Après avoir assisté à la victoire des Verts contre Dijon, Renaud Cohade suivra avec attention le match qui opposera ses deux anciens clubs lundi prochain au stade des Antonins.


Coco, comment as-tu vécu ton retour à Geoffroy-Guichard ?

Ça m’a fait énormément plaisir de retrouver ce stade où j’ai vécu en tant que joueur beaucoup de grands moments. En plus les Verts ont gagné donc j’ai vraiment passé un super week-end. J'en ai profité aussi pour voir aussi Jérémy Clément et François Clerc à Andrézieux. J’ai eu un peu de nostalgie en me remémorant les fortes émotions que j’ai connues à l'ASSE. Ce club m’a marqué à vie, ce stade aussi. Ça me donne envie d’y revenir encore. J’ai été très content de revoir des personnes qui sont toujours au club, à commencer par mon ami Loïc bien sûr. On a joué quatre ans ensemble. J’ai revu aussi le doc Tarak, les kinés.

Geoffroy me manquait, je n’étais plus venu ici depuis le match que j’avais gagné 1-0 avec Metz en septembre 2019. Le club m’a invité à faire une séance de dédicaces aux musée des Verts. J’avais déjà été sollicité l’année passée mais j’avais dû décliner l’invitation car j’avais eu un décès à cette période. Je remercie le club d’avoir pensé à moi. J’ai visité la nouvelle brasserie, c’est magnifique ce qu’ils ont fait. J’ai ressenti de la ferveur en entrant dans le Chaudron, ce club a une âme. Avec la victoire au bout, c’était vraiment une après-midi parfaite !

J’avais déjà eu l’occasion de le visiter mais le Musée des Verts est vraiment top, il faut féliciter Philippe Gastal et Laurent Chastellière et tous ceux qui ont oeuvré à cette réussite. Je trouve que c’est indispensable qu’il y ait un lieu comme ça dans le club. Le musée met en avant la riche histoire de ce club et montre à quel point l’ASSE a marqué l’histoire du football français. Le musée permet aussi aux joueurs qui arrivent de savoir dans quel club ils mettent les pieds. C’est important qu’ils s’imprègnent du club. L’ASSE n’est pas n’importe quel club, c’est un honneur d’en porter les couleurs. Il faut s’en montrer digne.

J'ai été touché par les nombreux messages de sympathie que j'ai reçu lors de cette séance de dédicaces. On sent que les années de l'ère Galtier ont beaucoup marqué les gens. C'est une époque où on a eu des résultats, la victoire en Coupe de la Ligue, les matches de Coupe d'Europe, des derbies mémorables qu'on a gagnés. Je pense que pas mal de supporters se sont identifiés à nous car on avait une équipe solidaire, combative avec quand même de la qualité. Tu ne gagnes pas un trophée par hasard, on avait Aubame bien sûr mais aussi des joueurs comme Josuha et Kurt qui ont fait une belle carrière derrière.

Ça a été très sympa d'évoquer tous ces bons souvenirs avec les supporters. J'ai senti qu'ils étaient malheureux de voir le club en bas de tableau mais ils restent fidèles à leur équipe, à leur club. Je suis convaincu qu'un jour l'ASSE retrouvera son rang. C'est une anomalie de les voir en Ligue 2 pour moi mais dans la difficulté il faut rester solidaires et unis. Samedi c'était un match entre relégables et il y avait plus de 21 000 supporters dans le Chaudron. Cette belle ambiance fait plaisir aux joueurs, ça leur fait du bien d'être soutenus.

Tu as aussi pu revoir Laurent Batlles, qui n’est pas étranger à ta belle aventure stéphanoise...

Oui, ça m’a fait très plaisir de revoir Laurent, c’est lui en effet qui m’a fait venir à l’ASSE. Au moment où il avait raccroché les crampons en 2012, il avait travaillé pour la cellule de recrutement du club. Il bossait avec Christophe Galtier et Stéphane Tessier. Pour prendre sa succession, Laurent avait invité les décideurs stéphanois à me faire signer, il avait suivi de près mes prestations à Valenciennes. Je suis ravi qu’il soit maintenant à la tête de l’équipe première après avoir performé avec la réserve stéphanoise et avec Troyes. Laurent, c’est une personne qui aime le club et qui a des compétences pour faire de très belles choses.

