Responsable du centre de formation de l'ASSE, Bernard David a répondu aux nombreuses questions des potonautes.


On a souvent critiqué les centres de formation français pour leur propension à miser davantage sur le physique que sur la technique et la tactique, comme en Espagne. Les joueurs qui sortent du centre de formation ces dernières années sont assez physiques (Zouma, Saadi, etc...) mais avec les Suljic et Souici à venir, ça s'inverse. Qu'en est-il vraiment ? (Galcian)

C'est aussi un phénomène de mode. Souvent, quand il y a un champion du monde costaud, comme l'Allemagne, on revient à de grands gabarits. Quand c'est l'Espagne, on revient à de petits gabarits. Nous, honnêtement, c'est vrai qu'on a aussi des joueurs costauds, en particulier derrière comme Karamoko en défense centrale, mais depuis que je suis là, on recherche surtout le profil au poste. C'est vrai qu'on veut de grands gardiens, c'est vrai qu'on veut de grands arrières centraux, mais on veut surtout des joueurs intelligents et bons footballeurs. Si vous venez voir nos 14 et nos 15 ans, on va dire que ce sont des pin's. On a pris un mauvais départ, puis derrière, on a tout gagné. On privilégie bien sûr le côté "intelligence" et les qualités de footballeur. Des garçons comme Souici et Suljic, à leur poste, ont des chances d'évoluer plus haut, même si on ne connaît pas à 100% leur évolution. Mais c'est avant tout la qualité du footballeur qui prime bien sûr par rapport au poste.

Quelle est l'utilité de faire signer un jeune pour un an comme Axel Kacou ? C'est une question de stats, de nombre de joueurs pros à sortir chaque année ? Y a-t-il un objectif à terme d'avoir un certain pourcentage de joueurs issu du centre ? (Galcian)

Non, aucun rapport avec les stats. C’est un garçon en qui nous croyons, mais il doit encore s’affirmer, au même titre que d’autres d’ailleurs. Bien sûr, il y a des exceptions comme Kurt Zouma. A 17 ans, il était déjà au top, mais un joueur "normal" est souvent prêt à 21-22 ans plutôt qu'à 17-18 ans. Cela donne donc la possibilité à Kacou cette année, d'avoir une année supplémentaire pour mûrir et se montrer. On préfère faire signer trois ans les joueurs pour qu'ils aient la possibilité de jouer en première division un jour. Ce n'est pas du tout une question de stats, je suis même surpris qu'on puisse le penser. C'est une question de donner une chance supplémentaire à un ou deux joueurs d'évoluer, certes en CFA au départ parce qu'ils ne sont pas encore mûrs, chez les pros un an plus tard.

Ça fait plusieurs années que l'ASSE s'essaye à la post-formation avec un résultat pour le moins mitigé. Je comprends que ce sont des paris et que l'on ne peut pas viser juste à chaque fois, mais pour l'instant à moins que je me trompe c'est un zéro pointé. Etant donné la continuité de cette politique cette année avec les Pinheiro et autres Virksas, est ce que ça veut dire que les problèmes rencontrés jusqu'à présent ont été identifiés et solutionnés ? Quel est votre regard sur le côté post-formation ? (derrickhunter)

Il est vrai - je parle toujours depuis que je suis là - qu'on fait le yoyo entre la CFA et la CFA2. Il est vrai qu'il y a de bons résultats avant, en U17 et U19 puisqu'on a été champion de France il y a deux ans, qu'on a été demi-finaliste l'année dernière, ça veut dire qu'il y a de bons jeunes. Il est vrai qu'on a une politique de jeunes, j'allais dire de très jeunes puisqu'en U19 nous jouons avec essentiellement des premières années voir des U17. On a battu Nîmes, qui avait tout gagné jusque-là, avec 8 "première année". Il est vrai qu'en CFA et CFA2, ça piétine. Pourquoi ? Quand on est en CFA ou CFA2, on joue contre des équipes, la plupart du temps, amateurs, qui, elles, ont des joueurs de 25-30 ans qui nous marchent dessus, il faut dire ce qui est. Quand on fait jouer des 17 ou des 19 ans, c'est comme ça. On veut les faire mûrir très vite, c'est la volonté du club, pour qu'ils sortent à 20 ans. A 20 ans, il faut prendre une décision, c'est embêtant mais la loi des contrats est comme ça.

Parfois, quand on recrute, on recrute à 13 ans, à Paris ou ailleurs, et ils arrivent avec des ANS (Accord de non sollicitation) à 15 ans. Après, à 18 ans, pour recruter en France, c'est très rare qu'un garçon soit passé à travers les mailles du filet, donc on va regarder le Lituanien qui est arrivé, Pinheiro du Cap-Vert, le petit Rocha qui est plus jeune, Maïga, qui malheureusement s'est blessé. C'est vrai que ceci permet de boucher nos trous à 18-19 ans. Ce ne sont pas des paris, ce sont des opportunités, mais plus on les prend tard, que ce soit des étrangers ou non, moins on a de chance de se tromper. Le jeune Virksas a de grosses qualités, Maïga, malheureusement, il va être freiné par sa blessure, les Cap-Verdiens, avec Pinheiro qui a 18 ans, on est plus sûr d'y arriver qu'avec un gamin qu'on recrute à l'âge de 13-15 ans. On aimerait bien sûr que notre réserve soit plus solide, mais, en même temps, nous sommes là pour faire progresser les jeunes. Avec Pinheiro, qui est un peu plus mûr, et Maupay expérimenté malgré son jeune âge, nous avons gagné. On n'aurait peut-être pas gagné sans eux, parce qu'ils ont marqué et ont fait marquer. Mais c'est le charme de la formation, évoluer dans la difficulté pour progresser plus vite.

