Entraîneur des U17 nationaux du Paris FC, Clément Lucas (en haut à droite sur la photo) nous donne son avis sur Yvan Neyou (à gauche du gardien), qu’il a entraîné deux ans au Centre de Formation de Football de Paris.


J'ai eu Yvan en benjamin et en U13 avant qu’il rejoigne le centre de formation de l’AJA. C’est vraiment un très bon joueur. Je le faisais jouer à un poste plus offensif que celui qu’il occupe maintenant. C’était du foot à neuf, je le faisais jouer attaquant ou excentré. Il était talentueux, bon dans le dribble, il avait les deux pieds, il était adroit… Bref, il avait une palette offensive assez large. Et comme sur un petit terrain on n’a pas énormément besoin de puissance et de vitesse, Yvan n’était pas embêté dans ces domaines-là.

Yvan était un joueur offensif complet, très coordonné, véloce, fluide, il avait déjà cette remarquable conduite de balle, ça allait très vite… Il était très, très fin, zéro muscle, donc parfois il se retrouvait en déficit pour résister aux charges ou pour conserver le ballon. Il était vraiment sec et extrêmement fin. Mais il avait des qualités techniques bien au-dessus de la moyenne. C’était par exemple l’un des meilleurs pour jongler. Je pense que c’est pour ça qu’il est passé par Clairefontaine, Yvan avait une grosse panoplie.

Au-delà de ses qualités de très jeune footballeur, je garde le souvenir d’un garçon qui avait le sourire, souvent enthousiaste. Yvan était demandeur et quand on lui proposait des choses, il était toujours partant. Au-delà de son talent, je pense que son entrain a favorisé sa progression, son évolution. Il n’était jamais réfractaire, jamais blasé des contenus qu’on lui proposait. En dehors du terrain, il lui arrivait parfois de chahuter. Une fois j’ai dû l’emmener à l’hôpital de Villeneuve Saint-Georges car il s’était chamaillé avec un autre garçon et il était tombé sur la tête. Une autre fois il s’est cassé une dent en tombant. Il était un peu casse-cou mais ce n’était jamais méchant. Que ce soit sur le terrain ou en dehors, on avait l’impression qu’il était un peu hyperactif.

Il a eu un parcours un peu sinueux et chaotique pour arriver là où il en est aujourd’hui. Je l’ai suivi, je suis encore en contact avec lui. Je ne suis pas sûr qu’il ait été bien conseillé à un moment dans sa jeune carrière. Pour en avoir discuté avec lui, le fait qu’il ait signé très tôt et sur une longue durée à Auxerre, ça l’a peut-être conduit à s’endormir un peu. Il a un petit peu arrêté d’avoir faim à ce moment-là. Il était dans un certain confort, il a un peu stagné à Auxerre, il a perdu un peu de temps. Ensuite il est parti à Laval, puis à Braga où il jouait surtout avec la réserve.

Comme je le lui ai dit après la finale de Coupe de France, je ne m’attendais pas à le voir à ce niveau contre Paris. J’ai été agréablement surpris. Je l’avais vu un match ou deux quand il jouait en National au Stade Lavallois, c’était pas mal mais il n’était pas au-dessus. Mais au Stade de France il s’est mis en évidence. Je l’ai trouvé très entreprenant, très culotté. Rentrer dans un match comme ça, dans une équipe réduite à dix, ce n’est pas si évident. Je l’ai trouvé épatant. Il a pris beaucoup d’initiatives, il a tenté beaucoup de choses. Ça m’a rappelé les années où il était avec nous au CFFP. Yvan n’avait peur de rien. Il avait confiance en lui et le montrait sur le terrain.

Je ne sais pas à quel poste précis il va être utilisé : est-ce que ce sera relayeur, est-ce que ce sera un peu plus haut ? Maintenant il va avoir beaucoup d’activité. Est-ce qu’il ne va pas compenser son petit manque de puissance athlétique par cette activité ? C’est peut-être sur ça qu’il doit jouer, en étant vraiment chasseur, en ayant beaucoup de volume. Je lui ai dit que je l’avais trouvé très bon en finale quand il avait eu le ballon, mais qu’il avait parfois été moins à son aise sur les phases de récupération, qu’il avait dans ces moments-là manqué un peu d’agressivité ou de changements de rythme. Il m’a dit qu’il était d’accord avec ça.

J’ai pris plaisir à échanger avec lui après le match, on se connaît bien et on s’apprécie donc on peut se dire les choses franchement. Je suis content qu’il ait réussi ses débuts sous le maillot vert et qu’il ait pu montrer ses qualités. Maintenant, il en a évidemment conscience, il ne faut pas que ça soit un coup d’éclat sans lendemain et qu’il n’y ait plus rien derrière, car ça voudrait dire qu’il n’est pas encore prêt. Yvan sait qu’il va devoir confirmer en Ligue 1 ce qu’il a montré vendredi dernier en Coupe de France. C’est un garçon qui a eu un parcours plus compliqué que d’autres joueurs professionnels, je le sens capable de s’imposer dans le monde pro. Il est déterminé à le faire, il sait qu'à 23 ans ce n'est plus un très jeune joueur.