Il y a trois sortes de sups verts. Ceux qui dominent la quarantaine et gardent au fond d’eux, même loin, le doux souvenir de la gloire, le frisson vécu de la victoire, la fierté débordante des titres qui s’accumulent. Ceux qui parfois se laissent aller à un peu d’aigreur, de nostalgie systématique. Ceux dont les yeux se mouillent et la voix s’emballe quand ils parlent d’hier, du temps béni des trophées qui s’amassent.
Il y a ceux qui plissent les yeux pour apercevoir la trentaine encore lointaine et ses ventres qui ramollissent, la paternité et ses nouvelles responsabilités. Nés après MP (Platoche pour les intimes), ils ont connu leurs premiers et trop rares émois avec Lubo et un joli quart de coupe en 93. Leur attente leur semble longue, mais ils croient sans réserve en de prochains titres.
Enfin il y a les entre-deux, les entre opulence et renaissance, les maudits trentenaires nés à la passion verte au moment où les victoires se raréfiaient. A peine dix ans au début des années quatre-vingts, on s’entiche d’un club qui défraye la chronique judiciaire. Rocher est derrière les barreaux, et nos premiers émois sentent le cake rocher, le joueur formé au club et les fessées à Bourg la Roche. Ils ont vécu trois descentes et trois montées en près de 25 ans de fidélité. Ils se sont tous dit un jour ou l’autre cette phrase absurde : « j’voudrais pas crever sans…. ».
C’est à eux qu’est dédié cet honteux plagiat.
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Le Vian nous portera
Je voudrais pas crever
Avant d'avoir connu
Les joies d’un nouveau titre
Tellement j’en ai rêvé
Finir torse nu
Sur les grilles, faire le pitre
Regoûter à la fièvre
Envahir le terrain
Je voudrais pas crever
Sans savoir si sans thune
On décrochera la Lune
Sans renier nos valeurs
On goûtera au bonheur
Si la ligue des champions
Ne sent que le pognon
Sans avoir essayé
D’encourager les Verts
Au cœur du virage Nord
Sans avoir vu encore
Henri Point debout
Sans un tendu d’écharpes
Dans des stades d’europe
Je voudrais pas finir
Sans connaître Dniepr
Ou l’Dinamo Tbilissi
Qu'on attrape là-bas
Le bon ni le mauvais
Ne me feraient de peine
Si si si je savais
Que j'en aurai l'étrenne
Et il y a z aussi
Tout ce que je connais
Tout ce que j'apprécie
Que je sais qui me plaît
La clameur du kop vert
Secoué par vagues
Voir Féfé onduler
Le calendar en juin
Les heures éternelles
d’avant un match des Verts
Et la panthère d’Alex
Que ceci que cela
L’esprit que voilà
Mon Sablé, Diawara
Je voudrais pas crever
Avant d'avoir usé
Mon futal à Saint Denis
La coupe avec mes mains
Le reste avec mes yeux
J'en dis pas plus faut bien
Rester révérencieux
Je voudrais pas mourir
Sans qu'on ait retrouvé
Les maillots sans sponsor
Les joueurs fidèles
La capitale à Sainté
La banlieue à Lyon
La fin de la douleur
Un palmarès en couleur
Tous les sups contents
Et tant de trucs encore
Qui dorment dans les crânes
De tous les verts rêveurs
Des mastres joviaux
Des ultras fanatiques
Des associés nostalgiques
Et des forumistes penseurs
Tant de choses à voir
A voir et à z-entendre
Tant de temps à attendre
A chercher dans le noir
Et moi je vois la fin
Qui grouille et qui s'amène
Avec sa gueule moche
Et qui m'ouvre ses bras
De grenouille bancroche
Je voudrais pas crever
Non monsieur non madame
Avant d'avoir tâté
Le goût qui me tourmente
Le goût qu'est le plus fort
Je voudrais pas crever
Avant d'avoir goûté
La saveur d’un autre titre...
Le texte de la version originale de Boris Vian : http://www.feelingsurfer.net/garp/poesie/Vian.PasCrever.html