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Emblématique joueur, capitaine et symbole de l'ASSE du XXIe siècle, Loïc Perrin est un footballeur à l'ancienne: simple, fidèle, batailleur, souriant... et aimé de tout un peuple !


S'il ne fallait retenir qu'un joueur des années 2010, ce serait indubitablement celui qui par son courage, son leadership, sa sympathie et surtout son talent, a su conquérir le cœur des supporters de l'ASSE. Stéphanois de naissance, formé au club et fidèle de la première heure, il incarne ce que tout supporter rêve de voir parmi les joueurs de l'ASSE: une icône. Le genre de capitaine qui va communier avec les supporters, mégaphone à la main, au soir d'une victoire à Gerland en 2014, et qui sera en plus légitime pour le faire. Mais son parcours, bien qu'assez classique dans  sa trajectoire, fut perturbé par de nombreux obstacles qui n'ont fait que le rendre plus fort... et plus attachant.


Deux amis promis à un grand avenir: Bafé Gomis et Loïc Perrin

Loïc Perrin a toujours baigné dans l’univers du football derrière son père, footeux également. Mais lors de son plus jeune âge, il se passionne d’abord pour l’athlétisme, ses disciplines étant le cross et le demi-fond. A 8 ans, il est champion de la Loire à Sorbiers. On comprend mieux l’endurance et le volume de jeu du futur milieu de terrain des Verts.
Il commence sa prometteuse carrière de footballeur aux petits clubs de Périgneux puis de Saint-Charles-la-Vigilante (situé à l'ombre de Geoffroy-Guichard) où il restera jusqu’à ce que l’ASSE vienne le chercher pour intégrer son centre de formation, en U13. De son passage à Saint-Charles-la-Vigilante, Loïc ne garde que de bons souvenirs, lui qui avait d’ailleurs refusé de venir une première fois à l’ASSE: "C'était vraiment dur de partir, parce que j'avais mes amis au club et puis j'étais plutôt jeune"

La transition vers le centre de formation d’un club professionnel se fait sans problème car ce jeune stéphanois a des qualités physiques déjà très au dessus de la moyenne. Par ailleurs, ses proches ne vivent pas loin, ce qui lui permet de les voir tous les jours et facilite son adaptation. Un luxe comparé à la vie des autres pensionnaires dont certains ont leur famille dans une autre région voire à l'étranger, tel son ami Bafé Gomis. Côté scolaire, comme ses coéquipiers, il intègre le lycée technique de Tézenas-du-Montcel avec des horaires aménagés en 4ème. Il y reste jusqu’en juin 2003, date à laquelle il obtient son bac scientifique. Comme quoi, même les footballeurs peuvent être beaux et intelligents à la fois.


Loïc Perrin, 18 ans (photo le Progrès)

Sa progression est assez linéaire. Avec son équipe il remporte une Coupe de la Loire U13 puis perd en finale du championnat de France des U15 face à l’INF Clairefontaine. Pendant la saison 2002-03, il est intégré à l'équipe réserve et effectue 4 matches en CFA. En U18, il est vainqueur du tournoi international de St Joseph et lors de la saison 2003-04, alors qu'il est un des tauliers de la réserve, Frédéric Antonetti lui donne sa chance le 15 août 2003, pour son premier match en professionnel, en L2. L’ASSE l’emporte 2-1 face à Lorient.
Loïc disputera 7 rencontre en tout lors de cette saison où l’ASSE devient championne de France de L2. Il alterne logiquement banquettes en L2 et prestations en CFA, où il est le vrai patron de l’équipe. Même s’il a encore du mal à s’exprimer en équipe une, Antonetti dit alors de lui qu’"il a déjà tout compris au football".


Perrin face à Rouen en Coupe de la Ligue 2003 (photo le Progrès)

La saison suivante, il effectue ses débuts dans l’élite le 14 août 2004 lors du match Lens-ASSE pour une lourde défaite 3-0, avec Élie Baup aux commandes. Durant cette saison 2004-05, il joue 16 matches en L1, est sélectionné en équipe de France espoir et gagne le tournoi de Toulon, en portant le brassard de capitaine. C'est la saison de la révélation.
Mais c’est plus particulièrement pendant la saison suivante que se confirme son immense talent. Alors positionné milieu offensif, il marque son premier but le 1er octobre lors du match ASSE-Le Mans d’une balle bien récupérée, en ajustant parfaitement le portier adverse. Les Verts l’emportent 3-0 et son statut est désormais confirmé. Suivra une autre réalisation le 4 décembre 2005 pour un nouveau Lens-ASSE avec une nouvelle défaite à la clef : 2-1.


