GreenPeace a écrit :Olaf a écrit :Dérive "fascistoïde", admettons (à mon avis, c'est loin d'être si net - j'ai plus la sensation d'une dérive "résignatoïde"). Mais pourquoi ? Parce que les mêmes problèmes - chômage de masse, inégalités, avenir bouché, lourdeurs et empêchement général pour les individus, absence de sens par la disparition de "traditions sociales" qui ne sont pas remplacées - subsistent depuis trop longtemps, qu'on y apporte toujours peu ou prou les mêmes réponses quelle que soit la couleur du parti au pouvoir (bla bla croissance/relance, bla bla contrats aidés, bla bla dépense publique peu importe comment, bla bla faux libéralisme-vrai capitalisme), et que ça n'a pas vraiment d'impact.
Le discours du FN (qui n'est pas du tout le mien) répond à ça : on mobilise les gens autour d'un rêve simple à comprendre -rendre à la France sa grandeur et aux Français leur pouvoir d'agir- et on en tire un discours prêt-à-penser où les lendemains seront radieux parce qu'on sera débarrassés de tous ceux (étrangers, musulmans, élites corrompues, Europe, fonctionnaires-traîtres) qui nous entravent.
Il faut juste se rendre à l'évidence : le rêve proposé par le capitalisme triomphant, le matérialisme à tous crins, fonctionne mal. Les gens y adhèrent encore majoritairement, mais cette majorité se réduit. La gauche électorale commence seulement à essayer de décentrer sa vision, à intégrer les thèses convivialistes, localistes, écologistes qui pour moi sont les préfigurations de l'avenir désirable - mais son discrédit actuel est immense. La droite ne sait plus à quel saint se vouer - et je ne parle pas de l'affaire Fillon : il devient de plus en plus difficile pour les libéraux sincères, les conservateurs capitalistes, les réactionnaires tradi, les modérés gestionnaires de trouver ce qui fait leur identité commune au delà du besoin de s'unir pour gagner la compétition électorale.
Depuis 30 ans, le FN (et je rappelle que je n'ai aucune sympathie, bien au contraire, pour ce parti) est cohérent et porte le même discours à peu de choses près. Les partis traditionnels l'ont érigé en ennemi à abattre, l'ont utilisé comme un épouvantail à une époque où il ne pesait rien : aujourd'hui que les partis traditionnels sont devenus, pour une masse toujours plus grande des électeurs, des nuisances dont il faut se débarrasser, l'épouvantail devient aux yeux de certains l'outil qui permettra de faire le ménage.
Dans ce cadre, renvoyer à la collaboration n'a aucun sens. Les temps ont changé, les enjeux ne sont pas les mêmes ; si Marine arrive au pouvoir, Poutine ne viendra pas avec des chars occuper le pays, instaurer le rationnement et organiser la déportation des arabes. Et même d'un point de vue purement "stratégique", on voit bien que la diabolisation ne marche pas contre le FN, ni contre la tentation fasciste (je distingue encore les 2 - peut-être suis-je trop naïf).
C'est ailleurs que le combat réside. La lutte contre le FN et/ou le fascisme ne marche pas : c'est la lutte pour un monde meilleur et désirable qui démontrera la vacuité des thèses d'extrême-droite.
Bah, sur le diagnostic d'ensemble, je peux être très proche de toi. Par contre sur l'option peace & love pour faire face au SO du fn, je ne suis pas assez maso pour te suivre.

C'est trop tard, en fait.
On se rejoins sur le constat, mais pour moi la barrière idéologique et historique reste avec l'extrême droite un marqueur indélébile. Je ne crois pas qu'ils ont changé ou que la version post moderne du FN incarné par le FN et l'´héritière sont différent.
Il y a beaucoup de similitude entre le contexte européen des années 30 et celui d'aujourd'hui : crise financière qui débouche en crise économique, sociale et politique, corruption des élites, incapacité et aveuglement des institutions, dysfonctionnement de institutions.
ForeverGreen a montré les similitudes de langages existant entre l'extrême droite d'alors et celle d'aujourd'hui. Les musulmans remplacent les juifs, les réfugiés syriens les républicains espagnols dans un programme qui rejoint une volonté de protection socialisante dans un cadre national et identitaire qui devrait sonner tragiquement à nos oreilles. J'ajouterai aussi qu'une partie de la droite traditionnelle symbolisée aujourd'hui par la ´derive droitière de Fillon n'est pas loin de faire allégeance à l'extrême droite. D'ailleurs, la dérive résignatoïde, notamment face aux pratiques locales de ce parti et des communes qu'il gère aujourd'hui, me semble aussi une bien triste réalité (combien de reportages montrant la réalité des politiques communales des villes FN et leurs misères ?) .....
Alors oui la diabolisation ne marche pas, et nous devons sans doute travailler à reformuler un projet collectif pour demain. Mais aujourd'hui, personne n'est prêt, notamment la gauche qui n'est qu'au début d'un long processus de reconstitution de son projet (elle y va en ordre dispersé et avec 2 projets qui ont des contradictions fortes entre eux) ... Alors pour cette élection tout au moins, je ne vois aucune autre possibilité que de s'accrocher à un vieux réflexe républicain dont la mémoire historique fait partie ...