Président de l'AS Quetigny, Guy Ipoua nous a livré ses impressions avant le match que son club de R2 jouera contre l'ASSE ce samedi soir à Gaston-Gérard lors du 7e tour de Coupe de France.


Merci tout d’abord de nous accorder cette interview car vous devez être beaucoup sollicité par les temps qui courent. Pouvez-vous, en premier lieu, nous présenter votre club ?

En fait, le club a été créé en 1966, exactement le 16 novembre, c'est donc bientôt l'anniversaire du club. Le club en lui-même, au fil des années, s'est construit vraiment comme un club amateur. Il n’y a pas eu de performances particulières, mais le club s’est développé tout tranquillement. Le plus haut niveau où l'équipe première a joué est le National 3. On a été à ce niveau à 2 reprises : la première fois en 2016-2017. Une seconde fois en 2022.

C'est donc très récent.

Oui, nos débuts au niveau fédéral sont assez récents. Malheureusement, les deux ou trois dernières années, on est redescendu, car ce  niveau fédéral demande beaucoup plus de moyens que nous en avons pour y survivre.

Un peu comme partout.

C'est ça. Une fois qu'on arrive à ce niveau-là, on est confronté vraiment à plusieurs types de contraintes. Vu qu'on n'était pas armé, on est malheureusement redescendu sur les deux dernières saisons. Je trouve que le club est un peu à sa place entre R1 et R2, aux niveaux régionaux. Je pense que pour l'instant, le club est dimensionné vraiment pour ces niveaux-là.

L'ASSE fera à cette occasion de la Coupe de France son entrée dans la compétition. Mais ça doit faire un bon moment que vous l'avez débutée. Pouvez-vous nous rappeler votre parcours ?

On est rentrés au quatrième tour et on est là au septième tour. On est rentré au premier tour des équipes régionales. On a eu beaucoup de chance d'avoir jusqu'à présent les tours à la maison. On a profité de ça, sauf une fois où on est parti un peu loin, mais bon, c'était une équipe de deux divisions en dessous. Et on est très, très heureux donc d'avoir eu au tirage Saint-Etienne !

Votre cinquième tour a été difficile car vous vous êtes qualifiés aux tirs au but contre le Mâcon FC.

Voilà, ça c'est typiquement le match où si on le joue à l'extérieur, on n'est pas sûr de passer. C'est vraiment le match typique où vous jouez une équipe qui a une division en dessous, mais vous voyez que c'est une équipe qui peut vraiment jouer à la division au-dessus, voire deux divisions au-dessus. C'est là que tu te dis que ça peut être ton année et que tu peux aller plus loin.

En fait, ce qui vous amène ce petit plus à la maison, ce sont vos supporters, j'imagine, ou alors le terrain, ou les deux ?

Le terrain, oui, car nous avons de très bonnes installations, une très bonne pelouse notamment. On a de très belles installations, de beaux terrains en synthétique également : on a tout ce qu'il faut en termes de complexe. C'est très bien. Après, l'avantage qu'on a, c'est que sur certains matchs comme ça, où il y a peut-être un peu d'enjeu, on a un public qui nous soutient avec passion, qui nous encourage, voilà c'est bien !

Apparemment, vous avez ce qu'il faut en termes de terrain d'entraînement.

Oui, on est très bien, on ne se plaint pas. Après, je pense que, mis à part le plus gros club de la région, qui est le DFCO, tout le monde dans la région ou dans le département est d’accord pour dire qu'on a les meilleures installations. Il y a de quoi faire pour que les joueurs chez nous se sentent bien en terme d'entraînement et de match. Ça, c'est bien parce que c'est quand même un point très positif, en fait : que les gens se sentent bien, effectivement, dans leur environnement.

Pouvez-vous nous dire quelques mots sur le staff et les joueurs ?

Concernant le staff et les joueurs, ça fait un moment maintenant qu'ils sont ensemble : voici trois saisons qu'on a le même staff au niveau de l'équipe première. Malgré les descentes qu'on a subies, en tant que bureau exécutif du club, nous avons décidé de garder notre entraîneur pour quelques années.

Le métier d'entraîneur, c'est difficile et particulièrement ingrat en cas de défaite.

