Ayant porté le maillot vert puis celui des vilains, Mouhamadou Dabo a fait le chemin inverse de François Clerc. L'actuel défenseur malherbiste a accepté de répondre à nos questions avant le match tant attendu de vendredi soir.


Bonjour Mouhamadou, comment vas-tu ? Où en es-tu au niveau des blessures ? Tu n’as pu jouer que deux matchs cette saison avec la réserve de Caen, tu espères revenir bientôt ?

Je vais mieux, Dieu merci, je commence à m’entrainer normalement à nouveau ; j’espère pouvoir revenir dans le groupe pro bientôt !

Tu es probablement l’un de ceux qui a joué le plus de derbys dans les deux équipes différentes, qu’est-ce que tu penses de ces matchs ?

D’abord, je crois que les derbys ne sont plus comme avant : quand je jouais à Sainté, il y avait beaucoup de joueurs issus du centre de formation, et maintenant c’est moins le cas. Il reste au moins Loïc Perrin et Jessy Moulin, et j’espère qu’ils sauront inculquer aux autres joueurs les enjeux que représentent un derby, mais je pense qu’on ne préparait pas le derby de la même façon qu’aujourd’hui.

Tu penses qu’il serait donc préférable d’inclure plus de joueurs du centre de formation pour ce match ? Il y a Saliba par exemple, qui a rejoint Saint-Etienne à 15 ans ; étant donné que Loïc Perrin est absent, tu penses que ce serait une bonne solution ?

Oui, en tant que joueur, on doit tous commencer un jour ou l’autre dans un match délicat. S’il est dans le groupe pro, c’est qu’il a des qualités. J’ai déjà vu quelques-uns de ses matchs, et je crois qu’il est capable de jouer le derby. On commence tous en bas de l’échelle, et il faut se lancer à un moment donné. Je pense que ce serait très gratifiant pour lui.

Que penses-tu du début de saison des Verts ? Comment tu sens ce derby ?

Je regarde encore les matchs de Saint-Etienne, et ils avaient bien commencé le championnat, puis ils ont eu un coup de mou, mais là ils sont en train de revenir en forme. Il y a un joueur que j’aime beaucoup : c’est Salibur. De l’autre côté, Lyon est un peu dans la même situation, avec beaucoup d’irrégularité, mais leurs joueurs sont en train d’élever leur niveau, avec Depay notamment. C’est un match quasiment impossible à prévoir, mais je suis sûr qu’on va assister à un beau derby.

Comment tu appréhendais les derbys ? Est-ce que tu sentais une différence dans la manière d’aborder le match entre les deux clubs ?

A Saint-Etienne, on considérait ce match comme très particulier : déjà le mois avant, on sentait dans la ville une ambiance particulière. Quand on croisait les supporteurs, on nous faisait sentir qu’il ne fallait surtout pas perdre ce match, il y avait beaucoup de pression. Alors qu’à Lyon, on avait l’habitude de jouer presque tous les 3 jours donc on n’abordait pas le match de la même manière. Mais c’est la suprématie dans la région qui est en jeu, donc quoiqu’il en soit, les deux équipes sont ultra-motivées. Ce sont des matchs que tout le monde aimerait jouer. Ce derby est plein de saveurs.

Justement, tu ne crois pas que c’est cette pression qui nous empêchait de gagner ?

Je ne sais pas ce qu’il en est maintenant, mais avant, oui, j’avais l’impression qu’à Saint-Etienne on préparait le match très tôt, peut-être trop tôt. On se mettait beaucoup de pression en effet, il ne fallait surtout pas perdre, et on n’avait pas gagné depuis longtemps. En fait, comme on était une équipe qui n’avait jamais gagné le derby, la pression s’accumulait. Alors qu’à Lyon, on abordait le match de façon plus tranquille.

Sur le plan individuel, c’est avec le maillot lyonnais que les derbys ne t’ont pas forcément réussi. Tu as reçu beaucoup de cartons, dont deux rouges : comment tu expliques ça ? Est-ce que c’est la tension globale due au derby ou c’est une pression que tu avais gardée en toi depuis Saint-Etienne ?

