Avant le match qui opposera ses deux anciens clubs à La Meinau lors de la 20 journée de L1, Renaud Cohade s'est confié à Poteaux Carrés.


Que deviens-tu Renaud ? Cohade neuf ?

J’étais en fin de contrat avec le FC Metz. Avec ce Covid qui est arrivé, on n’a pas pu terminer la saison. Vu mon âge et tout, je suis rentré dans les Cévennes, chez moi. Je me suis entretenu un peu au cas où un nouveau projet intéressant se présenterait à moi. Je n’ai rien eu d’intéressant. Je suis resté dans les Cévennes, j’ai eu ma troisième fille. Je m’occupe de ma famille et je m’entretiens un peu physiquement pour le plaisir. Je me tourne doucement vers autre chose que le football.

Si j’avais eu un club ambitieux de Ligue 2 ou autre même pour prendre du plaisir… Selon le club et différents aspects ça aurait pu m’intéresser. Ça ne s’est pas présenté, le contexte sanitaire n’a pas facilité les choses. Mon agent m’a fait part de quelques intérêts mais j’ai coupé court de suite. Le seul contact intéressant que j’ai eu, c’était à un moment donné avec Toulouse. Mais depuis il y a eu un changement de direction, le club a été repris et ça a changé la donne. Les nouveaux décideurs du TFC se sont orientés sur un autre projet, ça se comprend.

Tu vas définitivement raccrocher les crampons ?

Je pense que je m’oriente vers la fin de ma carrière professionnelle. Je ne ferme pas la porte, on ne sait jamais ce qui peut se passer dans le foot. Tu peux avoir un appel et tu te dis « ah, finalement j’ai encore envie ! ». Mais il faut se faire une raison. J’ai 36 ans, je n’ai pas joué depuis un an et ma situation familiale fait que je suis rentré dans le sud avec mes enfants. Ils ont retrouvé un équilibre, un rythme de vie. Maintenant ce sont eux qui passent avant tout. On est bien à Anduze. Les enfants, ça prend du temps.

Je m’entraîne, je vais courir car c’est compliqué de s’entraîner dans des clubs dans le coin, à cause du Covid ils sont souvent à l’arrêt. J’avais investi dans l’immobilier pendant ma carrière, il y a des travaux à faire, je m’occupe de ça. J’attends que le virus passe pour aller peut-être dans d’autres branches. J’ai investi dans la pierre chez moi car toute ma famille est ici. Je sais d’où je viens, j’ai eu la chance d’être bien entouré donc je n’ai pas fait n’importe quoi. C’est important de bien placer son argent.

Tu abordes sereinement cette fin de carrière de joueur professionnel ?

À un moment donné, il faut passer à autre chose. La vie de footballeur, c’était super. J’en ai profité longtemps. J’ai fait mes débuts professionnels avec Nîmes en 2002, on est aujourd’hui en 2021. Toute bonne chose à une fin. C’est sûr que ce n’est pas facile quand tu sens que tu es sur la fin. Mais il faut savoir passer à autre chose. Je ne te cache pas qu’il y a des jours où j’ai un peu le blues. La compétition, l’adrénaline, ça te manquera toujours. Mais il y a d’autres choses qui sont importantes dans la vie. Dans la situation qu’on vit actuellement, on ne peut vraiment pas se plaindre.

Je suis en pleine réflexion sur ma reconversion. Rester dans le foot, c’est une possibilité. Dans quel domaine, et à quel poste, franchement, je n’ai pas encore d’idée bien arrêtée. Si j’ai une opportunité qui se présente, tant mieux, mais si ça ne se présente pas, on fera tout autre chose. On va y réfléchir mais c’est sûr qu’avec ce fichu Covid, il y a beaucoup de choses qui bloquent. Travailler dans un club comme recruteur ou coach, ça pourrait m’intéresser. Coach, c’est un métier à plein temps, c’est compliqué. En plus il faut passer des formations. Recruteur ou superviseur, pourquoi pas ? Pour l’instant je prends du recul, je m’entretiens et on verra bien.

Tu as porté trois ans le maillot bleu de Strasbourg et quatre ans le maillot vert. Pour qui battra ton cœur ce dimanche après-midi ?

