Le petit Gomis n'est pas une salope

27/12/2015
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Dans l'ouvrage de Bernard Lions "La Légende des Verts par ceux qui l'ont écrite" (ed. Hugo & Cie, novembre 2015), Bafé Gomis revient sur ses rapports compliqués avec le public stéphanois. Extraits.

 

"Ce n'est qu'après être parti de Saint-Etienne et avoir un peu bourlingué que j'ai compris que le Chaudron possédait une des plus grosses ambiances européennes, avec les stades turcs. En Premier League, le public réagit après un beau but ou un tacle réussi. Il témoigne plus de respect que celui de Geoffroy-Guichard, qui se distingue par ses tifos et sa voix. Avec le public stéphanois, ça a toujours été "je t'aime, moi  non plus." Mais les sifflets des 35 000 personnes de Geoffroy-Guichard m'ont poussé à me montrer toujours plus ambitieux. Je m'en suis servi pour travailler ma concentration quand le ballon me venait ou traînait devant le but. Cette agressivité m'a aidé à franchir la barre des dix buts chaque saison et à faire de moi un bon joueur de Ligue 1. Ils ont également poussé l'enfant du pays que je suis devenu à faire attention à ce que je disais à chaud. Est-ce que je trouvais les supporters stéphanois parfois injustes à mon égard ? Joueurs, nous sommes tous de passage dans un club.  Seuls les supporters restent. Ce sont donc eux qui méritent le respect.

 

Je me devais de partir de l'ASSE en laissant la maison propre. C'est ce que j'ai fait en marquant un doublé devant Valenciennes qui assurait le maintien. Je suis parti la tête haute, pas très loin, mais plus haut. Surtout, je n'ai pas eu le choix. Lyon peinait à recruter André-Pierre Gignac. Je sortais d'une saison qui avait été un accident et un naufrage collectif. Je n'avais pas été bon. Je faisais profil bas quand un dirigeant est venu me chercher à l'entraînement pour me dire : "Dès que tu peux discuter avec Lyon, discute." J'ai discuté, mais les négociations coinçaient. Saint-Etienne m'a alors dit : "On t'a formé, tu dois nous rendre la monnaie de la pièce. Tu n'as pas le droit de faire capoter ce transfert." J'ai dès lors dû baisser mes revenus pour partir à Lyon. Je bénéficiais d'un intéressement de 10% sur mon transfert. Ayant été vendu 15 M€, je devais donc toucher une commission de 1,5 M€. Mais Sainté n'arrivait pas à revendre des joueurs comme Sanogo, Bergessio, Gelson qu'il avait achetés à un prix élevé et à qui il versait de gros salaires mais dont il ne voulait plus.

 

J'ai dû venir à l'Etrat avec mon agent pour discuter avec Bernard Caïazzo et Roland Romeyer. Au bout de dix minutes, j'ai accepté de prêter ma commission. Je ne l'ai pas touché car il fallait aider Saint-Etienne. Ce qui a été marrant, c'est que j'ai été sifflé à mon retour à Geoffroy-Guichard. Les supporters ne sont malheureusement pas dans la coulisse. C'est pourquoi je ne leur en veux pas. J'étais un joueur emblématique qui avait fait la panthère et je partais chez l'ennemi. C'est normal qu'ils l'aient mal vécu. Quand mon père a connu de graves problèmes de santé, la fille de Roland Romeyer s'en est occupée. C'est en grande partie grâce à elle s'il a survécu. Il était donc normal que je lui tende la main. Il faut aussi reconnaître que je m'y retrouvais. Je partais découvrir la Ligue des Champions et j'aspirais à l'équipe de France. Quand Saint-Etienne a pu, il m'a versé ma commission. C'est difficile de se voir traiter de traître alors que, dans une négociation de transfert, on est trois et le joueur est le dernier au courant, après que les deux parties se sont mis d'accord.

 

Je me suis refusé à rentrer dans le chambrage et à faire mal aux Stéphanois. Saint-Etienne est la main qui m'a aidé à manger et m'a fait grandir. Ce n'est pas mon genre de mal parler, comme l'a fait Frédéric Piquionne en partant. Peut-être était-ce dû au fait qu'il n'a pas été formé au club. Lors de mon premier derby avec Lyon, j'appréhendais les sifflets, même si je m'y attendais. J'avais eu droit à un avant-goût avec Piquionne, il avait ramassé. Je suis revenu avec la petite chanson chantée en présence de ma famille. "Le petit Gomis, le petit Gomis est une salope..." Je me suis alors rappelé que l'ASSE m'avait envoyé en prêt à Troyes, voulait de nouveau me prêter à Dijon à mon retour, où il a pris Lamine Sakho et Sébastien Mazure. Que mes amis présidents avaient dit : "Le public va le siffler." Personne n'avait pris les devants pour expliquer que je n'étais pas devenu l'ennemi. Je me suis donc mis dans la peau d'un Lyonnais. J'ai enfilé le maillot de l'OL et je me suis retrouvé seul contre tout un stade. "Le petit Gomis, le petit Gomis est une salope…" Je les ai pris à leur propre piège. Après mon but, tout est sorti, je suis redevenu une véritable panthère. Il me fallait extérioriser cette joie et cette colère enfouies au plus profond de moi.

 

Mon plus gros regret avec Saint-Etienne, c'est de ne jamais avoir pu gagner un trophée majeur. Quand j'ai vu les Verts remporter la Coupe de la Ligue en 2013, je n'ai pas ressenti un sentiment de jalousie. Mais du regret, ça oui. Parce qu'il n'y a pas que le foot dans la vie. L'amour que j'ai malgré tout reçu à Saint-Etienne, je ne l'ai retrouvé nulle part ailleurs. Même pas à Lyon, où j'ai pourtant marqué deux fois plus de buts. J'ai essayé inculquer les valeurs d'humilité à mon fils en l'emmenant visiter le Musée de la Mine."

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