Ca commence à dater, mais j'ai enfin trouvé la motivation de faire un petit CR de ma découverte du foot anglais. Here we go donc:
LEYTON ORIENT FC - STOCKPORT COUNTY FC
Tout le monde ici connaît Romain Molina, pour le meilleur et pour le pire. Mais avant d'être une personnalité publique des scandales du football professionnel, un influenceur ou que sais-je, pour moi, ce nom a résonné en premier comme une porte ouverte sur le berceau crasseux du football : le Royaume-Uni, plus précisément ses divisions inférieures. Le défunt blog "Kick Off" hébergé sur l'Equipe, puis le défunt site "Hat Trick" ont occupé beaucoup de mes étés d'adolescent sur Internet. Comme l'imagination est la plus belle des destinations de vacances, j'adorais naviguer entre les présentations de clubs improbables, de propriétaires fantasques, de supporters passionnés et de "frenchies" amenés par les circonstances dans ce joyeux bordel à la fois professionnel et populaire.
Parmi ceux-là, je me souvenais bien du portrait de Mathieu Baudry. "J'ai dormi comme un clochard sur un banc à l'aéroport", une phrase isolée de la description de son périple qui l'avait amené dans le Nord-Est londonien, chez les O's de Leyton, annonçait la couleur : le fond de la Football League et la Non-League sont un drôle de monde où la galère est inévitable, mais les émotions fortes aussi. Alors quand s'est présentée l'occasion de découvrir la Perfide Albion avec ma meilleure pote, une étape obligée du voyage était de voir un match de l'un des trèèèèès nombreux clubs londoniens. Wimbledon et Charlton jouant à l'extérieur ce weekend-là, le meilleur choix (pour £30 la place tout de même, ça déconne pas) était naturellement Leyton Orient.
Après une matinée à longer la Tamise, on traverse donc le quartier animé de Whitechapel pour prendre le métro et arriver à Leyton, un arrêt un peu excentré de la Straford Line. Une ligne rouge qui traverse toute la ville pourrait évoquer les ambiances post-apocalyptiques de
Metro 2033 mais rien de tout ça une fois arrivés, simplement un quartier tranquille et assez multiculturel où semble implanté une forte communauté roumaine.
Orient a beau être un club de troisième zone et autant de divisions, le quartier vibre clairement pour lui
A vrai dire, Orient n'a pas toujours été basé à Leyton puisque le club ne s'y installera qu'après la Seconde Guerre Mondiale, sa demeure initiale étant le quartier de Clapton un peu plus au Sud-Est. Pour autant et malgré le pamarès limité des O's (une seule participation à la D1 dans les années 60 et de très nombreuses années de vaches maigres entre la D3 et la D4), le quartier l'a clairement adapté puisqu'on aperçoit de nombreux maillots rouges ornés d'un dragon au Five Lads, sorte de version british du Five Guys où les burgers graisseux et les frites qui débordent dans tout le sac sont remplacés par de délicieuses ailes de poulet. Brisbane Road n'est qu'à quelques minutes à pied et l'entrée ne paye pas de mine, une demi-heure avant le coup d'envoi le public ne se presse pas au pied d'une tribune grise qui a plutôt une gueule d'entrepôt. Le stade est connu pour avoir des logements disposés aux quatres angles de ses tribunes, un détail amusant mais pourtant pas si remarquable une fois sur place.
La mention "East London's Finest" aurait de quoi faire sourire vu comme ça quand on pense aux West Ham, Millwall et autres Charlton, mais l'ambiance reste agréable
Une fois à l'intérieur, on se retrouve au milieu d'une foule de supporters discutant tranquillement devant une bière juste en-dessous des gradins alors que des écrans diffusent les derniers résultats de Championship (D2). Des images d'Ipswich Town (désolé aux anciens) ou de West Brom apparaissent à l'écran, mais les maillots bleus qu'on verra aujourd'hui sont ceux de Stockport County, club de la banlieue de Manchester plutôt habitué aux divisions inférieures mais qui réalise un parcours extrêmement sérieux ces dernières années et sont pressentis en ce début de saison pour remporter le titre de champions de League One (D3). Leurs supporters, juste à notre gauche, sont venus en nombre et mettent l'ambiance, ce qui est aussi étonnant qu'appréciable dans un stade anglais post-lois contre le hooliganisme où je ne m'attendais pas à grand-chose.
Côté Orient c'est calme, très calme, au point que ce post serait presque déplacé pour le topic "Monde des tribunes" puisqu'à part quelques "Come on Orient" on n'entendra pas grand-chose pendant la majorité du match. Les visiteurs n'auront même pas de réponse à leurs provocations à la 10ème minute avec un classique mais toujours drôle "Orient's a sh*thole, I wanna go home" (par contre les anglais ont un et un seul air pour tous leurs chants, c'est terrible). La rencontre est rapidement prise à leur compte par les visiteurs qui proposent peu d'eux-mêmes, mais exploitent parfaitement les contres offerts par Orient et claquent deux buts avant la pause, notamment un de la part de Nathan Lowe, la révélation de la première partie de saison de Walsall en League Two (D4) l'an passé. A la mi-temps, les londoniens ayant besoin de se redonner du courage, la queue pour la bière est trop longue ; on reste donc en tribunes à regarder un jardinier bedonnant en polo rose donner des coups de fourche aléatoires dans la pelouse comme s'il préparait un fond de tarte au citron. Il faut espérer qu'Orient montrera autre chose que la piteuse imprécision de ces 45 premières minutes.
Heureusement, les locaux revienennt avec de meilleures intentions, plusieurs individualités et des circuits de passent ressortent même si c'est encore assez compliqué. Ca se concrétise avec une réduction de l'écart à la 57ème par le 10 Connolly, idéalement servi après un déboulé côté gauche du 7 O'Neill, puis les occasions s'enchaînent, s'enchaînent, sans rien donner... Les multiples gains de temps de Stockport pour conserver le résultat amènent un temps additionnel de 7 minutes et une provocation des supporters visiteurs, pas pour très longtemps. 93ème minute, le 15 Bakinson fraîchement entré en jeu casse toutes les lignes par une passe lumineuse à destination d'O'Neill. Celui-ci gagne son duel à l'épaule avec le défenseur puis ajuste le gardien adverse entre les jambes, c'est (enfin) la folie en tribunes ! Le match se termine par une belle séquence de kick and rush pour faire honneur au foot anglais à l'ancienne, puis par une bière au pub à côté du stade où notre billet nous offre le privilège de voir Wolverhampton se faire exploser par City à la télé. C'est déjà le moment de sortir sur Camden et de guetter nerveusement (non, vu le déroulé du match, j'exagère) le résultat des Verts contre Rodez sur le téléphone, Orient ne laissera pas de souvenirs absolument exceptionnels mais un beau condensé de ce que le foot anglais local a à offrir : de la passion, de la convivialité et surtout beaucoup de bordel. Et c'est déjà très bien.
C'est certes pas tellement dans le sujet vu que les tribunes n'étaient pas les plus animées, mais ça fait un moment que je voulais y rédiger alors j'espère que ça vous aura plu