Je suis un peu depuis mon canapé les clubs où je suis passé. Pour dimanche, honnêtement, je n’aurai pas vraiment de préférence. Que le meilleur gagne ! J’ai joué avec des joueurs dans les deux clubs. Du côté strasbourgeois, j’ai joué à Metz avec Eiji Kawashima et Habib Diallo, qui est un super mec et un super joueur. À Sainté j’ai joué avec Jessy Moulin, Romain Hamouma, Kévin Monet-Paquet…

On signera ensemble pour un 3-2 pour les Verts alors… Dans ta carrière, tu as failli être Stéphanois avant d’être Strasbourgeois mais l’histoire en a décidé autrement.

Tout à fait ! J’appartenais aux Girondins, avec Michel Pavon j’avais eu un peu de temps de jeu mais quand Ricardo est arrivé, le club avait fortement recruté. Il y a avait Denilson, etc. Moi j’étais jeune, j’avais 20 ans, je voulais absolument jouer. J’ai fait un essai l’été 2006 à Sainté, à l’époque où Omar Da Fonseca était je crois le directeur sportif. J’avais fait un essai d’un mois, j’avais fait la préparation. J’avais joué un match amical avec les Verts contre Croix de Savoie. Ça s’était plutôt bien passé, ça avait failli déboucher sur un contrat mais finalement Ivan Hasek avait porté son choix sur un autre milieu de terrain [Yohan Hautcoeur, ndp2].

Je suis donc retourné à Bordeaux pour m’entraîner. Strasbourg m’a alors contacté car Leyti N’Diaye, qui venait d’arriver en prêt de l’OM, s’est fait les croisés. Jean-Pierre Papin m’a donc sollicité pour rejoindre le club. Cela faisait un ou deux matches que la saison avait commencé, j’ai enquillé direct. Cette année-là on est monté, j’ai fait une saison pleine.

Que retiens-tu de tes trois saisons en Alsace ?

Je retiens que c’est un club qui a beaucoup de ferveur et que c’est un club qui a largement sa place en Ligue 1. C’est bien que ce club ait retrouvé l’élite depuis 2017 et ne l’ait plus quittée depuis lors. On le voit par rapport aux supporters qu’ils ont. Moi quand j’y étais, c’était assez mouvementé. On a fait une montée, une descente, le club n’avait pas trouvé de stabilité donc c’était compliqué. Quand on est redescendu, j’ai eu la possibilité de partir en Ligue 1 à Valenciennes. J’ai sauté sur l’occasion bien sûr car tout joueur veut jouer au plus haut niveau.

J’ai apprécié mon passage à Strasbourg, ça a été une étape importante dans ma progression de carrière. Je suis resté très ami avec James Fanchone, qui était arrivé du Mans. C’était un joueur très rapide sur le côté, il marquait beaucoup de buts de la tête. C’est un mec très sympa, très humble. La force tranquille. Ce qui m’a marqué aussi à Strasbourg, c’est le fait d’avoir eu Jean-Pierre Papin comme entraîneur. C’est quelqu’un dans le football quand même, il a été Ballon d’Or le Monsieur ! Je garde l’image de quelqu’un d’hyper passionné. Il adore le football. C’était l’entraîneur mais il avait encore ce côté joueur. Il mettait des frappes, t’aurais vu ça… On aurait dit qu’il était encore joueur.

Après j’ai eu Jean-Marc Furlan, qui m’a beaucoup appris. Il aime faire jouer son équipe, a des principes de jeu. C’était super d’évoluer sous ses ordres. On venait de remonter en Ligue 1. Cette saison s’est mal finie alors qu’à la trêve on était bien placés. J’ai eu une pubalgie derrière qui m’a rendu indisponible six mois. Il m’a fait comprendre vidéo à l’appui dans quels domaines il fallait que je progresse pour devenir un très bon joueur de Ligue 1. J’ai franchi un cap à Strasbourg, ça a été déterminant dans ma carrière et j’ai pu confirmer derrière en enchaînant de bonnes saisons au VAFC.

Tu as évolué là-bas sous les ordres de deux entraîneurs passés par la maison verte.

