Le regard hagard, Roland accroche son vélo sur le mur de son garage entre la photo de l’arrivée au Stade France dans sa tunique cycliste siglée Asse et un fanion offert par Gérard Janvion. Il est épuisé. Il ne devrait plus s’adonner à ses sorties de 100 bornes. Le docteur Bouzaabia avait été clair lors de sa dernière visite, six mois plus tôt :
« - M. Romeyer. Vous êtes épuisé. Le vélo ne vous aide pas. Je vous conseille de raccrocher le vélo et le maillot vert au plus vite. Faites du Yoga ou de la Gym.
- Pourquoi pas du Bridge…
- Oui, pourquoi pas.
- Non mai tu rigoles, je suis juste un peu fatigué et moralement... Une victoire contre Monaco ce soir et ça me remettra sur pied en un rien de temps. Tu verras. Je vais bloquer les ultras qui veulent nous emmerder. Ahah on verra qui est le vieux fatigué.
- M. Romeyer, votre problème est aussi psychologique. Il me semble… que vous avez, depuis quelques temps...des problèmes dans l’analyse et la perception de votre environnement.
- Tu es sérieux ?
- Vos compagnons de sortie s’inquiètent. Ils disent que vous pensez avoir le coffre d’Eric Zabel mais vous ne seriez même plus capable de suivre Roger.
- Ils ont dit ça les fumiers ?
- Bernard est d’accord. Il dit que si vous l’aviez écouté, vous n’en seriez pas là. Que si vous aviez agi comme il vous le recommandait vous auriez encore l’énergie nécessaire pour vous faire le Puy-de-Dôme mieux que Poupou. Mais vous avez trop tiré sur la corde.
- Mais je suis encore au top…
- Et Julien entraîneur ?
- Mais… »
Quelques heures plus tard, en rentrant chez lui à vélo afin de se prouver que ce foutu carabin n’y connaissait rien, il avait trouvé un homme accoudé à son portail.
« - Bernard ? Qu’est-ce que tu fais là ?
- Reprends ton souffle, je vais t’expliquer… »
Accoudé au mur, Bernard, regarde Roland d’un air réprobateur mêlé d’une certaine affection.
« - Tu as vu la fissure sur ton mur, je t’avais dit de prendre l’entreprise Bertin, ça ne ce serait pas passé de cette manière.
- Bernard, que fais-tu à Sainté ?
- On va faire une conférence de presse.
- Pour dire quoi ?
- Tu vas lâcher du lest et on va vendre le club. Vraiment cette fois-ci. T’accuses le coup mon Roland ? Ne t’inquiètes pas. On peut négocier un poste. Tu connais tout le monde ici et moi je connais tout le monde qui compte : Nasser, Jean-Mi, le ministre. Les acheteurs seront bien content de nous avoir et on pourra surveiller tout ça.
- Je sais pas.
- Trop tard mon Roland, j’ai convoqué la Presse. Nasser m’a dit que j’avais raison, aujourd’hui il nous manque au moins 50 millions pour pouvoir avoir des ambitions…Ah si on avait recruté Pastore comme je l’avais dit… »
Une odeur de cigare familière sort Roland de sa rêverie.
« - Roland, c’est la merde.
- Qu’est … ce.. qui…
- Reprends ton souffle mon vieux. Si t’avais arrêté le vélo comme je te l’avais dit…
- Qu’est-ce qui se passe.
- Je viens d’avoir Lazard au téléphone.
- Ils sont pas morts ceux-là…
- C’est chaud avec les ricains.
- Ils ne sont pas là ?
- Si les ricains étaient là. Je viendrai pas t’emmerder.
- Ils signent pas ?
- Non. Ils ont pris la mouche. Apparemment De Bontin faisait tampon mais le Boss était furax. Notre dernière propal n’est pas passé.
- Non ?
- Ils m’ont envoyé des extraits de la conf call. Il gueulait comme un putois sur le mec de la banque. Comme quoi acheter le club en gardant les deux ringards, un stade qui appartient pas au club et avec des conditions sur le staff à conserver ça lui allait pas à notre prix. Il a dit à de Bontin : « pourquoi pas prendre ton pote brésilien qui quémandait un poste là où pourquoi pas un coach de la Soccer League, fuck yourself».
- Les deux ringards ?
- Je pense qu’il parlait de Gasset et Printant.
- On va passer pour des cons là.
- Pleures pas Roland, craques pas. Merde. Me laisses pas seul dans cette merde. Ce soir je suis invité d’une émission.
- Annules.
- Bah non, ça serait dommage quand même de … une émission en direct …
- Restes vagues. Balances rien. Gasset va nous claquer dans les pattes. Les gens du coin vont me tuer…
- Roland...
- Attends le téléphone sonne. Oui allô ? Quoi ? Qui est ce Dusart, connaît pas. Je démens rien je sais pas qui c’est ce Touiteur. Quoi ? Je comprends rien. Laissez moi tranquille !
- C’était qui ?
- On est grillé Bernard. Un mec de « But ! » Vient de reprendre une info d’Evect reprise d’un potin de Poteaux Carrés comme quoi sur Truiteur, un mec de l’équipe 21 a annoncé la mort de notre projet annoncé elle-même par un Dusart. On est mal !
- Gardes ton calme. Lazard va essayer de nous rabibocher avec les ricains moi je vais faire sobre sur infosport. Demain tout sera oublié. Roland fais moi confiance. »
A suivre...
Vertige : Épisode 1 : et si les Ricains n’etaient pas là
Modérateurs : Barre transversale, Poteau gauche, Poteau droit, Ligne de but
Re: Vertige : Épisode 1 : et si les Ricains n’etaient pas là
Excellent. Vivement la suite 
Re: Vertige : Épisode 1 : et si les Ricains n’etaient pas là
Merci Dr Green, sympa à lire, j'aime bien le passage où ils sont à l'ouest au sujet "des deux ringard" , ils sont vaches de penser à Gasset et Printant 
Les hommes naissent libres et égaux en droit. Après ils se démerdent . Jean Yanne