Nouvelle remontée de ce topic avec un compte-rendu groundhopping, ça faisait longtemps. Pas la destination la plus exotique du siècle, mais un match complètement fou opposant un club cher à OP à un club cher à JJ. Et non, c'était pas une opposition dans un entraînement de l'ASSE.
RED STAR FC - LE MANS FC
Contexte
Habitant depuis quelques mois en plein cœur du 93, il fallait absolument que je me rende un moment ou l'autre à Bauer pour voir à quoi ressemble l'autre club français évoluant en vert et blanc. C'est chose faite depuis vendredi soir et la venue du Mans, un adversaire qui en jette au vu de ses nombreuses années en Ligue 1, le passage de Drogba, Grafite, De Melo, Sessègnon, Yohann Pelé... Même si depuis quelques années, les manceaux semblent malheureusement surtout jeter les espoirs de leurs fans à la poubelle. J'étais accompagné de mon pote allemand, le même que pour le match à Anvers, de passage sur Paris à ce moment-là.
Même si beaucoup de gens la connaissent déjà, un point rapide sur l'histoire du Red Star ne fait pas de mal. C'est un club très ancien fondé en 1897, fortement marqué à gauche ce qui va bien (même si c'est de manière accidentelle) avec son nom. Le stade Bauer tire son nom d'un médecin juif communiste du coin fusillé par les nazis pour avoir résisté ; Rino della Negra, ancien joueur du Red Star et ouvrier communiste italien dont la tribune principale porte le nom, connaîtra le même sort. Originellement situé à Paris, le club se déplace par nécessité à Saint-Ouen, dans la banlieue nord ouvrière de Paris, dans les années 20.
C'est jamais facile de dépayser en racontant des endroits où on passe tous les jours, mais je vais essayer: sans pouvoir généraliser à l'ensemble du 93, Saint-Denis et Saint-Ouen ont une atmosphère très très similaire à Sainté sur certains points. Y'a la même proximité entre des gens qui se connaissent pas, la même fierté partagée pour des villes qu'un œil plus conventionnel qualifierait de dégueulasses, le même patchwork architectural pour caser un maximum de monde dans un minimum d'espace (bien que l'influence du Nord se voit beaucoup plus dans les toitures d'ici)... À vrai dire, en ayant déjà habité à un paquet d'endroits en région parisienne, c'est le premier où je me sens vraiment à l'aise malgré certaines galères.
En à peine quelques arrêts de métro on arrive à Mairie de Saint-Ouen alors que la nuit tombe, plantant le décor d'une atmosphère exaltante. Après une dizaine de minutes de marche le long d'une rue étroite pleine de travaux, on arrive enfin en vue de Bauer où les supporters de l'étoile rouge s'amassent dans des pubs jusqu'à déborder sur la rue. Parmi les habits ne portant pas l'étoile rouge on y croise un mélange de casquettes Gucci et de miki-moustache assez représentatif de la transformation sociologique de Saint-Ouen, opérée à marche forcée pour fournir un cadre bien propret aux athlètes des JO et peu importe si les loyers explosent. Cela dit, peu importe le style vestimentaire, tout le monde semble concerné par le club et c'est rassurant. L'entrée au stade est rapide, pas trop chiante au niveau des contrôles, de nombreux stewards plutôt sympathiques sont dépêchés pour indiquer les accès.
Chose promise, chose dûe, j'ai enfin chopé un téléphone correct
Je suis assez surpris d'atterrir dans une tribune flambant neuve avec une sono assourdissante donnant plutôt l'impression d'être à un concert qu'à un match de foot, et pour cause : le stade, à l'image de la ville, est en pleine transformation. En face de nous se tiennent les vestiges de l'historique tribune Rino della Negra, démolie dans le cadre de la rénovation du stade là aussi entreprise pour les JO. L'iconique barre HLM planète Z, un autre emblème du stade, trouve désormais à ses pieds un clubhouse qui dénote sérieusement avec l'identité populaire du Red Star ainsi qu'un minuscule parcage visiteur aux allures de tribune de tennis où s'entassent une cinquantaine de manceaux venus soutenir leur équipe dans une situation délicate.
Les restes de la tribune Rino, vus depuis... la tribune Rino, mais en plus bankable
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L'avant-match offre à voir toute l'étendue des contradictions qui agitent ce club si particulier, désormais propriété de 777 Partners (qui possèdent aussi le Standard de Liège, le Hertha, le Genoa, Vasco da Gama et peut-être bientôt Everton) et bien parti pour évoluer en Ligue 2 la saison prochaine. Les enceintes couvrent le bruit des conversations, même si c'est pour cracher en continu un mélange de drill, trap US et même du 93 Empire pour faire honneur aux productions locales. Le siège au plastique vert foncé immaculé à ma droite se retrouve vite noyé sous les traces de chaussures des supporters sautant la minuscule barrière pour se retrouver dans le secteur des ultras. En tout cas, à observer les gens autour, Bauer reste clairement un lieu d'échange, de retrouvailles entre potes, pas -encore- surveillé en continu, bref un lieu qui conserve malgré tout l'ambiance pas prise de tête de la banlieue (encore une fois, pas celle de l'autre côté de l'A47) et ça fait plutôt plaisir à voir.
