Stéphane Jobard nous a livré ses impressions ce jeudi matin avant d'étrenner ses nouvelles fonctions d'entraîneur dijonnais après-demain contre Sainté.


C’est chouette de démarrer ta carrière d’entraîneur par la réception des Verts !

Oui c’est chouette ! Je suis né dans les années 70 [en 1971, ndp2] donc forcément je suis né avec les Verts. C’est grâce à eux que j’ai connu mes premiers émois footballistiques. J’avais suivi le match des Verts contre Liverpool sur la télé en couleur des voisins. J’ai été bercé par les Verts. L’épopée des Verts, ça me parle. Les années Platini aussi car j’étais du côté de Nancy. Je suis évidemment sensible au fait que les Stéphanois retrouvent la Coupe d’Europe, c’est un joli clin d’oeil. Commencer en Ligue 1 face à un club historique comme l’ASSE, c’est plutôt sympathique !

Quel est le sentiment qui domine chez toi avant le match d’après-demain : l’appréhension, l’excitation, l’impatience ? Un mélange des trois ?

Je dirais un mélange d’impatience et de sérénité. Je crois que toutes les équipes sont impatientes de démarrer la compétition. La préparation, c’est bien mais c’est long ! On attend tous la reprise du championnat. Je ressens aussi une forme de sérénité car je sais qu’on est prêt. Après, advienne que pourra ! Je suis globalement satisfait de notre préparation, j’ai eu des joueurs impliqués, engagés, réceptifs à tout ce que l’on a proposé avec mon staff. Nos matches de préparation ont été intéressants. Je ne te dis pas que tout a été abouti mais je suis plutôt content du visage que l’on a affiché.

Il n’y a pas d’ancien Vert dans ton effectif mais il y en a un qui a joué avec toi et bosse toujours au DFCO. Peux-tu nous dire quelques mots sur Florent Perraud ?

J’ai connu Flo comme joueur à Dijon, j’étais milieu de terrain et lui gardien. Il a vite adopté les gènes du club. Maintenant il est estampillé Dijonnais, DFCO. Il travaille depuis quelques années au service commercial du club. C’est un rôle qui lui va comme un gant. Il a la chance d’avoir connu l’envers du décor, il est plus à même d’expliquer le pourquoi du comment des résultats sportifs à nos partenaires. Je pense qu’il a vraiment cette envie d’aller vers les autres qui lui va bien. Il est bien chez nous, il est comme un poisson dans l’eau et dégage les valeurs du club. Il a vraiment le profil idéal pour exercer et s’épanouir chez nous.

Tu as été le plus de fois capitaine du DFCO avant qu’un certain Cédric Varrault te détrône. Quels souvenirs gardes-tu de notre ancien latéral stéphanois ?

Cédric est en effet le joueur qui a porté le plus de fois le brassard. C’est le capitaine emblématique de la reconstruction de Dijon. On est un club assez jeune. Quand je suis passé dans le staff professionnel, Cédric était notre capitaine. C’est lui qui nous a ramenés en Ligue 1. C’est lui qui nous a permis de nous maintenir en Ligue 1. On a pu se rendre compte de l’importance qu’il avait dans le vestiaire quand il nous a quittés l’année dernière. Retrouver un autre Cédric Varrault, c’est compliqué… Au-delà du joueur – je suis admiratif de la longue carrière qu’il a faite - j’ai beaucoup apprécié l’homme. J’aimerais retrouver un nouveau Cédric Varrault pour alimenter mon équipe.

Tu as évolué sous les ordres de Rudi Garcia à Dijon et tu as collaboré avec lui cette dernière saison à l’OM. Qu’as-tu appris aux côtés de celui qui a démarré sa carrière d’entraîneur à l’ASSE ?

Rudi, c’est aussi une belle rencontre. J’ai effet été l’un de ses joueurs avant de devenir son adjoint. Dans les deux cas, il donne toujours l’impression de faire grandir les autres à côté de lui. C’est quelqu’un de passionné, il rayonne. Je trouve que Rudi est un personnage solaire.

Comme Gérard ?

(Rires) Non mais quand on est au contact de Rudi, on est aspiré vers le haut. Je sors d’une année très bénéfique passée à ses côtés, une saison porteuse d’enseignements. Que ce soit en termes de management, de construction de séances, de gestion des matches… Ce qui est top avec lui, c’est qu’on est toujours sollicité, stimulé. Il n’est pas du style « je fonctionne tout seul et débrouillez-vous ! » Il se repose vraiment sur son staff pour mener son équipe. Du coup on sort toujours grandi de ce genre d’épreuves.

