Deuxième match nul consécutif en déplacement pour les Verts, qui continuent leur série d'invincibilité, même si la manière laisse à désirer.


Dans leurs déclarations après le match, les deux entraîneurs ont le même avis - un match fermé, par crainte des attaquants adverses (des deux côtés) - et sont satisfaits du résultat, surtout que Montpellier est une "équipe difficile à manœuvrer" (de l'avis des deux, toujours). On note quand-même une petite pique de Jean-Louis Gasset ("on a trop porté le ballon dans les enchaînements dans les trente derniers mètres") et elle est probablement adressée à Cabella. Si lors des 17 premières minutes à Strasbourg (avant le rouge de Subotic), il a eu une possession du ballon de 5,1% et les trois autres offensifs réunis de 6,7%, pour la même période du match à Montpellier, il a eu 7,8% et les trois autres 6,9% - pour référence, l'ASSE a eu une possession similaire lors des deux périodes de 17 minutes (autour de 54%).

Que ça soit à cause de l'état de la pelouse ou du fait d'avoir trop porté le ballon, l'animation offensive de l'ASSE n'a pas été très concluante. Mais ça n'a pas trop contrarié les plans du staff stéphanois qui a d'abord cherché à éviter tout danger, en espérant éventuellement une étincelle offensive de la part de son duo Cabella - Khazri. Aucun ajustement tactique à la pause, pas de coaching (premiers changements à la 85e) en cherchant des profils différents, tout laisse penser que l'objectif principal pour les Verts n'était pas de mettre en danger l'adversaire. Comme circonstance atténuante, il faut préciser que les Stéphanois ont évolué dans un dispositif peu habituel et les automatismes ne sont pas encore en place.

Si on regarde seulement la composition d'équipe, elle ressemble beaucoup à celle du match précédent, avec les changements obligatoires de Kolo à la place de Subotic (suspendu) dans l'axe de la défense et de KMP à celle de Hamouma (blessé) dans le couloir droit. A Strasbourg, les Verts avaient défendu en 4-4-2 et proposé une animation offensive en 4-2-3-1, mais ça n'a pas été le cas à Montpellier. Même si parfois on a pu apercevoir un 4-4-2 défensif...


... il a été assez rare, compte tenu du système proposé par l'adversaire (3-5-2) et du fait que Cabella a eu du mal à tenir son couloir. Ainsi, les deux joueurs de couloir héraultais ont été pris par KMP à droite et Gabriel Silva à gauche. Comme il y avait deux avant-centres en face, Debuchy est resté en défense pour aider Perrin et Kolodziejczak, prenant rarement son couloir. Ainsi, intentionnel ou pas, le système des Verts s'est adapté à celui de leurs adversaires, semblant souvent à base d'une défense à 3 ou 5. Prenons deux exemples pour illustrer cela, avec et sans ballon.

 

Avec le ballon


Peu avant la 21e minute, Cabella joue en coup franc avec M'Vila :


Les Stéphanois se passent le ballon dans leur propre moitié, préparant une attaque. On remarque que Gabriel Silva est déjà monté dans son couloir gauche, presque à hauteur de KMP à droite et Khazri dans l'axe, pendant que Debuchy est resté bas, à hauteur de Perrin et Kolo. C'est le capitaine qui reçoit le ballon et qui décide de passer le premier rideau de trois Montpelliérains par une passe sautée à destination de Cabella :


Celui-ci contrôle et avant qu'il donne le ballon à un coéquipier on peut mieux apercevoir la disposition tactique des Verts :


Trois défenseurs (Debuchy ne montera quasiment jamais dans ce match), un avant-centre, deux joueurs de couloir (KMP et Silva)... et quatre milieux axiaux disposés en losange, avec M'Vila en retrait et Khazri en pointe. Le ballon circule sur les côtés du losange jusqu'à Selnaes...


... qui le redonne à M'Vila, qui écarte vers la gauche et la passe de Kolo est contrée en touche par un adversaire. La remise est pour M'Vila...


... qui s'appuie sur Cabella, qui joue en retrait avec Perrin. De nouveau, Gabriel Silva et KMP sont à la même hauteur, pendant que Debuchy reste en retrait. Cabella, Selnaes et Khazri se trouvent quasiment sur la même ligne, le dernier ayant décroché pour chercher le ballon. C'est toujours M'Vila qui est servi...


... et Cabella lui propose une solution à gauche. Il déclenche l'attaque en jouant en profondeur dans le couloir, où il y a un double appel de Diony et Gabriel Silva :


Deux Stéphanois... mais pas de surnombre, Montpellier propose une défense à 5 et si on voit trois défenseurs sur l'image précédente, ça veut dire que deux autres ont suivi :

 
Enfermés dans ce coin du terrain, les Verts finissent par perdre le ballon.


Sans le ballon

 
Une dizaine de minutes plus tard, c'est Montpellier qui construit une attaque en se passant le ballon entre les défenseurs :


Le duo Khazri-Diony cherche à empêcher les passes vers les milieux centraux et on peut considérer que derrière il y a une ligne de 4 KMP-Selnaes-M'Vila-Cabella. Ils ne sont pas parfaitement alignés, mais les deux excentrés sont proches de ce qu'on peut considérer leurs adversaires directs (les pistons), c'est ce qu'on leur demande. Les Héraultais continuent à garder le ballon en défense, sans pressing de la part des Stéphanois, qui reculent :


Si KMP est descendu avec le piston gauche adverse, Cabella a abandonné le sien, le laissant à Silva et en se dirigeant vers l'axe - avec la position plus en retrait de Khazri, on aperçoit de nouveau un losange dans l'axe. Le ballon quitte enfin les pieds des défenseurs...


... et les Verts se font avoir par les appels adverses. Le milieu offensif, placé entre les lignes, fait un appel qui attire Debuchy et M'Vila, pendant qu'un milieu axial se place dans l'espace libéré par le dernier, où il est trouvé par son compère - ni Khazri, ni Cabella, n'ont fait l'effort de suivre.

 
KMP suit toujours le piston gauche. Comme Debuchy était sorti de la défense et il y a deux avant-centres adverses, pour ne pas laisser Perrin et Kolo seuls contre eux, Silva doit serrer dans l'axe, laissant ainsi le piston adverse tout seul dans son couloir. Heureusement pour l'ASSE, l'adversaire choisit un tir de loin, qui passe largement au-dessus.
 



Conclusions


On ne peut pas tirer des enseignements tactiques à partir de ce match. Tout d'abord, les automatismes ne sont pas encore en place, le staff stéphanois n'arrive pas encore à faire jouer ensemble les deux recrues offensives de cet été, Khazri et Cabella. Ensuite, le mercato n'est pas fini et on cherche des profils différents par rapport à ce qu'on a à l'heure actuelle. Et finalement, ce match à Montpellier a été assez particulier d'un point de vue tactique et il est peu probable de voir les Verts disposés de la même manière régulièrement. C'est seulement à partir de mi-septembre qu'on pourrait s'attendre à voir le vrai visage tactique de l'ASSE 2018-2019, après une trêve internationale utilisée pour travailler avec un effectif finalisé. Mais d'ici là, il reste un match, la réception d'Amiens, qui devient importante d'un point de vue comptable : s'asseoir sur la manière pour se contenter d'un nul à l'extérieur a du sens seulement si c'est bonifié par une victoire à domicile...