C'est dur, c'est vrai. Mais bon, voilà. Malgré les descentes, on s'est dit qu'il fallait qu'on ait un peu de stabilité. Peut-être que certains ne comprendront jamais qu'on ait gardé notre entraîneur. Mais pour nous, c'était important de le faire. D'ailleurs, ça a permis aussi à pas mal de joueurs de rester au club et de trouver une stabilité avec nous. Et voilà, maintenant, on est pour l'instant premier au classement.

Ah, vous êtes premier actuellement ? J'avais vu que vous étiez quatrièmes.

C’est vrai que nous avons perdu le week-end dernier ! On était premier jusqu'au week-end dernier. Ce n'est pas évident de garder la concentration quand on a des perspectives de ce type-là. C'est compliqué. Et, vu les jours qui nous séparent du match contre Saint Etienne, les sollicitations seront de plus en plus fortes sur les joueurs et sur les entraineurs. Bien sûr, ils ne sont pas habitués à de telles sollicitations. Il va donc nous falloir gérer un peu tout ça, mais on en est conscient. Donc, on va essayer de gérer ça le mieux possible.

On a vraiment l’impression que vous avez une structure humaine très saine et une très bonne complicité entre vous aussi.

Oui, ça, c'est important, très important. C'est même capital, je dirais. Au niveau amateur, si on ne prend pas de plaisir à se retrouver, si on ne prend pas de plaisir à être ensemble, à rigoler ensemble, même dans les moments difficiles, on ne peut pas survivre très longtemps. Ce n'est juste pas possible. On est tous des bénévoles. On y met quand même beaucoup de temps et beaucoup d'entrain.

Et ce n'est pas toujours facile à la maison de dire qu'on va passer tout ce temps-là au stade de foot. Donc, effectivement, si en plus de ça, ce n'est pas fait dans la bonne humeur et dans la bonne entente, ça ne sert absolument à rien. L'ambiance, c'est capital. La seule chose qu'on a à gagner, c'est d'être bien entre nous et de passer un bon moment entre nous. On essaie de faire ça au maximum.

Pensez-vous que votre équipe a une petite chance de créer l'exploit ? Parce que vous savez que notre équipe sera très loin d'être au complet. Comment vous voyez ce match ?

Je dirais que si on passe ces tours, en Coupe de France, c'est pour que les joueurs aussi jouent contre les meilleurs joueurs adverses et les meilleures équipes ! A la limite, je suis même déçu, pour nos joueurs ou pour nous, que vous me disiez que l'équipe sera diminuée. Parce que moi, à la limite, je préfère jouer contre la meilleure équipe. C'est aussi pour ça qu'on parle de la Coupe de France. Maintenant, sans doute que l'équipe est affaiblie, à vos yeux, par rapport à ce que vous avez l'habitude de voir.

Mais au final, ça reste quand même, je suppose, beaucoup de joueurs professionnels ou en passe de le devenir. Des joueurs qui s'entraînent tous les jours ! La différence est tellement énorme à tous les niveaux que logiquement, on se dit qu'on ne devrait pas voir le jour et que le match devrait être plié au bout de dix minutes.

Mais comme vous le dites... ce n'est pas sûr du tout. La logique du papier dit ça. Maintenant, la logique de la vie, on sait que souvent, ce n'est pas toujours... Ce n'est pas toujours un chemin linéaire. Et on espère peut-être que si le chemin est sinueux, ça sera bon pour nous.

Quel est votre meilleur parcours en Coupe de France?

Je crois que c'était le sixième tour, il me semble. On n'est jamais allé jusqu'au septième tour. Et cette année, avec « la cerise sur le gâteau  »  avec ce tirage : c'est une première ! C'est bien que cette cerise-là s'appelle Saint-Étienne, en plus.

Vu votre histoire et vos parcours, il ne me semble pas que vous ayez réalisé un exploit particulier, comme beaucoup d’autres petits clubs l’ont réalisé en coupe ?

Non, mais comme on dit, il y a un début à tout. C'est peut-être samedi, le premier exploit ! Nous, en tous cas, on sait qu'on a préparé le match sur et en dehors du terrain pour figurer le mieux possible. Après, est-ce que la victoire sera au bout, je ne peux pas encore vous le dire. On verra ça samedi …

Est-ce que c'est la formation qui alimente votre équipe fanion, ou êtes-vous contraints de recruter des joueurs ?

