@ FG Je précise que je parlerai surtout de visions et que je rentrerai peu dans les détails.`
Je conçois mon analyse du monde et du l'humanité à partir de principes et constats qui me semblent évidents, et qui mis ensemble laissent peu de liberté quant à la direction suivre pour le bien de tous. Tout d'abord, notre planète représente un espace délimité, fini, même s'il n'est pas entièrement exploré et exploité. Deuxièmement, la croissance du PIB, indicateur principal utilisé aujourd'hui pour mesurer la santé économique et sociale de nos sociétés, est directement corrélé sur la croissance de notre consommation énergétique ; attention, je parle bien de corrélation et non de causalité, mais celle-ci me semble tellement intuitive et logique que je l'admets. Troisièmement, il est communément admis dans la communauté scientifique, et largement relayé auprès du grand public, que l'Humanité consomme plus d'énergie en 8 mois que ce que la la Terre (dans l'état actuel de nos techniques) est capable de renouveler en un an. Fort de ces constats, j'arrive à la conclusion suivante : dans l'état actuel des technologies humaines, la croissance du PIB infinie ne peut être possible ; cette conclusion s'observe aujourd'hui, puisque l'absence de croissance tient le rôle majeur de notre vie politique et économique.
Face à cette situation, je vois deux possibilités : une recherche renouvelée de croissance, base de notre mode de vie depuis la fin de la Deuxième Guerre, qui passera donc par l'effet cumulé de nouvelles technologies et de découverte et appropriation de nouveaux espaces exploitables ; un changement radical de vision portant sur la sobriété et l'économie (réelle !) plutôt que le confort matériel et la consommation, permettant non pas d'augmenter notre production énergétique, mais bien au contraire de la diminuer pour la rendre supportable par l'espace exploitable de nos technologies actuelles ; pour cela, il faudra nécessairement passer par une phase de décroissance, qui ne sera pas infinie non plus mais seulement transitoire, pour arriver à terme à une stabilité de non-croissance.
C'est à mes yeux, parmi tous les clivages idéologiques existants aujourd'hui, celui qui devrait servir de base au débat public. Pour toi, le vieux clivage gauche-droite reste la norme : il existe (et existera) encore, mais devient de plus en plus accessoire : celui qui a la palme aujourd'hui, c'est le clivage protectionniste/mondialiste. La gauche est divisée par ce clivage, tout comme la droite. C'est ce qui explique les scissions au sein de ces deux courants idéologiques : l'UMP dépassé par le FN, le PS gêné par le FdG. Aujourd'hui, une partie du PS et de l'UMP s'associent autour d'un personnage, Macron, représentant ce courant de mondialisation et de libéralisation de l'économie, qui devient face au protectionnisme de MLP et JLM l'essentiel à leur yeux, au delà de leur rivalité historique. C'est pourquoi je comprends complètement merlin (et d'autres) lorsqu'il dit attendre impatiemment un duel MLP-EM : c'est l'opposition qui lui parait essentielle aujourd'hui. Aussi, droite et gauche sont divisées par le clivage croissance/décroissance : j'y vois la différence fondamentale entre Hamon et Mélenchon. Et comme à mes yeux c'est bien ce clivage qui est le plus important, j'aurais aimé que ces deux là s'accordent sur leur projet commun de 6e République pour permettre ensuite la tenue de ce débat au sein de la société.
Tu me diras : où vient Cheminade dans tout ça ? Et bien pour moi, le représentant principal de ce courant de la croissance effrénée, conséquence du progrès technologique de l'Humanité, c'est lui. Je me souviens de son apparition dans "Des Paroles et des Actes" en 2012 : j'y ai vu des journalistes imbéciles s'y mettre à trois pour le descendre et se foutre de sa gueule. Et moi je me disais : "mais quelle bande de cons, toutes les politiques que vous commentez et défendez depuis des décennies, basées sur la croissance, vont dans le même sens que sa vision".
Regardons-y de plus près, autour de l'axe "les nouvelles frontières" :
http://www.cheminade2017.fr/-Projet-2017-
- le nucléaire : Pour moi, le nucléaire n’est pas un mal nécessaire, mais un bien indispensable; avec la mode de l’écologisme (...), l’optimisme philosophique de la Renaissance et des Lumières se trouve aujourd’hui gravement menacé par un obscurantisme infantilisant.
- la mer : L’économie bleue : aménager l’océan; Un chèque pour la recherche; les océans recèlent 90 % des réserves d’hydrocarbures et 84 % des métaux rares. Dans leurs profondeurs sommeillent des gisements de phosphate, des nodules polymétalliques.
- l'espace : L’espace, impératif économique et culturel; C’est pourquoi il nous faut préparer dès aujourd’hui un vaste projet de reconnaissance et de mise en valeur de la Lune et envisager, d’ici deux générations, une quasi autonomie de l’être humain dans l’espace; Construire tout d’abord de futures usines et stations spatiales scientifiques; construire un véritable lanceur lourd européen capable de propulser 60 à 140 T en orbite basse.
- l'écologie : Aujourd’hui, l’écologie est devenue un enjeu politique, économique et culturel. Cependant, le mot recouvre deux visions diamétralement opposées de l’être humain. La première postule qu’il faut sauver la planète en économisant ses ressources, qui seraient nécessairement finies. Au sein de cette conviction, certains exigent une croissance zéro ou une décroissance. (...) Il s’agit donc d’une conception malthusienne et anti-populationniste, aboutissant à des conséquences criminelles si l’on suit jusqu’au bout sa logique; Il y a une ressource inépuisable, qui est la capacité créatrice de l’être humain.
En bref : scientisme, exploration de l'espace et des océans, croyance en la croissance infinie. Sa vision ne me semble donc pas ridicule, mais bien au contraire partagée par l'essentiel des médias et des politiques. J'ajouterai également que son programme est quelque part
déjà appliqué : les millards dépensés dans la recherche spatiale, qu'elle soit publique avec la NASA ou l'ESA, ou bien privée avec SpaceX, les performance récentes ou futures avec Philae notamment (le but de la recherche ici est de pouvoir à terme exploiter les ressources premières des comètes, ça ne rappelle rien ?) et la future exploration humaine de Mars. Donc non, Cheminade n'est pas délirant, il est lucide sur le monde dans lequel on vit, et propose une voie qui me semble non seulement possible mais qui sera probablement celle choisie finalement par l'Humanité (y a qu'à voir la pendule qu'on nous chie à propos de Pesquet), comme j'imagine cela a été le cas (d'où mon interrogation il y'a quelques semaines) au moment des grandes découvertes.
Et comme pour ma part je suis de la mouvance décroissance, une opposition Cheminade-Hamon me semblerait, à l'heure actuelle, encore plus essentielle.