Avant le dernier match de la préparation estivale de l'ASSE (L2) programmé ce samedi à Cagliari (Série A), Jean-Michel Larqué revient pour nous sur la double confrontation entre les Sardes et les Verts il y a 55 ans.
"On a affronté Cagliari en 16e de finale de Coupe d’Europe des Clubs Champions. On venait d’être sacrés champions de France de D1 pour la 4e fois consécutive, la 6e fois de l’histoire de l’ASSE. On affrontait une redoutable équipe italienne qui a remporté cette année-là ce qui reste à ce jour son seul scudetto. On avait bien sûr une belle équipe mais je dois dire qu’on était quand même un peu impressionnés par nos adversaires.
En effet, pas moins de 6 joueurs de Cagliari avaient participé 3 mois plus tôt à la Coupe du Monde au Mexique. La Squadra Azzurra avait brillé là-bas. Elle avait notamment battu l’Allemagne en demi-finale 4-3 après prolongation au terme d’un des plus beaux matches de l’histoire de la Coupe du Monde avant de s’incliner en finale contre la fabuleuse équipe brésilienne des Pelé, Jairzinho, Rivelino…
La moitié de l’équipe d’Italie était à l’époque composée de joueurs de Cagliari. Il y avait le gardien Enrico Albertosi, le libero Pierluigi Cera, le milieu de terrain Comunardo Niccolai. En attaque il y avait Angelo Domenghini, Sergio Gori et bien évidemment ce diable de Gigi Riva. Un sacré joueur, qui nous a fait très mal au match aller en Sardaigne. Par sa puissance, il nous a laminés. Il a mis un doublé et on a perdu 3-0.
On a été courageux au match retour. A défaut de se qualifier, on a quand même eu le mérite de gagner. On avait montré du tempérament. Suite à un centre de Salif Keita, j’ai ouvert le score à la demi-heure de but mais ce but n’a pas suffi, on n’a pas réussi à en mettre d’autres même si on a mis plusieurs fois en danger cette équipe italienne. On aurait sans doute dû obtenir un penalty en seconde période sur une main non sifflée mais je ne sais pas si ça aurait changé le sort de ce match.
On va dire que c’étaient les prémices, l’apprentissage de la Coupe d’Europe. Je venais tout juste d’avoir 23 ans, j’étais un peu le jeunot de l’équipe. Il fallait passer par là, il fallait essuyer les plâtres, il fallait connaître les défaites, les difficultés de la Coupe d'Europe pour ensuite faire mieux. Je crois qu'on en avait tiré quand même la leçon de ces matchs-là. Ce qui est déjà plutôt positif. Je dirais que ça n'a pas été une élimination pour rien.
Evidemment, le match qui se profile ce samedi se jouera dans un tout autre contexte. La colère que j’ai exprimée il y a 2 mois lors de la descente des Verts n'est pas redescendue, ni d'un barreau de l'échelle, ni d'un degré. Je regarde ce qui se passe à l’ASSE de loin parce que ça me désespère. C'est la pire des choses d'être désespéré. Je suis désespéré. J'ai vu que la cellule de recrutement, c'était l'armée mexicaine.
Je vois qu’on parle beaucoup. Il y a eu une cellule de recrutement, c'est très ronflant. J'ai vu ça à la présentation. Ils ont tous plein de galons, plein de médailles sur la poitrine et le résultat, il est là. Je ne sais pas qui ils ont recrutés. Je n'ai pas l'impression que l'équipe se soit constituée pour remonter avec une petite marge de sécurité alors que l’objectif claironné est la remontée directe avec le titre à la clé.
Je suis très inquiet, toujours très en colère envers les dirigeants qui ont toujours un grand sourire. J’ose espérer que c'est toujours la même photo qui apparaît… Je ne suis pas sûr que les supporters stéphanois, aujourd'hui, aient un grand sourire. Il y a une chose que je ne supporte pas, c'est d'être pris pour un idiot. Et je dis "idiot" pour rester poli.
J'ai bien l'impression quand même qu'on prend de la sorte les supporters des Verts. On les abreuve de bonnes intentions, de belles promesses. On étudie, on observe, on fait ci, on fait ça. Je suis quand même très, très dubitatif sur les promesses tenues, et je n'aimerais pas que les supporters de Saint-Étienne soient pris pour des idiots."
Merci à Jean-Michel pour sa disponibilité