Marqué par son unique saison sous le maillot vert, Anthony Garcia nous a reçus chez lui à Aigues-Mortes (Gard) au lendemain du décès de son patron Loulou Nicollin.


Es-tu surpris d'avoir été nommé entraîneur de l'ASSE quatorze ans après ton départ de Sainté ?
(Rires) Non pas vraiment car je suis entraîneur depuis des années déjà. Personne ne le sait mais j'ai remporté quelques titres à Lille et à Monaco, c'était logique qu'on fasse appel à moi. Je vais apporter mon savoir et ma solide expérience à Saint-Etienne.

Tu peux nous en dire plus ?
Heu, non, désolé de casser ton délire ! Je m'appelle bien Garcia mais mon prénom c'est Anthony !

Ecoute ça fait rien, je te garde quand même ! Que penses-tu de la nomination d'Oscar ?
Franchement, on a le même patronyme mais je ne le connaissais pas. Il est né en Espagne comme mon père ici présent mais avant qu'il ne signe à Sainté je ne le connaissais pas. A mon avis je ne suis pas le seul, je crois que c'est le cas de l'écrasante majorité des supporters stéphanois. Personnellement j'ai été un peu surpris qu'on fasse appel à lui. Il n'est pas très connu car il a entraîné des équipes de jeunes ou de D2 (Brighton) ou dans des championnats peu médiatisés comme en Israël et en Autriche. Je m'attendais plutôt à ce que l'ASSE choisisse un entraîneur plus expérimenté et connaissant le championnat de France. Pour moi, Claude Puel avait vraiment le profil. Pour l'anecdote, j'ai joué à ses côtés lorsqu'Arsène Wenger m'a fait faire mes débuts en L1 à l'âge de 17 ans et un mois [ndp2 : seuls Kylian Mbappé et Thierry Henry ont été plus précoces à l'ASM].

Oscar est un jeune entraîneur mais il a fait du très bon travail à Salzbourg et prône un jeu offensif. Ça peut faire du bien à Sainté, non ?
Oui, mais seuls les résultats diront si Oscar était le bon choix. Les dirigeants stéphanois ont pris leur temps pour arrêter leur choix, ils ont rencontré pas mal d'entraîneurs. Ils ne se sont pas précipités, ils ont dû peser le pour et le contre avant d'accorder leur confiance à Oscar. Il y a beaucoup de professionnalisme à Saint-Etienne, la nomination d'un entraîneur est une décision importante. Il ne faut pas se tromper. Je pensais que Christophe Galtier allait rester encore quelques années et s'inscrire encore plus dans la durée. Il a eu de bons résultats même si la dernière année a été plus difficile. Je l'ai connu joueur, j'ai joué contre lui, c'était un défenseur assez rugueux. J'ai vraiment apprécié ses qualités d'entraîneur à Sainté, j'aimais bien son discours. Il a fait du très bon travail. C'est une page qui se tourne. C'est vrai que ça faisait un bon moment qu'il était en poste, je trouve qu'il collait bien à l'image de Saint-Etienne. Le club a progressé grâce à lui.

Comme toi il a joué au LOSC, mais lui n'a pas eu la chance de jouer sous le maillot vert comme tu l'as fait lors de la saison 2002-2003. Peux-nous nous rappeler les circonstances de ton arrivée à Sainté ?
J'étais à l'AC Ajaccio, on venait de monter en Ligue 1, en finissant champion de Ligue 2. Mon entraîneur de l'époque, Roland Courbis, m'avait dit que j'allais rester. Mais au dernier moment, comme il l'a fait à beaucoup d'autres joueurs, il s'est ravisé. C'était difficile à avaler mais je n'ai pas eu le choix. Dans le staff il y avait déjà Olivier Pantaloni, un ancien Vert. Il est venu me voir pour me dire qu'il avait eu vent d'un intérêt de Saint-Etienne me concernant. Je n'avais rien de concret, c'était un peu flou. Peut-être qu'il avait eu l'info par Christian Villanova, un autre Corse. Ne voyant rien venir, j'ai demandé à Olivier de me passer le numéro de Fred Antonetti. Je l'ai appelé directement. Il m'a dit : "Antonio Esposito est sur le départ, si ça se confirme tu viendras, mais je ne te promets rien." J'avais quelques touches dans d'autres clubs de L2 mais j'ai décidé d'attendre. J'ai pris ce risque et quinze jours après, j'ai appris la grande nouvelle alors que j'étais à la plage à Ajaccio. Le lendemain j'étais à Saint-Etienne pour signer mon contrat et je suis parti en stage dans la foulée à Annecy.