C’est vrai, j’ai eu d’abord Philippe Montanier puis Daniel Sanchez. Je garde le souvenir de deux entraîneurs rigoureux, qui connaissent bien le football, qui ont une grosse expérience. Chacun avait son système de jeu. Montanier en 4-3-3, Sanchez en 4-4-2. Avec Montanier on jouait avec une sentinelle et deux relayeurs, moi j’étais relayeur. C’était mon poste privilégié, que j’ai occupé à Sainté aussi quand Jérémy ou Josuha évoluait en sentinelle. C’est là que je me sentais le mieux pour faire le lien entre l’attaque et la défense. À Valenciennes on s’est sauvé trois fois, c’était l’objectif. Je me suis éclaté là-bas car il y avait une super ambiance.

T’en as retrouvé une autre à Sainté. Peux-nous rappeler le contexte de ton arrivée à l’ASSE en 2012 ?

Je venais de faire trois de saisons au VAFC et j’allais sur mes 28 ans. J’arrivais à un âge où je voulais jouer dans un club ayant une autre ambition que le maintien dans l’élite. À l’époque, Marseille et Sainté s’intéressaient à moi. Etant natif d’Aubenas, n’étant pas loin de Sainté, je me suis orienté vers Sainté. Jouer à Geoffroy, avec ses supporters et tout… J’étais plus motivé pour venir ici. En plus à l’OM si je me souviens bien Didier Deschamps quittait le club et il n’y avait pas encore d’entraîneur. J’ai eu Christophe Galtier au téléphone, j’ai eu aussi un rendez-vous avec le coach. J’avais le profil qu’il recherchait, ça s’est fait assez facilement.

J’ai été ravi de porter ce maillot vert. Tout le monde connaît Sainté, tout le monde sait qu’il y a des supporters des Verts dans toute la France. Quand j’étais à Metz, il y avait même des supporters qui arrivaient à l’entraînement et qui me lançaient des « Allez les Verts. Ça restera toujours, ce club a posé une marque indélébile dans l’histoire du football français. Moi j’ai eu la chance d’y vivre quatre belles années. On a gagné un trophée, c’est quand même quelque chose de fort pour un joueur. Tu vas me dire qu’il y a des joueurs qui en ont gagné beaucoup mais je connais un paquet de bons joueurs qui n’ont jamais remporté de titre dans leur carrière. Sainté, ça restera une super expérience.

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Qu’en as-tu gardé ?

L’atmosphère passionnée qui règne autour de ce club, l’ambiance qu’il y a dans le Chaudron. Déjà en tant qu’adversaire des Verts ce stade m’avait beaucoup marqué. Quand j’avais vingt ans, à l’époque où j’étais chez les Girondins, j’étais entré en jeu à Geoffroy lors d’un match nul et vierge. Le match en lui-même n’avait pas été exceptionnel mais le spectacle en tribune était assez fascinant. J’avais eu l’occasion de revenir dans le Chaudron avec Strasbourg puis avec Valenciennes.

C’est d’ailleurs grâce à tes passes décisives que le VAFC s’est imposé à GG en 2009 et y a fait match nul deux ans plus tard.



Ah oui, en effet ! À partir de l’été 2012 j’ai eu l’occasion d’y jouer tous les quinze jours, et même plus que ça avec la Coupe de la Ligue et la Coupe d’Europe. Tu te souviens de l’ambiance de fou qu’il y avait quand on s’est qualifié aux tirs au but contre Karabukspor ? Franchement, dans quel autre stade et dans quel autre club t’aurais vécu des scènes de liesse d’une telle intensité pour une telle affiche ? C’est ça, Sainté ! Impossible d’oublier non plus les séances de tirs aux buts remportées contre Paris et Lille en Coupe de la Ligue. Tu vois, j’ai des flashes comme ça parfois qui me reviennent. Jouer à Sainté, ça te marque à vie !



