Si un nul à l'extérieur est généralement un bon résultat, celui obtenu à Nîmes est un peu frustrant pour les Verts, qui auraient pu et dû faire mieux.


Le déroulement du match est bien résumé par Debuchy : "En première période, on doit tuer le match en marquant plus (...) À la mi-temps, on s'est dit qu'il allait falloir ressortir le ballon, mais on a trop balancé, et on a mangé des contres (...) Ils ont bien poussé, ils nous ont mis en danger (...) Nous, on aurait du mieux faire dans la maîtrise de la balle". Ce mot, maîtrise, revient aussi dans l'analyse que Jean-Louis Gasset fait du match. Et en effet, en première période, les Verts ont maîtrisé leur sujet, on bien géré le match et ont eu plusieurs occasions d'aggraver le score. Et si la deuxième période a commencé pareillement, cette maîtrise s'est ensuite volatilisé face à l'envie affichée par l'adversaire. Illustrons tout ceci avec quelques exemples.
 

Première période

 
Pendant une grosse demi-heure, les Stéphanois ont eu la possession du ballon (55%), déjouant le pressing adverse grâce à une belle maîtrise tactique. Dans l'exemple suivant, Ruffier joue avec Kolodziejczak :

 
Perrin s'est écarté de l'autre côté, M'Vila et Subotic sont dans l'axe, KMP, Cabella, Selnaes et Debuchy plus haut. Les Nîmois font un pressing haut avec pas moins de 7 joueurs dans les 40m de l'ASSE, une ligne de 3 (deux AC et un milieu latéral) et une autre de 4. Mais les Verts arrivent à ressortir proprement : Selnaes décroche, il est trouvé par Kolo et donne à M'Vila, qui écarte de l'autre côté avec Debuchy. Le latéral cherche Khazri, en position d'ailier...
 
 
... qui joue en arrière avec M'Vila et le ballon arrive de nouveau à Debuchy. Un autre triangle de passes est fait avec Perrin et Selnaes :
 
 
Le tout se fait sans affolement et avec une grande précision, malgré le pressing adverse. Selnaes est entouré par plusieurs adversaires, mais il reçoit de nouveau le ballon de la part de Debuchy :
 
 
... et il écarte parfaitement le jeu de l'autre côté, où Kolo est libre. Un pressing haut effectué par 6 Nîmois (sans compter le latéral qui suit Khazri), déjoué sans problèmes par les Stéphanois. Un décalage est fait, mais le but n'est pas d'attaquer, juste de faire courir l'adversaire. Ainsi, Kolo joue en arrière avec Subotic :
 
 
Le défenseur stéphanois trouve KMP sur l'aile gauche, qui combine avec Kolo...
 
 
... avant de donner le ballon à Selnaes. Le jeu est maintenant envoyé côté droit...
 
 
... où Debuchy est libre. Sur ce plan large, on peut observer comment les offensifs de l'ASSE se trouvent à 4-contre-4 avec la défense. Si Debuchy centre bien dans la surface, il y a clairement moyen de faire quelque chose. Mais il décide de jouer en arrière avec Perrin...
 
 
... qui combine avec Selnaes avant de donner le ballon à Ruffier. On aperçoit dans cet exemple une ASSE qui maîtrise parfaitement son sujet, qui dicte le rythme de la rencontre et qui n'est pas inquiétée par le pressing ou le positionnement de l'adversaire. Mais la suite de l'action est intéressante aussi : un long ballon de Ruffier qui cherche Debuchy...
 

... qui gagne son duel de la tête et qui lance ainsi Khazri en profondeur. S'il arrive à centrer, Nordin, Cabella et KMP se retrouvent contre seulement deux défenseurs. Malheureusement, le gardien sort et pousse l'avant-centre stéphanois, sans qu'une faute ne soit sifflée.

Ce long ballon qui envoie un Vert excentré dans le dos de la défense est loin d'être anodin - ça a été la tactique stéphanoise qui a donné les meilleurs résultats en 1MT. Par exemple, à la 10e minute, après plusieurs dégagements des deux côtés, Khazri est trouvé sur l'aile gauche :

 
Son contrôle est approximatif est il est obligé de revenir avec le ballon jusqu'en défense, où il combine avec Perrin. Le capitaine évite le tacle d'un attaquant et redonne la balle à l'avant-centre converti premier relanceur, qui lève la tête, attend l'appel, et envoie un énorme ballon... 
 
 
... dans le dos de la défense, parfaitement dans la course de Cabella. Une fois dans la surface, il se retourne, mais il ne cherche pas à combiner avec KMP ou Nordin :
 
 
Il garde le ballon, cherchant d'autres solutions et la défense a le temps de se replacer. Cabella combine finalement avec M'Vila...
 
