Ancien joueur de l'ASSE et du Mans, David Charriéras suivra avec attention le match des Stéphanois à Léon-Bollée. En attendant, il nous retrace sa carrière et livre son sentiment sur les Verts.


David, quels souvenirs gardes-tu de ta période stéphanoise ?

Je ne garde que de bons souvenirs. J'ai quand même passé près d'une dizaine d'années à Sainté ! Je suis arrivé à l'ASSE à 13 ans et demi. J'ai fait toutes mes classes dans le centre de formation, sous les tribunes du Chaudron car il n'y avait pas encore le centre de formation de l'Etrat à l'époque. A 19 ans, j'ai signé mon premier contrat pro. Pierre Mankowski m'a lancé lors de la saison 1996-1997. La saison d'après, j'ai évolué sous les ordres du duo Robert Herbin - Pierre Repellini. La saison suivante, j'ai participé à la remontée.

Mais tu as quitté le club en décembre pour rejoindre Caen. Pourquoi ?

Aujourd'hui je peux dire que j'ai fait une grosse connerie. J'aurais dû être plus patient mais à l'époque j'avais des prétentions, je n'étais pas satisfait de mon temps de jeu. Pourtant j'étais régulièrement dans le groupe, ça prouve que Robert Nouzaret comptait sur moi. Mais bon, je me suis braqué bêtement. A 33 ans, j'ai aujourd'hui une autre vision des choses qu'aux moments des faits, lorsque j'en avais 22. A l'époque, je n'avais pas supporté d'être remplaçant alors que je sortais d'une saison où j'avais joué 35 matches. Je croyais être l'un des cadres de l'équipe alors que j'avais encore beaucoup de choses à prouver. Mais bon, c'est comme ça, je ne retiens que des choses positives de mes années en vert malgré les mauvais résultats des deux premières années. J'ai découvert le foot pro grâce aux Verts. Humainement, j'ai beaucoup appris au contact de mes entraîneurs et de mes coéquipiers.

Peux-tu nous rappeler quel a été ton parcours après avoir quitté le Forez ?

Après mon prêt de six mois à Caen, j'ai signé au Mans pour trois saisons. J'ai vécu de bons moments là-bas. On avait une belle équipe, j'ai joué notamment avec Didier Drogba et Stéphane Samson. Arrivé en fin de contrat en 2002, j'ai été contacté par l'entraîneur de Rouen Yves Brécheteau, l'ancien adjoint de Robert Nouzaret. Ma première saison en Normandie s'est bien passée, avec une montée en Ligue 2 à la clé. On avait un bon groupe, avec des joueurs comme Philippe Chanlot et Hubert Fournier. Mais la saison suivante, on a détecté que j'avais une arthrose au genou droit. J'ai du mettre un terme à ma carrière de joueur au cours de cette saison 2003-2004 car je n'avais plus de cartilage. Je n'étais plus opérable.

Un vrai coup dur, d'autant plus que tu n'avais même pas 28 ans à l'époque !

Effectivement. Jusqu'à présent, j'avais été épargné par les blessures chez les pros. Je m'étais juste fait les croisés à Sainté quand j'avais 17 ans. J'avais été opéré avec succès par le docteur Imbert et je n'avais jamais eu de problème auparavant. Devoir mettre un terme à sa carrière de joueur à 28 ans, c'est difficile. Depuis l'âge de 13 ans, toute ma vie était consacrée au football. Et tout d'un coup tout s'arrête. La situation était d'autant plus délicate que j'étais déjà marié avec deux enfans.

Dans quel domaine as-tu choisi de te reconvertir ?

Avec mon épouse, on a pris le temps de la réflexion. J'ai eu des opportunités de passer mes diplômes d'entraîneur mais je ne tenais pas spécialement à rester dans le milieu du foot. Je préférais un poste stable permettant de me poser et de m'occuper de ma famille. J'ai d'abord eu le projet de gérer des gîtes et des chambres d'hôtes pour une clientèle haut de gamme en Dordogne. Mais après avoir fait une étude de marché, j'ai préféré renoncer. J'ai ensuite été sollicité pour reprendre un magasin Sport 2000 en Corrèze. Les négociations ont duré quelques mois mais elles n'ont pas abouti. Mais ça m'a donné l'idée de monter un magasin de cette enseigne. Depuis cinq ans, je gère deux magasins à Saint-Yriex la Perche, une petite ville située à equidistance de Brive (ma ville natale), Périgueux et Limoges : un Sport 2000 de 400 m2 et un Sport Nature de 200 m2. Les affaires sont plutôt bonnes et je m'éclate dans ce boulot.

Suis-tu toujours avec attention les résultats des Verts aujourd'hui ?

Plus que jamais ! Plus les années passent, plus mon coeur reverdit. Saint-Etienne est en moi, je suis vacciné à vie ! J'ai encore des attaches dans la Loire car ma belle famille est à Saint-Marcellin-en-Forez. J'ai donc l'occasion de retourner de temps en temps à Geoffroy-Guichard. Quand je vais au stade, j'ai des frissons. Quand je passe dans la région, j'essaye d'aller au centre d'entraînement à l'Etrat. J'y vais discrètement, comme un supporter "de base", je dis ça sans connotation péjorative car j'en suis un maintenant. J'aime observer les entraînements, palper l'ambiance. Je regarde également pas mal de matches des Verts à la télé, là encore en supporter passionné : je saute de mon canapé à chaque but des Verts !

