Les Verts ont mal démarré la phase des matchs retours, concédant une défaite à domicile à terme d'un match sans spectateurs et sans rythme...


Le résultat c'est une chose, la manière c'en est une autre. Et les deux ont été décevants pour l'ASSE lors de la réception de Nantes. Claude Puel en conférence de presse en est parfaitement conscient : "notre performance a été insuffisante face à une équipe bien organisée (...) il manquait toujours le bon appel, la bonne passe vers l’avant. On s’est au contraire installés dans un train-train et on a manqué de tempo". Il est évident que l'absence des supporters a joué sur le manque de rythme qu'on a pu observer dans le jeu stéphanois, mais la prestation sans relief des Verts  ne peut pas avoir comme seule raison le huis clos. Bien sûr, la solidité du bloc défensif adverse y a aussi contribué, comme d'autres facteurs qui seront plus évidents dans les exemples suivants.

 

1MT : Passer les lignes adverses


Il est difficile d'illustrer dans une analyse tactique un manque de rythme ou de vitesse dans le jeu. On pourrait prendre comme exemple les nombreuses séquences des passes répétées entre défenseurs, incapables de trouver une solution vers l'avant, mais, pour positiver un peu, on regardera plutôt un exemple d'une des rares attaques construites proprement par les Verts.

Mais avant cela, le système tactique :


Un 4-2-3-1 classique, avec Khazri avant-centre et Boudebouz en meneur de jeu devant une paire de milieux axiaux Cabaye - Mahdi Camara. L'enjeu de l'animation offensive des Verts a été de faire remonter le ballon proprement des défenseurs jusqu'aux attaquants.
 

Comme par exemple à la 13e minute, quand Ruffier joue avec Perrin et via Moukoudi le ballon arrive jusqu'à Palencia :


Les deux premières lignes du bloc nantais sont visibles, les deux attaquants se sont employés à couper les angles de passe vers les deux milieux axiaux stéphanois, Cabaye et Camara. Les Verts sont donc obligés de trouver d'autres possibilités pour amener le ballon vers le but adverse - dans cet exemple, c'est Palencia qui cherche à trouver un coéquipier plus haut :


Boudebouz se trouvait entre les lignes, Khazri décroche et y va aussi. La passe de Palencia n'est pas trop précise et elle est interceptée par le latéral gauche adverse. Heureusement, Cabaye intercepte aussi la passe de ce dernier et Palencia récupère de nouveau le ballon.


Le jeu change de côté, via Moukoudi et Camara, mais les transmissions sont lentes et le bloc adverse a le temps de coulisser. Le milieu droit nantais intercepte la passe vers Trauco, mais le ballon sort en touche. Perrin reçoit le ballon sur la remise en touche et une nouvelle attaque doit être construite :


Camara et Cabaye ne sont pas trouvables, il est difficile de faire parvenir le ballon entre les lignes jusqu'à Boudebouz.. à moins qu'en espace soit créé. L'appel en profondeur de Khazri fait reculer la défense et son milieu offensif se retrouve libre :


Perrin le trouve parfaitement, mais le contrôle est approximatif et les Nantais ont le temps de revenir. Un milieu récupère le ballon dans les pieds de Boudebouz, un contre peut être lancé...


... mais Palencia lit bien le jeu et intercepte, avant de lancer Honorat à droite. L'ailier stéphanois combine avec Boudebouz, qui lui avait proposé une solution en s'excentrant...


... mais qui choisit ensuite de jouer en arrière, avec Moukoudi. Le jeu est de nouveau envoyé à gauche, via Perrin :


Trauco reçoit le ballon, mais le bloc adverse, de nouveau en place, a le temps de coulisser. Le latéral gauche s'appuie sur Camara, qui combine avec Nordin, qui retrouve Trauco. Le jeu est fermé de ce côté, alors on change :


Moukoudi reçoit le ballon, les Nantais coulissent vers leur gauche, mais pas assez vite pour fermer tous les angles de passe :


La belle passe verticale trouve Boudebouz entre les lignes, qui sert Khazri. L'avant-centre stéphanois n'est pas hors jeu (la défense avait reculé) : il dribble un défenseur, mais perd le ballon avant de pouvoir armer sa frappe.

