraits de notre éphéméride du 30 mars (à écouter à partir de 32:17).

Didier Roustan rappelle surtout ce que le football français doit aux Verts de Robert Herbin. Extraits.

"Avec le départ de Robert Herbin, c’est toute une partie de notre histoire, de l’histoire du football français, qui s’en va. Enfin, qui s’en va… Cela restera bien sûr à tout jamais, d’autant plus que nous en récoltons les fruits encore aujourd’hui. Il y a eu un avant Saint-Etienne et un après Saint-Etienne. (…)

Joueur, Herbin était déjà un bon footballeur mais au-delà de ça, il avait des qualités physiques et mentales bien au-dessus de la norme, notamment française. Je me souviens de son but de la tête en finale de Coupe de France 1970 contre Nantes, écrasé 5-0. Une tête invraisemblable qui finit dans la lucarne opposée. C’était extraordinaire. Il avait un remarquable jeu de tête, ce qui n’était pas trop la spécialité du footballeur français à l’époque. Il a joué 15 ans, de 1957 à 1972. Il a d’abord été milieu de terrain et terminera les dernières saisons avec Albert Batteux en défense centrale aux côtés de Bernard Bosquier. Il a été un remarquable libéro.

En 1972, Albert Batteux prend de court Roger Rocher en présentant sa démission. Roger Rocher propose à Robert Herbin le poste d’entraîneur alors qu’il n’a que 33 ans à l’époque. Ce n’est pas courant de prendre la tête aussi jeune d’une équipe qui reste un des clubs phares du pays mais en phase de reconstruction avec le départ de plusieurs joueurs importants. Roger Rocher pense à Robert Herbin dont il connaît les qualités de leader, les idées, l’emprise qu’il a sur les autres. Robert Herbin hésite, il pourrait encore jouer une saison ou deux. Il accepte mais à une condition, avoir un contrat de quatre ans car c’est le temps nécessaire selon lui pour vraiment former les joueurs.

En 1972, il faut rappeler que l’état du football français est désastreux. En Coupe du monde 1966, on a fait un petit tout et puis s’en va. L’Euro 1968, on n’existe pas, on se prend un 5-1 en Yougoslavie. La Coupe du Monde 1970, rien que les éliminatoires… On perd 1-0 à Strasbourg contre la Norvège. Certes on gagne après 3-1 en Norvège mais contre la Suède on perd 2-0 le match décisif. Tout nous faisait peur à l’époque. Coupe du monde 1974, là-encore pour se qualifier tu passes à travers… On était bons techniciens mais physiquement on se faisait broyer. Il suffisait d’un rien, un but pris contre le cours du jeu, pour que ça soit fini car mentalement on n’existait pas.

C’est pour ça qu’il y a un football français avant Saint-Etienne et un football français après Saint-Etienne. Saint-Etienne va tout débloquer pour nous. Tout ! En ayant ces résultats formidables en Coupe d’Europe des clubs Champions… Ah bah ouais, tu vas en demi-finale en 1975. Tu te fais éliminer par le Bayern mais t’es dans le dernier carré, ce n’était plus arrivé depuis la finale du Stade de Reims en 1959 ! Il en a coulé de l’eau sous les ponts. Et le coup d’après, tu vas en finale ! Incroyable ! Bon, tu perds, poteaux carrés mais t’as fait jeu égal, tu n’as pas été broyé, si ça tourne bien tu peux gagner ce match. Le coup d’après, tu gagnes le quart de finale aller à Geoffroy-Guichard contre Liverpool.

C’est là que Saint-Etienne rate le coche. Su tu tiens le coup à Anfield, s’il n’y a pas ce Fairclough - qu’est-ce qu’il va nous faire celui-là… - en demi-finale tu tombes sur le FC Zurich et tu passes à coup sûr et tu te retrouves à jouer ta deuxième finale consécutive. La première, ce n’est pas pareil, t’as le côté émotionnel. Là, tu maîtrises encore mieux l’environnement. Tu joues contre le Borussia Monchengladbach, une bonne équipe mais Liverpool leur en met trois dans la musette. On l’aurait gagné ce match, on aurait pas dû attendre l’OM de 1993.

