Il ne savait pas que le football était grave
13/05/2022
Ancienne préparatrice mentale au centre de formation de l'ASSE (de 2004 à 2007), Cécile Traverse s'est longuement confiée à Ouest-France. Extraits.
"Intégrer un centre de formation représente un bouleversement majeur en pleine adolescence. Ils sont sans aucun doute fiers mais sont-ils vraiment conscients de ce que cela signifie pour eux ? Du jour au lendemain, le foot passe du loisir quasi innocent à une tâche millimétrée et récitée. Ces garçons se retrouvent éloignés de leurs familles, foyers, copains, coéquipiers, entraîneurs et villes. Les personnes à la tête des centres savent qu’ils ont une énorme responsabilité d’éducation auprès de ces adolescents. Il existe un véritable rôle de substitution à la famille pour qu’ils continuent de développer leur identité au sens large.
J’ai travaillé comme intervenante en psychologie du sport dans plusieurs centres de formation au début des années 2000. Je ne vous apprends rien : si « rentrer » dans cette structure n’est pas une tâche aisée, signer son premier contrat professionnel reste de loin la plus ardue. De nombreux jeunes ont ce rêve en tête. Tant d’étoiles dans leurs yeux pour si peu d’élus. Les centres de formation sont eux-mêmes soumis au diktat « du résultat ». Face à cette réalité complexe à gérer, j’ai malheureusement pu constater que la mission éducative de grande envergure qui consisterait à former des hommes en devenir était trop souvent reléguée au second plan pour donner la priorité absolue au football.
Je sais : ils sont là pour ça, l’idée paraît couler de source. Seulement, il existe plus d’échecs que de réussites. Par conséquent, que deviennent ces jeunes aux rêves brisés rentrant chez eux honteux en ayant le sentiment d’avoir tout perdu ? Je ne parviens pas à les oublier. Imaginant que c’est le seul chemin légitime à suivre, certaines institutions imposent aux garçons l’idée que pour réussir, le football doit prendre toute la place, le moindre interstice disponible : il faut « se lever foot », « manger foot », « penser foot », « respirer foot », « dormir foot ». Au fil du temps, ils oublient qu’ils sont des personnes avant d’être des footballeurs. Et cet oubli se joue au cœur même de leur développement. C’est dangereux car malgré leur talent et leur projet d’excellence, le football ne les protège en rien. Comme je le rappelle souvent aux athlètes avec lesquels je travaille : vous ne pouvez pas vous définir par l’unique prisme de votre pratique. Je m’explique : si vous n’êtes « qu’un joueur de football » et que vous échouez, qui êtes-vous ?
Conditionnés par ce sacerdoce, certains jeunes joueurs en viennent à égarer leur amour originel pour le sport. Dans un des clubs pour lequel je travaillais, j’avais un bureau à l’étage. Tous les matins, je les observais quitter le centre depuis ma fenêtre. Quelque chose me surprenait : qu’ils soient en chemin pour le collège-lycée ou l’entraînement, beaucoup avaient la même allure. Pourtant, croyez-moi : nombre d’entre eux détestent l’école. Qu’est-ce qui clochait ? Je savais sans nul doute qu’ils préféraient s’entraîner à l’idée de s’installer derrière un bureau. Mais alors pourquoi cette démarche robotisée ?
Comme souvent, c’est le témoignage de l’un d’entre eux qui m’a éclairée de plein fouet. Il était venu me voir pour se confier quelques semaines après avoir rejoint le centre. Il avait eu cette phrase que je n’oublierai jamais : « Mais Cécile, je ne savais pas avant de venir ici que le football était grave. » J’ai eu l’impression de prendre une claque. En effet, sans qu’ils y soient réellement préparés, le centre de formation change leur relation initiale au football et ils se retrouvent trop souvent happés par un système qui les dépasse. Dès cet instant, ils ne « joueront » plus vraiment au football comme avant.
J’ai travaillé suffisamment d’années en centre de formation pour reconnaître qu’il s’agit d’une structure extrêmement difficile à gérer, en quête constante d’équilibre entre école, entraînements, vivre-ensemble et compétitions. Je suis aussi heureuse de constater qu’il existe des structures qui ont saisi ces problématiques et fonctionnent très bien, respectant l’individu dans son entier, prenant soin de lui. Mais il reste trop de centres de formatage, et non de formation. Le foot n’est évidemment pas le seul sport concerné. Je regrette amèrement que l’unique objectif puisse être de préparer des athlètes à une performance, sans se soucier de ce que peut ressentir la personne derrière le maillot, sous prétexte que cela pourrait perturber son évolution de sportif… Je m’élève contre ce postulat. À mes yeux, plus l’homme est épanoui, plus le footballeur est performant."

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