Actuellement sous contrat avec Charleroi (Belgique), Ben Karamoko a côtoyé deux ans (2018-2020) Ibrahima Wadji à Haugesund (Norvège). L'ancien défenseur central stéphanois nous présente cet attaquant sénégalais qui devrait s'engager en début de semaine prochaine avec l'ASSE.
Ben, comment présenterais-tu Ibrahima Wadji aux supporters stéphanois ?
C’est un attaquant très rapide, qui se bat vraiment pour l’équipe. Ce n’est pas un tricheur et il a beaucoup de tempérament. Quand il est arrivé à Haugesund en 2018, au début il jouait sur l’aile droite mais le coach l’a remis dans l’axe et c’est en attaquant axial qu’il a performé. En 12 matches il a dû marquer 8 buts. On évoluait en 4-4-2, il jouait devant avec Ibrahima Koné. L’actuel attaquant de Lorient était notre point d’appui, faisait les déviations et Ibrahima Wadji partait en profondeur. Les deux, ça marchait super bien ensemble ! Ibrahima a vraiment performé à ce poste d’attaquant de pointe.
Penses-tu que sa possible association avec Jean-Philippe Krasso puisse être aussi concluante ?
Jean-Philippe Krasso, je ne le connais pas trop mais des résumés des matches que je vois à la télé il a l’air d’avoir un profil qui se rapproche un peu d’Ibrahima Koné. Je pense que leur association peut faire du bien à Sainté et du mal aux défenses adverses.
Dans quels domaines as-tu vu Ibrahima Wadji progresser ?
Tactiquement et techniquement, Ibrahima n’était pas mauvais à Haugesund, et je trouve qu’il a progressé à Qarabag l’été dernier. Comme on est resté ami, il m’arrive de regarder les matches de Qarabag. Techniquement il a progressé, dans la finition aussi. Il a mis 20 buts toutes compétitions confondues depuis qu’il joue là-bas, sachant qu’il a rejoint ce club l’été dernier. Je trouve que maintenant il a encore plus de sang-froid et de lucidité devant le but.
Wadji a un pied droit très fort. Franchement, il envoie parfois des boulets de canon, ça peut faire mal ! En plus c’est un super gars dans l’effectif. Je pense que c’est quelqu’un qui va aider les Verts. Je ne dirais pas qu’ils manquent de caractère mais il manque ce genre de joueurs dans l’équipe pour dire au bout d’un moment « stop, quoi ! ». Je pense que ça va lui faire du bien d’être à Saint-Etienne, de connaître le Forez.
T’as eu l’occasion de discuter avec lui récemment au sujet de Sainté ?
Il y a deux semaines, il m’a appelé pour me demander des conseils à propos de Saint-Etienne. Je pense qu’il avait discuté avec les dirigeants stéphanois et qu’il avait envie d’aller à l’ASSE. Il m’a dit qu’il voulait vraiment tenter sa chance en France car il n’a jamais joué en France. Il a démarré sa carrière en Turquie à Gaziantep avant de jouer de nombreuses saisons en Norvège. Il a d’abord joué deux à Molde et ensuite trois ans et demi à Haugesund.
Quand tu joues à Saint-Etienne et que tu te fais un nom chez les Verts, t’es un peu connu. Je pense qu’Ibrahima a envie de goûter à la sélection du Sénégal. Il a eu des bons rapports avec Loïc Perrin et Laurent Batlles, à mon avis c’est pour ça qu’il va à Saint-Etienne. Moi je lui ai dit que Sainté c’était super bien, qu’il y avait de vrais supporters. Je lui ai dit que les infrastructures à l’ASSE étaient top. Bon, c’est sûr qu’elles sont meilleures qu’en Norvège déjà ! (rires)
Je ne l’ai pas senti trop hésitant quand je lui parlé malgré la situation actuelle du club. J’ai senti que ça lui faisait mal que l’équipe soit dernière de Ligue 2. Après la défaite 6-0 je lui ai posé la question, je lui ai demandé s’il avait toujours envie d’aller à Sainté. Il m’a dit que ça lui faisait mal de voir un grand club à ce niveau-là mais que ça ne le dissuadait pas pour autant d’y aller. Je pense qu’il sera déterminé à aider l’équipe à redresser la pente.
Toi aussi ça doit d’attrister de voir Sainté bon dernier de la L2 !
Oui, moi aussi ça me fait mal au cœur de voir l’ASSE dans cette situation. Je suis arrivé dans ce club à 15ans, j’y ai fait toutes mes classes au centre de formation. C’est là-bas que j’ai signé mon premier contrat professionnel, que j’ai joué mes premiers matches en pro. J’ai connu beaucoup de joueurs qui étaient au centre de formation, qui étaient un peu plus jeunes. J’ai joué dans l’équipe réserve entraînée par Laurent Batlles aux côtés de garçons comme Mahdi Camara, Mickaël Nadé, Dylan Chambost, Léo Pétrot, etc.
Ça fait mal de voir les Verts derniers avec zéro point après cinq journées, c’est dommage qu’ils aient été rejoints sur le fil à Valenciennes. Mais pour connaître le caractère de Laurent Batlles, je suis convaincu que les mecs vont se relever et que l’équipe ne va plus tarder à décrocher des victoires. Ce n’est jamais évident de se remettre d’une descente. J’ai bon espoir que l’ASSE se redresse. A mon avis le retour des supporters dans le Chaudron fera du bien. Je pense que ça va permettre aux Verts de prendre beaucoup de points à la maison. Comme on dit, ce n’est pas le départ qui compte, c’est l’arrivée.