Sablé, Perrin et Nivet, une image qui fleure bon les années 2000

C’est lors de cette saison qu’il connaît une première blessure importante, durant la première mi-temps d'un OM-ASSE. Il est blessé au genou par un tacle maladroit de l’Argentin Renato Civelli et son équipe encaisse un but dans la foulée, comme un symbole. Cette entorse du genou le tiendra éloigné des terrains trois long mois et il ne reprendra la compétition que pour le dernier match de la saison à Ajaccio (défaite 3-1). Au final, il aura été 18 fois titulaire en championnat et 8 fois remplaçant. Sa grande polyvalence et son intelligence de jeu le conduisent à être aussi bien à l’aise au milieu qu’au poste d’arrière droit, où il fait des débuts remarqués et remarquables… brisant momentanément la malédiction du poste.
Malheureusement pour lui, il commence la saison 2006-07 par une rupture du ligament croisé antérieur au genou droit, pendant un match amical de préparation d'avant saison contre Lens, encore. Sa bête noire décidément...
Cela lui vaut six nouveaux mois d'indisponibilité et un grand désagrément pour tout un peuple qui était prêt à en faire le symbole du renouveau vert. Il ne rejouera au football qu'en mars 2007. Entre sa blessure au Vélodrome et son retour face à Troyes un an plus tard, il n'aura joué que 8 minutes !

Le nouveau coach Laurent Roussey décide alors de profiter de sa polyvalence pour en faire son arrière-droit titulaire. Julien Sablé parti à Lens, Perrin devient le nouveau capitaine de l'ASSE et revient à son meilleur niveau jusqu'à ce que divers problèmes physiques (ischio-jambiers, adducteurs, cuisse...) ne le rattrapent, lui faisant faire des aller-retours réguliers entre le terrain et l'infirmerie. Déjà à cette époque, plusieurs observateurs le trouvent trop fragile pour le monde impitoyable du foot professionnel.


Loïc Perrin, nouveau capitaine du navire vert en 2007

Malgré sa participation active à la belle saison 2007-08 et sa qualification pour la C3, Loïc Perrin ne dispute que 19 matches la saison suivante et 18 matches lors de la saison 2009-10. Divers problèmes récurrents à la cuisse lui font quitter le groupe durant de longues semaines. Il sent alors que le moment est peut-être venu de partir, après une année à jouer le maintien dans un contexte tendu et des blessures handicapant sa progression. Monaco lui fait les yeux doux, il n'y est pas insensible. Le feuilleton dure tout le mois de juillet 2009 mais finalement, Christophe Galtier, le nouveau coach depuis l'éviction d'Alain Perrin, parvient à le convaincre de rester pour s'inscrire dans la durée à Saint-Étienne. Etrangement, le peuple Vert ne lui tiendra pas rancune pour cet épisode et l'oubliera même totalement.

Néanmoins, Loïc a pris la bonne décision: tandis que Monaco coule progressivement jusqu'à sa relégation en 2012, l'ASSE se redresse petit à petit. Titulaire quand il n'est pas blessé, Perrin met tout le monde d'accord sur ses capacités et réussit une saison 2010-11 parfaite, inscrivant même 4 buts (dont un doublé face à Sochaux) en 27 matches. Il est plus que jamais le chouchou du public stéphanois.
Mais il ne sera pas dit que ce joueur du cru aura une carrière tranquille. Alors que la saison 2010-11 commence sur les chapeaux de roue, Loïc Perrin se rompt à nouveaux les ligaments croisés le 31 août 2011, en se jetant sur un ballon qui sortait en touche face à Bordeaux en Coupe de la Ligue. Les spectateurs à quelques mètres de lui entendent un cri déchirant dans la nuit: c'est sa troisième grave blessure au genou et sa treizième en 6 ans. On le dit alors perdu pour le football, il n'en reviendra que plus fort.


ASSE-Bordeaux 2011, le cauchemar...

Le 31 mars 2012, exactement 7 mois plus tard, Captain Perrin fait son grand retour à GG face à Nice. Il remplace Laurent Batlles au poste de milieu mais ne peut empêcher la défaite 3-2. La saison se termine certes mal mais lui revient en forme. Galtier lui a trouvé le poste parfait: défenseur central. Il est vrai qu'il n'y avait effectué que des piges passagères. Le coach stéphanois estime que ce poste est le meilleur pour lui: sa vision du jeu, son intelligence dans la relance et son jeu de tête seront des atours précieux. De plus, c'est le poste le moins exigeant en terme d'efforts musculaires. Seule énigme: Loïc parviendra t'il à s'engager suffisamment dans les duels ?
Après quelques débuts hésitants, il ne tarde pas à donner la réponse à cette question en réussissant la meilleure saison de sa carrière: 34 matches, 2 buts inscrits, un ratio de 86,6% de passes réussies, la deuxième meilleure défense du championnat et un titre à la clé. Le 20 avril 2013, il soulève la Coupe de la Ligue au Stade de France. Le peuple Vert n'avait plus vu cà depuis 1977.