Ça représentait quoi pour toi de signer à l'ASSE ?
C'était énorme, une grande fierté ! Pour l'anecdote, mon ami d'enfance Thibault, m'avait dit quelques mois auparavant qu'il me verrait bien à Saint-Etienne. A l'époque il n'y avait pourtant aucun contact. Il avait ce pressentiment, moi bien sûr ça m'emballait mais je demandais à voir… Finalement ça s'est fait. Je suis de la Drôme-Ardèche. Mes attaches sont à Pierrelatte, ma ville natale, et à Bourg-Saint-Andéol, qui est juste à côté. L'ASSE c'est le club phare de la région. Signer à Saint-Etienne, c'était incroyable pour moi. J'étais très content. Il vaut mieux jouer un an là-bas que deux ans n'importe où ailleurs. Quand j'étais enfant, mon père m'avait emmené à Geoffroy-Guichard. Petit, j'ai vu jouer Oswaldo Piazza et ensuite Michel Platini. Quand j'ai signé à Sainté, c'est à nouveau mon père qui m'a emmené au Chaudron. J'avais du mal à réaliser, je me demandais ce que je faisais là dans ce club mythique. Après, je me suis vite mis dans le moule.

 

Tu aurais pu devenir stéphanois neuf ans plus tôt !

Pierre Garonnaire m'avait repéré lors de la saison 1992-1993 alors que j'étais prêté à Lorient par Monaco. Il m'a dit après un match que je lui rappelais Jean-François Larios. Quand j'ai signé à Beauvais, Garonnaire a insisté pour que je vienne faire un essai à Sainté mais avec mon père on a joué la sécurité. C'était mon premier contrat pro de 4 ans, javais 20 ans ... Garonnaire s'est déplacé à Pierrelatte chez mes parents me voir, on ne savait pas quoi faire .. J'aurais dû peut être lui confier mes intérêts.

Quels souvenirs gardes-tu de ton unique saison sous le maillot vert collectivement et individuellement ?
Mes souvenirs sont mitigés car on a vécu une saison très compliquée. On a été relégable une partie de la saison. J'ai joué beaucoup de matches, 38 toutes compétitions confondues dont 36 en tant que titulaire. J'ai fait des bons matches, j'en ai fait d'autres moins convaincants. Quand le collectif ne tourne pas rond, c'est difficile de tirer son épingle du jeu. Le club était dans le creux de la vague à l'époque. Il avait du mal à se remettre de l'affaire des faux passeports et avait des difficultés financières. Je suis plutôt satisfait de mes prestations de cette saison-là, mais j'étais déçu de devoir jouer le maintien. Vu l'entraîneur et les joueurs qu'on avait, je m'attendais à beaucoup mieux ! J'ai le sentiment de ne pas être arrivé au bon moment à Sainté.

Dans cette saison plutôt terne, le club a démarré une belle histoire avec la Coupe de la Ligue qui s'achèvera en apothéose dix ans plus tard au Stade de France.
Cette compétition nous a permis de sortir de la grisaille de notre championnat très moyen. La Coupe de la Ligue nous a fait du bien, a apporté de la fraîcheur. C'est vrai qu'on a fait un parcours honorable. On a d'abord battu Toulouse grâce à un but marqué dans le temps additionnel par Patrice Carteron, on a ensuite éliminé Le Havre après prolongation sur un but de Fred Mendy. Le tour suivant on a sorti le Mans grâce au but victorieux de Lilian Compan. Mais notre parcours s'est arrêté en quart de finale, à la maison contre l'OM d'Alain Perrin. Il y avait une belle ambiance, plus de 30 000 spectateurs dans le Chaudron, mais on n'a pas réussi à créer l'exploit face à Marseille.