Il vit une saison très compliquée.

Laurent s'attendait à vivre une saison compliquée mais sans doute pas à ce point. Heureusement, on voit que la dynamique est en train de s’inverser. Tu sais, j’ai vécu des descentes et des montées dans ma carrière. Quand on vit une descente, soit on rebondit de suite, soit ça laisse des traces. Parfois, pour tout remettre dans le bon chemin, ça prend un peu de temps. C’est le cas avec l’ASSE, d’autant plus qu’il y a eu d’entrée des circonstances défavorables : trois points de pénalité, quatre matches à huis clos, ce n’était pas l’idéal pour démarrer la saison. Vu la ferveur qu’il y a ici, il y avait beaucoup d’attente, c’est pas évident quand tu tardes à avoir des résultats. Je pense que le club est dans un virage important et qu’il va bien le négocier. C’est en train de reprendre forme. On est sur une bonne dynamique mais il reste encore des matches importants à gagner.

Les Verts viennent tout juste de sortir de la zone rouge, ils ne s’enflamment pas et ils ont raison, ils savent très bien que la saison est encore longue et que ça reste très serré derrière. Pour moi les Verts ne sont pas à leur place, ils devraient être bien mieux classés car il y a beaucoup de joueurs de qualité dans cette effectif, notamment des garçons qui ont joué en Ligue 1. Mais voilà, il y a des saisons comme ça ou quand ça part mal, c’est pas évident de redresser la barre. La saison s’est mal goupillée d’entrée pour les Verts mais depuis le début de l’année ça va beaucoup mieux, ils viennent de remporter 4 matches sur 6. Je pense et j’espère que les Verts vont remonter au classement et que ça peut amener de belles choses pour les saisons à venir.

Tu continues de suivre les matches des Verts ?

J’ai décroché un peu du foot en général mais on ne décroche jamais vraiment quand il s’agit des Verts ! Je vis du côté d'Anduze, je retape des biens immobiliers, je gère un gîte et surtout je m’occupe de ma famille car trois enfants en bas âge, ça prend du temps ! (rires) Mais bien sûr je continue à suivre les Verts. On regarde leurs matches quand on peut et sinon on suit attentivement leurs résultats. Cette saison post-descente est très compliquée, il y a eu beaucoup de changements et parfois ça met du temps avant que la mayonnaise prenne. Je pense que mine de rien le 0-6 contre Le Havre a laissé des traces dans les têtes. Il y avait un problème de confiance et un manque d’automatismes dans cette équipe.

Ce que j’ai vu contre Dijon dans le Chaudron confirme que les Verts vont mieux. OK, tu vas me dire qu'en face il y avait une équipe en plein doute et sur la pente descendante depuis plusieurs semaines, mais l’ASSE a fait un match sérieux. Les Verts ont su se faciliter la tâche en ouvrant le score assez vite et en faisant le break dès la première mi-temps. Sainté a peu été mis en danger et a montré une certaine solidité défensive lors de cette rencontre. Les Verts avaient pris 7 buts sur les 3 matches précédents, c’était important de resserrer les boulons. C’est primordial quand on veut se maintenir de tenir la route un minimum en défense.

Quels joueurs t’ont tapé dans l’œil dans cette équipe stéphanoise ?

Je vais d’abord citer Gaëtan Charbonnier car j’ai appris qu’il s’était fait les croisés. Je profite de cette interview pour lui témoigner tout mon soutien. J’ai connu la même blessure début 2015 dans le Chaudron, également au genou droit, sur un tacle de Thiago Motta lors d’un quart de finale de Coupe de la Ligue contre le PSG. Je souhaite un prompt rétablissement à Charbo. C’est un coup dur pour lui et pour l’ASSE mais ça fait hélas partie de la vie d’un footballeur, c’est de la malchance. Gaëtan, c’est quelqu’un qui est fort, il s’en remettra.