L’ASSE est bien sûr le club qui m’aura fait vivre les émotions les plus fortes de ma carrière. Il faut dire que c’est là où j’ai gagné le plus de matches. Ma première saison on finit 5e et on remporte la Coupe de la Ligue. La deuxième on finit 4e, la troisième on finit 5e et la dernière on finit à une 6e place également qualificative pour la Coupe d’Europe. Il y a pire comme bilan ! Après, quand tu te sauves à la dernière journée avec un club qui vise le maintien, tu ressens aussi beaucoup d’émotions. Mais je l’ai vécu, c’est aussi plus de stress.

Ton meilleur souvenir en vert ?

Le meilleur souvenir, ça reste la victoire en Coupe de la Ligue. La finale au Stade de France et la communion avec le peuple vert qui s’en est suivie.

On rappellera à cette occasion que tu es impliqué dans l'action qui a débouché sur l'unique but de la rencontre. Romain Danzé a testé à cette occasion la solidité de ton short.



Ton plus mauvais souvenir en vert ?

C’est quand Thiago Motta m’a blessé à Geoffroy en janvier 2015 lors d’un quart de finale de Coupe de la Ligue. J’ai dû attendre 9 mois avant de pouvoir rejouer. Je m’étais fait les croisés et j’ai mis du temps à m’en remettre car ça n’avait pas bien consolidé, j’avais quelques petites lésions. J’ai fini par revenir et par retrouver un bon niveau mais cette blessure est arrivée au mauvais moment. Je venais tout juste de passer la trentaine, je me sentais en pleine possession de mes moyens. Ce n’est jamais évident de revenir mais c’est comme ça, ça fait partie de la vie d’un joueur.



Quel est à tes yeux le plus beau de tes sept buts marqués sous le maillot vert ?

Il y en a deux qui me reviennent spontanément à l’esprit. Celui que j’ai mis contre Troyes est peut-être le plus beau. Je fais un enchaînement contrôle, coup du sombrero et frappe du droit dans le petit filet opposé. Je me souviens que le coach Galtier m’avait un peu piqué à la mi-temps et derrière j’ai eu cette inspiration.



Il faut dire que j’ai bénéficié d’une ouverture millimétrée de La Brise, notre Brise national ! (rires) C’était un super mec, un coéquipier modèle, doté d’un bon pied gauche. C’est quelqu’un sur qui tu peux compter. En plus John est super marrant ! (rires) On s’entendait tous bien dans ce groupe. Quand tu t’entends bien avec tes coéquipiers dans le vie, tu fais les efforts plus facilement sur le terrain. Je pense que c’est notamment pour ça que le club a obtenu de très bons résultats toutes ces années-là.

Le deuxième but que j’ai en tête, c’est celui quand ils avaient refait la tribune du Kop Nord. J’ai mis une belle demi-volée du droit contre Costil. Celui que j’avais mis contre Troyes, je n’avais pas pu le fêter avec le Kop Sud car la tribune était en travaux. Alors que celui contre Rennes, le Kop Nord venait de rouvrir et ça avait fait du bruit.



Je me souviens que c’est Brandao qui m’avait fait la passe décisive d’une déviation de la tête. Il est arrivé le même été que moi au club mais un peu plus tard dans le mercato. De suite on a vu que ce mec allait beaucoup nous apporter. Un vrai guerrier, un super compétiteur. Il ne s’entraînait pas tout le temps mais quand il s’entraînait, il voulait gagner tous les jeux. Sur le terrain, c’était le premier à presser, à défendre. Il a tiré tout le groupe vers le haut de ce côté-là. Je me souviens que "Branda" m'avait aussi fait une passe dé lors d'un match de Coupe d'Europe. C'était contre quelle équipe déjà ?

La réponse en images...



Un but de la tête, c'est assez rare pour être souligné ! (rires) Milsami, c'est bien ça. C'est un club que je ne connaissais pas du tout et tu te souviens, on l'a retrouvé deux ans plus tard en match de barrage !

T’as marqué aussi contre deux clubs corses.

Exact. Mon premier but en vert, c'est à Furiani que je l'ai mis.



Et j'ai marqué aussi contre Ajaccio. Je m'en souviens très bien car c'était quelques jours après la finale de la Coupe de la Ligue, grâce à une super déviation d’Aubame.