Es-tu resté en contact avec d'anciens coéquipiers stéphanois ?

Essentiellement avec Lionel Potillon. J'ai également de temps à autres Jeannot Dés et Jérémie Janot au téléphone. La semaine dernière, j'ai eu l'occasion de déjeuner avec Willy Sagnol. Mais sinon je n'ai pas vraiment gardé de contacts avec les autres. Dans ce milieu, se faire de vrais amis est difficile. Je considère que le foot est un sport collectif mais un milieu d'individualistes. On se fait des tapes dans le dos, on déconne ensemble, on se fait des bisous mais souvent ça s'arrête là. Ensuite chacun vit sa vie.

Que penses-tu des difficultés actuelles de l'ASSE ?

Je pense que c'est un gros gâchis. Je ne parle pas uniquement de cette saison mais de ce qui se passe dans ce club depuis plusieurs années. Il y a des choses que je n'arrive pas à comprendre dans la gestion de ce club. On en a parlé récemment avec Willy. Je ne comprendrais jamais pourquoi on persiste à changer d'entraîneur aussi souvent. OK, il y a de la passion à Sainté, de la pression. OK, certaines anciennes grandes figures du club émettent des avis critiques. Mais le club aurait vraiment besoin de stabilité. On a fait sortir Antonetti par la petite porte. On a vu depuis qu'il a fait du bon boulot et obtenu de bons résultats avec Nice. Dans le même temps, Sainté a vu défiler plusieurs entraîneurs qui sont partis dans un climat conflictuel. La saison dernière, on a viré Laurent Roussey au bout de trois mois alors que la saison précédente, l'équipe avait fini à la 6ème place et retrouvé la coupe d'Europe sous sa direction. Il faut laisser du temps aux hommes en place plutôt que de les condamner dès que l'équipe enchaîne quelques mauvais résultats ! Un an après le limogeage de Laurent Roussey, on se rend compte que le changement d'entraîneur n'a pas servi à grand chose. Le bilan d'Alain Perrin n'est pas meilleur que celui de son prédécesseur.

Comme expliques-tu les mauvais résultats des Verts cette saison ?

Notre équipe a un bon potentiel, on a de jeunes joueurs intéressants comme Bakary Sako et Dimitri Payet. Il y a moyen de faire quelque chose de bien avec ce groupe mais mentalement, il y a un souci. Quand je vois jouer des équipes comme Auxerre et Lorient, j'ai l'impression qu'elles essayent de jouer pour gagner. Quand je vois Sainté, j'ai parfois l'impression que les mecs se disent "on va essayer de ne pas perdre". Le match contre Lorient, on s'est fait bouffer la première demi-heure. Les joueurs n'y étaient plus. A ce niveau, tu ne peux pas te permettre de passer complètement à côté de ton sujet pendant une mi-temps. Sainté me donne l'impression sur certains matches d'avoir le trouillomètre à zéro. Quand les Verts réagissent, il est souvent trop tard.

Que penses-tu des nombreuses blessures qui touchent l'effectif stéphanois depuis plus d'un an ?

Cette impressionnante série de blessures m’interpelle, comme tous les supporters stéphanois. Je ne sais pas si c’est dû à la préparation physique. A mon avis, certaines blessures sont liées au mental des joueurs. Quand tu n’es pas trop bien dans ta tête, tu as plus de risques de te blesser, il y a eu des études là-dessus. A l’inverse, quand t’es fort dans tête, tu peux faire des gros matches dès ton retour de blessure. J’étais à Bordeaux pour le match contre la Juve. Chamakh était incertain mais il a pu tenir sa place et faire un super match.

Sainté va gagner à Bollée ? A quel type de match t’attends-tu ?

Honnêtement, je m’attends à un match hyper crispé car les deux équipes sont en total manque de confiance. Ce match n’est pas dramatique, on est encore tôt dans la saison. Mais les deux clubs ont vraiment besoin de se rassurer et de prendre des points. L’équipe qui arrivera le mieux à faire abstraction du classement a de grandes chances de l’emporter. Celle qui se dit « même si on perd, on n’est pas mort » jouera libérée et pourra faire la différence. Sainté sera encore privé de quelques bons joueurs mais je crois que les Verts sont capables d’aller gagner au Mans. Il faudra bien évidemment qu’ils évitent de rééditer leur première mi-temps contre Lorient.

Pour clore notre entretien, le questionnaire de Proust revu et corrigé par Poteaux Carrés. Ton équipe préférée ?

Sainté.

L’équipe que tu détestes ?

Monaco.

Ton geste technique favori ?

Une passe bien ajustée.

Le son, le bruit du stade que tu aimes ?

La musique en entrant sur le terrain de Geoffroy-Guichard l’année de la remontée.

Le son, le bruit du stade que tu détestes ?

Les sifflets.

Ton juron, ton gros mot ou blasphème favori lors d’un match ?

Fais chier !

Un footballeur pour illustrer un nouveau billet de banque ?

Willy Sagnol.

Le métier du foot que tu n’aurais pas aimé faire ?

Directeur sportif.

Le joueur, l’entraîneur ou l’arbitre dans lequel tu aimerais être réincarné ?

David Ginola.

Si le Dieu du foot existe (on aurait entraperçu sa main lors d’un Angleterre-Argentine resté célèbre), qu’aimerais-tu après ta mort, l’entendre te dire ?

Bravo, t’as bien mouillé le maillot !