La très longue expérience en terme de post-formation à l'ASSE laisse parfois l'impression de trop de tâtonnements, avec un niveau de jeu passable et trop de joueurs recrutés tardivement, qui percent très peu au final. L'ASSE n'aurait-elle finalement pas intérêt à recruter très peu de joueurs de 18 ans et à se concentrer quasi exclusivement sur le recrutement de jeunes de moins de 16 ans ? (bfb2)


Franco-français, bien sûr. Mais après sur les 18-19 ans, logiquement tous les clubs travaillent bien, même les clubs étrangers viennent tenter de nous piquer nos jeunes, et logiquement, des très très bons, il n'y en a plus, ou alors, c'est un gars qui éclate à 18 ans dans un club amateur de CFA ou National. On se concentre déjà sur les 13-16 ans français et après, on essaye de trouver les très bons ailleurs, et en même temps, ça complète notre génération. Avec la génération Bamba, on a été champion de France, mais cela ne nous a pas empêchés de descendre de CFA …

Pourquoi Allan Saint Maximin, considéré comme le joueur le plus prometteur passé dans le centre de formation ces dernières années, ne convenait pas à l'équipe pro et a été transféré ? N'as-tu pas le sentiment d'un certain gâchis le concernant ? (Leg42)

Je n'aime pas trop parler de cas particuliers. Il y a des joueurs très prometteurs à leur âge, Saint-Maximin en était un, et ils évoluent, ils n'évoluent pas, c'est compliqué. Ils sont en pleine crise d'adolescence, ce n'est pas toujours facile et je comprends très bien Christophe Galtier. Après, on a des joueurs, on peut le dire, comme par exemple Eliott Gattier, qui était et qui est toujours, très prometteur dans cette "génération Bamba". Il avait marqué les trois buts en finale du championnat U17 mais il s'égare un petit peu. On espère le voir revenir bientôt, parce qu'il a eu une blessure, mais on ne sait pas trop quelle est son hygiène de vie depuis qu'il quitte le centre... On en revient toujours à ce problème de maturité tôt ou tard. Allan fait partie des gens qui ont des qualités. Après, certains perceront ailleurs parce qu'ils ne comprendront que plus tard qu'ils avaient des qualités et qu'il fallait faire des efforts. Allan a joué en 17 ans, puis en 19, il a gravi les échelons très vite : ce n'est pas facile pour un adolescent de comprendre ça. Ça va très vite, et puis il y a l'entourage qui compte énormément, je parle des agents...

On parle beaucoup du gros investissement effectué par l'OL dans leur centre de formation et qui porte ses fruits avec moult joueurs formés dans leur équipe et vendus chaque été. Est-ce un modèle pour l'ASSE ? (Leg42)

Les deux clubs ont des politiques de formation différentes. Bien sûr, ça s'étudie, mais Lyon n'est pas l'AS Saint-Etienne et puis les bassins économiques et les clubs ne sont pas les deux mêmes. Nous, on attache davantage d'importance à l'image, à l'éducation, à la scolarité (98% de réussite au bac depuis 3 ans), au bien-être du jeune, et nous essayons de recruter de très bons joueurs, et quand on recrute de très bons joueurs, ils sont demandés par d'autres clubs, sinon ça veut dire qu'on se tromperait . Quand ce sont des joueurs régionaux, Lyon et Evian s'intéressent aussi à ces joueurs, logiquement, et puis maintenant il y a Monaco, Paris. Après, forcément, si c'est une question d'argent, ils ne viennent pas chez nous. C'est une volonté du club à laquelle j'adhère totalement parce que s'ils viennent à l'AS Saint-Etienne pour l'argent… Ce ne sont pas les valeurs qu'on inculque aux jeunes. Donc on recrute "malin" et je pense qu'on se débrouille bien. C'est comme les pros avec le salary cap, parfois nous en perdons mais, sur la valeur humaine du joueur, nous sommes toujours gagnants.

Faîtes-vous du benchmarking en matière de formation pour trouver des modèles susceptibles de s'adapter à un club comme l'ASSE ? (maxarthur)

On essaye, maintenant j'ai quand même un peu de bouteille. L'année dernière, avec le Président Caïazzo et Dominique Rocheteau, on est allés faire une semaine en Allemagne, on a visité le Bayer Leverkusen, le Borussia Dortmund et Moenchengladbach et on a ramené des idées parce que la formation est bonne à Saint-Etienne mais il faut toujours améliorer, la développer, la faire évoluer, aller voir ce qui se fait à l'extérieur pour progresser. Par exemple le Bayer Leverkusen et même Dortmund ont beaucoup de joueurs issus de l'école de foot, et on s'est attachés depuis deux ans à améliorer notre école de foot. Il n'y a pas assez de Ghoulam, il n'y a pas assez de Perrin même, qui est arrivé très jeune. On s'y attache et l'école de foot a énormément progressé, vous pouvez voir les résultats pas seulement au niveau de la Loire, parce que c'est logique qu'on gagne les tournois régionaux, ou départementaux, mais on a gagné des gros tournois et on est très content. En U11, on a gagné le grand tournoi de l'Olympique de Saint-Etienne, il y a quelques semaines, et ce n'est qu'une image, contre l'OL en finale. On est très contents parce que tu peux battre un club local, mais battre l'OL... On a gagné ce tournoi, il y avait 64 équipes, l'Olympique de Marseille, des clubs amateurs comme Burel qui sont très costauds en petits. Ça veut dire que notre école de foot est sur de bons rails et ce sont ceux-là qu'on aimerait voir rentrer davantage à 12 ans dans notre centre de formation. Par rapport à une identité locale et régionale aussi. Il y a un séminaire sur la formation à Manchester en novembre prochain, je pense m'y rendre pour voir ce qui se fait ailleurs et prendre ce qui peut nous faire progresser.

De quel budget l'ASSE dispose-t-elle en matière de formation? (Tom)

Très honnêtement, je ne le sais pas parce que c'est intégré dans le club mais le Président Romeyer et l'ensemble de la direction, dont Michel Saez, Président de l'Association, nous donnent les moyens de travailler. On a investi sur le terrain synthétique, maintenant c'est la tribune. On a eu des moyens vidéos pour filmer nos matches et faire des montages. Le Président Romeyer nous donne les moyens de bien travailler et on ne se plaint pas du tout de ce côté-là. Nous avons de très bonnes conditions de travail.