Il faut voir les matches de cette épopée des Verts, il faut voir les émotions les enfants ! Si tu gagnes comme un rat, avec un petit football mièvre… Mais là, quand tu perds 4-1 à Split et que tu gagnes 5-1 au retour. Quand tu joues le Dynamo Kiev, la meilleure équipe du monde à l’époque, que tu perds 2-0 à Simferopol et qu’au retour, tu te qualifies mon ami, 3-0 ! Contre le PSV en demi, le scénario est différent. Tu ne dois pas remonter un score à Eindhoven, tu dois préserver le 1-0 de l’aller. Et ben tu tiens, 0-0 !

Tout ça mis bout à bout sur plusieurs saisons fait que tout a basculé. C’est le renouveau du football français dont va profiter la sélection nationale pour se qualifier pour les trois Coupes du Monde suivantes avec une forte ossature stéphanoise. Les bases étaient là et on en profite encore aujourd’hui, même s’il y a eu entretemps quelques petites sorties de route. Au-delà de cet élan physique et mental, il y a cet élan de sympathie.

Les Verts étaient tous archi-différents physiquement et au niveau du caractère mais ils mettaient tout au service de l’équipe. Curkovic, tu vois l’homme que t’es allé chercher derrière le rideau de fer, le sérieux, le travail, magnifique. Il plaisait à une partie de la population qui se retrouvait en lui. Rocheteau avait ce côté imprévisible, ces bouclettes, ses dribbles, cette folie. D’autres, un public peut-être plus jeune et plus féminin, se retrouvaient en lui. Bathenay c’était le travailleur, toujours face à la tempête. Tu vois son but à Anfield, impassible. Au lieu de courir de tous les côtés, tu le vois les bras en V.

Hervé Revelli, tu vois son talent, ses remises, sa technique, sa malice. Osvaldo Piazza, tu le lâches, c’est un pur-sang dans la pampa. Et Janvion, toujours tenace, au marquage individuel sur la flèche d’en face. Farison, qui montait, qui revenait. SynaegheL.. Larqué, le travail bien fait, paf, la transversale qu’il faut, les coups francs au moment X, plus un côté technique… Il y avait de tout dans cette équipe mais chacun jouait la même partition pour faire en sorte qu’il y ait une harmonie formidable sur le terrain. La musique, ça jouait juste. Et en cela, Robert Herbin, féru de musique classique, aura été un chef d’orchestre extraordinaire.

Après, attention, ils étaient tous des bons footballeurs. Ils avaient tous un niveau international mais il n’y avait pas un phénomène, aucun joueur figurant dans le top quinze mondial ou même européen. Certains selon les saisons n’en étaient pas très loin mais c’était l’assemblage des onze –enfin, quatorze ou quinze – qui aura fait la différence. Ils pratiquaient un jeu certes moins léché que le FC Nantes de l’époque, mais plus féroce, plus fou, plus imprévisible. Nantes c’était River Plate, Saint-Etienne c’était Boca Junior.  Il y avait cette grinta !

Nous devons beaucoup à Saint-Etienne et évidemment au chef d’orchestre Robert Herbin ainsi qu’à tous ses musiciens verts."

Potins
26/04 09:51
Larso, 50 matchs à Haut niveau
26/04 09:23
Djo aux JO ? (4)
25/04 23:02
Nadé finalement dispo pour Caen
25/04 17:05
Batubinsika marque pour son fils
25/04 16:24
Gomis ne retrouvera pas les Verts
25/04 07:26
Abdi n'abdique pas
25/04 06:54
Briançon ménagé
25/04 06:42
Romain Thomas espère un exploit (2)
24/04 23:16
Seule la barre arrête Aubame
24/04 22:25
Diony se prenait déjà la tête avec Dall'Oglio
Articles
26/04/2024
Patrice Garande : "Malherbe peut inquiéter Sainté"
21/04/2024
Riera bien, qui ri(e)ra le dernier
21/04/2024
Popodo podo popodo
12/04/2024
Sainté - Angers, le match des calendriers
08/04/2024
Jessy Moulin : "Geoffroy-Guichard, c'est incomparable, c'est incroyable !"
07/04/2024
Pénurie de latéraux
23/03/2024
L'animation stéphanoise
19/03/2024
Damien Bridonneau : "Mangez, prenez, et vous allez vivre une histoire extraordinaire !"
10/03/2024
Une histoire de temps forts
05/03/2024
"Il aimait profondément Saint-Étienne et Saint-Étienne l’aimait"

Partager