Avec Fabio Celestini, ton récent concurrent malheureux dans la course à la succession de Galette, l'OM s'est en effet imposé 2-0, buts de Fernandao et Lamine Sakho. En championnat, les Verts étaient lanterne rouge en février. Comment as-tu vécu cette situation ?
C'est vrai qu'on était dernier mais on avait deux ou trois matches de retard car plusieurs rencontres avaient été reportées en janvier à cause de la neige. On n'a pas paniqué mais ça la foutait vraiment mal d'être dernier de Ligue 2. Surtout dans un club du standing de Saint-Etienne. On n'était pas au mieux et c'était un peu chaud avec les supporters, certains nous jetaient des cailloux quand on arrivait au parking. Leur colère était compréhensible, nos résultats étaient bien en-dessous de leurs attentes comme des nôtres.

Tu as marqué ton unique but en Vert dès ton premier match à Geoffroy-Guichard. T'en souviens-tu ?
Comme si c'était hier ! C'était contre Istres. Mickaël Dogbé a débordé côté droit, m'a adressé un super centre en retrait, j'ai repris le ballon directement d'une frappe rasante pour inscrire le troisième but de notre victoire 3-0. On en rediscutait récemment avec mon père, c'est sur un de mes corners que Vincent Hognon avait ouvert le score en début de match d'une de ces têtes décroisées dont il avait le secret. Alex avait doublé la mise peu de temps après. J'avais sauvé un ballon sur la ligne de Dominique Casagrande quand le score était de 2-0.

Cette saison a également été marquée par deux déroutes, à Aurillac et contre Gueugnon. Après cette piteuse élimination en Coupe de France, Juju et JJ avaient exprimé leur honte et Anto avait déclaré que t'étais le seul à avoir joué à son niveau. Après la débâcle à la maison contre les Forgerons, les supporters craignaient le pire pour la fin de saison…

Oui, je me souviens très bien de ces deux matches. Cette équipe d'Aurillac jouait en CFA2 et était entraînée par Thierry Oleksiak. En Coupe de France, notre équipe avait été un peu remaniée. On savait à quoi s'attendre, il fallait se préparer psychologiquement. Je ne sais pas si tout le monde était prêt mais on ne pouvait pas être surpris, le staff nous avait prévenus. On avait quand même quelques joueurs d'expérience dans l'équipe et malgré ça on s'est fait balayer par une équipe évoluant 3 échelons en dessous. On prend un but en début de match, ils font le break avant la pause et trouvent même le moyen d'enfoncer le clou en seconde période. Vincent Hognon a réduit le score en fin de match. Contre Gueugnon, tout s'est mal goupillé, on a perdu 0-3 devant une toute petite chambrée qui avait bravé le froid. Je me souviens qu'il neigeait et qu'on avait raté deux pénalties. Après ce match on avait vraiment la tête dans le seau, on était relégables. Heureusement on a bien fini le dernier quart du championnat, au point de terminer à la neuvième place.

Quel joueur t'as le plus impressionné à Sainté ?
Je dirais Jérémie Janot. Il n'est pas parti titulaire, c'était Dominique Casagrande le gardien numéro un en début de saison. Suite à une blessure de Dominique, Jérémie a su saisir sa chance alors qu'à la base il n'avait pas le profil d'un titulaire pour Frédéric Antonetti. Mais Jérémie est un garçon explosif et bosseur, qui a su s'imposer et faire décoller sa carrière cette saison-là. Moi j'étais à côté de lui, c'était un super mec. C'est lui qui m'a le plus marqué.

Avec quels joueurs stéphanois avais-tu le plus d'affinités ?
J'étais très copain avec Lilian Compan, Vincent Hognon, Patrice Carteron, Julien Sablé. C'était un peu notre noyau, l'ossature de l'équipe. Je m'entendais bien aussi avec Alex.

