Dans cette fin de championnat, les Verts rencontrent souvent des "petites" équipes qui leur laissent le ballon et qui préfèrent défendre avec un bloc compact, en espérant les surprendre sur des contres. Pour continuer à enchaîner les victoires, nos joueurs doivent donc faire sauter le verrou des défenses adverses. Regardons de plus près comment ils s'y sont mis pour leur dernier match, contre Troyes.
Attaquer contre un 4-1-4-1 compact
Pour se rassurer, Troyes a proposé un 4-1-4-1 assez bas et compact. Autrement dit, il n'y avait vraiment pas d'espace entre les lignes quand la défense troyenne était en place.
Dans cette situation, si on ne peut pas jouer facilement dans le bloc adverse, la solution la plus simple est de ne pas le faire, de balancer des ballons longs par le dessus. Les Verts ont heureusement choisi de ne pas tomber dans la facilité (seulement 9% des passes ont été longues - la moitié par rapport au match précédent à Ajaccio). Ils ont préféré une approche plus réfléchie pour essayer de mettre la défense troyenne à la faute.
Créer un surnombre sur les côtés
La solution classique pour contourner un bloc compact est de passer par les côtés. Comme les deux équipes ont deux joueurs par couloir chacune, l'idée est de créer un surnombre sur un côté. Soit ça passe par là, soit ça aspire des défenseurs et ça libère donc de la place sur le côté opposé.
Le milieu central et l'avant-centre se projettent ainsi vers un côté et avec les deux joueurs présents (le défenseur latéral et l'ailier), la densité des joueurs est assez importante. On arrive donc à un jeu de passes courtes, dans un petit périmètre, ce qui n'est pas donné à tout le monde. Voici une capture d'écran des Verts qui essaient ce type d'attaque :
Tout le monde est sur le côté droit, KTC et Tannane (normal), mais aussi les deux milieux centraux, Lemoine et Cohade, ainsi que l'avant-centre Roux. Les Troyens sont aussi nombreux, mais le une-deux entre Lemoine et Tannane élimine leur milieu central (MC). Si ce jeu court réussit, Lemoine a deux possibilités de passes dangereuses: pour Cohade entre les défenseurs centraux ou pour Roux dans le couloir désert... mais le une-deux ne réussit pas.
Le déchet technique étant trop important et ce type de jeu clairement pas le point fort de nos joueurs, cette approche n'a pas été trop souvent utilisée pendant le match contre Troyes.
Le déchet technique étant trop important et ce type de jeu clairement pas le point fort de nos joueurs, cette approche n'a pas été trop souvent utilisée pendant le match contre Troyes.
Créer des espaces vides au milieu
S'il n'y a pas la place entre les lignes, il faut la créer - et tout se résume à des courses, des appels sans cesse de nos joueurs. Même dans une défense en zone, les adversaires sont obligés de se déplacer aussi, soit pour éviter un surnombre à un endroit, soit pour couper les angles de passe. Et si on insiste, ces déplacements dans le bloc finiront pas créer des brèches.
S'il existe plein de variations à cette tactique, analysons-en une qui a été souvent utilisée par les Verts contre Troyes. Comme les deux milieux centraux (Cohade et Lemoine dans ce cas) ne peuvent pas être facilement trouvés dans le bloc troyen, ils bougent. L'un (souvent Cohade) monte très haut, au niveau des attaquants, pendant que l'autre descend au niveau de la sentinelle :
Celui qui monte doit être pris en charge par un défenseur - ce qui libérerait un coéquipier - ou par la sentinelle adverse qui quitterait ainsi sa zone. Celui qui descend aspire un peu un milieu adverse, élargissant encore plus l'espace laissé libre par la sentinelle adverse. En plus, il offre maintenant une deuxième rampe de lancement, même si l'équipe semble être coupée en deux :
Le but est de créer de l'espace au milieu. Dans cet espace, un des attaquants (avant-centre, ailier) peut décrocher et recevoir le ballon. Dans le schéma ci-dessus, c'est l'ailier droit qui décroche, suivi par son adversaire direct, ce qui libère le couloir pour un appel en profondeur du latéral. D'autres suites à une telle action sont possibles, évidemment, le but étant simple: on passe le premier rideau défensif et on met un de nos joueurs dans une position favorable pour déclencher une action dangereuse.
Pourquoi ça n'a pas marché ?
Si on regarde le match contre Troyes de nouveau, en se focalisant sur les courses des joueurs et pas sur le ballon, on peut s’apercevoir que les Verts ont souvent utilisé ce type d'attaque. Les appels ont été faits et souvent la première passe (vers le joueur ainsi démarqué) a été précise. D'ailleurs, les Verts finissent ce match avec 81% des passes réussies (un de leurs meilleurs matchs de ce point de vue...). Alors pourquoi cette sensation de déchet technique et de manque de danger provoqué ? Tout simplement parce que créer de l'espace entre les lignes et trouver un coéquipier n'est que la première partie de l'attaque. Il faut enchaîner avec un bon contrôle, de la vitesse et de nouveau des appels et passes précises pour casser le dernier rideau et se créer une opportunité. Et c'est là où les actions des Verts se sont arrêtées le plus souvent contre Troyes.
Si on regarde une attaque placée à la 33e minute, on voit Lemoine qui décroche, aspirant avec lui un milieu central, créant ainsi l'espace pour Tannane - la sentinelle étant prise avec Cohade:
Le ballon tarde à arriver à Tannane et, quand il finit par le recevoir, le temps qu'il se tourne, le couloir (qui avait été bien pris par KTC) est de nouveau bloqué par un adversaire...
Dans un autre exemple à la 28e minute, on voit bien Cohade sur la même ligne que Roux - il occupe ainsi le défenseur droit adverse, laissant beaucoup d'espace à BAE et KMP :
Le jeu est sur la gauche de notre attaque, évidemment, mais la passe de Perrin n'est pas assez précise et elle est interceptée...
Voilà quelques exemples types d'une bonne mise en situation par nos joueurs, malheureusement pas bien exploitée jusqu'au bout suite à des erreurs techniques.
C'est grave, docteur?
Non, ce n'est pas grave. On a une équipe qui sait jouer ces matchs, sait comment s'y prendre, comment essayer de se créer des occasions sans se mettre trop en danger. Il suffit de travailler un peu plus l'avant-dernier geste, la dernière passe, et ça débloquera pas mal de situations. Mais c'est Galtier qui résume le mieux la situation, en conférence de presse après le match: "Je trouve que mes joueurs ont fait beaucoup de courses vers l’avant, malheureusement avec des erreurs techniques. Il faudra mettre toujours autant d’intensité, mais y ajouter plus de justesse". Ce n'est pas le manque d'implication des joueurs qui a fait défaut, c'est leur justesse technique dans certaines situations clés. Et ça se gomme facilement, la confiance emmagasinée après les dernières victoires aidera aussi...