C’était un phénomène ! Il a une vitesse incroyable et c’est quelqu’un qui est hyper travailleur. Il a progressé énormément et on voit le niveau qu’il a atteint aujourd’hui. Il n’y a pas de secret, il le mérite largement.

C'est grâce à toi qu'il avait marqué du talon un but lors d'un neigeux et victorieux Sainté-Montpellier.



Ah la la, t’évoques encore un sacré souvenir ! Quelques minutes après ce but la neige est tombée abondamment. Je n'avais jamais joué un match dans de telles conditions, c'était fou ! Ça restera un des matches marquants de cette époque.

Aubame est le joueur qui t’a le plus impressionné à Sainté ?

C’est sûrement le joueur avec le meilleur niveau. Mais en talent brut, Pascal Feindouno était pour moi un joueur extraordinaire. Je l’ai côtoyé un peu à Bordeaux mais aussi à l’ASSE. Je n’ai pas joué avec lui à Sainté mais je l’ai connu aux entraînements. C’était un joueur fantasque et fantastique. Aubame, c’était l’atout plus de notre équipe. Quand t’as un joueur comme ça, la défense recule, t’as plus d’espace pour jouer. Et si elle ne recule pas, tu la donnes dans le dos et Aubame a le ballon sans problème.

Tu as également scoré contre ton précédent club.

De mémoire c’est suite à un corner et à une tête déviée de Ben Corgnet. Je suis au second, je ferme et je mets le tibia ! (rires) Bon, ce n’est pas le plus beau but de ma carrière mais il compte !



Le plus beau but de ta carrière, c’est ton dernier sous le maillot vert car tu l’as mis contre les banlieusards. T’as marqué contre la vilénie, Renaud !

(Rires) Ce but n’est pas le plus beau mais il est important car il a permis de plier le derby. J’ai mis ce but du 3-0 à vingt bonnes minutes de la fin, je pense que ça les a achevés. J’ai profité d’une erreur de Corentin Tolisso mais j’ai eu le mérite d’y croire, de continuer à presser.



Je me rappelle surtout le gros match qu’on avait fourni ce soir-là. On a largement mérité cette victoire. Le peuple vert attendait depuis très longtemps qu’on gagne un derby à la maison. On l’a fait avec la manière. On s’est fait plaisir et on a fait plaisir à nos supporters, c’était trop bon ! En plus j’avais eu ma première fille pas longtemps avant. L’ambiance à Geoffroy était incroyable, sans doute la plus forte que j’aie connue dans toute ma carrière. Bien sûr il y avait aussi une énorme ambiance au Stade de France pour la finale de la Coupe de la Ligue. Mais dans notre Chaudron, j'ai senti cette atmosphère très particulière du derby, tout le public est encore plus pour toi que d’habitude, il te pousse. Tu sens vraiment le soutien du 13e homme.

Le 12e, non ?

Non parce qu’à Sainté le 12e homme il compte double ! (rires)

Le parcours victorieux en Coupe de la Ligue a été jalonné de trois qualifications aux tirs au but. À chaque séance tu as été le premier tireur stéphanois et t’as pris le gardien adverse à contrepied. Ça s’est décidé comment ?

À Strasbourg, j’avais l’habitude de tirer souvent les pénos. J’en avais d’ailleurs mis un contre Sainté lors d’un match qu’on avait gagné à La Meinau.



Le fait que je sois le premier à tirer lors des séances de tirs au but à Sainté, ça s’est fait naturellement lors de notre premier tour à Lorient. J’avais voulu prendre mes responsabilités. Ça a marché et derrière on est resté comme ça match après match. C’est un geste que j’aime bien exécuter. Il faut avoir du calme, du sang froid. Après, j’avais un petit secret pour les tirer mais je ne vais pas te le dévoiler, on ne sait jamais ! (rires)



Ah, t’avais un petit secret ? Vu que t’as raccroché les crampons, tu peux nous le dévoiler !

(Rires) Je t'ai feinté, en fait je n’avais pas de secret. Je faisais ça à l’instinct. Je choisissais un côté, je m’appliquais. Je feintais un peu la frappe pour prendre le gardien à contre-pied.

Contre Lorient t’as tiré à droite, contre le QSG à gauche.