Tu ne l'as pourtant pas connu lors de sa meilleure saison…
C'est vrai mais ça ne m'a pas empêché de l'apprécier. Moi je l'aimais bien, c'était un gars généreux. Il nous a plusieurs fois invité chez lui, il m'a même offert un maillot. Il était important aussi bien dans le vestiaire que dans l'équipe. Il n'était pas au meilleur de sa forme car il n'avait pas beaucoup joué lors de son prêt au Paris-Saint-Germain la saison précédente. Il a mis du temps à se remettre dedans, ce n'est pas évident pour un mec de ce talent de se retrouver à jouer le maintien en Ligue 2. Nous on était content quand il était sur le terrain car il avait ce petit truc en plus qui pouvait faire basculer un match. Beaucoup de pression reposait sur lui.

Tu as cité Julien Sablé. Que t'inspire sa fraîche nomination au poste de directeur du centre de formation de l'ASSE ?
Je n'ai pas suivi dans le détail son parcours de formateur dans les équipes de jeunes de l'ASSE mais ça ne me surprend pas du tout qu'il prenne un poste de direction, il a l'état d'esprit qui convient. Julien, c'était un moteur dans une équipe, un gars qui était toujours positif, entraînait les autres. En plus c'est un bon gars. J'ai pris beaucoup de plaisir de jouer à ses côtés, on était souvent associé ensemble au milieu de terrain. Je lui souhaite beaucoup de succès dans ses nouvelles fonctions, je crois qu'il va faire du bien aux jeunes, il va leur inculquer son état d'esprit positif et combatif.

Quels souvenirs gardes-tu de ta collaboration avec Frédéric Antonetti ?
J'en garde d'excellents souvenirs car c'est quelqu’un qui est franc, honnête, très clair dans ce qu'il demande. Moi j'ai eu de bonnes relations avec lui car je suis un peu comme ça aussi. Ça a bien fonctionné, je suis resté en contacts avec lui par la suite au téléphone et c'est vraiment quelqu'un que je reverrais avec grand plaisir. Il voulait me conserver à Sainté mais hélas j'ai dû quitter le club.

Peux-tu nous rappeler pourquoi ?
J'avais signé un an de contrat, le club n'était pas en mesure de me proposer plus à l'époque vu le contexte incertain au niveau des finances et de la direction du club. J'espérais être prolongé, d'autant plus que le coach, reconduit dans ses fonctions, comptait sur moi. Mais quand je suis arrivé en fin de contrat, en juin 2003, Henri Grange venait de succéder à Alain Bompard à la présidence du club. Il nous a dit qu'il ne pouvait pas prolonger les joueurs en fin de contrat et qu'il ne pouvait pas recruter. Fred Antonetti m'a dit qu'il fallait garder espoir, que la situation finirait peut-être par se débloquer. J'ai donc repris l'entraînement avec les Verts en juillet. Je devais même partir en stage mais j'avais les boules de pouvoir m'entraîner sans que le club me propose quoi que ce soit. Peut-être que j'aurais dû être patient et attendre, mais au final ils ont juste fait re-signer Mickaël Citony parce qu'ils avaient besoin d'un milieu droit.

Comment as-tu vécu ce départ forcé de Sainté ?
Très mal. Ça reste le gros regret de ma carrière, d'autant plus que la saison suivante l'ASSE a terminé champion de L2. Quand je suis parti de Saint-Etienne, le ressort avec le foot s'est cassé. J'étais dégoûté, je n'avais plus envie. A 31 ans, j'étais pourtant loin d'être fini. J'ai quand même signé à Laval mais le cœur n'y était plus. J'espérais vraiment rester à Saint-Etienne et finir ma carrière là-bas. J'avais déjà dû quitter Ajaccio l'été d'avant alors qu'à la base on m'avait dit que j'allais rester. A Sainté, je fais une saison très correcte, le coach veut me garder mais je dois à nouveau faire mes valises. C'est frustrant et énervant car ce n'était pas lié à des critères sportifs.