Perrin brandit le trophée tant attendu par le peuple Vert (photo le Progrès)

Que faire alors quand on a atteint le top ? Et bien, viser plus haut, pardi !
Associé au revenant Bayal Sall lors de l'exercice 2013-14, il effectue une saison que l'on peut juger à plus d'un titre parfaite, glanant son surnom de "Dieu": 38 matches, 6 buts dont 5 de la tête (faisant de lui le recordman de la saison en la matière), 74% de duels gagnés, membre du XI-type de la saison par de nombreuses agences de statistiques, Loïc Perrin obtient la consécration qu'il n'attendait plus en étant appelé par Didier Deschamps dans sa liste élargie de 28 joueurs pour la Coupe du Monde 2014 au Brésil. Il est réserviste et se tient prêt à remplacer n'importe quelle défection en défense mais le rêve passe, personne ne se blesse et lui doit rester en France: "Si j’avais eu l’opportunité d’y aller, ç’aurait été magique. J’ai fait un bout de préparation avec eux. Je ne peux pas dire que j’en ai fait partie à 100 %. Mais même si ça n’avait pas été le cas, j’aurais été derrière l’équipe de France, car c’est mon pays et je l’aime".

Loïc aura une autre belle occasion de briller un an plus tard lorsque Didier Deschamps le convoque à nouveau pour deux rencontres amicales face à l'Allemagne et l'Angleterre. Mais alors qu'il a déjà offert des sélections à Paul-Georges Ntep, Rod Fanni ou Christophe Jallet, il prend la décision criminelle de ne pas accorder la moindre minute de jeu à Perrin, dans un contexte, il est vrai, tendu par les attentats de novembre 2015.


Perrin du Vert au Bleu, le temps d'un espoir

Cet acte manqué sera le plus regrettable de sa longue carrière au vu de ses statistiques incroyables durant ces années-là.
Loïc Perrin est proprement monstrueux durant les saisons 2014-2015 (42 matches, 1 but), 2015-16 (34 matches, 3 buts) et 2016-17 (40 matches, 4 buts). Son entente avec Bayal Sall et Stéphane Ruffier assure une muraille quasi-infranchissable pour les attaques adverses et font de Geoffroy-Guichard une citadelle. Son sens du placement et son anticipation font merveille aux côtés de la puissance physique de Bayal et des réflexes extraordinaires de Ruffier: on le voit dévier une immanquable face au Gazelec Ajaccio, rattraper un Monégasque plus rapide en modifiant sa course pour l'empêcher de marquer ou encore sauver un ballon messin quasi-rentré sur sa ligne avant d'égaliser dans la foulée...
Le 30 avril 2016, pour suppléer un Stéphane Ruffier en état de grâce et sauver un 0-0 inespéré face à Toulouse, il se sacrifie et fauche volontairement - mais sans violence - l'attaquant Somalia. Il reçoit pour l'occasion le premier carton rouge de sa carrière, lors de sa 13e saison professionnelle (!) Son second sera son dernier...

Mais n'anticipons pas trop: pour l'heure, Loïc Perrin est incontestablement le pilier de l'ASSE mais l'intersaison 2017 va peu à peu changer les choses: Christophe Galtier quitte le club et avec lui s'achève une époque. avec son remplaçant Oscar Garcia puis l'intérimaire Julien Sablé, les choses ne se passent pas bien pour l'ASSE et pour Perrin, qui rechute physiquement à plusieurs reprises. alors que le club s'enfonce doucement, Perrin assiste du banc à quelques naufrages mémorables, comme face à l'OL en novembre 2017 (0-5).
L'arrivée de Jean-Louis Gasset en toute fin d'année sonne heureusement la fin des ennuis: les Verts se remettent à bien jouer et à gagner, de nouveaux joueurs sont recrutés, Loïc Perrin renaît.

L'ambiance, la performance et les résultats reviennent au printemps 2018

On commence toutefois à entrapercevoir la fin du parcours pour Loïc. À 33 ans, malgré ses prolontgations régulières, l'inamovible défenseur central commence doucement à accuser le poids des années. Il est moins rapide, moins vif, se fait parfois surprendre physiquement ou peine à compenser ce handicap avec sa lecture du jeu.
Sa saison 2018-19 est encore excellente (32 matches, 2 buts) et sa complicité avec Neven Subotic, Mathieu Debuchy et Timothée Kolodziejczak fait des merveilles mais l'éclosion des prodiges William Saliba puis Wesley Fofana, laissent envisager sa succession avec sérénité.
Cela ne se passera malheureusement pas ainsi...