Oui, j’ai changé de côté. On sait que les gardiens étudient les séances de tirs au but pour voir si on a un côté préférentiel. C’est un élément à prendre en réflexion sans se prendre la tête non plus. Un penalty, ça va vite. Il faut être confiant, concentré, appliqué et déterminé, c’est tout !

T’as tiré de nouveau à droite lors de la mythique demi-finale contre Lille.



Une séance riche en émotions !

Stéphane Ruffier s’est particulièrement illustré lors de cette campagne victorieuse en Coupe de la Ligue. Que penses-tu de sa triste fin à Sainté ?

Steph a effectivement été un des grands artisans de nos qualifications et il a aussi été décisif en finale. Il nous a rapporté énormément de points en championnat pendant toutes ces saisons. On ne peut pas lui enlever ça. C’est un super gardien, avec beaucoup de qualités. Il a grandement contribué à nos qualifications européennes. Il y a des soirs, il était imbattable, c’était impressionnant !

Je ne peux pas juger ce qui s’est passé récemment avec lui, cela fait quatre ans et demi que j’ai quitté le club. Je suis personne pour juger ce qui lui arrive. Je trouve juste ça dommage qu’on en soit arrivé là, pour lui comme pour le club. Il restera quelqu’un d’important dans l’histoire de Sainté. Maintenant, aujourd’hui, quand je vois jouer Jessy, je suis super content pour lui. C’est quelqu’un de super. Il a toujours travaillé et mérite de jouer au plus haut niveau.

Un autre de tes anciens coéquipiers toujours au club est actuellement le meilleur buteur stéphanois de la saison. Tu lui as délivré quatre de tes onze passes décisives sous le maillot vert.







Ah, Romain… Tu fais bien de rappeler qu’il me doit beaucoup, à commencer par son premier but en vert ! (rires) Passe-lui un message, qu’il m’invite un peu au resto ! (rires) Romain est un très bon joueur de football, il est vraiment talentueux. Ce que je trouve dommage, c’est qu’il a eu quelques petites blessures qui l’ont ralenti. Mais c’est un joueur qui a eu une carrière exemplaire. Romain est pétri de qualités. Je suis arrivé en même temps que lui à l’ASSE, en 2012. Il est encore au club. Il n'y a pas de secret, s’il joue encore pour les Verts et qu’il est performant, ce n’est pas pour rien. C’est un super mec et j’aime son style de jeu. C’est un footballeur inspiré, un créateur. Il lui arrive de rater des choses mais c’est quelqu’un qui peut te débloquer des matches.

Tu as également délivré trois décisives à Bayal en trois semaines !

Le Roc ! C’était facile de lui faire des passes dé, tu mettais le ballon en l’air et il poussait tout le monde ! (rires) C’est vrai que ma dernière année à Sainté, on avait un bon feeling sur les coups de pied arrêtés. J’arrivais à le toucher au second poteau. Mouss, il suffisait qu’il soit lancé, avec sa puissance il devenait dangereux dès qu’il touchait le ballon. J’avais juste à m’appliquer en tirant les coups de pied arrêtés.



C’est ce que tu as fait à Rennes puis contre Monaco, et enfin lors de ce terrible match retour contre le FC Bâle.

M’en parle pas ! Le plus terrible ascenseur émotionnel de ma carrière. C’est ma plus grosse déception. Tu passais ce tour-là, tu jouais une grosse équipe et après tout peut se passer à Geoffroy en Coupe d’Europe. Quand t’es joueur, tu veux vivre des grands matches comme ça. Mais à Bâle, tout a tournéeen deux minutes. Pff ! Je me rappelle que dans le vestiaire il y avait un silence. Tout le monde était abattu, prostré. Tu crois arracher la qualification à la 89e et dans le temps additionnel tu prends ce but à la noix, le mec il rate sa tête et ça arrive sur un coéquipier. Tu peux revoir le but 150 fois derrière, ça fout les nerfs mais c’est comme ça.