Jean-Philippe Krasso se distingue particulièrement cette saison. Il a de la qualité, c’est un joueur différent. On voit bien qu’il a des qualités techniques au-dessus de la moyenne et que c’est un poison pour les défenses adverses. Il est décisif, on l’a encore vu contre Dijon car il est impliqué sur les deux buts. Bien sûr, on ne peut pas ne pas parler de lui ! C’est le meilleurs buteur (11 pions), le meilleur passeur (5 passes décisives) de la Ligue 2. Pourvu qu’il continue sur sa lancée ! Le club aura besoin de lui.

J’aime bien le petit Bouchouari au milieu. C’est un joueur qui aime bien avoir le ballon, qui est toujours dans la demande. C’est un jeune joueur qui a encore une grosse marge de progression. Il ne peut que progresser, surtout avec un entraîneur comme Laurent Batlles. Laurent a joué milieu de terrain, il va bien le conseiller. On sent que ce Benjamin Bouchouari est un joueur qui a quelque chose. Il a fait un bon match contre Dijon et je suis content qu’il ait ouvert son compteur but. Avec un brin de réussite, certes, mais la chance sourit aux audacieux. Il a eu la réussite qu’il n’avait pas eue à Niort quand le poteau avait repoussé son tir.

Il y a d’autres joueurs qui sont là pour apporter leur expérience. Je pense à un garçon comme Thomas Monconduit. Il avait déjà été très bon le précédent match contre Annecy, je l’ai encore trouvé intéressant contre Dijon. Il a récupéré beaucoup de ballons. Il fait du bien à l’équipe et apporte de la confiance aux autres. J’ai aimé aussi la prestation de Léo Pétrot. C’est un match de référence pour lui. Il est bien dans ce schéma-là axe gauche, il est plus performant que lorsqu’il évoluait latéral ou piston. Je l’ai trouvé solide et sérieux contre Dijon, il a bien relancé.

Dennis Appiah aussi apporte son vécu de Ligue 1, on sent le gars expérimenté et serein. Il se place bien et on le voit encourager ses jeunes coéquipiers, notamment Saïdou Sow que j’ai trouvé très bon contre Dijon. Je l’ai trouvé agressif dans le bon sens du terme. Je trouve que c’est bon signe, c’est le comportement qu’il faut avoir. En Ligue 2, les matches sont des combats, il faut se faire respecter, notamment à la maison. On sent qu’il y a du mieux à ce niveau-là. Hormis à Bastia, les Verts mettent beaucoup d’engagement depuis un mois ou deux.

Bien sûr, la blessure au genou de Charbo est un coup dur mais je considère malgré tout que Sainté est armé pour se maintenir. Dans les buts, Gautier Larsonneur a apporté du dynamisme et de la fraîcheur. C’est un gardien qui a connu une montée avec Brest, il a un bon état d’esprit et apporte de la confiance. Il a un jeu au pied et peut-être qu’il s’est inspiré de moi en quittant Valenciennes pour Sainté (rires) Les Verts ont un effectif assez étoffé, avec des joueurs qu’on a peu vu à l’œuvre pour l’instant mais qui devraient apporter. Je pense à un garçon comme Kader Bamba, qui avait fait une très bonne entrée à Niort. On sait que c’est un garçon qui a beaucoup de talent. Malheureusement, il a eu une petite lésion à la cuisse mais son retour va faire du bien.

Lundi prochain, les Verts vont affronter dans le Gard le Nîmes Olympique, le club où tu as fait tes débuts en pro à l’âge de 18 ans. Tu venais d’un endroit plutôt sordide. C’était quel club déjà ?

