Tranquille comme Baptiste, Lafleuriel travaille à Nantes. Mais il est resté Vert.


Quels souvenirs affleurent quand tu repenses à tes vertes années ?
J’ai vécu une super expérience pendant mes sept années à l’ASSE. C’est mon club ! Pour moi ça a été extraordinaire. J’ai une la chance de tomber dans une génération dorée. On a pratiquement tout gagné. J’ai joué notamment deux finales de Coupe Gambardella : la première, on avait gagné contre le PSG aux tirs au but. La seconde, on avait perdu aux tirs au but contre l’AJA de Philippe Mexès et Djibril Cissé. J’ai eu l’opportunité de jouer deux fois au Stade de France, ce n’est pas donné à tout le monde !

Quels joueurs t’ont le plus impressionné lors de ton septennat stéphanois ?
Quand je suis arrivé à Sainté à l’âge de 14 ans, la star de l’équipe première était Lubomir Moravcik. J’avais les yeux grand ouverts quand je le voyais à l’entraînement. Je regardais Lubo avec passion, avec fascination, avec admiration. C’était un joueur vraiment au-dessus techniquement, avec un pied extraordinaire. Plus tard, j’ai eu la chance de joueur avec Alex et Aloisio. J’aimais la puissance de José et le style d’Alex. En fin de séance, je lui adressai des centres qu’il reprenait de volée. Il avait une adresse hallucinante, un taux de réussite vraiment bluffant.

Dans ta génération, quels joueurs t’ont marqué ?
Julien Sablé bien sûr, ça reste mon capitaine. On était proche. Frédéric Mendy et Alassane N’Dour m’ont aussi marqué. En particulier Fred, il avait une aisance technique et des qualités de vitesse hors de commun. Quand on jouait à côté de lui, on était parfois admiratif de ce qu’il pouvait réaliser. Mais le seul joueur dont je sois vraiment resté proche est Sylvain Armand. On a continué de se voir quand il a été à Clermont. Après le monde pro s’est terminé en ce qui me concerne, mais lui à l’inverse a signé pro à Nantes. On s’apprécie, c’est pour ça que j’étais venu dans la région il y a quelques années. Je suis le parrain d’une de sa première fille, il est le parrain de ma plus grande.

Te souviens-tu précisément des quatre matches officiels que tu as joués en équipe première ?
C’est bien simple, j’ai joué un match par compétition : D2, Coupe de la Ligue, Coupe de France et D1 ! Je fais partie du groupe sacré champion de France de D2 car Robert Nouzaret m’a fait entrer en fin de match à Geoffroy-Guichard contre le Red Star lors de la première partie de saison. On avait gagné 2-1 grâce à un doublé d’Adrien Ponsard. Peu de temps après, j’ai joué près d’une heure contre Gueugnon, qu’on avait éliminé aux tirs au but. J’ai aussi pris part au 16e de finale de Coupe de France qu’on a perdu à Gerland aux tirs au but. Je me souviens très bien de cette rencontre. C’est énorme de jouer un derby en pro. On avait fait un bon match face à une belle équipe, emmenée par Sony Anderson. J’ai enfin joué titulaire contre Guingamp, l’année suivante en D1. D’un point de vue perso, j’étais satisfait de jouer en L1 dans le Chaudron, mais on a fait un match nul synonyme de relégation.

Ton expérience stéphanoise s’est mal terminée à cause d’une blessure...
Ma fracture au tibia, survenue lors d’un match de préparation après un stage très éprouvant en Roumanie, a été un vrai coup d’arrêt. Avant ça, j’étais proche de signer un contrat pro avec Sainté. J’étais en convalescence quand Alain Michel a été limogé suite aux mauvais résultats du début de saison. Frédéric Antonetti n’a pas eu le trop le temps de s’attarder sur mon cas. Je n’avais pas une grosse expérience et sa priorité absolue était de sauver le navire. Il n’a pas compté énormément, ce qui peut se comprendre. Je n’ai aucune rancœur, il n’a aucun souci. Je n’ai aucune amertume garde que du positif de mes années à Sainté. Ce n’est pas un club comme les autres. J’ai eu la chance de rencontrer plein de gens qui avaient été formés dans d’autres clubs comme Nantes ou Bordeaux. Quand tu discutes avec eux, tu sens qu’à Saint-Etienne il y a autre chose qui se passe. Il y a cette ferveur que tu sens très tôt, très vite. C’est quelque chose qui te marque à vie !

Après avoir joué à Andrézieux, à Aurillac puis à la Roche-sur-Yon, tu as vécu il y a dix ans une aventure de fou à Carquefou !
J’ai en effet vécu une superbe aventure cette saison-là. Alors qu’on était à la peine en CFA2, on a créé plusieurs exploits en Coupe de France. On s’est pris au jeu au fil des tours. Après avoir sorti Nancy, qui jouait à l’époque les premiers rôles en L1, on a éliminé l’OM en 8e de finale avant de perdre 1-0 en quart de finale à La Beaujoire contre le PSG de mon ami Sylvain Armand. J’avais également retrouvé Jérôme Alonzo à cette occasion-là. On avait longtemps résisté avant de céder sur un but de Pauleta. On avait joué à guichets fermés à une époque où le FC Nantes ne faisait pas recette car il végétait en D2. Il y avait une super ambiance. C’était génial à vivre pour le groupe. C’était fabuleux.