Parfois le football est magnifique, parfois il est cruel. Ce soir-là il a été très cruel mais ça fait partie de la carrière d’un joueur. Malgré ce triste dénouement, ces matches de Coupe d’Europe avec Sainté resteront ancrés en moi. Tu sens que ces matches ont un parfum particulier. On sentait que le club avait une histoire quand on jouait l’Europe. Les supporters voulaient revivre les grandes années d’avant. Mais c’est compliqué sur le terrain, là t’arrives au plus haut niveau. On le voit, les clubs français ont du mal en Coupe d’Europe. Il y a Paris mais c’est compliqué pour tout le monde.

Lors du match aller contre Bâle, tu as fait une passe dé à un joueur qui évolue toujours au club actuellement.



Ne jamais oublier, ce soir on va gagner grâce à Monnet-Paquet ! On avait gagné avec un but de Kévin effectivement, sur un corner que j’avais tiré. Kev avait mis une jolie tête. Je garde une bonne image de lui. Il est arrivé à l’ASSE un peu après moi [deux ans plus tard, ndp2]. Kévin est quelqu’un qui a un moteur exceptionnel, il court sans relâche. Il a un super état d’esprit. Il a un physique énorme, il est très généreux, fait beaucoup d’efforts. Il est très collectif. C’est un joueur qui a du mérite car il revenu après s’être fait deux fois de suite les croisés. Il a une grosse force de caractère.

Avec quels joueurs stéphanois partageais-tu le plus de moments en dehors du terrain ?

Je connaissais déjà Jérémy Clément et François Clerc car j’étais au centre de formation avec eux chez l’ennemi ! (rires) Après, on s’entendait tous bien dans cet effectif de l’ASSE. On se voyais en dehors des entraînements, on a gardé des contacts. J’ai régulièrement des nouvelles de Fab Lemoine, François Clerc, Jérémy Clément, Jonathan Brison, Loïc Perrin, Jessy Moulin… Je m’entendais bien avec tout le monde à Sainté, on formait un véritable groupe. On avait du plaisir à se retrouver. Je me souviens qu’on avait fait un Harlem Shake dans le vestiaire, il y avait un peu de folie.



Tu auras connu le meilleur des années Galette à Sainté. Quelle image garderas-tu de ce coach ?

Le coach, c’est une grosse personnalité. Sa grande force, c’est qu’il sait gérer les égos et les caractères des joueurs. C’est quelqu’un qui a beaucoup de réflexion, qui sait manager un groupe. S’il a des résultats à Lille comme il en avait à Saint-Étienne, ce n’est pas pour rien. Christophe Galtier a beaucoup de compétences. Ce que j’aime aussi chez lui, c’est qu’il sait se remettre en question quand il fait une erreur. C’est là aussi sa force. Je me souviens par exemple que lors de ma première saison, on tâtonnait un peu en début de championnat. Il nous a dit « écoutez, on va changer de plan de jeu, je me remets en question. Maintenant on va presser tout terrain, je dois mieux profiter des joueurs que j’ai. Lâchez-vous les gars, allez-y ! » Et de suite on est parti sur une série de victoires.

Tu auras connu le meilleur des années Galette à Sainté. Quelle image garderas-tu de ce coach ?

Le coach, c’est une grosse personnalité. Sa grande force, c’est qu’il sait gérer les égos et les caractères des joueurs. C’est quelqu’un qui a beaucoup de réflexion, qui sait manager un groupe. S’il a des résultats à Lille comme il en avait à Saint-Etienne, ce n’est pas pour rien. Christophe Galtier a beaucoup de compétences. Ce que j’aime aussi chez lui, c’est qu’il sait se remettre en question quand il fait une erreur. C’est là aussi sa force. Je me souviens par exemple que lors de ma première saison, on tâtonnait un peu en début de championnat. Il nous a dit « écoutez, on va changer de plan de jeu, je me remets en question. Maintenant on va presser tout terrain, je dois mieux profiter des joueurs que j’ai. Lâchez-vous les gars, allez-y ! » Et de suite on est parti sur une série de victoires.

Comment as-tu vécu la fin de ton aventure à Sainté ?