Les ultras et supporters fervents du Red Star ont donné de la voix toute la rencontre, ça démonte Anvers tous les jours
Quelques minutes avant le match, les tambours des aficionados de la tribune Rino se mettre en branle pour enflammer le stade, on se croirait n'importe où ailleurs qu'en National. Mon pote allemand est moins impressionné, ce qui se comprend pour quelqu'un habitué à trouver en troisième division des clubs comme Dresden, Munich 1860 ou Kaiserslautern. Le parcage n'est pas en reste avec une bâche franchement honnête des Fire Snake laissant transparaître la lumière de quelques torches.
C'était dur de se faire entendre dans ces conditions, mais les supps manceaux n'ont pas démérité
Les étendards officiels des deux équipes sont plantés sur la pelouse (celui du Mans dans le mauvais sens, pourrait-on y voir un sale présage ?) pendant une durée interminable. Après que les enceintes crachent une dernière fois un son de rap local assez sympa parlant du Red Star, les équipes sont annoncées sans que le public reprenne les noms (à la grande surprise de mon pote allemand) puis rentrent sur la pelouse sans hymne (à la grande surprise de mon pote allemand²). À noter que le Red Star joue dans un vert étonamment clair qui évoque plus Wolfsburg que Saint-Ouen, autre surprise.
Ça va, ils ont juste pris 5 minutes pour s'en rendre compte
Le match
Comme j'étais pas sûr de pouvoir compter sur un résumé vidéo pour me souvenir de tout et qu'il s'est passé beaucoup de choses la description du match sera linéaire, un peu selon le format de certaines acad de chez Horsjeu.
Un petit mot sur le contexte sportif et les effectifs: côté manceau, je suis agréablement surpris d'apprendre que figure parmi les titulaires Mathieu Coutadeur, qui évoluait pour le MUC72 à l'époque où je collectionnais les cartes Panini. À part Antoine Rabillard, perdu de vue depuis ses quelques entrées avec Marseille, aucun autre joueur ne m'évoque quelque chose. Côté étoile rouge, on trouve dans les bois Quentin Beunardeau, qui jouera contre son club formateur, parmi les remplaçants l'increvable Cheikh N'Doye (37 ans) et bien sûr Habib Beye pour chapeauter une équipe pointant à la première place avec 5 points d'avance sur le second Niort. Côté manceau, on flirte avec la zone de relégation avec une... onzième place, oui ça va être violent le National cette année.
1' Coup d'envoi de la rencontre, les deux équipes se testent, le spectacle le plus intéressant est pour l'instant dans le kop audonien qui fait même reprendre les chants à de nombreux gens dans la tribune assise, moi y compris.
10' C'est pas qu'on se fait chier mais elles viennent quand les occasions ? Ah ben voilà une belle talonnade d'un joueur du Red Star pour servir un partenaire à l'entrée de la surface, la frappe est captée par le gardien manceau.
11' Le Mans réplique immédiatement avec une reprise difficile captée par le goal. Derrière ça cafouille un peu, un tir très chaud plein d'opportunité est malgré tout arrêté par Beunardeau qui s'apprête à livrer un gros match.
17' Un Redstarmen adresse un joli piqué à un partenaire, mais le tir ne donne rien. Contre immédiat pour Le Mans avec un centre venu de la droite, le ballon est mal dégagé et revient sur Mathis Touho qui est aussi tout seul, Beunardeau se fait logiquement fumer (ok on va arrêter là avec les jeux de mots).
0-1
18' Habib Beye s'énerve sur le coup d'envoi et reçoit un jaune. Les supporters locaux pondèrent la décision... Non je déconne ils s'énervent aussi, même s'il faut remarquer que les insultes envers l'arbitre fusent beaucoup moins que dans la plupart des autres stades que j'ai connus.
23' Touho, le buteur, pousse un Redstarmen de manière rugueuse alors qu'il perd le ballon. Un de ses coéquipiers perd son sang-froid et le pousse à son tour, lui faisant manger le gazon mais personne ne mangera de biscotte. À côté ça lance des "OH MATHIS GROS CRÂNE CHAUVE !" qui restent bon enfant. Par contre ça commence à sentir le match qui pue pour l'Étoile Rouge.