Que ce soit à l’ASSE, à Carquefou ou à Orvault, tu restes attaché au vert !
Oui, j’aime jouer en vert ! J’ai joué six ans à Carquefou, où j’ai vécu non seulement cette belle épopée en Coupe de France mais aussi deux montées, en CFA puis en National. J’ai ensuite évolué à Orvault. C’est la troisième saison que je suis revenu à Carquefou, j’ai passé mes diplômes. Je suis retourné ici pour encadrer les U19. Ça s’est super bien passé car la première année on a fini sur le podium et la deuxième on a été champion de la Ligue. Du coup cette année on m’a proposé de reprendre la réserve qui joue en DHR. Je ne me destinais pas à devenir éducateur, ça s’est fait un peu par hasard mais j’y ai vraiment pris goût. Ça a commencé en donnant un petit coup de main à Orvault chez les U17 nationaux. Je me suis rendu compte que j’avais des choses à transmettre, à partager.

T’inspires-tu de tes anciens formateurs ?
Absolument. J’ai d’ailleurs gardé cette culture qu’on m’a inculqué à Sainté. Je suis toujours dans ces vertus d’humilité pour mes joueurs, de travail, de rigueur. C’est vraiment ce que j’ai retenu d emon passage à Sainté. C’est un état d’esprit propre à l’ASSE. A Sainté, il y a quelque chose qui se dégage en plus dans cette manière de transmettre. Je l’ai profondément ressenti quand j’ai débarqué au centre de formation. Saint-Etienne n’est pas une ville comme une autre. Il y une histoire, un truc qui pouvait rejaillir par moment à travers nous. Je me suis imprégné de ça pendant toutes mes années à Sainté. Et ça m’a suivi, que ce soit lors de ma carrière en amateur et maintenant comme éducateur. Je souhaiterais d’ailleurs poursuivre cette voie de formateur au plus haut niveau. J’aimerais beaucoup être formateur dans un centre de formation d’un club pro.

Quels formateurs stéphanois t’ont particulièrement marqué ?
Le premier nom qui me vient à l’esprit, c’est Gérard Fernandez. C’est un pur stéphanois, très attaché au club, il y est toujours d’ailleurs. On sent qu’il est habité par cet état d’esprit-là. C’est vraiment lui qui m’a transmis ça. Après, j’ai eu des formateurs comme Christian Larièpe, Bertrand Reuzeau. Lui n’a fait qu’un bref passage mais il m’a marqué, c’était un bon pédagogue. On voit le travail qu’il a fait après, c’est une figure très respectée dans le domaine de la formation en France. Il a longtemps dirigé le centre de formation du PSG et exerce les mêmes fonctions depuis deux ou trois ans à Monaco. Il est hyper compétent. J’ai apprécié également un entraîneur comme Michel Audrain, il était vraiment dans la transmission.

Es-tu resté proche de l’ASSE ?
J’ai quitté le club il y a 16 ans mais l’ASSE ça reste et ça restera mon club. Moi je me sens Stéphanois. J’ai un attachement presque viscéral à Sainté même si je suis ça de loin car ici dans la région nantaise, c’est logiquement le FC Nantes qui prédomine. Mais je vais chercher des infos via Poteaux Carrés, le site officiel ou L’Equipe. Je suis toujours au courant de ce qui se fait, je suis attentivement l’actu du club. J’ai par exemple envoyé des messages à Julien à chacune de ses nouvelles prises de fonctions.

Que t’inspire son parcours cette saison ?
J’apprécie énormément Julien. Je n’ai pas été surpris par sa trajectoire d’éducateur et ça ne m’a pas étonné qu’il prenne rapidement des fonctions à la tête du centre de formation. Quand il était joueur, il était déjà dans le conseil, dans la transmission. Il faisait passer certaines choses à tout le groupe à travers son état d’esprit. Il vit bien sûr une saison très particulière. Après avoir été nommé entraîneur numéro suite au départ d’Oscar Garcia, il est passé numéro deux puis numéro trois. Je suis fier de ce qu’il est et je suis convaincu qu’il prend à cœur son nouveau rôle dans le staff. Julien a eu le courage de récupérer l’équipe première dans une période très difficile pour le club, qui sortait d’une défaite humiliante à domicile contre Lyon. Ce derby a été catastrophique. Julien aurait pu rester à l’abri à la tête du club mais il a voulu servir le club dans un contexte très délicat. C’est tout à son honneur.

