Le début du match contre Toulouse a été particulièrement électrique. La suite, en restant virile, a été beaucoup plus claire, notamment grâce à une gestion très sereine de Philippe Malige. Manque de bol pour lui - et tant mieux pour les Verts - il manque un carton rouge dès la cinquième minute… L'occasion d'évoquer un point très important pour l'arbitre : l'activation.
Hier soir, lors du début du match sur RMC, les commentateurs soulignaient qu'Alain Blachon avait pris tous les joueurs lors de l'échauffement pour les remonter à bloc. Les techniciens stéphanois ne pouvaient pas manquer que l'équipe encaisse beaucoup de buts dès l'entame des matchs. Il s'agit d'un élément commun à la préparation des joueurs et des arbitres : chercher à être le plus performant possible au coup d'envoi et ne pas risquer de mettre plusieurs minutes à rentrer dans le rythme. Nom de code lors des stages du corps arbitral : l'activation.
Par ce terme, on entend un ensemble de détails visant à ne pas risquer de coup dur, faute d'être prêt au bon moment : être actif plutôt qu'avoir à réagir. Cela comprend bien sûr la volonté de saisir dès les premiers contacts l'intensité du match, d'adapter de suite sa course au placement de tous les joueurs, particulièrement les milieux défensifs qui se retrouvent souvent sur la trajectoire de l'arbitre… Dans ce cadre s'intègre aussi des actions à répéter à chaque match, les "gammes" d'un arbitre en quelque sorte : compter les joueurs avant le coup d'envoi, demander aux gardiens s'ils sont prêts, noter l'équipe qui a engagé en première mi-temps, intervenir en prévention sur les premiers corners ou coups-francs à proximité de la surface… L'idée étant d'appliquer une routine pour se sentir à l'aise et appliquer ce que l'on sait faire tout en étant prêt à improviser dès la première minute si besoin. Ainsi, on a pu sentir dès avant le coup d'envoi que Philippe Malige n'était pas aussi prêt qu'il aurait dû l'être : un Toulousain reste dans le rond central pour l'exécution du coup d'envoi par les Stéphanois.
Bien entendu, il s'agit d'un détail, mais c'est un signe ! Confirmation à la cinquième minute avec un corner pour les Verts aux abords de la surface toulousaine. Évidemment, plusieurs duels sont à prévoir dans ce premier coup de pied arrêté potentiellement dangereux du match. La logique et la "routine" auraient voulu que l'arbitre diffère son exécution afin de rappeler à l'ordre les joueurs, particulièrement Mignot et Ninkov qui semblent partis pour une danse plus collée-serrée que la Lambada. Or, Malige n'intervient pas en prévention. Erreur qui n'est pas sans conséquence : les deux joueurs, pendant la course d'élan du botteur du corner, passent hors de son champ de vision et Mignot, pour se débarrasser de son adversaire, lui décoche un coup de poing au visage, certes léger, mais très largement suffisant pour valoir un carton rouge. Tant mieux pour les Verts, l'arbitre ne l'a pas vu.
Cependant, cette action où il est conscient d'avoir raté un truc est l'aiguillon qui va le mettre dans le match. Et la suite des événements va lui permettre en plus de mettre en place de façon parfaite la gradation des sanctions comme elle était évoquée dans un précédent papier (Voir le début de Un match se construit en cartons). Quelques secondes plus tard, un premier tacle de Congré, simplement fautif, lui permet de rappeler tranquillement au capitaine toulousain de faire attention. L'action suivante est un "chef d'oeuvre" arbitral. Les Verts contrent, une faute assez appuyée est commise par Ninkov, décidément remonté, mais l'avantage profite aux Stéphanois. Le ballon finit par sortir complètement à l'opposé, après un délai assez long. Philippe Malige va alors voir le Serbe : du point de vue de la gestion de son match, cette intervention est parfaite, tant visuellement auprès des joueurs, du public et des téléspectateurs que psychologiquement, avec le fautif. Il n'en rajoute pas dans l'agressivité puisqu'il est probablement conscient qu'il s'est passé quelque chose plus tôt avec le latéral droit du TFC. Il cherche donc avant tout à calmer le joueur. Et, dans le même temps, il fait comprendre à tout le monde, en quelques gestes, qu'on a atteint la limite au-delà de laquelle les cartons vont sortir.
L'ancien joueur de l'Étoile Rouge de Belgrade a donc eu deux "chances" d'évacuer sa frustration : immédiatement après l'action et sur cette intervention. Par deux fois, il a pu communiquer avec l'arbitre qui, à défaut de pouvoir le satisfaire, a calmement échangé avec lui. Mais Ninkov décide de ne pas en tenir compte en assénant, cinq minutes plus tard un coup de coude (non violent) à Mignot. Le temps est donc venu de la sanction, sur un duel aérien que l'arbitre aura forcément d'autant plus dans le collimateur qu'il a d'abord lieu dans la surface de réparation et concerne les deux protagonistes du premier point chaud du match dix minutes auparavant. Le côté volontaire de l'intervention le coude en avant ne peut échapper. Carton jaune, l'arbitre est tout à fait dans son match. Et il n'en sortira plus… Mais il est intéressant de noter également cette impression que Ninkov avait plus ou moins "besoin" de cette sanction pour évacuer sa rage. Il a commis sa petite vengeance, ne conteste pas l'avertissement et peut enfin passer à autre chose. Reste que tout ça n'aurait probablement pas eu lieu avec cinq secondes de prévention dix minutes avant.
Pitch do Brasil
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