... le match du 15 janvier dernier entre Manchester United, le prochain adversaire européen de l'ASSE, et Liverpool. Quel est le style de jeu, quelles sont les principales caractéristiques de l'équipe entraînée par José Mourinho ?


Depuis novembre dernier, Manchester United a commencé à jouer de plus en plus dans un 4-3-3 avec une pointe basse, le vétéran Michael Carrick (35 ans), abandonnant ainsi le 4-2-3-1 avec Rooney en soutien d'Ibrahimovic (des trentenaires aussi). Ça a été aussi le cas lors du match contre Liverpool...
 

... mais seulement lors de la première période. Après la pause, Rooney a remplacé Carrick et Manchester United, mené depuis la 27ème suite à un penalty concédé par le frère de Florentin, s'est jeté en attaque. L'égalisation d'Ibrahimovic à 6 minutes de la fin a été la conclusion d'une seconde période assez chaotique dans le jeu (le milieu offensif Mkhitaryan a fini défenseur gauche !), où la seule tactique semble avoir été "tous vers l'attaque".

Par la suite, on regarde de plus près deux aspects du jeu de Manchester, mais seulement lors de la première période - plus posée tactiquement que la deuxième et assez riche en renseignements.

 

Les milieux axiaux

 
La grosse force de Manchester United lors de la période passée en 4-3-3 a été son trio des milieux axiaux Carrick - Herrera - Pogba. Le bloc équipe a été très difficile à passer pour Liverpool, mais d'une manière assez différente de ce qu'on voit d'habitude. On ne peut pas vraiment parler de deux lignes de 4 avec une sentinelle entre elles, mais plutôt d'un triangle dans l'axe, un triangle très élastique et dynamique, mais extrêmement efficace pour empêcher les lignes de passe.
 
Il est presque impossible de décrire cette dynamique au milieu avec des captures d'écran, mais voici quelques exemples pris au hasard lors de la première période :
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Les trois ne sont jamais loin l'un de l'autre et font à la fois du pressing haut ou bas, du marquage individuel ou en zone, en s'adaptant toujours. Ce jeu a été si efficace que Liverpool n'a rien pu construire au delà de la ligne médiane, n'ayant comme option que de balancer des longs ballons au dessus de ce milieu. A titre d'exemple, les passes tentées par Liverpool dans les 30m adverses lors du premier acte, en sachant que la possession du ballon a été équilibrée - 17 seulement :
 

 


Les milieux excentrés

 
Dans les exemples précédents, on a aussi marqué le positionnement des milieux excentrés de Manchester United, Mkhitaryan à droite et Martial à gauche. Si le deuxième a tout le temps suivi son latéral, restant ainsi bien cantonné sur son côté, le premier a plus serré dans l'axe à côté du triangle, agissant souvent comme un quatrième axial.

Ce positionnement défensif, sans ballon, reflète bien la manière d'attaquer aussi. Les attaques passent plutôt sur les côtés, souvent après une récupération de balle. Par exemple, à la 7ème, Valencia (le latéral droit perd le ballon offensivement et se replie vite pendant que Mkhitaryan presse les défenseurs...
 
 
... qui balancent un ballon au delà du milieu, où Valencia le récupère. Le ballon est tout de suite envoyé sur le côté gauche, à Martial :


Et le jeune Français est tellement craint, qu'il aspire un grand nombre de défenseurs :


Parfois ça passe (en un contre un à chaque fois), parfois non, mais souvent l'attaque de Manchester United consiste à lui donner le ballon et le laisser se débrouiller - son latéral ne monte l'aider que rarement.
 

C'est exactement le contraire du côté droit, où offensivement le joueur de couloir est le latéral Valencia, et non l'excentré Mkhitaryan :
 
 
 
 
 

Conclusions

 
Une première période d'un match à haute intensité - deux aspects identifiés. Offensivement, on est sur un terrain connu, avec un ailier qui mange la craie (mais qui aspire beaucoup d'adversaires) et un autre qui pique dans l'axe pour libérer le couloir pour son latéral (très rapide et technique). Défensivement, par contre, c'est assez inquiétant pour les Verts, compte tenu du jeu proposé cette saison. Si on regarde les étapes pour marquer un but sur une action construite, qui parte de derrière :

  1. La construction, le ballon qui circule de la défense vers le milieu, les appels sans ballon, la prise des espaces entre les lignes, la création des décalages, ce que Romain Revelli appelle une animation offensive
  2. Transformer les décalages en occasions, bonifier les bons reçus en bonne position
  3. Mettre les occasions au fond
 
Le nombre des buts marqués par les Verts lors de la phase aller du championnat est quasi-identique avec les "expected goals", autrement dit, on marque normalement lors des occasions créées. Mais si le troisième point est correct, le deuxième est désastreux pour l'ASSE, dans des nombreuses analyses les derniers mois on a pu apercevoir des belles constructions offensives, des décalages trouvés et des derniers gestes ratés qui ne créent ainsi pas d'occasions derrière. Mais c'est surtout le premier aspect qui inquiète après avoir vu la qualité défensive du bloc de Manchester United. Notre animation offensive dépend beaucoup de l'état de forme de Selnaes, mais aussi de l'envie de ses coéquipiers à lui proposer des solutions, à faire des appels entre les lignes, par exemple. On peut donc assister à des belles constructions lors d'un match et à du néant lors d'un autre. Il faudra donc un gros milieu de terrain, de la forme et de l'envie, pour pouvoir passer le bloc défensif proposé par Manchester United et même avec tous ces ingrédients, ça ne sera pas du tout évident.
 
 
 
 
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