Jeudi, en fin de conférence de presse, Eirik Horneland déclarait que les nouveaux dirigeants allaient ramener les Verts en Europe. 48 heures plus tard, il les a ramenés en Ligue 2.
Triste et prévisible épilogue d’une saison où l’exceptionnel moment vécu lors du derby ne peut compenser l’addition historique d’humiliations.
Prononcée avec conviction, la déclaration d’Horneland a eu l’effet anesthésiant d’une inhalation sur la crève carabinée. Comme un bien-être éphémère, une douce parenthèse, qui fait du bien mais ne guérit rien. On te croit, Eirik, on te croit. Parce qu’on on n’a pas le choix, et parce qu’au regard de notre situation, faute de mieux, on se raccroche, comme un peuple allant aux urnes, aux promesses de ceux qui vont le diriger.
Mais que valent les promesses, que pèsent les mots face aux faits ? Qui a oublié les déclarations de décembre et janvier, celles d’un président vendant son entraîneur comme l’un des plus prometteurs d’Europe, celles du-dit entraîneur affirmant – contre toute évidence – qu’il ferait progresser un groupe n’ayant pas besoin d’être renforcé ? Qui a oublié la vente d’Amougou et qui doute de la prochaine vente de Stassin ?
Quelle (mé)connaissance du football faut-il pour imaginer l’été dernier que ce groupe, avec quelques jeunes inconnus issus de championnat de seconde zone, pourrait se maintenir ? Quel degré d’inconscience ou d’incompétence faut-il pour estimer en janvier, et ne jamais changer d’avis, qu’une équipe à ce point fébrile défensivement puisse s’en sortir en misant tout sur l’attaque ?
Quel niveau de prétention faut-il atteindre pour arriver dans un championnat inconnu et croire qu’un des plus faibles effectifs du championnat puisse déployer le jeu du Barça ?
Quel mépris pour l’histoire de ce club et la passion unique de ses supporters faut-il avoir pour considérer qu’une relégation n’est qu’une simple péripétie sportive ?
Quelle confiance désormais pouvons-nous avoir en la faculté de ces dirigeants à tenir compte des particularismes de la Ligue 2 pour bâtir l’effectif qui nous ramènera en Ligue 1 ?
Sortant accablé de Geoffroy samedi, ployant sous le poids de toutes ces interrogations, je réalisais, effaré, que je venais de vivre ma 5ème descente en Ligue 2 en un peu plus de 40 ans. Tout juste après avoir connu ma 4ème remontée, ce qui ne nous était jamais arrivé. Lors des 3 remontées précédentes, en 1986, 1999 et 2004, nous avions su, parce que le foot exige ça, renforcer l’équipe : Dimitrov, Krimau, Wallemme, Alex, Aloisio, Pédron, Camara, Feindouno, Piquionne, Zokora en furent les admirables preuves.
Mais le foot a changé, parait-il. Il empêcherait un promu de 2024 de se renforcer.
Le foot a changé paraît-il…. Oui et non. Comme chaque année depuis toujours, il sanctionne d’une relégation les pires défenses du championnat, et envoie au cimetière des prétentieux ceux qui oublient qu’une équipe se construit d’abord sur la basse d’une assise défensive solide.
Pour n’avoir pas pris conscience de nos faiblesses, pour n’avoir pas donné à ODO ce qu'il réclamait cet été, pour avoir donné cet hiver les clés du camion à un entraîneur sans expérience de la Ligue 1 au moment où on n’avait pas le temps de lui laisser prendre ses marques et installer son style, pour ne pas avoir tenté de sauver les meubles en janvier, nos nouveaux dirigeants sont indéfendables.
Tête baissée, mutique sur le chemin du retour, je réalisais bizarrement que ma tristesse était moins intense que redoutée. Était-ce l’effet de l’habitude des chutes ou le soulagement de voir mes souffrances enfin abrégées ? Etait-ce la sagesse qui susurre au creux de ma peine que même en Ligue 2 (surtout en Ligue 2 ?) le plaisir de venir à Geoffroy est inégalable ? L’idée aussi que nos morts annoncent toujours de magnifiques résurrections ? Ou alors suis-je bêtement plus influencé que je ne veux l’admettre par les belles paroles de nos dirigeants ?
A défaut de réponse claire, j’observe, rassuré que tout Geoffroy semble au diapason. Les groupes ont accueilli avec un calme étonnant et exemplaire cette nouvelle saison minable de notre club, dans la continuité de ces dix mois de compétition où, en particulier lors du derby, l’ensemble du public aura fait rayonner Sainté comme jamais aux yeux de la France et de l’Europe du foot. En un an seulement, en un an d’une telle misère sportive, c’est un exploit sans précédent.
Il faut le dire, le souligner, l’apprécier encore et toujours ce public qui, à l’extérieur comme à domicile, dans un Henri Point exceptionnellement animé comme dans ces Kops éternellement survoltés, reste l’atout premier, l’atout éternel de ce club.
Les dirigeants ont la chance incroyable de bénéficier de l’appréciable patience du Peuple Vert. Mais elle ne durera pas, il n’y a donc pas d’autre choix, après cette foirade totale, que d’être, enfin, au rendez-vous des promesses :
Achevez l’évolution du club, constituez un bel effectif cet été, un effectif adapté aux ambitions du coach et, surtout, décrochez la remontée immédiate - exploit si rare que seuls les témoins de 1963 ont connu en ces lieux - qui, seule, effacerait le fiasco inédit d’une descente 12 mois après la montée.