Quand je suis revenu, les choses étaient un peu claires, j’allais avoir moins de temps de jeu. Après, tu ne le sais jamais. Parfois à Sainté en début d’année on me l’a dit et j’ai quand même joué. Tu me connais, je suis un compétiteur. Par nature, j’aime relever les défis. Mais on arrivait un peu à la fin d’un cycle, le groupe avait été beaucoup modifié. Je ne partais plus comme titulaire et quand tu vas vers tes 32 ans, t’as besoin d’avoir quelques certitudes pour jouer et continuer de prendre un maximum de plaisir. Arrivé à cet âge, tu sais que peut-être c’est fini dans trois ou quatre ans. Metz m’a proposé un super challenge avec un contrat de trois ans.

Tu figurais sur la fameuse liste noire parue dans la Pravda quelques mois avant ton départ ?

Je me souviens en effet qu’une liste était sortie dans la presse mais je ne m’y suis pas trop intéressé. Enfin, un peu quand même, j’avais demandé à Dominique Rocheteau si c’était vrai tout ça. Il m’avait dit que non. Après, moi, je m’en fous, il n’y a que le terrain qui compte. Je ne m’attarde pas sur ce que disent les médias. Quand tu pars de Sainté, t’as toujours un petit peu d’amertume mais il faut savoir rebondir. C’est ce que j’ai fait à Metz où j’ai vécu une belle aventure. On est monté, on s’est maintenu. J’ai joué, j’ai été capitaine. À part la dernière saison, je me suis éclaté là-bas. Je ne regrette pas ce que j’ai fait, j’ai eu la carrière que je méritais d’avoir. Ni plus ni moins. Je suis content. Maintenant je suis les clubs où j’ai joué depuis mon canapé. Parfois ça démange un peu de jouer…

Ça peut s’arranger. Tu sais que Saint-Etienne cherche un avant-centre. Cohade 9 alors ? T’as montré que t’avais le sens du but face aux vilains et un derby se profile bientôt.

(Rires) Je préfère laisser ce numéro à Romain. Il aime bien marquer contre Lyon en plus. Il peut remettre ça, c’est tout le mal que je lui souhaite !

Une victoire contre les banlieusards sauverait un peu la saison. T’es surpris de voir les Verts aussi mal classés à la trêve ?

Tu sais, le foot, c’est cyclique. Le club a pris un virage, un nouveau projet est en train de se mettre en place. Je pense qu’il ne faut pas faire une fixette sur le classement actuel et qu’il faut laisser du temps au temps. On aimerait tous que les Verts soient tout le temps en haut de l’affiche mais dans le contexte actuel il faut se montrer patient. Le groupe s’est rajeuni, l’équipe a vécu une première moitié de saison très compliquée.

T’as eu l’occasion de voir des matches des Verts cette saison ?

Franchement, non. Téléfoot, je n’ai pas ça chez moi.

Téléfoot va disparaître. Et si tu rachetais les droits TV et montais une chaîne ? On l’appellerait Coco Channel.

(Rires) Non mais tu sais, je suis un peu coupé du foot ces derniers temps. J’ai eu une troisième petite et j’ai choisi de ne pas trop regarder de foot. Bon, je regarde quand même les résumés. Ça donne une idée mais ça ne me permet pas de porter un jugement sur les équipes en général et les Verts en particulier. Tout ce que je peux dire, c'est que Claude Puel a quand même de l’expérience et qu'il n'est pas dans la culture des résultats immédiats. Il construit ses projets petit à petit. Après, est-ce que la mayonnaise prendra ? Les résultats le diront mais ça ne viendra pas du jour au lendemain.

Il faut être patient lorsqu’un nouveau projet se met en œuvre. Il faut avoir confiance dans les compétences du coach, tout simplement. Si tout le monde marche ensemble, Sainté un est un gros club, les Verts remonteront au classement. Je ne me fais pas trop de souci pour le maintien. Après, une équipe c’est un groupe, un équilibre. C’est parfois très fragile. Il faut vivre dans le groupe pour savoir. De l’extérieur, on ne peut pas juger. Les Verts avaient démarré fort la saison, la qualité est là. Les joueurs, ils les ont. Ça peut basculer dans le bon sens. Allez les Verts !

 

Merci à Renaud pour sa disponibilité