On a en moyenne, année après année, aux alentours de 350 licenciés. Le problème, c'est qu'il y a beaucoup de clubs du même niveau, que ce soit en termes de jeunes ou en termes de seniors. Il y a pas mal de va-et-vient. Bien sûr, quand on était en National 3, tout le monde voulait venir chez nous. Maintenant qu'on descend, au niveau seniors, ça part un peu. Après, on essaie d'alimenter l’équipe une du mieux possible avec des joueurs qui sortent des U18 et U19.

On a quand même pas mal de joueurs qui viennent chaque saison de clubs de la région. C'est vraiment du local. On n'a pas de joueurs qui viennent de loin, puisque malheureusement, ou heureusement, je ne sais pas, à notre niveau, on n'indemnise aucun joueur. Ils ne sont pas indemnisés pour jouer au football. Au contraire, ce sont même eux qui doivent payer leurs cotisations pour leurs licences. Donc, c'est beaucoup de joueurs locaux.

Vous n'avez pas un sponsor qui peut vous aider un peu ?

Non, on n'en a pas. Malheureusement, ici, il n'y a pas de grande industrie. Donc, on se débrouille avec nos bénévoles. On a des sponsors locaux, mais ce n'est pas avec ça qu'on peut aller vraiment très loin, aller chercher des joueurs.

Certains de vos joueurs ont-ils déjà connu un niveau supérieur au Régional 2 ?

Oui effectivement, il y a même pas mal de joueurs qui ont connu le National 3. Ils sont 5 ou 6 qui y étaient déjà titulaires.

Donc, en fait, vous avez un niveau supérieur au Régional 2 ? 

Oui, je pense qu'on est plus Régional 1 que Régional 2. Je pense que, logiquement, on a un club de Régional 1 entre la première et la cinquième place, en fait. Là, la descente qu'on a eue, c'est une descente un peu dure, deux ou trois petites choses. Mais, logiquement, le club doit remonter, en fin de saison, on l’espère. Après ça, on va se stabiliser à ce niveau de R1.

Quel est le budget d'un club comme le vôtre ?

On tourne entre 80 000 et 95 000 euros par an.

J'en reviens aux joueurs, est-ce qu'ils ont des emplois du temps un peu adaptés en fonction de ça ?

Non, pas vraiment. En tout cas, nous, on n'adapte pas grand-chose, puisqu'ils ont deux, voire exceptionnellement trois entraînements par semaine, et c'est en soirée. Les entraînements commencent, en règle générale, aux alentours de 19h30. Ceux qui travaillent ont fini le travail, ceux qui sont en études ont fini les cours. Il n'y a donc rien d'adapté.

Ce tirage a dû modifier un peu votre emploi du temps ces derniers jours. Est-ce que vous espérez en récupérer quelque chose pour la suite, en termes d'images, ou en termes de budget, ou d'autres ?

Oui, c'est plus pour l'image. En fait, moi, ce que j'ai dit, c'est que là, il faut que ce soit un peu le moment de gloire des entraîneurs, du staff, des joueurs et des dirigeants qui profitent un peu de cette mise en avant, de cette mise en lumière. C'est là, vraiment, que ça va nous changer. En termes financiers, ça ne nous changera pas beaucoup parce que le problème qu'on a, c'est qu'on a dû délocaliser le match et donc être sur un autre terrain.

Le match va en effet se jouer à Gaston-Gérard.

Oui à Dijon, au stade qu'utilise le DFCO. Le problème, quand vous délocalisez comme ça, c'est que ça a un coût. Comme vous le savez, malheureusement, il y a eu un arrêté préfectoral qui nous pénalise énormément.

L'interdiction de déplacement de supporters stéphanois ?

Ce n'est pas vraiment l'interdiction de déplacement, ça s'appelle plutôt une interdiction de paraître. C'est-à-dire qu'il ne faut pas montrer les maillots et les écharpes. À partir de ce moment-là, il y a beaucoup de personnes qui ont peut-être décidé de ne pas se déplacer.

Oh, il y en aura quand même, j’en suis certain !