Pourquoi ne pas avoir prêté des jeunes comme Dylan Saint-Louis, Jerrold Nyemeck ou Ben Karamoko cette année afin de leur permettre de se tester à un niveau plus élevé que la CFA2 ? (alexioninho)

Ce sont des joueurs pros. Dès qu'ils sont pros, ils font donc partie du groupe pro, mais certains restent dans le groupe excellence parce qu'ils ne sont pas assez mûrs. Il y a eu une volonté d'en prêter mais malheureusement on n'a pas eu les demandes nécessaires. On a eu les contacts avec les agents de Karamoko et Saint-Louis par exemple, nous leur avons dit : « amenez-nous les clubs et on discute », mais nous n'avons pas eu l’opportunité de discuter. Nous l'avions fait avec Polomat, avec Mayi, les derniers, je crois. Nous, nous étions ouverts à toutes discussions, on va dire.

La remontée de la réserve en CFA est-elle un objectif cette année pour le club ? (alexioninho, Tom)

Nous, on est des compétiteurs, on veut remonter, mais le début de saison est difficile comme il y a deux ans. Pour nous, c'est un devoir de remonter, mais ce n'est pas une obligation parce que, on l'a vu avec Christophe, on préfère faire jouer des très jeunes pour les faire mûrir dans la difficulté et nous savons que nous perdrons des matchs à cause de notre jeunesse mais c'est formateur. Ça ne nous a pas empêchés de remonter il y a deux ans avec cette politique. On aimerait remonter, mais on n'a pas l'épée de Damoclès au-dessus de la tête. Si on a des 17-18 ans régulièrement dans cette équipe, ce n'est pas une obligation de remonter. Par contre avec une équipe mûre toute l'année, ce serait plus dommageable de ne pas remonter mais nous avons choisi l'option "jeune", c’est-à-dire celle de la formation.

Avec l'effectif plus abondant dont dispose l'équipe pro, va-t-on voir plus systématiquement des joueurs en manque de temps de jeu encadrer les jeunes de la réserve ? (alexioninho)

Pas forcément, car il y a beaucoup de matchs rapprochés et Christophe Galtier connaît bien son métier, fait très bien le turn-over, et il y aura toujours des blessés. Christophe jugera si certains joueurs en manque de temps de jeu, comme Maupay il y a 15 jours, doivent venir gagner du temps de jeu en CFA2. Ça, je ne peux pas le dire, et puis les blessures, l'enchainement des matches en professionnel, c'est très compliqué parce que, en janvier, vont venir s'ajouter la Coupe de la Ligue et la Coupe de France, ça sera terrible pour le groupe professionnel.

Quels sont les moyens techniques mis à disposition de la formation, notamment en termes de vidéo ? Les matchs sont-ils filmés et les vidéos analysées par le staff de la formation ? Si ce système vidéo existe, y a t'il un travail de synthèse, joueur par joueur, fait à destination du staff pro et de Christophe Galtier ? (bfb2)

Tous les matches, à Aimé Jacquet, sont filmés, ceux du groupe Excellence en priorité. Depuis deux ans, on a des tablettes, etc. Tous les entraîneurs font venir soit l'équipe au complet, soit les joueurs individuellement.Tout est fait. Quand il y aura la tribune, ce sera encore mieux. Une caméra est également à la disposition des éducateurs pour filmer certains entraînements ou certains exercices. Les gardiens font beaucoup de travail vidéo aussi. Il faut rendre grâce à Roland Romeyer qui nous a permis de disposer de ce matériel. On est content car la vidéo nous sert à faire mieux admettre eux joueurs leurs erreurs afin de les faire progresser. Depuis deux ans, le club fonctionne avec le groupe excellence, cette saison Julien Sablé et moi. Julien est en relation quotidienne avec le staff pro, principalement avec Thierry Oleksiak et Laurent Batlles, mais aussi avec Christophe Galtier.

De quelle façon se mesure l'intérêt de Christophe Galtier pour la formation au quotidien ? Y a-t-il des réunions régulières, demande-t-il des informations spécifiques (travail vidéo ou autre) sur des profils de postes dont il a besoin, ou des joueurs en particulier. Assiste-t-il à des débriefings de matchs, des débriefings de quart ou mi saison ? S'enquiert-il des avis des formateurs vis à vis de tel ou tel jeune, les meilleurs éléments à suivre ? (bfb2)

Il y a de temps en temps des réunions, mais elles ne sont pas toujours formelles. Christophe vient voir les matches quand il peut. Ce n'est pas évident comme, souvent avec la coupe d'Europe, ils ont lieu au même moment le dimanche. Mais, dès qu'il le peut, il le fait. Quand il y a des jeunes qui complètent l'équipe pro, c'est qu'ils le méritent et que Christophe les souhaite. C'est toujours d'un commun accord avec nous. On a déjà regardé, par exemple, les U17 contre Nice, il y a un an. Il est venu à la mi-temps dire ce qu'il avait vu etc. La vie du club est saine.

La doublette d'entraineurs des U17, Rodriguez-Vaillant marche très bien, avec deux profils complémentaires. Le club prévoit-il de généraliser ce fonctionnement en doublettes sur d'autres catégories, avec un profil plutôt tacticien, l'autre plutôt meneur d'hommes, comme il est fait en U17 ? (bfb2)

C'est toujours une question de budget aussi ! La fédération prône ça, des doublettes complémentaires. Le binôme s'explique car, avant, il n'y avait qu'une équipe. Gilles est à plein temps, Lionel est à mi-temps et il est professeur au lycée de Tézenas. Cette année, je suis avec Julien Sablé pour le groupe excellence. Jean-Philippe Primard est secondé par Razik Nedder, qui passe actuellement son diplôme. C'est vrai que, naturellement, on se dirige vers des binômes et que c'est un plus pour une individualisation du travail.