27' Le Red Star se met à jouer (à moins que ce soit le cas depuis le début du match, j'en sais rien je suis pas Pilou) dans un 3-2-5 très offensif qui ne résout pas pour l'instant leur cruel manque de réalisme, même s'ils dominent. Côté manceau on a un 4-3-3 classique.
29' Sur un tir raté, un Redstarmen tente un lob opportuniste qui passe juste au-dessous de la barre. Le public commence à pousser et appelle pour beaucoup les joueurs par leur prénom, on sent qu'il y a une forte proximité.
30' Sauvetage très propre du défenseur central du Red Star. Sur le contre un manceau se trompe de sport et effectué un joli plaquage, carton jaune.
31' Le public audonien pousse de plus en plus, encore une bonne occasion de l'ailier gauche du Red Star qui fait le crochet de trop. Sa frappe est contrée mais ça revient dans les pieds d'un attaquant qui lâche une frappe à ras de terre trop croisée.
32' Le Red Star s'expose beaucoup défensivement et manque de se faire punir sur un contre, Beunardeau effectue une belle parade à bout portant. Corner.
35' Un manceau se retrouve une nouvelle fois seul à bout portant, le gardien local capte bien.
37' Le Red Star se fait ENCORE surprendre sur son couloir gauche, ça devient désespérant. Je comprends mieux pourquoi ils jouent en vert. Heureusement pour eux, le tir manceau ne donne rien.
38' Grosse occase pour le Red Star sur corner, le gardien manceau trébuche mais les défenseurs empêchent le but.
39' L'ailier gauche du Red Star fait pour une fois un crochet utile et réussi, sert le 9 à la limite du hors-jeu mais celui-ci tire juste à côté.
40' Les locaux acculent les manceaux, le 10 a un boulevard en attaque mais attend trop pour tirer, c'est contré. La frustration commence à monter.
41' Sur un ballon qui rebondit, le défenseur central du Red Star semble avoir du mal à détacher sa remorque. Le manceau au duel (qui n'en est plus un) file droit au but mais bute une nouvelle fois sur un Beunardeau impérial.
45' Deux minutes de temps additionnel, le Red Star aura poussé mais s'apprête à rentrer aux vestiaires avec un pion de retard, la faute à un gros manque de finition.
45'+1 BUT DU RED STAR ! Bon ballon de contre, le 9 se présente seul sur un côté puis sert dans la surface Ivann Bottella qui se rate complètement sur son ciseau au sol mais arrive à pousser le ballon au fond de manière peu académique sur sa deuxième tentative. L'un des buts les plus bizarres que j'ai vus mais ça marche.
1-1
La mi-temps permet de faire un tour aux chiottes et d'observer rapidement quelques panneaux qui racontent l'histoire de Bauer, puis on repart.
Le mélange entre enceinte flambant neuve et architecture volontairement datée type vieille usine est assez bizarre dans cette nouvelle tribune, même sans avoir connu l'ancienne. Enfin, ça reste toujours mieux qu'un truc ultramoderne tout poli et sans saveur
48' Un défenseur du Red Star est blessé à la suite d'un contact, rien de trop grave apparemment.
52' Beaucoup de largesse défensive du côté audonien encore une fois, mais Le Mans tire au-dessus.
54' J'ai l'impression d'avoir des hallus en regardant la vitre du secteur VIP, mais non c'est juste les reflets des joueurs qui vibrent un peu sur le corner côté visiteurs. Bizarre.
55' Hors-jeu sifflé contre un Redstarmen, quelques protestations car le ballon a été touché par un manceau.
57' Changements pour le Red Star, Durand sort pour Benali et Anani pour Dembi, un chauve élégant qui va mettre Le Mans en grosse difficulté.
58' BUT DU RED STAR ! Après une relance défensive propre (et pas dangereuse, pour une fois), le ballon est envoyé sur la droite de la surface mancelle. Le tir est mal repoussé par le gardien et Kemo Cissé, bien placé, marque en deux temps. Toujours un peu cafouillis mais on sent que la confiance est là.
2-1
61' Encore une bonne accélération de l'ailier gauche du Red Star mais il fait encore une fois trop de crochets, son centre est contré et le corner ne donne rien.
64' Le Mans effectue ses premiers changements, Mathis Touho sort en se faisant tout petit devant le public qui le vilipende gentiment.
66' Encore une grosse occasion pour le Red Star, le 9 est trouvé dans la surface mais son tir trop timide est capté par le gardien. Gaffe à ne pas regretter.
68' Centre dangereux pour Le Mans, mais heureusement un défenseur s'interpose bien. Oui vu l'ambiance à côté j'ai clairement pris parti pour le Red Star, vous m'en excuserez.
70' BUUUUUUT DU RED STAR j'ai pas tout compris mais Hassen Benali creuse l'écart à bout portant.