C’est une source d’inspiration dans ta propre façon de coacher ? As-tu d’autres influences, d’autres modèles ?

Rudi est forcément quelque part un mentor. Je vais m’en inspirer. Il prônait un jeu de possession, c’est quelque chose qui me plaît bien. Cette idée a été renforcée par l’expérience que j’ai vécue aux côtés d’Olivier Dall’Oglio. C’était un peu la même marque de fabrique. Je suis donc imprégné, marqué par ces deux entraîneurs. Malgré tout, j’ai aussi ma propre sensibilité. Je vais peut-être faire un mix des deux à la sauce Jobard.

Quelles sont les recettes de cette sauce Jobard ? Quels sont tes principes de jeu, ta philosophie ?

J’ai envie que les spectateurs passent un bon moment au stade, qu’ils viennent nous voir. Mais aujourd’hui, quand t’es dans un club de la dimension de Dijon, tu t’adaptes avant tout aux joueurs que tu as sous la main. Tu essaies de les mettre dans les meilleures conditions pour que ton équipe puisse produire du jeu tout en restant équilibrée. Ces trois dernières saisons, on a pris beaucoup de buts. Plus d’1,5 de moyenne. Avec ce postulat de départ, tu te dis que ça devient compliqué de te maintenir en Ligue 1. On s’est sauvé in extremis cette dernière saison mais il faut essayer d’être un peu plus hermétique.

Il y aura du béton dans la sauce Jobard ?

Ce serait réducteur de dire que je compte bétonner. Il y a deux temps dans un match de foot : le temps où on a le ballon et le temps où on ne l’a pas. Quand t’as le ballon, t’essayes de produire du jeu. Il faut bien sûr avoir les éléments pour mais je pense que je les ai dans mon équipe. Mais je veux faire comprendre à mes joueurs que les temps où on n’a pas le ballon, c’est important aussi. Ça a été un peu galvaudé. Mais l’idée n’est pas de mettre un pont-levis et des barbelés dans la surface pendant tout le match. J’ai envie que mes joueurs prennent aussi du plaisir sur le terrain.

Loïs Diony devrait faire son retour à Gaston-Gérard à l’occasion de cette première journée de L1. Quels souvenirs gardes-tu de ce garçon et comment expliques-tu qu’il peine à s’imposer à Sainté ?

Je garde un excellent souvenir de Loïs. On l’a vu passer du monde amateur au monde professionnel chez nous. Loïs m’a marqué par ses grosse qualités athlétiques et footballistiques. J’ai le souvenir d’un joueur plein d’envie, qui croquait à pleines dents tout ce qu’on lui proposait. Tu me parlais de Cédric tout à l’heure, je n’oublie pas non plus l’apport de Loïs. Il nous a fait monter en Ligue 1. Il formait un duo très complémentaire avec Julio Tavares. Sa première année en L1, Loïs a marqué 11 buts, ce n’est pas anodin. Je pense que c’est un très bon joueur. Par contre c’est un affectif, il a besoin d’un cocon, d’être rassuré, entouré. Quand j’ai appris qu’il partait à Sainté, je pensais que c’était le bon environnement pour lui pour grandir. Avec la ferveur du Chaudron, je pensais qu’il pouvait devenir l’un des chouchous du public. Je constate qu’il a un peu de difficultés là-bas. Je ne connais pas les raisons de cet état de fait, c’est dommage. J’ai tendance à penser qu’il suffirait d’un petit déclic pour qu’il retrouve de sa superbe. S’il pouvait éviter d’avoir ce déclic samedi, je ne te cache pas que ça m’arrangerait !

A l’issue de ce match, vas-tu garder Loïs ?

(Rires) J’ai lu qu’on nous prêtait l’intention de le faire revenir mais on ne s’est jamais penché sur son cas. On pense qu’il est bien à Saint-Etienne et je ne suis pas sûr qu’on fasse partie de ses plans. L’idée de voir d’autres clubs, d’autres environnements lui irait très bien. Son retour chez nous est une fake news, ce n’est pas le cas. Même si on doit compenser le départ de Wesley Saïd, on est plutôt armé offensivement. Loïs n’est pas dans les profils recherchés. On cherche plutôt un joueur capable de faire la dernière passe, d’alimenter le cœur du jeu.