Le club prévoit-il de recruter des techniciens spécialisés dans un domaine et qui officieraient sur plusieurs catégories en même temps, comme pour Mickaël Dumas, l'entraineur des gardiens. Par exemple, est-il prévu de recruter un entraineur des attaquants, spécialiste du poste, qui entrainerait les attaquants spécifiquement, en plus des séances quotidiennes qu'ils ont avec leur entraineurs de catégories ? (bfb2)

Oui, on en parle entre nous avec les dirigeants. Tous les mercredi matins, il y a des séances spécifiques. On essaye de mélanger. Julien Sablé pourrait prendre tous les milieux de terrain chez les jeunes, Jean-Philippe était plus un défenseur, on a peut-être ces personnes au club. Pour les attaquants, la DTN nous en parle aussi. C'est vrai que ça existe pour les gardiens, alors pourquoi pas pour les attaquants ? Il y a une réflexion là-dessus.

Au regard de ton expérience, sur les aspects mental, familial, physique, tactique, technique, quels sont pour toi ceux qui sont les plus importants pour déterminer la réussite d'un jeune. Quels sont les aspects les plus déterminants qui expliquent une réussite ou un échec ? (bfb2)

On en revient toujours au recrutement. Plus on recrute localement, plus on a de chances de réussite. La fédération a fait une étude : 100 % des garçons pris hors ligue avant 13 ans ne réussissent pas. C'est très important que le gamin rentre tous les soirs chez ses parents, ou quand il a 15 ans, le vendredi soir. La cellule familiale proche est capitale. Après, on ne fait jamais d'un cheval de trait un cheval de course. Donc, le mental et la proximité familiale sont les deux éléments déterminants. J'ai connu des joueurs moyens, mais avec un mental hors norme, comme Sagna, même s'il n'avait jamais eu de contrat jusqu'à 20 ans. Un des exemples proches de chez nous, c'est Julien. Il n'était pas le meilleur sans doute au départ, mais avec un mental extraordinaire, il a dépassé tout le monde. On m'a dit la même chose pour Willy Sagnol. Ne sortent désormais que des joueurs avec un minimum d'intelligence parce qu'il y a beaucoup de candidats et peu d'élus. La sélection est dure. On est en train de prendre des décisions pour certains jeunes, avec qui c'est très compliqué à l'école et surtout dans le comportement. On ne fera pas de cadeaux car si ça ne passe pas à 15-16 ans, ça ne passera pas après. Les sacrifices, l'investissement et l'exigence du haut niveau s'apprennent très jeune.

Comment sont pris en charge les jeunes joueurs qui viennent de loin, parfois de région parisienne ou de plus loin encore ? Le club met-il des choses en place, pour gérer l'éloignement familial, entre autres ? (bfb2)

Déjà, quand on prend ces joueurs qui viennent de loin, on cherche à minimiser le risque. Ils ont déjà des contrats de travail (Aspirant puis stagiaire). On essaye de faire venir les parents de temps en temps. Les gamins sont pris en charge totalement. Mais on sait que les premiers mois ne sont jamais faciles. Après, certains sont mieux chez nous que chez eux, il faut le dire aussi. J'en ai connu, à Auxerre, qui ne voulaient pas rentrer dans leur cellule familiale à Noël. Ils étaient mieux nourris chez nous, etc... On remplace les parents ! Après, il y a d'excellentes familles heureusement ! On veut former des hommes avant tout car il n'y a que peu d'élus. Si jamais ils n'y arrivent pas chez nous, on veut qu'ils puissent réussir en L2 par exemple. Ici, l'exigence du top 4/5 est très élevée. Qu'ils réussissent à gagner leur vie dans un autre club grâce à leur passage de trois à cinq ans chez nous, comme Kevin Mayi, par exemple, cela voudra dire que nous avons déjà pas mal travaillé !

Par rapport à des générations antérieures qui proposaient surtout des joueurs à vocation défensive, on a l'impression que les générations à venir vont proposer de plus en plus de joueurs offensifs très intéressants. As-tu le même sentiment et peux-tu en présenter deux ou trois particulièrement marquants ? (bfb2)

Avec toute la retenue – d'un mois à l'autre ça peut changer -, on peut penser à Bamba. On peut parler des défenseurs Karamoko, Cabaton, Dekoké. Souici, Suljic sont des milieux à vocation défensive... On parlera toujours plus des attaquants, c'est comme ça, mais tous les lignes sont représentées. C'est bien réparti, jusqu'aux gardiens !

Comment l'ASSE tire son épingle du jeu pour convaincre les meilleurs jeunes de 14 ans de venir au centre de formation de l'ASSE ? Quels sont les atouts et faiblesses du club vis à vis de la concurrence quand il s'agit d'attirer un jeune ? (bfb2)

D'abord, il faut toujours rassurer les parents. Il y a le côté familial et le président Roland Romeyer les reçoit à chaque fois. Dominique Rocheteau est présent aussi. C'est capital de rassurer les parents. Notre centre d'entraînement est un bel outil aussi. La majorité des parents comprennent qu'il n'y a pas que le foot, que leur gamin n'est pas sûr du tout d'y arriver. Ils veulent donc être rassurés sur la scolarité. Il y a trois ou quatre ans, on a eu 15 succès au bac sur 17, après 10/10, ensuite 9/9 et l'année dernière, 10/11. C'est presque du 100% ! C'est un argument capital. On forme des hommes mentalement mais aussi pour qu'ils aient une insertion dans la vie. S'ils ne sont pas pro, ils vont trouver des clubs de CFA qui leur proposeront des jobs dans les mairies, dans des entreprises, etc. Il faut qu'ils aient un minimum d'intelligence, d'équilibre et de bagage. Avec Roland Romeyer, nous en recevons de temps à autres certains qui n'ont pas compris qu'il fallait travailler à l'école. On fait vraiment tout et ça rassure les parents. Après, il y a l'image du club en France, qui est très forte. Le club est aimé. Et nous, notre devoir, c'est d'être proche des parents, des gamins et de les aider à régler leurs problèmes. Je pense qu'ils sont heureux d'être ici. Mais ils ont des devoirs à respecter. Et nous considérons que notre devoir d'éducation est primordial.

