Curko le répète, tout est dans la tête

24/06/2023
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Ivan Curkovic s'est confié sans langue de bois à Denis Chaumier dans le livre  AS Saint-Etienne, 90 ans de légende paru le 14 juin aux éditions Hugo & Cie. Droit dans ses bottes comme il était adroit dans ses buts, le mythique gardien de l'épopée des Verts n'épargne pas son ancien président et son ex-entraîneur. Extraits.

"En écartant le PSV Eindhoven en demi-finale, l’équipe avait suscité un courant de sympathie jamais vu en France pour une équipe de football et cette euphorie générale lui avait fait oublier l’enjeu premier : la finale n’était pas un but en soi, il fallait la gagner ! Mais une dimension nous a fait défaut. Sans qu’il soit forcément conscient, il y a eu un relâchement psychologique que subissent toutes les équipes novices à ce niveau. Ça n’a pas pardonné. Notre frustration a été d’autant plus grande que cette finale était vraiment à notre portée. Sur le plan national, la machine est repartie, avec le 10e titre de champion de France et une 6e Coupe de France, mais dans les compétitions européennes, nous n’avons jamais retrouvé nos dispositions de 1975 et 1976

Contre Manchester puis Liverpool, on n’a pas été à la hauteur. Chacun a son caractère, j’ai le mien. J’ai très vite compris la façon de vivre « à la française ». Il aurait fallu une mentalité plus accrocheuse, plus de détermination, car tout se passe dans la tête. On est battus en finale et on se retrouve à défiler sur les Champs-Elysées. On rentre bredouilles et on est célébrés comme jamais… Cette envie de gagner ne nous a jamais quittés, mais toute cette fièvre autour de nous, tous ces médias qui chantaient nos louanges… On ne pouvait pas se comporter comme si ça n’existait pas. Il a été parfois compliqué de refroidir les têtes. Et là, on a touché nos limites.

Quand je suis arrivé au club en 1972, la formule était idéale avec une équipe dirigeante de grande qualité, quelques joueurs cadres, des jeunes issus du centre de formation et deux étrangers, pas plus. On n’a jamais imaginé mieux pour réussir. Mais on a eu tendance à l’oublier en chemin. Platini et Rep ont été engagés. Ils étaient tous les deux de grands joueurs, c’est incontestable. J’ai souvent parlé avec Michel, avec lequel je suis resté très ami. Il me disait : Je ne me suis jamais senti chez moi à Saint-Etienne, contrairement à Nancy. »

Ce n’est pas que Michel a été mal adopté mais l’ambiance n’était plus la même. Je ne dirais pas que Michel et Johnny ont déséquilibré l’équipe mais plutôt que quelque chose avait changé : on s’éloignait de ce que l’on faisait auparavant, de la fameuse formule idéale. L’équipe était plus spectaculaire dans son expression mais aussi plus fragile sur ses bases. C’était aussi d’ordre mental. Je ne peux que me répéter : tout est dans la tête, qui précède et commande le comportement sur le terrain. En France, ça passait encore, mais au niveau international, ce n’était plus aussi évident.

En Yougoslavie, la tactique revêtait une importance particulière, pas trop en France, où les joueurs couraient beaucoup, à la différence des Yougoslaves. J’en ai souvent parlé avec Herbin : comme positionner une défense, comment associer Lopez et Piazza dans l’axe ? Comment rendre une équipe cohérente ? Comment assurer le lien entre les différentes lignes ? On cogitait ensemble, on cherchait à prolonger nos réflexions en les adaptant au terrain mais c’était lui, et lui seul, qui tenait le poste de commande. Les joueurs connaissaient notre mode de fonctionnement et ils l’acceptaient.

Mais peu à peu, tout le monde a pensé que je voulais prendre sa place. Herbin aussi. Entraîner, c’est être soumis en permanence à la critique du public, des médias, des dirigeants et même des joueurs. Je n’en voulais pas, je vous l’assure. Je lui ai dit en 1980 que je voulais arrêter ma carrière de joueur. Je sentais que mes coéquipiers m’écoutaient moins, qu’ils étaient moins réceptifs à mes conseils. Je me suis convaincu qu’il était temps d’arrêter. Avant un déplacement au mois d’août à Bastia, j’ai prévenu Herbin que j’allais disputer mon dernier match.

Je l’ai annoncé à Rocher, qui m’a regardé un peu interloqué. Après quelques secondes, il m’a lancé : «Bon, toi, tu veux une augmentation, hein ? » Il faisait fausse route. Mon choix était clair : c’était fini. J’avais de bons rapports avec lui, il m’a même proposé de devenir président délégué. Rien à voir avec Herbin, qui à force d’entendre que je voulais lui succéder, m’a tourné le dos, tout comme Garonnaire, qui était pourtant venu me chercher à Belgrade. Ils ont voulu mettre de la distance entre eux et moi.

J’ai pris une fois Herbin entre quatre yeux pour lui dire : « Ecoute-moi bien une fois pour toutes, je ne veux pas être entraîneur ! » J’ai eu beau lui dire qu’il ne voulait pas de son poste, il n’a pas voulu l’entendre. Il a été déstabilisé par un environnement qui ne l’a pas aidé. Et c’est ainsi que survient, souvent, le déchirement entre les hommes. J’ai toujours respecté les hommes, mais j’ai senti que le bateau tanguait et que j’étais devenu gênant. J’avais certes la capacité de devenir entraîneur, mais je ne le voulais pas. On ne m’a pas entendu.

En voulant recruter des stars, Rocher s’est exposé à leur demande : gagner plus. L’ouverture de la boutique des Verts l’a aidé à alimenter une caisse noire et à les rétribuer. Il a été la propre victime de son moment de faiblesse, d’autant plus incompréhensible qu’en France les institutions mènent l’Etat et qu’il est impossible de les tromper sous peine d’être rattrapé et sanctionné. On en connaît les conséquences. Je l’avais compris. Un jour, devant les enquêteurs, Rocher a été obligé de présenter un tableau où figuraient les noms de tous ceux qui avaient touché de l’argent illégalement. Le mien n’y figurait pas…"

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