L'action précédente est une des rares en 1MT où les Verts ont réussi à amener le ballon proprement de leur défense jusqu'aux 30 mètres adverses. La faute à un bloc adverse qui a rendu impossible le travail des milieux axiaux et à des attaquants restés en général assez haut : une équipe stéphanoise trop étirée sur la longueur en phase de construction pour y arriver facilement. Les Stéphanois ont ainsi gardé le ballon en première période, mais ils se sont rarement montré dangereux, ayant en général du mal à arriver jusqu'à la surface adverse. Ainsi, en 1MT ils ont eu la possession (63%), mais ils ont tiré moins souvent que les Nantais (4 tirs à 7).


2MT : Pas de bloc équipe

 
Non seulement les Stéphanois ont eu du mal à construire leurs attaques, mais en plus ils ont été approximatifs en défense. Et la différence entre le bloc proposé par les deux équipes a été évidente, comme par exemple à la 48e minute, quand les 4 offensifs déclenchent un pressing sur les défenseurs nantais :


Abi était entré après la pause à la place de Boudebouz, Khazri reculant un peu d'une position d'avant-centre à celle de milieu offensif. Honorat cherche son latéral, Khazri un central... et Abi et Nordin pressent tous les deux le même autre défenseur. Qui parvient à trouver son avant-centre, qui remet au latéral droit, qui n'a plus d'adversaire direct.


Il a donc le temps d'attendre des appels. Perrin ayant sorti avec l'avant-centre, l'autre attaquant nantais plonge dans son dos, où il est trouvé par son latéral, passant avant Moukoudi, trop lent.


Le bloc défensif stéphanois n'est plus en place. Camara a du couvrir à gauche, Moukoudi et Trauco s'y trouvent aussi. Il y a de l'espace entre les défenseurs, bien exploité par les Nantais, Cabaye étant trop loin pour empêcher l'avant-centre adverse de recevoir le ballon dans la surface. Heureusement son centre passe devant la cage de Ruffier sans être repris. Le ballon est néanmoins récupéré par le milieu gauche, qui temporise :


Honorat et Cabaye se trouvent à 2-contre-2 dans ce couloir, Palencia y va aussi, laissant ses coéquipiers à 4-contre-4 dans la surface. Ce n'est normalement pas si grave, sauf que Cabaye et Camara anticipent tous les deux une passe à l'extérieur de la surface :


Un des attaquants adverses se trouvent ainsi tout seul dans la surface, où il est trouvé et où il élimine par son contrôle un Moukoudi arrivé trop tard. Et les Verts encaissent un deuxième but, dès le début de la deuxième période...


Après l'entrée d'Abi après la pause, deux autres changements des joueurs offensifs sont intervenus au cours de la deuxième période. Rivera est entré à la place d'Honorat...


... et a pris la place de "10", pendant que Khazri s'est excentré à gauche et Nordin a changé d'aile, à droite. Ensuite, en fin de match, Edmilson est entré à la place de ce dernier...


... et les trois milieux offensifs ont de nouveau permuté, Khazri dans l'axe, Rivera à droite et le nouveau entré à gauche. Les entrants ont apporté de l'envie, de la vivacité, mais le jeu collectif des Verts a toujours été poussif et pas inspiré...


Conclusions


Sans supporters il est difficile de mettre du rythme, et sans rythme il est difficile d'avoir une animation offensive digne de son nom. Surtout quand il y a toujours de très nombreux absents dans les rangs stéphanois. Mais ce n'est pas l'absence d'animation offensive qui est la plus inquiétante, c'est le manque de rigueur défensive, comme le souligne très bien Claude Puel : "on concède des buts qu’on devrait pouvoir éviter. On doit faire preuve de plus de rigueur défensive et être plus vigilants (...) Il nous faudra faire preuve de plus rigueur collective et retrouver un niveau de performance homogène au sein de l’équipe". Et c'est maintenant le chantier prioritaire du staff stéphanois, retrouver un vrai bloc équipe, une défense sereine et solide.