On a très peu d'internationaux dans les équipes de jeunes : cela correspond-il au niveau du centre, ou ces sélections sont-elles biaisées, comme certains le disent, en privilégiant certains clubs par rapport à d'autres ? (old side)

Nous, on sait qu'on a des bons jeunes. Après, les sélections, c'est comme l'équipe de France A… Après, c'est tout un problème de concurrence avec des joueurs d'autres clubs, qui jouent par exemple à Arsenal, à Chelsea ou au Réal. On sait qu'on a des bons joueurs dont on espère qu'ils joueront en L1 dans les prochaines années. Nous avons des sélectionnés chez les jeunes, en U15, U17, après c'est plus difficile. Mais bon, ça ne nous inquiète pas plus que ça. Augustin Bangoura, par exemple, part faire la coupe du Monde U17 avec la Guinée. Cazim Suljic va en U20 avec la Bosnie... Maïga, il fait presque partie de l'équipe A de la Côte d'Ivoire. On a aussi Hassim Traoré, le Burkinabé mais il est blessé. Dovydas Virkas est international lituanien. Le Cap-Verdien sera forcément sélectionné.

Comment résistes-tu aux pressions des clubs étrangers sur nos meilleurs jeunes ? (old side) Comment un formateur comme toi voit-il l'AS Monaco actuelle, qui multiplie les transferts de jeunes : est-ce que cela a un sens en termes de carrière pour ces joueurs selon toi ? (old side)

On revient toujours au problème de l'environnement du jeune. Si on prend Martial, il était déjà à Lyon et y était bien loti. Il a été vendu plus de 60 millions avec les bonus. La réussite d'un jeune, c'est d'abord sa stabilité. Mais, tant qu'il est chez nous, on arrive encore à le garder. Les parents comprennent qu'il a plus de chances d'éclore dans l'équipe une de Saint-Etienne et d'être vendu après, comme Gomis, Guilavogui, Zouma etc... vers 20/22 ans plutôt que plus jeune. Il y a quand même pas mal d'exemples d'échecs des joueurs qui sont partis très jeunes. Et après, certains veulent revenir… Mais on n'est pas une poubelle non plus ! Il y a des joueurs qui sont sollicités, par Chelsea ou Arsenal. Les parents ont confiance en Saint-Etienne parce que tout ce que l'on promet, on le tient. Après, l'équipe première, ça se mérite. Nous tenons toujours nos engagements et tant que nous sommes crédibles et que nous ne trahissons personne, les parents nous font confiance. Mais il y a le rôle des agents et ce n'est pas facile ! C'est vrai que l'ASSE est un grand club, qui tient parole et qui a de bons formateurs. L'honnêteté et notre humilité sont récompensées, logiquement et heureusement !

Ces transferts de jeunes justement deviennent l'essentiel apport financier des clubs français. Comment cela t'impacte-t-il? Te demande-t-on (ou as-tu entendu parler dans d'autres centres) de développer rapidement des attaquants, susceptibles d'être vendus à prix d'or outre-Manche ? (old side)

Non, notre but, c'est de former des joueurs qui jouent en L1, à l'ASSE, le plus vite possible. Après, la politique, le joueur qui éclate en L1, ce n'est plus de mon ressort. Il y a tellement d'enjeu. Mais le but de notre travail est de recruter et de former des jeunes. J'aimerais qu'ils soient tous du département de la Loire, mais c'est utopique. Bamba est de Paris et il joue quelquefois en pro ! Après, il n'a encore rien fait. Le vrai pro, c'est celui qui à 150 matchs dans les jambes. Après, qu'il joue à 18, 19 ou 20 ans. Le but est de les amener en pro.

Christophe Galtier te demande-t-il parfois de tester un joueur à un poste différent de celui qu'il occupe habituellement ? (buffy)

Oui, ça peut arriver. Chapuis, on était à peu près sûr qu'il ne passerait pas en L1 dans l'axe, on l'a mis à droite par exemple.

Est-il envisagé de recréer une deuxième équipe réserve laquelle avait été abandonnée il y a un vingtaine d'années à Saint-Etienne ? (la buse)

Pas du tout. Nous jouons déjà avec beaucoup de jeunes en CFA2. Les meilleurs 17 jouent en 19, les meilleurs 19 jouent en CFA. On est déjà très jeune. On lutte tous les week-ends car c'est dans la difficulté qu'ils vont progresser. Autant c'était judicieux de créer une deuxième équipe en U17, autant une deuxième équipe réserve n'aurait pas de sens.

Quel rôle joue Dominique Rocheteau au du centre de formation ? (la buse)

Dominique est un élément très, très important pour moi et le club en particulier. Il est le pont entre le travail de formation et le staff pro car on ne peut pas se voir tous les jours. Dominique est précieux par son intelligence et sa façon d'apaiser les tensions, son calme. Il fait passer des messages, il voit notre travail, les séances d'entraînements. Son rôle est très important et il le fait très bien. Il donne son avis, il nous écoute. Pour moi, c'est un bonheur. C'est un personnage discret mais efficace en coulisses. Dominique joue un rôle capital.

Quels avantages tire le club d'avoir racheté l'Etrat ? (la buse)

Déjà c'était un signe d'évolution du club. On a un président qui est très bon dans l'agencement car c'était son métier. Il y a eu la construction du bâtiment des pros, la construction du terrain synthétique Georges Bereta, il y a maintenant la tribune du terrain Aimé Jacquet. L'ASSE se développe, évolue. C'est un signe fort de la direction du club pour le faire grandir avec ses moyens et de se rapprocher des plus grands clubs français et européens. C'est pour ça, aussi, qu'on est allé à Monchengladbach, à Dortmund, etc…

Qui décide de recruter ou de se séparer ou de conserver tel ou tel entraineur des équipes de jeunes ? Michel Saez ? Roland Romeyer ? Gérard Fernandez ? Vous-même ? (freeman)

Je suis là depuis trois ans et les retouches se font intelligemment. Les décisions sont toujours réfléchies et collégiales..