Il faut digérer la descente et il y a beaucoup de jeunes aussi. Comme on est à Saint-Etienne, il y a une petite pression. Mais je pense qu’ils vont faire du bon travail. De mémoire, les résultats n’étaient pas terribles au début quand Laurent Batlles entraînait Troyes mais au final il a fini en boulet de canon et l’Estac est montée en Ligue 1 dès sa deuxième saison. Je pense que ça va faire la même chose. Il va finaliser son recrutement lors de ces derniers jours de mercato. Et quand les joueurs vont commencer à bien se connaître… Je pense que les Verts pourront remonter d’ici deux ans. J’aimerais qu’ils remontent dès cette année mais ça paraît difficile pour le moment.
Mais les Verts ont beau être derniers de L2 en ce moment, ça reste un club pas comme les autres, un club qui ne laisse pas indifférents les joueurs. Quand j’ai eu Ibrahima, Qarabag venait de franchir 3 tous préliminaires de Ligue des Champions et s’apprêtait à jouer le barrage contre le club tchèque de Viktoria Plzen [finalement perdu le 23 août par Qarabag, reversé du coup en Europa League, ndp2]. Je lui ai dit : « tu préfères prendre le risque de ne pas jouer la Ligue des champions et partir à Saint-Etienne ? » Dans sa réponse, j’ai senti qu’il était vraiment intéressé par les Verts. Il m’a dit qu’il devait discuter avec le coach Batlles. Je pense que le discours du coach l’a vraiment convaincu, et que c’est pour ça qu’il y va.
Ibrahima n’est pas quelqu’un qui fait les choses à moitié. S’il y va, il se battra jusqu’au bout. Je pense que tout le monde va le kiffer à Sainté. En plus de ses qualités de footballeur, c’est quelqu’un qui un remarquable état d’esprit. C’est un bosseur qui ne fait pas trop de bruit mais s’il y a quelque chose qui ne va pas, il ne va pas mâcher ses mots. S’il a un problème avec toi, il va te le dire directement. Vous allez discuter, régler le problème et hop c’est fini, il passe à autre chose.
T'avais des affinités avec lui qui dépassaient le rectangle vert ?
Oui, j’ai appris à connaître Ibrahima et à l'apprécier car on se voyait beaucoup en dehors des terrains. On était voisins. Avec les deux Ibrahima, Wadji et Koné, on était tout le temps ensemble. Limite on vivait à trois ! (rires) On est des vrais amis, on se dit la vérité. J’ai constaté qu’Ibrahima Wadji détestait vraiment perdre. Les deux ou trois jours après une défaite, il était énervé d’avoir perdu. C’est un super mec dans la vraie vie, comme sur le terrain.
Mais attention, sur le terrain, face aux défenseurs adverses il va vraiment au combat ! Ibrahima, il est petit en taille mais il est costaud [1m75 et 74 kg, ndp2], il n’hésite pas à aller au mastic. Il n’aura pas peur d’ailleurs d’aller au duel avec un Mickaël Nadé, j’aimerais bien voir ce duel mais bon, ils vont jouer ensemble en fait ! (rires) Ibrahima est fort et vraiment puissant, il va au duel. Je lui ai dit : « La Ligue 2, c’est un peu le charbon ». Il m’a répondu : « Non mais tu me connais, moi je n’ai pas peur. Je suis prêt à charbonner. » J’ai hâte de le voir sous le maillot vert.
Quel est ton rapport avec l’ASSE aujourd’hui, plus que quatre ans après avoir quitté le club ?
L’ASSE, ça reste mon club formateur donc je suis le parcours des Verts, obligé ! A chaque match, même si je n’ai pas pu voir la rencontre, je regarde les résultats et les résumés. Je prête particulièrement attention aux jeunes qui jouent. J’essaie de suivre tout le monde en fait. Même si ça ne s’est « pas très bien passé », il faut garder du positif. C’est quand même Saint-Etienne qui m’a formé, qui m’a tout donné, qui m’a permis de jouer au foot. J’ai eu très peu de temps de jeu en équipe première mais je n’ai aucune rancœur ou quoi que ce soit. Quand je vois que le club est en bas, ça me fait mal ! J’espère qu’il va remonter et je sais qu’Ibrahima va tout donner pour aider les Verts à remonter.
T’aurais une petite anecdote sur Ibrahima pour clore notre entretien ?
J’ai en mémoire un match du championnat norvégien où on gagnait 2-0 ou 3-0 contre Stabaek. Il restait à peine cinq minutes à jouer. Ibrahima était sur le côté, il n’avait pas besoin d’accélérer. Mais comme il a toujours faim, il a fait une accélération de fou et il s’est claqué. Tout le monde lui a dit : « Mais pourquoi t’accélères à ce moment-là du match sachant qu’on gagne ? » Lui-même il ne savait pas (rires) Bon, je te rassure, c’est la seule fois qu’il s’est blessé quand on était ensemble à Haugesund et à ma connaissance il ne s’est pas blessé depuis, c’est quelqu’un de solide. Mais c’est pour te dire que c’est vraiment quelqu’un qui va tout donner pour le club !
Merci à Ben pour sa disponibilité