Friteuse a écrit : ↑Hier, 12:05
En fait, concernant le centre-ville de Sainté, j'ai surtout l'impression qu'on subit des politiques d'attractivité qui se jouent à bien plus grande échelle que la ville et possède deux "points d'équilibre":
1) La configuration de la plupart des grandes/moyennes villes françaises (je compte pas Paris qui est tellement grand que ça devient un cas à part) avec un centre-ville attractif, touristique, bardé de restaurants, de bars mais aussi de grandes enseignes. Ça s'accompagne d'une flambée des prix de l'immobilier et d'une distribution en couronne des populations selon leurs revenus/classe sociale par rapport au centre-ville, une évolution qui serait difficile à Sainté vu qu'on part du schéma quasi inverse.
2) La spirale descendante qu'on observe à Sainté et dans d'autres villes, en général plus petites, où le manque d'attractivité du centre-ville dans une ville où les gens ont déjà pas beaucoup de sous fait fermer pas mal de commerces qui ne peuvent pas maintenir un public. Si des gens se souviennent du Hangar 18 rue José Frappa c'était malheureusement un triste symbole de ça alors que la dame qui y gérait s'était battue corps et âme pour faire vivre un magasin de metal à Sainté.
Pour l'instant j'ai l'impression que la ville s'échine à attirer une population de cadres pour essayer de passer du 2) au 1), sauf que ça ne prend pas du tout parce qu'on a trop de retard sur toutes les autres villes pour espérer que ça marche. La fermeture des Halles, alors que tu pouvais en plus jouer sur le côté local des produits, en est un exemple typique. Faudrait déjà que les cadres travaillent sur place et c'est pas le cas, à mon avis les seuls rares qui pourraient faire ce choix le feraient surtout pour bosser hors de la zone d'attractivité de Sainté (chez les voisins pour ne pas les nommer) et ceux qui sont déjà là ont pas envie de quitter leur cadre tranquille plus loin du centre. Suivre une politique qui nous ancre officiellement comme une banlieue de Lyon au rabais très peu pour moi, d'autant que les prix du logement en centre-ville c'est peut-être pas terrible pour les investisseurs mais ça garantit au moins de ne pas faire complètement exploser le sans-abrisme et le mal-logement qui guettent déjà. Le jour où les prix monteront sans que les moyens de la majeure partie de la population stéphanoise suivent, ce sera vraiment la merde.
On ne pourra pas donner de solution miracle dans ce contexte pénible de mise en concurrence permanente des villes à l'échelle nationale, voire européenne. Il reste cependant une option qui me paraît plus réalisable (non pas que je l'apprécie dans son ensemble pour autant, mais ça me paraît pas voué à l'échec comme le fait d'imiter toutes les autres villes françaises avec du retard et des spécificités locales à 180°) : jouer sur l'attractivité artistique de la ville pour un public plus typé "bobo", de la même façon qu'à Berlin, Manchester, Leipzig, un peu Nantes... Ce sont certes toutes des villes plus grandes que Sainté, mais à l'échelle de la France je pense qu'il y a au moins de quoi ramener des gens qui ancreraient leurs activités dans l'économie locale plutôt que d'utiliser la ville comme dortoir. En ce sens, on a pu se moquer des platras de design à travers lesquels Sainté essaye de se donner une nouvelle image, mais ça me paraît beaucoup plus adapté comme stratégie si on veut "jouer le jeu" de créer une sorte de personnage de RPG à la ville, ce qui est la tendance (ridicule, mais qu'on aura bien du mal à inverser) en Europe.
Sachant qu'en suivant cette voie le problème de l'impossibilité de se loger adviendra aussi, Manchester et Berlin c'est quasiment aussi catastrophique que Francfort ou Londres sur ce point. Mais bon ça c'est une tendance générale dont on était à peu près épargnés jusqu'à présent. Quelle que soit la voie qu'on suive, je vois pas beaucoup d'espoir dans les politiques de développement des villes
Bien sûr cette analyse n'est qu'à grande échelle donc elle ignore beaucoup d'éléments locaux plus précis comme Steel, les galeries Dorian, tout ça, mais ça a déjà été débattu en longueur et il est difficile d'en ressortir un consensus.
Pour finir Blast a fait une vidéo sur le sujet récemment qui parle de Sainté, je la partagerai pas parce qu'outre les blagues de lyonnais à la con le propos n'est pas hyper intéressant, mais ils font quand même une observation qui mérite qu'on la retienne : les petits commerces de centre-ville que regrette la dame dans la vidéo, s'ils ont périclité, c'est pas seulement parce que la grande surface est plus pratique mais aussi parce qu'elle est plus fiable dans la qualité des produits parce que tout est standardisé. Les endroits où des commerces de centre-ville "à l'ancienne" survivent, c'est généralement des endroits très populaires où l'alternative de la grande surface est tellement mauvaise et les gens tellement dépourvus de moyens de transport que cet avantage se perd. Typiquement quand j'habitais à Saint-Denis c'était exactement ça, au début j'allais au Aldi et puis je suis passé au primeur de la rue commerçante parce que j'en avais marre d'avoir des fruits et légumes qui pourrissent en 24 heures.