 
... qui joue en arrière avec Kolo et le jeu change de côté en passant par la défense :
 
 
Le deux équipes se sont replacées proprement, M'Vila et Selnaes sont dans l'axe et les 4 offensifs à leur place, même s'ils ont un peu interchangé, Nordin en "10" et Cabella en ailier gauche :
 
 
Le bloc nîmois est en place (deux lignes de 4), mais il y a une faille, probablement identifiée à la vidéo, vu le nombre de fois qu'elle a été exploitée. Ce fameux ballon dans le dos d'un latéral adverse est pour KMP cette fois-ci. Le gardien sort comme dans l'exemple précédent, mais il est éliminé par l'ailier stéphanois, qui offre à Khazri l'opportunité de tuer le match dès la 10e minute. 


Deuxième période

 
Les 10 premières minutes de la 2MT ont été similaires à la première demi-heure : des Stéphanois qui gardent le ballon (55% de possession) et qui ne laissent donc pas aux Nîmois la possibilité d'emballer le match. Mais la suite n'a pas été du même calibre, le ballon a commencé à être perdu de plus en plus vite et les offensives adverses faisaient de plus en plus mal. Les Verts n'ont affiché plus que 41% de possession entre la 56e et la 75e (égalisation de Nîmes) et ils ont eu des longues minutes sans sortir de leur propre moitié. Cette capture d'écran de whoscored.com montre les ballons touchés par Nîmes (orange) et l'ASSE (bleu) pendant 5 minutes après l'entrée de Salibur à la place de Nordin (les Verts "attaquent" de droite à gauche) :

 
L'ASSE a bénéficié de plusieurs touches et deux "6 mètres", donc des opportunités claires pour garder le ballon, mais ils l'ont perdu en quelques secondes à chaque fois. Comme on ne peut pas montrer toutes ces approximations, on regarde seulement la fin de ces 5 minutes, fin qui illustre très bien un autre aspect : non seulement les Verts ne gardaient pas le ballon, mais ils ne défendaient pas très bien non plus. Après une sortie de but, Ruffier joue long, pour KMP :
 
 
Le duel aérien est gagné par le Nîmois, mais le ballon arrive à M'Vila. Relance propre, ballon posé pour calmer le jeu, comme en 1MT ? Non, long ballon envoyé n'importe comment directement dans les bras du goal adverse et possession perdue. Nîmes peut donc commencer une nouvelle attaque, qui démarre à droite...
 
 
... avant que le jeu soit envoyé à gauche :
 
 
Il n'y a rien d'exceptionnel, le bloc stéphanois est en place, chaque joueur défend sur son adversaire direct :  
 
 
Salibur sur le latéral adverse, Debuchy sur le milieu excentré, Selnaes et M'Vila sur les deux milieux axiaux. Mais tout se casse avec un des mouvements les plus basiques : un des milieux nîmois se projette vers la surface stéphanoise. Ça crée un espace qui est pris par le latéral gauche, balle au pied. Il élimine Salibur et avance avec le ballon...
 
 
... avant de trouver un point d'appui avec un des attaquants. La montée et la passe du latéral adverse ont donc éliminé Salibur et le duo Selnaes-M'Vila : Debuchy se trouve seul contre deux adversaires, le milieu latéral et celui axial qui était monté. C'est le dernier qui est lancé en profondeur...
 
 
... et il talonne pour le premier. La défense stéphanoise n'est clairement pas bien en place. Alors que le milieu droit nîmois est complètement libre au second poteau, le duo Subotic-Kolo défend sur l'avant-centre. Quant à Perrin, Debuchy et Selnaes, ils doivent défendre contre quatre adversaires. Le même avant-centre est de nouveau utilisé en point d'appui et le un-deux fonctionne très bien, le milieu latéral se retrouvant seul contre Ruffier... Heureusement, la barre transversale s'interpose et l'égalisation est retardée, mais pas pour longtemps.
 
 

Conclusions

 
Ce match a été bien préparé par le staff stéphanois. L'équipe alignée a été cohérente, avec des joueurs à leur meilleur poste (Cabella en "10", Khazri en avant-centre), une faille a été identifiée chez l'adversaire (les ballons dans le dos des latéraux) et la maîtrise a été au rendez-vous (même si pas tout le temps). Avec un peu plus de réalisme, les Verts entraient à la pause avec au moins deux buts d'avance et le match aurait pu être plié. Mais les adversaires ont su répondre avec leurs armes, l'envie, la combativité, et parfois ces ingrédients suffisent pour prendre le dessus sur une équipe supérieure dans d'autres domaines. Comme l'ASSE retourne dans le même stade en quelques jours, ça sera intéressant de voir ce que les deux équipes proposent dans le contexte d'une probable rotation d'effectif. Parce que les ingrédients nîmois ne dépendent pas trop de qui est sur le terrain, mais la maîtrise stéphanoise risque de pâtir de la situation. Et dans ce cas, il faudra répondre présent dans la détermination, surtout dans un match de Coupe - à voir si les Verts en sont capables.