Tu sembles avoir fait une croix sur Loïs mais envisages-tu de faire revenir Aubame à Dijon ?

Ça va être compliqué ! (rires) Pierre-Emerick est dans d’autres sphères, il est bien loin de Dijon. On est très content de son évolution. Je garde le souvenir d’un garçon charmant, plein de simplicité, d’humilité. Il avait cette envie d’apprendre. Je regarde son parcours d’un œil envieux et amusé. Aubame joue à très haut niveau. Mais son retour chez nous n’est pas d’actualité. Peut-être qu’il reviendra dans dix ans, quand on jouera la Ligue des Champions…

A défaut de faire revenir Aubame dès maintenant, t’as recruté deux gars bons du Gabon, qu’on avait pistés il y a quelques années : Bruno Ecuele Manga et Didier Ndong. Tu les as pris pour tenter de neutraliser leur compatriote Denis Bouanga ?

Ecoute, s’ils pouvaient le mettre sous l’éteignoir samedi soir, ça m’irait très bien ! En tout cas, je suis content de ces deux recrues, ils apportent une réelle plus-value à Dijon. J’espère qu’ils neutraliseront Bouanga ce week-end pour nous montrer qu’on ne s’est pas trompé.

Naïm Sliti, qui avait réalisé un triplé à GG ne janvier dernier, sera-t-il de la partie ?

Il revient ce matin à l’entraînement, on lui a laissé trois semaines de vacances après la CAN. Je ne compte pas l’aligner samedi, il est nécessaire qu’il retrouve le rythme des entraînements avant de pouvoir postuler.

On verra si tu nous racontes des bobards, Jobard ! En attendant, quel regard portes-tu sur le mercato stéphanois ?

Je trouve que les Verts restent un gros morceau. Moi j’ai bien aimé ce qu’ils ont proposé la saison dernière. Il y a eu quelques changements lors de ce mercato mais je trouve que les profils restent les mêmes. Le seul joueur majeur qui est parti, Rémy Cabella, a été remplacé par un autre très bon joueur ayant à peu près le même profil, Ryad Boudebouz. J’estime que les Verts ont une force de percussion devant très intéressante. Denis Bouanga par exemple est un joueur hyper intéressant. Je pense que les Verts ne se sont pas trompés. Globalement, l’équipe n’a pas trop changé en fait. Je pense qu’on aura samedi un adversaire de calibre pour débute le championnat. Je pense que les Verts feront encore une bonne saison. Il faut peut-être attendre la fin du mercato et les premiers matches pour mieux juger les forces en présence mais à mon avis Sainté aura de nouveau les arguments pour postuler au Top 5.

Sainté a remporté les quatre matches de L1 qu’il a joués à Dijon. Comptes-tu perpétuer cette belle tradition samedi soir ?

Tu te doutes bien que non ! (rires) Je me dis qu’au moins je ne pourrai qu’agréablement surprendre. J’aimerais être le premier entraîneur à prendre au moins un point à Dijon contre Saint-Etienne. C’est vrai qu’on a perdu les quatre précédents matches contre l'ASSE à Gaston-Gérard. La seule fois où on a accroché les Verts ici, on les avait même éliminés aux tirs au but en Coupe de France, c’était il y a plus de quinze ans, à l’époque de Rudi Garcia. On sait que depuis on a été corrigé à chaque fois que les Verts sont venus chez nous. J’aimerais vaincre le signe indien samedi.

Choper un point suffirait à ton bonheur ?

Ecoute, on sait que pour se maintenir il faut gagner des matches. Une équipe comme Dijon doit en gagner une bonne dizaine dans l’année. Après ça dépend des scénarios des matches. Face à des adversaires à notre portée, il faut s’efforcer de prendre les trois points. Parfois, il faudra se contenter du nul, quand on sentira que l’adversaire est au-dessus de nous. A chaque match son histoire, difficile de prédire ce que ça donnera samedi.

France Football te voit finir cette nouvelle saison lanterne rouge. Ça t’agace, ça t’amuse, ça t’indiffère ou ça te motive ?

Je prends ça avec beaucoup de détachement. L’histoire, on ne la connaîtra qu’à la fin. On ne pourra que surprendre agréablement vu que tout le monde nous met au fond du seau. Personnellement j’adore relever ces challenges-là. J’aime qu’on nous mette au fond de la nasse, la tête sous l’eau. A Dijon, on ne se noie pas sans se débattre.

 

Merci à Stéphane pour sa disponibilité.