Le voilà. Là devant nous, vertigineux.
Ce moment si redouté.
L’heure fatidique et flippante.
Galette nous quitte. Et c’est un déchirement.
Résumer Galette serait trop fastidieux. Trop douloureux aussi si on en croit, et c’est mon cas, tonton Serge (Tu t’souviens des jours heureux et tu pleures, tu suffoques, tu gémis à présent qu’a sonné l’heure...). Décrire par le menu tout ce qu’il nous a apporté prendrait des pages. Son œuvre est immense, et l’expérience qu’il a fait vivre au club semble anachronique.
Conjuguer performance et stabilité à un tel niveau est en effet d’un autre temps. Depuis plusieurs années, Galtier est comparé à Wenger ou Ferguson. Par sa longévité exceptionnelle bien entendu. Par l’empreinte laissée au club. Par la constance dans la performance qu’il a su atteindre, par le nouveau statut qu’il a su conférer à son club.
Pour tout cela nous lui devons une statue à la hauteur de la gratitude qu’on lui voue. Gratitude, le mot est trop froid, trop formel, trop officiel. Trop dépourvu d’émotion. Peut-être faudrait-il parler d’amour. Celui que nous, supporters, portons à ce club, à nous en rendre malades les soirs de défaites comme les veilles de derbies, à nous en rendre euphoriques et insomniaques les nuits de triomphe. Galette a su - depuis ce soir glacial où Tavla découpa un Marseillais pour laisser l’équipe à 10 courageusement tenir le 0-0 dans le Chaudron – être un formidable vecteur de cet amour au point que je suis, sans honte, de ceux qui aujourd’hui aiment l’homme, sans l’avoir jamais rencontré, tout autant sinon plus que l’entraineur que nous connaissons par cœur au point de deviner avant même qu’il les conçoive les changements qu’il fera.
Si l’ASSE était un arbre, Galette en serait ce tronc solide, massif, qui impose son autorité. C’est le tronc qui fait la majestuosité de l’arbre. De ce tronc sont parties de si belles branches : Aubame, Papy, Perrin, Ruff, Cohade, Mouss et tous les autres qui ont fait de cette presque décennie un plaisir total. Et d’abord et avant tout une FIERTE.
Le maître-mot, celui qui dit tout de la trace qu’il laissera, éternelle, dans le club comme dans nos mémoires. L’amour d’un supporter pour son club se nourrit de cela : la fierté. Et cette fierté, Galette l’a toujours sublimée par son exigence exceptionnelle.
Son exigence conjuguée à son intelligence, pour saisir les ressorts de l’âme verte ont permis à Galette d’écrire cette décennie verte en Majuscule. Il nous a fait arpenter, le torse bombé, l’Europe entière. Il a su marcher sur l’ennemi héréditaire, refaire défiler, coupe en mains, une équipe verte dans nos rues, retrouver la quintessence de l’âme verte avec un groupe de potes à l’état d’esprit exemplaire, inscrire la performance dans la permanence.
Il a tout ramené, tout élevé, Galette. Tout. Les résultats, l’intelligence du discours, l’état d’esprit guerrier, la fierté. Tout pour nous plaire, au point que dans une envolée lyrique empruntant à Céline évoquant La Fontaine, il serait bien tentant d’affirmer que « le plus grand c’est Galtier parce que c’est fin, c’est ça et c’est tout. C’est final ».
C’est final, c’est trop ? Non. Bordel, bientôt 35 ans de supportage de ce club depuis ce premier traumatisme ce soir maudit où Rocheteau, se trompant de cage et de maillot, nous crucifia au Parc, et il faudrait qu’on mégote à l’heure de faire péter le dithyrambe ?
Mais dites-moi, qui, depuis 35 ans, en matière d’extases collectives a plus et mieux délivré que Galette ?
Presque une décennie de Galtier, c’est un miracle dans ce foot tristement dévoyé. C’est une place de choix dans nos cœurs. C’est une longévité comme une exception culturelle verte qui, elle aussi, participait de notre fierté à supporter ce club à part.
C’est mon fils, parmi des milliers d’ados, n’ayant connu que Galette et n’imaginant pas qu’un jour un autre lui succède : « Papa, Galette c’est Sainté, Sainté c’est Galette non ? » Oui c’était un peu ça l’idée.
Il faut autant pour lui que pour nous espérer que les faits donnent tort à mon fils, que chacun sache se ré-inventer dans la performance.
J’ai des doutes. Est-ce que vous en avez ?