Sur quels critères vas-tu être jugé pour que ton contrat soit renouvelé ? (freeman)

Un directeur de centre est toujours jugé sur les joueurs qui sortent en pro. Après, la formation, c'est le travail de la patience. Bamba est arrivé en même temps que moi, Souici est arrivé un an après, Pierre-Gabriel la saison passée, Virksas et Pinheiro cette saison, nous les avons recrutés. Je dis "nous" car c'est un travail d'équipe. Gérard Fernandez est le responsable du recrutement des jeunes, on prend toujours les décisions ensemble, du président qui donne le feu vert final à notre cellule de recrutement, c'est un travail d'équipe. Après, c'est un investissement au quotidien. Je suis responsable un peu de tous les domaines du scolaire, du sportif, de la surveillance… On ne fait pas que du foot !

Un championnat entre équipes réserves de clubs pros aurait-il tes faveurs (Dr Makaveli)

Ça a toujours été le dilemme. A Auxerre, avec Guy Roux, on avait des équipes très mûres, on aimait bien se confronter à des équipes amateurs. En juin dernier, ça a failli être voté par la DTN. Au dernier moment, il y a eu des problèmes, d'arbitrage entre autre. Mais au club nous aimerions que ça se fasse ! Déjà, ça permettrait d'adapter le championnat on pourrait par exemple jouer le lundi soir et faire jouer les remplaçants pros. Et le jeu pratiqué dans un championnat d'équipes réserves ressemblerait davantage au jeu professionnel. Quand on va dans certains villages français, ce n'est pas facile...

On constate parfois que les joueurs les plus performants dans la gestion du groupe et dans l'encadrement des plus jeunes sont ceux qui ont pu poursuivre des études jusqu'au bac ou au-delà. Loïc Perrin en est un exemple excellent. As-tu une démarche pour coordonner performances sportives et cursus scolaire de bon niveau ? (GTI)

On pousse à mort tous les gamins à avoir le bac et de nos jours, ce n'est pas si facile que ça. Et, bien sûr, il y en a toujours deux ou trois qui vont au-delà. Le hic, c'est que dès qu'ils touchent un peu aux pros, ils commencent à abandonner un peu. Nous, nous avons un phénomène, Yahya Nadrani, qui veut faire médecin ou kiné. Du coup, on l'aide, on aménage ses entraînements, etc. C'est un gamin hors-normes à ce niveau-là. On pousse à fond tous les jeunes mais il faut toujours la volonté du gamin.

La signature du jeune Lucas Tousard à Lyon pose, selon moi, la question du maillage du territoire par les recruteurs de l'ASSE. Comment se fait-il que ce jeune ait pu nous échapper lorsqu'il a quitté Rodez pour Valenciennes? Toute la France est-elle couverte par les recruteurs de l'ASSE ? (Stéphanois)

La France n'est pas couverte totalement. Ce n'est pas possible. On vient de signer le 38e partenariat avec Ramatuelle parce qu'on n'avait pas de club dans le Var. Dans les régions Rhône-Alpes, Paris et Sud, nous sommes toujours sur tous les gamins et en premier. Mais les autres clubs aussi comme Paris, Lyon et Monaco travaillent bien également. Ce qui fait souvent la différence, c'est malheureusement l'argent et certains garçons préféreront toujours un club à un autre. Lucas Tousard, on était dessus mais on ne l'a pas eu.

Les stats de la FFF montrent sur les dernières années que 32% des joueurs devenus professionnels ne sont pas identifiés à 12 ans (non suivis par les clubs professionnels), que 64% d'entre eux n'ont pas été sélectionnés en sélection régionale à 15 ans. Par rapport à ces chiffres, quand on sait que les matchs de U12-U13 sont déjà très observés par les recruteurs, comment le recrutement est-il effectué ? Sur deux ou trois qualités indispensables à un futur poste déjà identifié ou sur la base d'une somme de qualités qui permettront une progression vers le haut niveau ? (Sylvain92)

Plus on les prend tôt, plus on se trompe. Après, si on ne les prend pas à cet âge-là, ils sont pris ailleurs. On est un peu pressé mais honnêtement c'est aussi pour ça que certains nous échappent. Parfois on a des doutes. On ne se dit pas : "ce gamin de 12 ans, on va le prendre parce que Rennes le veut." Non, jamais. On risque de rater certains joueurs et on parle de ceux qui réussissent mais on ne parle pas de ceux qu'on a "ratés" à une certaine période et qui n'ont pas réussi ! Il faut savoir également que nous n'avons le droit qu'à 8 A.N.S. par an.

Sur la base de quels critères va s'effectuer le recrutement ? (Sylvain92)

L'intelligence, le mental et la technique, si on ne devait donner que trois critères. Après, le défenseur central, on préfère qu'il soit grand. Les latéraux, on aime qu'ils sachent jouer au ballon et qu'ils soient rapides et endurants. Les attaquants, il faut qu'ils soient plus rapides que les latéraux à qui nous demandons d'être rapides aussi ! Donc, il y a quand même des qualités aux postes mais s'il n'y a pas le mental... On est toujours déçu avec certains qui n'ont pas le mental de compétiteur. Alors qu'un Julien Sablé avec un mental à toute épreuve a fait la belle carrière que vous connaissez.