La campagne européenne de 2019 est poussive, Perrin commence à franchement accuser le poids des années et le reste de l'équipe se relâche progressivement sous les ordres de Ghislain Printant. Claude Puel est nommé pour remettre un peu d'ordre mais le jeu des Verts se délite et Perrin ne peut plus endosser le costume du sauveur. Dès le début de la saison, il annonce que ce sera sa dernière et que la rencontre face à Dijon, prévue à l'ultime journée à Geoffroy-Guichard le verra faire ses adieux au peuple vert.
Le rendez-vous est donc pris. Loïc dispute néanmoins 30 matches, sans marquer, avant que... tout ne s'arrête brutalement !
Pas à cause d'une énième blessure. Non, à cause d'une pandémie. Le virus du COVID-19 met le monde à l'arrêt et tous les championnats cessent brutalement. Tout comme la carrière de Loïc Perrin qui aura joué à Montpellier une anonyme dernière rencontre.


Dernière entrée pour l'artiste Perrin

Enfin... pas tout à fait !
Avant que tout ne s'arrête brusquement, les Verts ont eu le temps de remporter une épique demi-finale de Coupe de France face à Rennes, au terme d'une soirée aussi festive que peu prudente, sanitairement parlant: ils doivent encore jouer la fameuse finale au Stade de France, face à l'inévitable PSG.
Aussi, Loïc Perrin signe un avenant à son dernier contrat et prolonge pour quelques semaines, le temps de disputer cette ultime rencontre, dans un stade quasi-vide certes mais comme il le dit lui-même: "C'est la vie qui choisit pour vous, on ne choisit jamais".
Cet ultime match de sa carrière, le 471e en vert, Loïc Perrin ne le terminera pas: après un début compliqué, terni par l'ouverture du socre de Neymar, il doit intercepter un contre de Kylian Mbappé. Son tacle aurait parfaitement pris le ballon à n'importe quel attaquant au monde mais Mbappé est si vif, si rapide qu'il devance le Stéphanois de quelques centimètres et c'est sa cheville que Perrin tacle.

Le choc est spectaculaire, le petit prodige français se tord de douleur et doit être évacué sur civière. Il rejouera quelques semaines plus tard en Champions League. Loïc, lui, sait que son match, sa finale et sa carrière s'achève sous le signe de son second et ultime carton rouge.
L'ASSe, malgré une prestation très solide voire dominatrice à 10 contre 11, ne parviendra pas à régaliser et s'inclinera 1-0. Pour Perrin, la soirée n'aurait pas pu être pire.


Clap de fin cruel pour Loïc Perrin

Ainsi s'achève la carrière (sportive) de Loïc Perrin mais une fois son deuil consommé, l'amour de l'ASSE redevient le plus fort: un temps simple conseiller de l'équipe dirigeante, Loïc intègre la promotion 2021-2023 du diplôme universitaire de Manager Général au CDES de Limoges. Son objectif est d'intégrer la direction de l'AS Saint-Étienne et celà va se produire plus tôt que prévu: à l'éviction de Claude Puel pour mauvais résultats en décembre 2022, Perrin voit son rôle se muer en coordinateur sportif, en partenariat avec Jean-François Soucasse, le directeur sportif et Pascal Dupraz, le nouvel entraîneur.
La sauce ne prendra pas: le mercato d'hiver est complètement raté et les résultats, légèrement meilleurs, ne seront pas suffisants. L'ASSE coule en L2 et Dupraz s'en va. Il sera avantageusement par Laurent Batllès pour un plan biennal de retour en L1.


Le trio Perrin-Batlles-Soucasse remontera-t-il l'ASSE en L1 ?
(photo le Progrès)

En tout état de cause, malgré son succès, ce pur produit maison a toujours su rester simple et c’est ce qu’on aime chez lui en plus de son immense talent (son physique ne gâchant rien pour la gent féminine). Lauréat du Ballon d'eau Fraîche en 2013 (récompensant le joueur de L1 ayant la meilleure mentalité), fondateur d'un complexe de sport-loisir près de Saint-Étienne avec Jérémie Janot, Loïc Perrin a encore de belles années devant lui, aprés sa longue carrière d'une fidélité exemplaire et rarissime.
Et s'il restait fidèle au club de son cœur jusqu'à sa retraite définitive, qui sait?
Il le mériterait...