On ne connaît pas ! (rires) On le dira pas, c’est interdit (rires). Parlons plutôt de Nîmes car c’est un club qui m’a donné ma chance de jouer en pro. J’ai joué 3 ans là-bas, en L2 puis en National. C’est un club qui me parle car je suis originaire d’Anduze, dans le Gard. Je suis un Cévenol. D’ailleurs j’ai joué à partir des poussins jusqu’à mes 13 ans à Alès avant de partir rejoindre le centre de formation du club dont on ne va pas parler ! (rires) Cette période nîmoise a été importante pour moi car c’est là que les Girondins m’ont repéré et que j’ai pu découvrir la Ligue 1.

A Nîmes tu auras joué avec des anciens Verts comme Jean-Pascal Yao, Loïc Chavériat, Cédric Horjak et aussi un certain Gilles Leclerc. Ce dernier avait d’ailleurs évoqué votre amusante rencontre dans l’entretien qu’il nous avait accordé il y a quatre ans.

Je sortais du centre de formation du Nîmes Olympique, j’ai été convoqué en équipe première. Quand je suis arrivé dans les vestiaires des pros, je me suis assis à côté de Gilles, qui était deux fois plus âgé que moi. Il me dit : « C’est quoi ton nom ? » Je lui dit : « Cohade ». Il me dit : « Tu connais Didier ? Il est de ta famille ? » Je lui réponds : « Oui, un peu, c’est mon père ! » (rires). Gilles avait joué avec lui à Alès. Il a pris un coup quand il s’est rendu compte que maintenant il allait jouer avec moi. Il a dit : « Bon, il ne me reste plus longtemps à jouer ! » (rires). Gilles avait 36 ans à l’époque, il était venu pour finir sa carrière. On avait pris du plaisir. Ça reste une belle rencontre, je sais qu’il reste très attaché à l’ASSE, comme Cédric Horjak que j’ai croisé il y a deux semaines. Gilles joue régulièrement dans l’équipe des anciens Verts. Cédric lui il joue plutôt à la pétanque, il est doué dans ce domaine-là.

Tu continues de suivre le Nîmes Olympique ?

Oui, je suis d’ailleurs allé voir le match Nîmes-Metz il y a un mois au stade des Antonins. Je voulais voir des anciens coéquipiers messins avec lesquels j’avais gardé contact, Alexandre Oukidja et Matthieu Udol. Les Grenats ont été largement au-dessus, ils ont battu les Crocos 4-1. Je garde un œil sur ce club nîmois, qui vit une période au moins aussi compliquée que celle des Verts. Bernard Blaquart était resté 5 ans en poste mais depuis son départ il y a deux ans et demi, il y a une certaine instabilité sur le banc des Crocodiles : Jérôme Arpinon, Pascal Plancque, Nicolas Usaï et maintenant Frédéric Bompard.

Le Nîmes Olympique a perdu plusieurs bons joueurs depuis un an. Anthony Briançon a quitté les Crocodiles pour les Verts l’été dernier, Lamine Fomba en a fait de même cet hiver. C’est aussi un club qui a changé de stade depuis deux ou trois mois, les Crocodiles jouent désormais aux Antonins. Les Nîmois sont actuellement dans la zone rouge mais il ne faut pas les enterrer. Le Nîmes Olympique est un club de caractère. Il faudra que Saint-Etienne soit à son niveau pour faire un bon résultat à Nîmes.

Tu seras partagé lundi ?

J’aurai quand même une préférence pour les Verts, c’est le club qui m’a permis de vivre les meilleurs moments de ma carrière. Et j’ai envie que Loïc et Laurent réussissent.

Loïc t’a sondé en vue du prochain mercato estival ? T’es prêt à rechausser les crampons Coco ?

Loïc m’a sondé mais quand il a vu mon petit bidon… (rires) Nan mais Loïc n’a pas besoin de moi. Il faut lui faire confiance. L’ASSE, c’est son club, il est là où il faut. Loïc, c’est Sainté. Je suis convaincu que le meilleur reste à venir.

Ton prono pour ce Nîmes-Sainté ?

Je vois les Verts l’emporter sur le même score que samedi, 2-0. Buts de Jean-Philippe Krasso et… Thomas Monconduit. Un petit but des 18 mètres pour faire le break, ce serait pas mal, non ?

 

Merci à Renaud pour sa disponibilité