Comment définis-tu le poste futur d'un joueur puisque la plupart des joueurs commencent attaquants, Est-ce que la plupart des repositionnements sont des contraintes athlétiques (exemple : trop petit, pas assez rapide, pas assez puissant...) ? (Sylvain92)

On essaye de ne pas faire de gâchis. C'est vrai qu'un joueur limité offensivement, qui était attaquant et qui mettait beaucoup de buts en 14-15 ans ne marque pas forcément en 17-18 ans. C'était le cas de Sagna à Auxerre qui a toujours marqué des buts en catégorie de jeune et qu'un jour, j'ai replacé arrière droit car il ne marquait plus de but en sénior. C'est l'intelligence ou la perspicacité de l'éducateur. A 15 ans, à 16 ans, à 20 ans, parce que ça peut être aussi très tard, hein ? Dans les 19 ans, on a aussi un joueur qu'on a remis arrière droit, un petit, qui était sûr de ne pas passer devant et là, on est très agréablement surpris. Je veux parler de Thomas Vogel, qui était un attaquant un peu brouillon en U17, mais qui a une volonté hors-normes et qui s'en sort très bien malgré son petit gabarit car il est véloce, endurant. Le repositionnement d'un joueur, c'est aussi une qualité des éducateurs. Il faut au moins le tenter, donner toutes les chances au jeune de réussir. Bon, c'est vrai que c'est souvent de l'avant vers l'arrière, rarement dans l'autre sens. Mais, après, c'est une question de gabarit. Pour Chapuis, on voulait qu'il réussisse mais il aurait plus réussi à droite. On a aussi le jeune Mendy, qui est toujours très bon dans l'axe mais on s'est dit qu'il serait plus à l'aise à droite. C'est notre boulot d'essayer de ne pas "rater" un joueur à un autre poste.

Je sais que tu analyses saison après saison à partir des U13 génération par génération, poste par poste, le niveau du joueur local (très bon, bon, moyen, insuffisant) pour cibler le recrutement "extérieur", régional puis national, ce qui semble très cohérent, par rapport à ce suivi analytique quels sont les cas dans ta carrière de formateur d'évolution les plus prévisibles (exemple Zouma, Saint Maximin pour moi) et imprévisibles (exemple Ghoulam qui évolue au Napoli et a le niveau LDC alors qu'il était un joueur moyen en U17) les plus significatives ? (Sylvain92)

Je ne vais pas parler de joueurs de chez nous puisqu'ils ne sont pas encore sortis. Il y en a un ou deux que je ne pensais pas voir percer en arrivant à Saint-Etienne et je pense qu'ils sortiront, enfin j'espère. Et puis d'autres, qui ont donné beaucoup de promesses, à une époque, piétinent vraiment pour l'instant au point de se demander s'ils vont percer. Après, à Auxerre, au début j'avais Mexès et Cissé, on ne s'est pas posé beaucoup de questions. Ce sont des joueurs qu'on accompagne. Bakary Sagna, personne n'y croyait, moi j'y ai cru et il a doublé tout le monde. C'était sans doute le cas d'un Sagnol. Polomat parce qu'il a été prêté deux ans à Châteauroux puis à Laval. Ce n'était pas acquis, hein ? Non, il n'y en a pas 36. Désormais, les mailles du filet sont vraiment serrées mais il se peut qu'un jeune à 20 ans passe devant ceux qui sont entrés dans un centre de formation plus tôt. C'est rare mais ça peut arriver, le football n'est pas une science exacte.

Est-ce que certains grands principes de jeu sont transmis à toutes les équipes du centre (U17, U19, CFA2) ou est-ce que le(s) formateur(s) de chacune des équipes ont une indépendance dans la manière de faire travailler et faire jouer les équipes du centre de manière générale ? (Sylvain92)

Tout est calqué sur le 4-3-3 de l'équipe première. C'est une volonté de Christophe Galtier et on continue. Ce système me plait. Il y a plusieurs types de 4-3-3 : le 4-3-3 avec le n°10, avec la pointe en haut et la pointe en bas. Tout dépend du type de joueurs qu'on a. Tout part de là et ça nous est arrivé de surprendre, de jouer en 3-5-2. Ce n'est pas l'ADN du club mais si on a besoin de points, de temps en temps, on fait ce qu'il faut pour prendre ces points. Ce n'est d'ailleurs pas qu'une question de points : dans la formation du joueur, c'est bien de pouvoir s'adapter à un système différent. Aussi bien pour jouer avec ce système que pour lutter avec un système adverse. Toutes nos équipes à 11 jouent pareillement mais si on a un super n°10, on va mettre deux n°6 et un n°10. Si on a des bons travailleurs, on va mettre un 4-3-3 avec un n°6. Chez les plus jeunes, toutes nos équipes à 9 jouent de la même façon. Maintenant, il arrive aux formateurs d'adapter leur système de jeu en cours de match car la vérité d'un match et les aléas d'un match font réfléchir les éducateurs.

Comme pour Oan Djorkaeff ou Baixu Xiang, on a l'impression que l'arrivée de Driss Zidane s'apparente plus à un coup de com qu'à une véritable opportunité. Quel est votre sentiment et qui est décisionnaire en dernier lieu pour valider ces transferts ? (thomas99)

Moi, je suis responsable de ça. Driss Zidane a fait deux ou trois matches amicaux avec nous et on l'a trouvé intéressant, ça s'est fait naturellement. On l'avait suivi et il avait fait de bons matches avec Marseille Consolat contre Nîmes en amical. Oan Djorkaeff - c'est vrai que je connais bien son père - nous avait fait bonne impression. Il a quand même fait deux ans chez nous. Le Chinois, Xiang, on a tenté, on a vu qu'il avait des qualités mais c'est vrai que ça a été très très difficile au niveau de la barrière de la langue, de la culture, de la nourriture. C'était un garçon charmant, super, mais il nous disait « oui » à tout même si parfois fois, il ne comprenait pas. C'était compliqué, et pour les éducateurs, et pour lui. Ça nous a fait une expérience, à nous et à lui. Concernant Djorkaeff et Zidane, nous n'avons pas souhaité faire des coups de pub. Jamais. Nous ne sommes pas là pour faire rêver inutilement des mômes.