3-1
71' Changements pour le Red Star avec la sortie du premier buteur Bottella et la rentrée de l'inoxydable Cheikh N'Doye qui prend le brassard de capitaine, sûrement pour cadenasser un peu le jeu.
72' BUUUUUUT DU RED STAAAAR ! Joli une-deux de Dembi sur le côté droit, le chauve aux dribbles chaloupés sert Kemo Cissé pour un but brandaesque tout en simplicité. Le Mans est définitivement enterré. Côté supporters ça fait 10 minutes que ça chante "En tribunes ce soir c'est la folie" et c'est clairement pas un mensonge.
4-1
73' Ah non en fait Cheikh N'Doye joue en pointe maintenant. D'accord. Et il met la misère aux défenseurs manceaux à 37 ans. Beauseigne.
74' Le Red Star s'enorgueuillit et commence (ou pas) à faire n'importe quoi défensivement. Un mauvais dégagement du central gauche aurait pu finir en CSC sans un Beunardeau vigilant, qui doit ensuite sortie de sa surface pour tacler le ballon loin devant sur une étrange passe en retrait pour personne. Clairement le héros du match.
75' Les joueurs du Mans n'en a plus rien à foutre du football, alors ils s'entraînent pour un concours de roulades. La faute est indiscutable mais 11 c'est quand même un beau record à battre.
76' J'ai rien dit, grosse occase pour les manceaux mais le tir à bout portant est superbement taclé par un défenseur.
80' Un joueur du Red Star reste à terre près de la surface mancelle alors que ses coéquipiers lancent une attaque, le ballon lui rebondit dessus, hors-jeu. Logique.
81' Encore une belle occase pour le Red Star qui veut vraiment aller planter le cinquième, le tir est à peine trop croisé. Je repense à Corentin, ce pote de primaire qui supportait Le Mans à l'époque où ils étaient meilleurs que Sainté. J'espère qu'il va bien.
83' Le goal du Mans sort pour dégager un ballon brûlant mais un défenseur se dit que c'est une meilleure idée de le faire (mal) à sa place, laissant le but complètement vide. Heureusement pour eux, le Red Star comment une faute.
86' Bon j'en ai marre d'écrire toutes les grosses occases du Red Star, on a compris Le Mans n'existe plus et vous voulez soigner le goal average.
87' Cheikh N'Doye tente une petite Khazri aux 40m, c'était cadré mais le gardien parvient à claquer en corner.
88' Sur un dégagement à ras de terre de leur gardien, les joueurs manceaux oublient le ballon qui finit en touche. J'ai vraiment de la peine pour les Fire Snake qui se sont déplacés pour voir cette merde.
90' Seulement 2 minutes de temps additionnel, l'arbitre a dit "Stop la hagra".
90'+1 Cheikh N'Doye est tout seul, le cinquième but est plus près que jamais, mais il est signalé hors-jeu.
90'+1.5 Le Mans tente de sauver l'honneur avec un déboulé dans la surface, mais l'attaquant pousse le ballon en sortie de but. Au moins ils auront eu le ballon dans la surface.
90'+2 FIN DU MATCH sur un beau "Red Star FC, lalalala lalalala"
L'après-match
On reste un certain temps pour acclamer les joueurs et chanter une dernière fois "Red Star Fans". Ceux-ci viennent accompagnés du staff et pour certains de leurs enfants en bas âge dont un qui tape dans ses mains avec les supporters, c'est mignon. On sent encore une fois la grosse proximité entre le public et les joueurs, ça fait plaisir à voir. Même si le déroulement du match a bien aidé, l'ambiance était clairement au top avec des chants variés et plutôt bien repris par la tribune. Une pensée pour les pauvres supporters manceaux qui mériteraient de voir des joueurs un peu plus concernés, ou juste un peu moins nuls, défendre leurs couleurs.
Belle communion entre joueurs et supporters
Une fois sortis du stade, pas grand-chose à dire vu le peu de temps de trajet. L'ambiance est assez calme, les supporters rentrant en direction du métro sont finalement assez peu nombreux. On croise un bâtiment industriel plutôt cool qui me rappelle des souvenirs mêlant Blake et Mortimer et Sainté. Une grosse demi-heure plus tard on est à mon appart, heureux de constater que l'âme de Bauer et du Red Star semble plus forte que quelques coups de peinture pour rendre le club trendy.
Un témoin de l'histoire industrielle de Saint-Ouen sur le chemin vers le métro
Pour les gens que le côté peu dépaysant de ce CR aura déçu, ce qui se comprend très bien, attendez deux semaines et si j'ai la motiv je vous fournirai quelque chose de beaucoup plus inattendu
)
ça c est du CR . 
merci 
) jusque la tribune populaire faite de terre et de broc, billèterie dans une espèce de cabane ou mon père me demandait de me baisser pour bénéficer du tarif -12 ans . Que de souvenirs. 