A Laval, tu as retrouvé un gars qu'on aime bien sur Poteaux Carrés, Fousseni Diawara.
Moi aussi je l'aime bien le Fouss ! Il était prêté à Laval mais encore sous contrat à l'ASSE, mais il m'avait dit qu'il ne voulait plus retourner à Saint-Etienne. Fred Antonetti a quitté Sainté et Elie Baup lui a succédé. Un jour je suis allé le voir et je lui ai dit : "Ecoute Fouss, retourne vite à Saint-Etienne !" Je lui ai dit : "la saison est longue, on ne sait pas ce qui va arriver, tu peux rejouer". Fouss était encore jeune à l'époque, j'avais plus d'expérience. Il m'a dit "mouais, je pense que je ne vais pas jouer." Je lui ai dit : "tu es bien à Laval ? Retourne à Saint-Etienne ! Tu es travailleur, tu vas montrer de quoi tu es capable à l'entraînement et la roue va tourner." Il m'a écouté et trois mois après il jouait chez les Verts. Je suis content de l'avoir conseillé. Dans le foot, ça va tellement vite…

Contrairement à tes anciens coéquipiers Julien, Lilian, Vincent et Patrice, tu n'es pas resté dans le foot après ta carrière de joueur. Peux-tu nous éclairer sur ce choix ?
Le ressort s'est vraiment cassé quand j'ai quitté Saint-Etienne. La déception a été tellement forte que je n'ai pas souhaité rester dans le foot. Après ma saison lavalloise, j'ai joué quelques mois à Roye en National, mais j'avais déjà pris ma décision d'arrêter. Grâce à Antoine Di Fraya, entraineur de l'équipe corpo du groupe Nicollin que je connaissais car il est de Valence (on a des amis en commun), j'ai rencontré Olivier Nicollin à la Grande Motte en 2005. C'est le fils ainé de Loulou, qui dirige maintenant l'entreprise. Il m'a dit : "tu veux aller au foot ou à l'entreprise ?" Mon choix était clair, je voulais rejoindre le monde de l'entreprise. Cela ne me disait rien de me lancer dans une carrière d'entraîneur ou de faire partir d'un staff.

Tu avais des diplômes au moment de découvrir le monde de l'entreprise ?
Non, c'était tout nouveau pour moi. Je me suis arrêté au bac, que j'ai raté deux fois. J'ai commencé à jouer avec les pros à l'AS Monaco dès l'âge de 17 ans, c'était difficile de suivre des études en parallèle. J'ai appris sur le tas dans le groupe Nicollin. Les six premiers mois j'ai suivi un contremaître qui jouait avec moi dans l'équipe corpo. Quand j'ai commencé, je m'occupais du nettoiement de la ville du Grau-du-Roi. Je gérais les balayeurs et les machines qui nettoient la voirie communale. Depuis huit ans, je travaille dans une filiale. Je suis responsable de secteur dans le nettoyage industriel. Je gère un portefeuille. Quand on gagne des contrats de nettoyage, on récupère le personnel et moi je m'occupe du contrat de A à Z : je gère le personnel, le client, le cahier des charges, les devis, les payes.

En quoi ton expérience de joueur pro t'a aidé dans le monde de l'entreprise ?
Cette expérience m'a beaucoup aidé car l'humain est au cœur du métier. Le foot, ça t'apprend beaucoup sur les rapports humains, les synergies au sein d'un groupe. Je me suis beaucoup servi de mon vécu dans le foot dans la façon de gérer mes salariés. Quand j'étais joueur, j'étais dans l'échange et dans l'écoute avec mes coéquipiers mais aussi avec mes chefs, mes entraîneurs et mes présidents. Je n'avais pas de compétences dans la gestion et l'informatique, mais je les ai acquises petit à petit. Un métier ça s'apprend, la gestion humaine c'est moins évident si tu n'as pas ça en toi. Au sein du groupe Nicollin, j'apprécie les relations humaines. J'en profite d'ailleurs pour adresser un petit clin d'oeil à mon responsable d'exploitaton Achour Hamoudi, un vrai mordu des Verts !