La décision d'avoir ou pas une deuxième équipe U17 est une réelle décision politique. Pour donner un exemple extrême, Mahdi Camara (un garçon qu'on a été cherché loin) a, il y a deux ans, disputé plus de matches avec l'équipe de France qu'avec l'ASSE. Quels sont les avantages de n'avoir qu'une seule équipe en fait (à part des économies de budget de fonctionnement)? (osvaldopiazzolla)

L'unique raison d'avoir créé une deuxième équipe de U17, et c'est mon cheval de bataille, c'est le temps de jeu des joueurs. Si un jeune de 15 à 20 ans, ne joue pas tous les week-ends, sauf blessure, comment veux-tu qu'il progresse ? Rien ne remplace un match et on s'est aperçu que quelques joueurs ne jouaient pas ou très peu, ces dernières années, chez les U17. Et, effectivement, Mahdi Camara qui était en Equipe de France était plus souvent sélectionné et revenait parfois fatigué ou blessé. Le fait d'avoir une deuxième équipe nous a fait prendre un peu plus de joueurs locaux. On essaye qu'il n'y ait pas toujours les même remplaçants. Un remplaçant en U17 nationaux, j'aimerais qu'il soit titulaire le week-end d'après, en A ou en B. Pour moi, un joueur qui ne joue pas est un joueur inutile et qui ne progresse pas. Après, l'idéal, dans l'avenir, ça serait d'avoir les 2 générations : les U17 et les U16 d'un très bon niveau.. Je trouve cela tellement évident…

Quel bilan dresses-tu de la politique des partenariats ? De nouveaux clubs partenaires vont-ils entrer dans le giron de l'ASSE ? Certaines régions ne sont pas représentées comme la Bretagne… (marée verte)

On vient de faire Ramatuelle pour cibler le PACA. Avec Lilian Compan qui est notre référent, on va être très présent, là-bas. On va faire justement une réunion pour bien étudier le fonctionnement de ces clubs partenaires. On ne veut pas forcément en prendre d'autres. On en voudrait 42 pour le symbole ! On voudrait vraiment être efficace parce qu'après il y a le service après-vente. On veut s'en occuper et ne pas décevoir. Les joueurs issus de nos clubs partenaires arrivent à 12, 13, 14, 15 ans. Cette année, il en est arrivé de Saint-Priest, de Gueugnon, trois ou quatre de Feurs.

Bien sûr, il y a des gros partenariats sportifs mais aussi des partenariats d'image, il ne faut pas se le cacher. A Brioude, on espère en avoir un jeune un jour. Un club partenaire, c'est aussi nos yeux et nos oreilles. Ce n'est pas forcément à Brioude qu'il y aura un bon joueur mais ils joueront contre un club qui aura un bon joueur. C'est une très bonne politique parce que ça développe des relations amicales avec les gens. Et, bien sûr, de temps en temps, on veut, on souhaite qu'il y ait un joueur des clubs partenaires qui nous rejoigne et devienne pro.

Comment se fait la détection à l'étranger ? Est-ce structuré ou est-on juste à l'écoute de propositions d'agents (Virksas) ou d'anciens joueurs ? (marée verte)

Il y a toujours notre réseau, on connaît beaucoup de monde dans le monde entier. Gérard Fernandez en est le responsable. En Afrique, bien sûr mais aussi dans les pays de l'Est. On essaye de couvrir aussi les compétitions internationales, les championnats d'Europe des 17 ans et 19 ans. Mais c'est vrai que quand tu vas voir un match, par exemple, un championnat d'Europe des U17 en Belgique et que tu es assis à côté du recruteur de Chelsea, tu te sens petit. On a des observateurs dans les compétitions internationales, surtout en Europe. La plupart du temps, ce sont nos observateurs qui couvrent ces compétitions. Nous avons nos observateurs dans la région parisienne, dans la région PACA et Rhône-Alpes évidemment. Nous allons aussi en Bourgogne, en Auvergne. Honnêtement, ça nous va bien car avec en plus notre réseau amical et professionnel, tous les bons joueurs nous sont signalés. Après, nous sommes toujours en premier sur les très bons joueurs mais notre sourire ne suffit pas toujours à convaincre les parents.

Qui a fait venir les deux Cap-Verdiens à l'ASSE ? Peux-tu nous les décrire brièvement ? (Manchot)

On les a trouvés grâce à nos connaissances et à nos recruteurs. Ils ont eu une info. Ils sont allés les voir jouer sur Paris.

Erin Pinheiro je l'appelle "tentacule" parce qu'il est grand, il a une grande chevelure et il est très très fort techniquement même s'il est très à court encore, il a besoin de temps de jeu. C'est un garçon très prometteur. C'est un 8-10, relayeur mais aussi finisseur. On ne sait pas s'il est droitier ou gaucher. Il a marqué un super but avec la réserve, il a rendu facile quelque chose de difficile. Il a de grosses qualités et en plus, c'est un gagneur, compétiteur. Il a du tempérament, je dirais presque qu'il faut le calmer.

Le petit Kenny Rocha Santos est un joueur complet. C'est un 8. Un gros, gros travailleur avec de grosses qualités techniques. Très prometteur. C'est un 2000 qui a de grosses qualités malheureusement il vient de se faire un petit claquage. Ce sont des garçons qui n'ont pas joué depuis un an. Kenny fait partie des trois bons joueurs blessés qui vont nous manquer pour le derby U17 de ce week-end. Je reste bien sûr mesuré car il n'a que quinze ans. On ne fait pas des chevaux de course avec des chevaux de trait. Nos deux Capverdiens sont à l'heure actuelle des chevaux de course…

Quelles sont tes premières impressions concernant Dovydas Virksas ? (Manchot)

Le jeune Virksas est très intelligent, il prend des cours de français. Il fait son trou en 19 ans. Il n'a aucun problème au niveau "volume" : c'est lui qui court le plus. L'autre jour il avait le GPS, il a tout pulvérisé. On veut le remplir un peu athlétiquement, il est très près du groupe CFA2. On préfère qu'il joue tous les matches en U19 plutôt qu'un quart d'heure en CFA2. Nous lui parlons souvent et nous lui disons de continuer à travailler. Il nous fait une très bonne impression.

 

Merci à Bernard pour sa disponibilité et aux potonautes Stéphanois, Naar et RudyRhod77 pour la retranscription