Ce n’est pas la pression que j’avais gardée de Saint-Etienne, car je pense que sur mes derniers derbys avec l’ASSE, on avait un peu rectifié le tir. On fait quelques matchs nuls, dont un où on est très proche de gagner, mais Benzema marque à la toute fin de rencontre [27 janvier 2008 ndp²]. Donc il y avait moins de poids sur nos épaules. Et ensuite, avec l’OL, pour le premier carton rouge que je prends, on gagne le derby en Coupe de la Ligue trois jours avant [26 Octobre 2011 ndp²], donc je n’aborde pas le match avec une pression particulière.  Finalement je me prends ce carton rouge pour une faute sur Nicolita, dans un duel.

Les cartons que j’ai reçus étaient plutôt liés à des faits de jeu : le second rouge que je reçois, c’était à Geoffroy-Guichard (9 décembre 2012 ndp²) : Gradel me piétine le visage, et donc quand je me relève, je mets ma tête en avant mais il s’écroule… J’ai joué plus de derbys à Saint-Etienne (7 avec Saint-Etienne, contre 6 avec Lyon, ndp²) où il y avait plus de pression, et où nous étions souvent dominés, et pourtant je n’ai pas pris de carton rouge, donc je pense que ce n’était pas lié à la tension du match.

Comment tu vivais le retour dans le Chaudron avec le maillot lyonnais, ce n’était pas trop difficile ?

Non, pas difficile du tout. Au contraire, quand je revenais à Saint-Etienne, je prenais beaucoup de plaisir : c’est mon club formateur, donc revenir à Geoffroy-Guichard était agréable. De plus, je pense avoir laissé une bonne image de moi, je n’ai jamais eu de problème, j’ai toujours été soutenu, donc bien au contraire, c’était toujours très sympa de retrouver les joueurs et les dirigeants.

Ça a été plus compliqué pour d’autres, comme Gomis par exemple…

Non pas du tout, je pense que c’est parce que Bafé est attaquant : on sait que c’est celui qui peut mettre en danger l’équipe, donc il y a peut-être un peu plus de pression, mais il a toujours compris ce que ressentaient les supporteurs. Et puis, c’est juste un match de foot : après le match, des supporteurs des Verts venaient prendre des photos avec lui. En fait, après la rencontre, tout redevient normal, et c’est cela qui cimente le football : tu cries pendant 90 minutes sur le joueur adverse, et à la fin du match tu vas l’embrasser, c’est ce qui est magnifique.

Tu penses qu’avec le 5-0 à Geoffroy-Guichard de l’an dernier, et tout ce qui s’en est suivi, il y a une sorte d’esprit revanchard qui redonne de l’enjeu à ce match ? Est-ce que ça peut compenser l’absence de joueurs formés au club ?

Ça peut jouer en effet ; avec le résultat de l’an dernier, ils vont probablement bien mieux préparer ce match. Mais pour revenir sur ce qui s’est passé à Geoffroy-Guichard, je crois qu’il ne faut pas que les supporteurs mélangent : célébrer son but est tout à fait normal, ce n’est pas interdit. Les supporteurs stéphanois en général supportent leur équipe sans débordement du début à la fin, et c’est qui est beau, c’est mieux comme cela.

Le match aura lieu au Parc OL. Toi qui as joué dans ce stade, qu’en penses-tu ? Est-ce que ça donne une arme supplémentaire aux vilains ?

J’ai eu l’occasion de l’inaugurer quand j’étais à Troyes ; ça leur donne une grande force, ils perdent beaucoup moins depuis qu’ils jouent là-bas. Mais je crois que le match va se décanter autour d’énormément de critères puisqu’il y a aussi l’état physique des joueurs à prendre en compte avec les nombreux internationaux lyonnais, le froid qui vient d’arriver… Cela fait beaucoup d’éléments qui rentrent en jeu.

Merci à Mouhamadou pour sa disponibilité.