Comment analyses-tu la saison des Verts ?
Il y a eu plusieurs saisons dans cette saison. Un été bon comptablement mais un peu trompeur suivi d'un automne franchement inquiétant. Je pense que ce match contre Lyon a fait beaucoup de mal dans les têtes, au sein du groupe et même chez les dirigeants. Cette déroute a forcément laissé des traces. L’enchaînement des défaites fait que l’équipe ne jouait plus du tout en confiance. Il y a eu ensuite un hiver marqué par un mercato intelligent qui a permis d’inverser la tendance. Les joueurs qui sont arrivés ont apporté une vraie plus-value au groupe. Neven Subotic et Mathieu Debuchy ont fait beaucoup de bien derrière. Au milieu, M’Vila est une bonne pioche. Devant Ntep peut être un joueur intéressant même s’il n’a pas pu encore donner sa pleine mesure. Le retour en forme de Cabella a également été bénéfique à l’équipe. Et n’oublions pas Beric ! On peut dire ce qu’on veut, c’est un finisseur. C’est ce qui manquait à Sainté cette première partie de saison. Je ne suis plus inquiet pour les Verts.

Te prends-tu même à rêver d’Europe pour Sainté ?
Pourquoi pas ? En cas de victoire à Nantes, les Verts reviendraient à deux points des Canaris. Moi je pense vraiment que les Verts ont un coup à jouer vu leur deuxième partie de saison et leur dynamique actuelle. Cette équipe stéphanoise produit un jeu intéressant et peut s’appuyer sur d’autres bons joueurs que les recrues hivernales. Je pense notamment à Loïc Perrin, un garçon que j’ai connu à Sainté quand il jouait dans les équipes de jeunes. Je l’apprécie énormément pour sa fidélité au club et son état d’esprit. Il est toujours serein et mesuré dans ses propos. J’espère qu’il aura une fin à la hauteur de ce qu’il a fait. Loïc est vraiment un exemple pour les plus jeunes.

Toi qui vis dans la région nantaise depuis de nombreuses années, es-tu devenu au fil du temps un peu supporter des Canaris ?
Non, pas plus que ça ! (rires) Je vais de temps en temps au stade mais au final assez rarement. Pas parce que c’est le FC Nantes mais par manque de temps. J’ai mon travail de magasinier à Crazy Republic, un magasin de prêt-à-porter basé à Nantes en plus de mes fonctions d’éducateur à Carquefou qui me prennent beaucoup de temps. Mais je suis quand même le parcours des Canaris. On a des contacts avec eux car c’est un club voisin. Comme on est un gros club de jeunes, on a des contacts très réguliers avec le FC Nantes. Je suis leur politique de jeunes mais j’ai rarement le temps de voir les pros à la Beaujoire.

Que t’inspire cette équipe nantaise ?
Vu l’effectif qu’ils ont, je trouve que ce qu’ils arrivent à faire est plutôt pas mal. Au niveau du spectacle, ce n’est pas toujours à la hauteur de ce que l’on attendrait. Mais par contre c’est diablement efficace ! Ils ont un entraîneur très expérimenté et très rigoureux, qui ne laisse rien au hasard. Les Nantais font déjouer pas mal d’adversaires car ils sont bien en place. Ils ont une certaine rigueur défensive tout en étant efficaces offensivement. Ils ne gagnent quasiment jamais par plusieurs buts d’écart mais ils arrivent à faire de bons résultats là où on ne les attend pas. Nantes, c’est une autre manière de voir le foot. Ce n’est pas le foot que j’aime beaucoup. Pour le moi le foot est un spectacle et doit créer quelque chose chez les gens qui viennent le voir. Le foot doit être un vecteur d’émotions. Par moment on s’ennuie avec Nantes mais bon, ça reste efficace.

Quid de l’ambiance ? L’ambiance de la Beaujoire est-elle comparable à celle du Chaudron ?
Moi je trouve que ce n’est pas comparable ! (Rires) Attention, il y a une belle ambiance à la Beaujoire, il y a vraiment un kop qui fait des beaux trucs. Mais on n’est pas dans les chaleurs que moi j’ai connu à Geoffroy. Moi j’ai des souvenirs d’ambiance incroyable dans le Chaudron, notamment contre Lyon et Marseille. Même si on s’en rapproche un peu, on n’est pas à Nantes dans des ambiances aussi intenses qu’à GG. A Nantes il n’y a qu’un kop qui met l’ambiance alors qu’à Sainté il y en a deux, le kop nord avec les Magic Fans et le kop sud avec les Green Angels. Du coup ça ne rend pas pareil, c’est différent. Ceci étant, Nantes ça reste pas mal du tout à l’échelle de la Ligue 1. Nantes est une ville de foot, une ville de sport.

Quel est ton prono pour dimanche ?
Je m’attends à un match serré. Les dernières confrontations entre les deux équipes n’ont pas donné lieu à des scores très larges. Il y a eu pas mal de matches nuls. Je vois bien un petit 1-0 pour Sainté, ça m’irait très bien. But de Robert Beric... A moins que ce ne soit Loïc ! Curieusement il n’a pas encore ouvert son compteur but cette saison, ce serait top qu’il le fasse à la Beaujoire.

 

Merci à Baptiste pour sa disponibilité.