Je pense quand même. En tout cas, c'est ce qu'on espère. Il faut qu'il y ait quand même une belle fête. Après, je pense quand même que les forces de l'ordre, on en a un peu discuté ce matin [entretien réalisé le jeudi après-midi, ndp2], feront preuve d'indulgence si, bien sûr, un petit de 10 ans, accompagné se son papa ou de sa maman porte un maillot vert ! Il faut que ça reste une fête familiale. C'est encore plus sympa quand c'est en famille. Il faut juste qu'il fasse ça avec un peu de parcimonie, de voir qui est vraiment bien là pour la fête et pour être content.

Le match aurait-il pu se dérouler à Geoffroy Guichard. 

Cette piste a été discutée, ça a été murmuré pendant un petit moment Mais le fait est qu'ouvrir Geoffroy-Guichard aussi, c'est un coût ! Vous savez, malheureusement, maintenant et toujours, tout est un peu relié aux coûts, aux dépenses et autres.

J'imagine que le "coup de projecteur" doit être important avant ce match ? C'est peut-être le moment de passer des messages ?

Non. On n'a pas vraiment trop de messages à passer en tant que tel. Le seul message qu'on veut passer, c'est de dire aux gens qu'on a un bon petit club, qu'on fait notre bonhomme de chemin. On sait qu'il y a des projecteurs sur les dix derniers jours, que ça risque de s'arrêter dès lundi. Mais c'est juste de profiter au maximum. Ce qui fait que si on en est là, c'est qu'on le mérite. On n'a rien à envier à qui que ce soit.Que ce soit les interviews, radio, médias, télé, puisque samedi soir, vraiment, on peut juste profiter. On ne demande rien de particulier. On n'a pas de message particulier à faire passer.

Vous avez joué un match mardi à Digoin. Je ne pense pas que vous ayez aligné l'équipe première.

Non, non. Aucun des joueurs qui vont jouer samedi n’ont joué mardi. Assez rapidement, mon entraîneur avait décidé que ce serait l'équipe réserve.

En cas de qualification quand même, parce qu'on ne sait jamais ce qui peut arriver dans le foot, est-ce que vous avez prévu quelque chose vis-à-vis de votre staff ou de vos joueurs ?

En fait, je vous avoue que non. Mais la première fois qu'on m'a posé cette question-là, c'était ce matin à la préfecture. Le responsable de la police municipale de Dijon nous a posé la question. Qu'est-ce qui se pourrait se passer dans ce cas ? Est-ce qu'ils vont tous se retrouver avec des fumigènes ? Il m'a posé une colle. J'avoue que je n'avais pas pensé à ça. Je vous avoue que pour l'instant, je ne sais pas.

En interne, vous avez peut-être une réserve de bonnes bouteilles de champagne, Président ?

Par contre, ça, oui ! On connaît le chemin. Ne vous inquiétez pas de ça. Si à la mi-temps, il y a 3-0 pour nous...

Attendez, il ne faut pas s'emballer à la mi-temps, Président ! Un match, ça dure 90 minutes. Même plus avec les arrêts de jeu.  Il n'y a pas longtemps, on  gagnait 3-0 à la mi-temps aussi …

Exactement. Ça a failli mal se finir. C'est pour ça que je dis que... C'est pour ça que je n'ai pas voulu y penser avant, mais... Peut-être qu'à la mi-temps, il faudra que je commence à y penser sérieusement.

Dans quel état d'esprit êtes vous avant ce match de samedi contre l'ASSE ?

Nous, on est bien, on est serein. On a fait tout ce qu'il fallait faire en termes d'organisation de match pour que ça se passe bien. Donc ça, c'était vraiment primordial à nos yeux. Que ce soit vraiment une fête pour toutes les personnes présentes. Après, nous, on est là. On sait qu'on est dans un état d’esprit pour gagner le match.

On fait tout aussi pour que cet instant ne soit pas anodin, que les joueurs sentent quand même que c'est le match d'une vie. Ils n'auront plus l'occasion peut-être de refouler le même terrain que des joueurs professionnels sur un match officiel. Je veux aussi que les joueurs ressentent que ce n'est pas un match comme les autres. C'est un événement exceptionnel.

Un grand merci à vous Président d'avoir accordé du temps pour les lecteurs de Poteaux Carrés

De rien, on connait votre site ! Des supporters des verts, il y en a vraiment partout. On a un ancien éducateur, toujours avec nous mais maintenant à la retraite qui est toujours avec un vêtement vert sur lui !  Il connait TOUT de l’ASSE !!! 

Crédit photo : LBP - Rémi Chevrot