On imagine que tu es très affecté par le décès soudain de Loulou Nicollin.
Oui, forcément ! On a appris ça jeudi soir. Le lendemain, au bureau, on était tous très tristes et sous le choc. J'ai des collègues qui pleuraient. On l'avait vu récemment, il était venu nous rendre visite. C'est quelqu'un qui était proche de ses salariés. Bien sûr, je connais plus son fils Olivier, j'ai plus de rapports directs avec lui. Le décès de Louis Nicollin, c'est une énorme perte pour l'ensemble du groupe, et c'est aussi une grosse perte pour le monde du foot. J'ai joué quatre ans en corpo dans le groupe Nicollin, Loulou était très attaché à notre équipe. Il venait nous voir à toutes les finales. Quand on a gagné une finale à Paris, il est arrivé sur le terrain et nous a lancés : "Ce soir, la soirée, elle est pour moi !" Il est allé voir un dirigeant et lui a remis une enveloppe de 5 000 euros en disant : "C'est pour eux !" L'équipe corpo occupait une place particulière dans son cœur parce c'était encore le foot amateur auquel il était vraiment attaché. Loulou était généreux et passionné. Pour les 70 ans du groupe, il a invité tous les salariés à son mas Saint-Gabriel situé à Marsillargues, près de Lunel.

Tu as pu visiter là-bas son fameux musée ?
Bien sûr, je l'ai vu plusieurs fois. Je lui ai d'ailleurs donné un maillot pour sa collection. Un maillot rare car il s'agit d'un maillot vert que j'ai porté quand je jouais... au LOSC. Ça prouve qu'il n'était pas allergique aux Verts ! (rires) Je sais que les supporters de l'ASSE n'appréciaient pas ses piques anti-stéphanoises mais c'était plus un jeu qu'autre chose. Dans le fond, je ne pense pas qu'il était anti-stéphanois. C'était un amoureux du foot et quand on aime le foot, on aime Saint-Etienne. Il y a d'ailleurs de très nombreux maillots verts exposés dans son musée en plus de la collection que lui avait confié le président Roger Rocher.

On espère que cette collection finira au Musée des Verts, qu'on te recommande vivement de visiter si t'as l'occasion de passer à Sainté. Es-tu retourné à Geoffroy-Guichard depuis que tu as quitté le club ?
J'y suis retourné la saison suivante, ça m'a fait bizarre d'ailleurs car j'ai joué du coup contre les Verts aux côtés de Fouss avec Laval. Sainté avait gagné 2-0 grâce à des buts de Lilian Compan et Nicolas Marin. J'y suis retourné quelques années plus tard pour faire connaître la ferveur du Chaudron à mes enfants. Fred Emile, qui est toujours intendant là-bas, m'avait très bien reçu. J'étais venu pour un Saint-Etienne-Lille. J'avais pu pénétrer dans les vestiaires. Ça me fait toujours quelque chose d'y retourner. A la fois ça me fait plaisir et en même temps ça fait un peu mal, j'aurais tellement aimé rester plus longtemps dans ce club. J'adorais quand on s'échauffait devant le kop et qu'il chantait "allez les Verts". Ça boostait, ça me donnait de l'énergie. Moi ça me transcendait, ça me motivait ! Et en même temps je me disais : "C'est dingue ce que je vis là ! Qu'est-ce que je fais là ?" C'est la chanson qu'on écoutait quand on était petit, que tout le monde a entendu et fredonné. Sauf que là j'étais sur le terrain ! Je me souviens qu'en revenant à Geoffroy-Guichard, j'étais tombé sur Bafé. C'était je crois lors de sa dernière saison chez les Verts. Quand je l'ai connu à Sainté, il était tout jeune, il devait avoir 17 ans. Mais comme Loïc Perrin, un autre petit jeune prometteur, Bafé venait parfois s'entraîner avec nous. Quand il m'a reconnu, il m'a promis de m'envoyer un maillot pour mes enfants. Bafé est un gars sympa et gentil, il a tenu promesse.

 

Merci à Anthony pour sa disponibilité.



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