Galette89 féru de tactique

13/01/2022
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Adjoint d'Olivier Pantaloni à l'AC Ajaccio (leader de L2) et responsable méthodologique du centre de formation du club corse, le potonaute Galette89 (Jordan Galtier) a accordé une longue et passionnante interview au site officiel de la Ligue 2. Extraits.

"Les grandes lignes de notre politique vis-à-vis des jeunes sont communes à beaucoup de clubs. L’ACA a amorcé un virage il y a deux ou trois ans avec l’idée de développer son centre de formation et d’intégrer des jeunes au groupe professionnel. L’idée est d’avoir une politique commune, la même méthodologie quelle que soit la catégorie d’âge et de créer une passerelle entre le centre de formation et l’équipe professionnelle.

Avant d’intégrer le staff professionnel, Patrick Leonetti, l’actuel directeur du centre de formation, et Johan Cavalli m’avaient sollicité pour mettre en place une méthodologie commune à toutes les équipes de jeunes. Un projet qui entrait dans le cadre de ma formation du formateur à la DTN. Je leur ai présenté une semaine type avec des entraînements articulés autour de la tactique. Tous les facteurs de la performance sont liés afin de développer toutes les structures du joueur pendant sa formation. Comment ça se déroule ? On travaille par semaine avec, selon les jours, différents principes (collectifs), sous-principes et sous-sous-principes de jeu (individuels). On s’inspire fortement de la périodisation tactique du Portugais Vitor Frade.

Vitor Frade est un universitaire portugais qui a théorisé la périodisation tactique dans les années 70. Ce n’est donc pas une méthodologie nouvelle. Ces dernières années, elle a été mise en avant par José Mourinho même si beaucoup d’entraîneurs s’y sont mis. Cette méthodologie priorise l’aspect tactique et la manière dont on aimerait que notre équipe s’exprime en compétition, en y associant les différentes réponses motrices et techniques. Nous voulons que nos joueurs donnent du sens à leur jeu. Chaque procédé d’entraînement, qu’il soit technico-tactique ou athlétique, doit se référer à ce qu’on appelle notre modèle de jeu, qui est l’élément indispensable de cette méthodologie. Ce n’est pas une voie facile mais c’est ce qu’on essaie de mettre en place à l’ACA.

De plus en plus de clubs fonctionnent avec cette méthodologie. Certains centres de formation s’en inspirent, d’autres font croire qu’ils s’en inspirent car c’est un peu la mode. A l’ACA, on n’a pas la prétention de dire qu’on applique la périodisation tactique à 100% mais on s’en inspire fortement. En Ligue 1, le LOSC fonctionnait comme ça et je pense que c’est encore le cas. André Villas-Boas s’appuyait sur la périodisation tactique à l’OM, comme Alain Casanova à Toulouse il y a quelques années. C’est aussi le cas de mon père à Nice en ce moment.

Ma conviction profonde est que le foot est un sport collectif qui se base à 85% sur la perception. On est toujours en train de prendre des informations. Chaque geste technique, chaque mouvement, est le résultat d’une perception. Si on perçoit, alors on réalise. Si le joueur est bien placé, il va pouvoir réaliser le geste correct. J’ai peut-être cette vision car, comme joueur, je n’avais pas beaucoup de qualités athlétiques. C’est le moins qu’on puisse dire (rires). Je devais donc réfléchir au maximum pour compenser ce déficit.

Mon vécu m’a fait aller vers cette méthodologie-là mais également le fait de se poser les bonnes questions. Comment battre un adversaire en fonction d’un système ? En fonction des espaces à exploiter ? Ce n’est pas forcément le joueur le plus rapide qui va marquer un but, c’est ce qui est intéressant dans le foot. Je me pose beaucoup de questions, je lis beaucoup, je m’intéresse aux différentes méthodologies… Car attention, il y a d’autres méthodologies hyper intéressantes même si je suis plus sensible à la périodisation tactique.

Je n’ai pas de système favori. Ce n’est pas le système qui importe le plus, c’est l’animation qu’on y met. On peut très bien commencer en 4-4-2 et se positionner en 3-4-2-1 avec la balle. Que veut-on faire ? Quel espace veut-on attaquer ? Que veut-on faire croire à l’adversaire ? Tout ça en fonction des caractéristiques des joueurs. Avec les U19 de l’ACA, j’ai parfois joué en 3-4-3. Non pas par conviction mais parce que j’avais les joueurs pour. Même chose lorsqu’on a joué 4-1-4-1 avec l’équipe U17. On s’organise en fonction de notre modèle de jeu, des espaces qu’on veut exploiter et des joueurs. Selon si notre adversaire nous presse à deux, trois ou quatre attaquants, on va adapter notre première ligne de relance. Puis, on va positionner des joueurs entre les lignes, dans les espaces où l’on pense l’adversaire vulnérable. Ça peut être extrêmement mouvant. Le système doit être flexible.

Comme les pros jouent en 4-4-2, on oriente les éducateurs vers ce système pour qu’il y ait des passerelles plus rapides entre le centre de formation et l’équipe première mais on ne l’impose pas. Dans la semaine, la priorité est de travailler en fonction du match à venir ou du match passé. Il n’y a pas de programme type pour la semaine 1, la semaine 2, la semaine 3… C’est selon le ressenti de l’entraîneur. S’il estime que son contre-pressing n’a pas été performant, libre à lui de le travailler. C’est lui qui choisit les principes de jeu qu’il va travailler parmi la quinzaine de principes qu’on a établis en amont avec Patrick Leonetti et Johan Cavalli. Les éducateurs les connaissent et les mettent en place pour que le modèle de jeu de leurs équipes soit semblable à celui de l’équipe pro. Voici un résumé un peu barbare de ce qu’on essaie de faire.

Il y a des principes de jeu offensifs, défensifs, de transition… Un de nos principes offensifs de base est de battre la première ligne adverse. Comment ? En attirant le pressing et en occupant de façon rationnelle l’espace de jeu. Un deuxième principe consiste à assurer la continuité de la circulation. Un autre est d’identifier et exploiter les espaces. Ce sont trois principes dans notre première phase de construction. Mais ensuite, libre aux éducateurs de trouver les sous-principes qui correspondent aux caractéristiques de leurs joueurs. Mais on veut voir ces principes lorsqu’on va observer les matchs de nos équipes de jeunes.

Dans le staff des pros, je suis chargé de l’observation des adversaires et des montages vidéo à présenter aux joueurs. Au quotidien, avec le préparateur physique Tom Frère, on construit et on anime les deux premiers procédés d’entraînement de la séance en fonction des attentes d’Olivier. Puis, il prend la partie tactique en main, souvent en fin de séance. Je m’occupe de visionner les matchs, de les découper puis d’habiller les images : mettre des flèches, des annotations… Ça prend énormément de temps mais c’est mon rôle. Je regarde trois fois les trois derniers matchs de l’adversaire. Mais, parfois, ça peut monter jusqu’à six matchs. Enfin, le jour du match, à 11 heures, je montre mon montage aux joueurs en présence du staff au complet.

Avec mon père, on a beaucoup parlé de la périodisation tactique. J’en étais déjà adepte avant qu’il arrive au LOSC. J’avais beaucoup lu, je m’étais renseigné, j’avais fait des formations en ligne… Quand mon père a signé à Lille, il y avait des Espagnols et des Portugais dans son staff, notamment João Sacramento. Il m’a dit qu’il découvrait un peu un nouveau métier. On a échangé sur comment mettre en place ces principes de jeu pendant la semaine pour être performant le week-end en fonction de l’adversaire et des caractéristiques des joueurs. Quand j’échange avec mon père, on échange davantage sur le processus que sur la conséquence. C’est le plus important pour moi : comment faire jouer l’équipe d’une certaine façon et comment convaincre les joueurs. Quand João Sacramento est parti de Lille, un autre Portugais, Jorge Maciel, est devenu l’adjoint de mon père et j’ai beaucoup échangé avec lui aussi. Il est d’ailleurs toujours au LOSC, avec Jocelyn Gourvennec.

Généralement, on ne se voit qu’une fois par an avec mon père, c’est peu. Mais disons qu’une fois par mois, on a une bonne discussion. Quand je regarde les matchs de l’OGC Nice, je peux lui envoyer un petit texto : « Qu’est-ce que tu as cherché à faire sur tel ou tel aspect ? » Je crois qu’on n’a jamais parlé management. Il ne joue pas un personnage. Dans la vie, il est celui que l’on voit sur le bord des terrains. Mais il ne faut pas le réduire à un super manager. C’est une qualité forte mais il en a d’autres. La méthode et la tactique le passionnent par exemple. 

Mon but dans la vie, ce n’est pas de devenir l’entraîneur adjoint de mon père. Ma priorité est d’apprendre mon métier à l’ACA. Je veux aider l’équipe à être performante et à atteindre ses objectifs. Si un jour, je dois travailler avec mon père, ça se fera naturellement. Et si ça ne se fait pas, ça ne se fait pas. Ce n’est pas mon but dans la profession. J’en ai tellement bavé depuis le début de ma carrière, on a fait tellement de sacrifices avec ma femme, que je n’ai pas envie que les gens se disent que je suis pistonné ou ce genre de conneries qu’on peut lire sur les réseaux sociaux. Je suis très fier de m’appeler Galtier, je suis très fier de mon père. Si j’ai un problème, je peux l’appeler. Mais aujourd’hui, je ne suis pas dans le staff d’Olivier Pantaloni parce que je m’appelle Galtier. Quand je jouais, j’entendais parfois : « C’est le fils Galtier, c’est un pistonné ». Je ne peux pas empêcher ça mais je veux l’éviter au maximum. Je ne veux pas être médiatisé. Si on doit parler de moi, c’est pour mon travail et ce qu’on réalise à Ajaccio."

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